CHAPITRE 1
J'arrivai au lycée avec cinq bonnes minutes de retard car mon bus avait été coincé dans des embouteillages pendant un quart d'heure.
Après être allée chercher un billet de retard, je me dirigeai vers ma salle d'anglais et je m'arrêtai devant la porte. Je soupirai. Je détestais ce cours car je parlais presque parfaitement bien anglais, et ces heures m'étaient totalement inutiles. Mais, après tout, cette matière m'aidait à garder dans les 17 de moyenne générale -ce dont je n'étais pas peu fière.
Après avoir poussé un dernier soupir, je toquai à la porte et une voix sèche me répondit :
"Entrez."
J'ouvris la porte, lâchai un bref "Bonjour" et me dirigeai vers le bureau de Mme Vischy pour y déposer mon billet de retard. Je sentis les regards de mes camarades sur moi tandis que je traversais la pièce pour rejoindre ma place près de la fenêtre.
Un regard vers la chaise vide à côté de la mienne m'apprit que Lena était absente. C'était étrange car d'habitude elle me prévenait toujours en m'envoyant un message. Après m'avoir jeté un regard perçant -je ne savais pas pourquoi elle me détestait autant- Mme Vischy reprit le cours qu'elle étais en train de faire avant mon arrivée.
***
Je sursautai lorsque le proviseur entra dans la salle, car j'étais absorbée par la contemplation des graffitis sur ma table, qui me paraissaient bien plus intéressants que le cours d'anglais. Il avait un air abattu et très fatigué, ce qui attira mon attention. Lorsqu'il prit la parole, sa voix semblait cassée :
"Bonjour. Vous êtes bien la classe de seconde 2 ?"
Quelques vagues affirmations retentirent dans le salle, mais la plupart des élèves gardèrent le silence, attendant dans une sorte d'angoisse inconsciente ce qu'il avait à nous annoncer.
"J'ai une très mauvaise nouvelle à vous annoncer, reprit-il. Ceci va sûrement être un choc pour la plupart d'entre vous... Votre camarade de classe, Lena Humblot, s'est suicidée hier soir. Je suis désolé."
Il fallut plusieurs secondes pour que l'information arrive à mon cerveau. Puis je sentis mon cœur rater un battement. Je n'entendais plus rien, à moins qu'il n'y ait tout simplement aucun bruit. Je n'arrivais plus à respirer. Les larmes dans mes yeux me brûlaient, mais elles n'arrivaient pas à couler. J'entendis une chaise racler le sol, et, quelques secondes plus tard, la porte claquer. Des sanglots bruyants retentirent. Il faisait beaucoup trop chaud dans cette salle. Je me levai brusquement et me précipitai hors de la salle. La porte claqua derrière moi mais je m'en fichais. Je marchai dans le couloirs sans vraiment savoir où j'allais. Puis, d'un coup, au milieu de l'escalier, toutes mes forces me lâchèrent et je m'effondrai. J'enfouis mon visage dans mes mains et me mis à pleurer, ne pouvant plus contenir mes larmes plus longtemps. Je ne voulais pas y croire. Je ne pouvais pas y croire ! Lena, ma meilleure amie depuis le CE2, morte ? C'était impossible ! Elle n'avait pas pu me faire ça !
Un sanglot bruyant m'échappa et je sursautai quand une main chaude se posa sur mon épaule. Surprise, je tournai la tête et vis Thomas, le petit-ami de Lena. Enfin, ex-petit-ami, maintenant. A cette pensée, mes pleurs s'accentuèrent. Ça devait être lui qui avait quitté la salle peu de temps avant moi. Levant les yeux, je remarquai que les siens étaient rouges, à force de pleurer, sans doute.
"Salut Thomas, lui dis-je."
Ma voix était cassée.
"Salut Adèle."
La sienne aussi.
Il s'assit à côté de moi et, dans un effort surhumain, me prit dans ses bras afin de me consoler, malgré la tristesse qui l'étreignait lui aussi. J'appuyai ma tête contre son épaule, sanglotant. Je restai là, blottie contre lui, refusant presque d'accepter la vérité, refusant d'accepter que Lena m'avait abandonnée pour toujours. D'une main douce, Thomas me caressa le dos, très gentiment.
"Il faut qu'on retourne en cours, Adèle, me dit-il au bout de quelques minutes."
Il me releva doucement, et, avec sa manche, essuya une larme solitaire qui descendait le long de ma joue. J'essayai tant bien que mal de lui sourire. Je savais qu'il allait aussi mal que moi, et pourtant, il trouvait quand même le courage de me consoler. Je lui jetai un coup d'œil à travers mes yeux embués et une pensée me traversa l'esprit :
"Il est beau... Très beau..."
Je rougis violemment. Thomas était le petit ami de Lena, je n'avais pas le droit de le trouver beau. Sans se douter le moins du monde des pensées qui étaient les miennes, il passa un bras autour de mon épaule et nous traversâmes le couloir ainsi. Au moment de rentrer dans le salle d'anglais, il me lâcha.
***
La salle était un véritable carnage. Madame Vischy était assise à son bureau, le visage entre les mains. Louisa et Marine deux amies de Lena et moi, sanglotaient, l'une dans les bras de l'autre. Line, Inès, Maëlys et Jeanne, qui harcelaient Lena avant sa mort ne pleuraient pas, mais ne bougaient pas, et elles avaient l'air choqué. Sans doute diraient elles, plus tard, qu'elles ne se rendaient pas compte de ce qu'elles faisaient. Dégoûtée, je détournai le regard. Dire que c'était en partie à cause de cette bande de pestes qui se croyaient au dessus de tout le monde que Lena avait mis fin à ses jours ! En passant devant elles, je serrai les dents, et je sentis Thomas se crisper à côté de moi.
Le reste de le journée se passa comme dans un rêve -ou plutôt un cauchemar. Tous les professeurs avec lesquels j'avais eu cours avaient tenus à me voir et à me parler un peu, car ils savaient que j'étais très amie avec Lena, on nous voyait rarement l'une sans l'autre. Thomas était resté avec moi à chaque fois pour me soutenir. En descendant du bus, il me raccompagna chez moi. Nous marchâmes en silence, car aucun de nous n'avait la force de parler.
Quand nous arrivâmes devant ma maison, je lui dis, gênée, avec quelque chose que j'essayais de faire ressembler à un sourire :
« Bon... Merci pour aujourd'hui...
- Ce n'est rien, répondit-il. Et puis, je ne pouvais pas non plus te laisser seule... Tu avais besoin de compagnie. Et moi aussi, d'ailleurs. »
Ma grimace ressembla un peu plus à un sourire.
« A demain, Thomas.
- A demain Adèle. »
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