Chapitre 22 : à propos de Jason
Nolan venait juste de me dire que les gars qui l'avaient agressé étaient, selon lui, ceux qui avaient kidnappé Jason. Mais comment ça, kidnappé Jason ? Certes, il y avait eu du temps entre la disparition de Jason et le moment où on l'avait retrouvé mort, mais pourquoi aurait-on voulu l'enlever ? Surtout pour le tuer par la suite.
Mais surtout, comment Nolan pouvait-il savoir tout cela ?
- Attends, murmurai-je à Nolan en m'essayant sur son lit. Comment tu peux savoir ça ?
- Je... c'est ça, mon secret, soupira-t-il.
Je n'étais pas sûre de saisir.
- J'étais dans la forêt, commença-t-il d'un air sombre. Je me baladais, on va dire, et je suis tombé sur une toute petite maison abandonnée, une cabane même. Je l'avais déjà vue, mais jamais je n'avais vu de la lumière à l'intérieur. Alors, j'ai jeté un coup d'œil par la fenêtre et là... j'ai vu Jason. Il était ligoté, bâillonné et assis sur une chaise. C'était d'ailleurs la seule chose qu'il semblait y avoir dans cette pièce. Il était tellement pâle et avait l'air vraiment affaiblit, si bien que son cou ne semblait même plus pouvoir supporter le poids de sa tête. Ça devait faire déjà quelques jours qu'il était ici. J'ai voulu rentrer pour l'aider, parce que tout le monde savait qu'il avait disparu, mais quand je me suis retourné, je suis tombé nez-à-nez avec avec son agresseur, ou plutôt l'un de ses agresseurs, parce qu'ils sont plusieurs.
Il marqua une pause, mais le suspense était trop intense pour moi, alors je demandai :
- Et ? Il s'est passé quoi ?
- Le gars m'a donné un coup dans le ventre, mais... je l'ai arrêté.
- C'est-à-dire ? m'impatientai-je. Tu l'as frappé à ton tour ?
- Non, dit-il gravement. J'avais un flingue.
Je faillis m'étouffer avec ma propre salive.
- Mais tu es malade ? m'exclamai-je. Qu'est-ce que tu fous avec ça ?
- Justement, reprit-il, je venais juste de l'acheter, et j'avais rendez-vous avec ce gars dans la forêt, c'est pour ça que je suis tombé sur cette cabane. Il n'était même pas chargé mais quand je l'ai pointé sur l'agresseur de Jason, il n'a visiblement pas remarqué. Alors j'ai voulu ouvrir la porte de la cabane mais un deuxième homme est arrivé, un complice du premier agresseur. Il m'a frappé dans le dos mais il n'avait pas vu mon arme, jusqu'à ce que je me retourne et qu'il se stoppe net, lui aussi croyant qu'il était chargé.
Nolan marqua une brève pause et reprit :
- Je ne pouvais donc pas sauver Jason parce que je savais que si je leur tournai le dos pour ouvrir la porte, ils allaient me maîtriser, à deux contre un. Et je ne pouvais pas braquer mon arme sur les deux. Alors je suis parti en courant pour prévenir la police, les secours, n'importe qui. Les hommes ne me suivaient pas, et j'ai trouvé ça bizarre. Mais une fois sorti de la forêt, c'est-à-dire quand j'ai récupéré du réseau, j'ai regardé mon téléphone et là...
Il arrêta de parler.
- Là quoi ? m'exclamai-je, incapable d'attendre une seconde de plus.
- J'avais reçu un SMS d'un numéro inconnu. Je l'ai supprimé, mais on me menaçait clairement, en disant que si je balançais ce que j'avais vu à quelqu'un, à n'importe qui, ils allaient tuer mes parents, à commencer par ma mère. Ils ne blaguaient vraiment pas parce que quand je suis rentré chez moi, il y avait sur mon lit une photo de ma mère, et sa tête était barrée au feutre rouge. Ils avaient réussi à rentrer dans ma maison ! Ils savaient qui j'étais et où j'habitais ! Alors j'ai pris peur, j'ai vraiment flippé. Je ne savais pas quoi faire, j'étais en panique et du coup, je n'ai rien fait. Je n'ai rien fait pour Jason, alors que j'aurais pu. Je suis un connard, un lâche, ce que tu veux.
Je ne savais pas quoi répondre. Il avait eu la possibilité de sauver Jason, d'épargner une vie ! Mais en même temps, on avait menacé sa famille, et les avertissements paraissaient sérieux.
- Tu n'en as parlé à personne ? demandai-je. Même après qu'on ait retrouvé le corps de Jason ?
Nolan secoua la tête.
- Tu es la première. Je te fais confiance, tu ne peux le dire à personne.
- Mais ça change tout ! m'exclamai-je. Ceux qui ont tué Jason l'ont aussi retenu captif pendant plusieurs jours ! Ça ferait avancer l'enquête !
- Jenna, mes parents vont mourir si tu en parles. Je ne sais pas comment, mais ces gars savaient qui j'étais et ils avaient mon numéro de téléphone. J'ai vu leur deux visages, et même si je ne les ai jamais recroisés, ils se sentent en danger à cause de moi. Je suppose qu'ils se sentaient tellement en danger qu'ils ont voulu se débarrasser de moi en me tuant.
- Tu es sûr que c'étaient eux qui t'ont agressé ? demandai-je. Ils avaient bien des cagoules cette fois-ci ?
- Certain, affirma-t-il. Ils étaient trois, ils avaient des cagoules mais ils m'ont parlé de Jason. C'était eux, c'est obligé.
Je ne savais pas quoi répondre.
- Promets-moi que tu ne diras rien, me pria Nolan, les yeux vitreux. Personne ne doit savoir.
C'était un énorme secret, et au fond de moi je savais que la police devait être au courant. Mais Nolan était dans une position plus que délicate et je ne me voyais pas le dénoncer. Il semblait tellement mal, mal de n'avoir rien dit pour Jason et mal de ne toujours pas pouvoir dire quelque chose.
- Je ne dirai rien, promis-je.
Je restai encore quelques instants avec Nolan mais ses parents arrivèrent, alors je décidai de les laisser seuls. Je rentrai chez moi.
Bordel, je n'arrivais pas à m'en remettre. Le meurtre de Jason était loin d'être un simple accident. Mais pourquoi le garder prisonnier dans cette cabane, pour ensuite le tuer ? Et comment les kidnappeurs connaissaient-ils l'identité de Nolan, si lui ne les connaissait pas ? Et dire que je ne pouvais en parler à personne... L'enquête était loin d'être terminée.
Le lendemain, nous étions mardi et j'avais cours à 10h, ce qui était agréable. Vint rapidement l'heure de déjeuner. Veronica, Archie, Jughead et moi nous installâmes sur une table à l'intérieur parce que l'hiver était définitivement arrivé à Riverdale. Betty et Kevin avaient préféré rester travailler au journal du Blue and Gold, mais je savais pertinemment que Betty et Jughead ne s'étaient pas réconciliés, et qu'ils préféraient donc s'éviter.
- Alors, partant pour la semaine au ski ? s'écria Veronica avec un sourire jusqu'aux oreilles.
- Carrément ! s'exclama Archie. Ça va être tellement bien, vous vous rendez compte ?
- J'ai vraiment hâte aussi ! répondis-je. On fera la course, Archie, je suis sûre que je te bats.
Ce dernier m'envoya un léger coup de coude dans les côtes en me répondant que ça ne risquait pas d'arriver. Seul Jughead restait silencieux.
- Jug ? demanda Archie. Tu ne veux pas venir ?
- Bof, dit-il en baissant les yeux. Je n'ai jamais skié.
- Mais il y a du ski de fond ! rétorqua Veronica. Je suis sûre qu'il y en aura plein dans ton cas.
Archie fronça les sourcils, et dit :
- N'importe quoi. Tu as déjà skié, Jug. Peut-être pas récemment, mais je me souviens qu'en primaire, quand tes parents étaient ensemble...
Archie se tut, certainement par peur de gêner Jughead ou de le rendre triste. Archie reprit :
- Alors ? Pourquoi tu ne viendrais pas ?
- C'est juste que je ne peux pas, c'est tout, dit Jughead en secouant la tête.
- Ça serait trop cool ! insista Archie. On skie, on mange des plats bien chaud, on boit même du chocolat chaud à défaut d'avoir Pop, et on se met devant le feu de la cheminée ! Et surtout, on sera tous ensembles. Aller, tu as déjà vu les photos des terminales des années passées, ça a l'air génial ! On les a longtemps enviés !
Jughead haussa simplement les épaules, comme si ça ne l'intéressait pas plus que ça. Pourtant, il semblait quand même triste. Alors je pensai à quelque chose : et si c'était à cause des 125€ à payer ? Déjà que son père ne lui laissait pas de quoi s'acheter à manger, cela m'étonnait qu'il possède cette somme de côté. Mais comme je ne voulais pas le mettre mal à l'aise, je ne dis rien et nous continuâmes le repas.
Je ne reprenais les cours qu'à 14h, contrairement aux autres à 13h. Une idée me vint à l'esprit : je décidai de passer au bureau de la conseillère d'éducation, pour savoir si des aides financières étaient disponibles pour Jughead pour le ski, comme en avait parlé ma prof de français. Je dus bien attendre un petit quart d'heure avant que Mme Frey ne puisse me recevoir.
- Bonjour, dis-je en entrant dans le bureau. C'est à propos des aides que vous pouvez accorder concernant le séjour au ski des terminales.
- Très bien, sourit-elle. Assieds-toi.
Je m'exécutai.
- Quel est ton nom ? demanda-t-elle. Je vais regarder si tu es éligible aux aides.
- Oh, non, ce n'est pas pour moi, annonçai-je. C'est pour un ami.
- Ce sont des données confidentielles, je suis désolée, s'excusa Mme Frey qui avait visiblement l'air navré.
- S'il vous plait, insistai-je. Il refuse de nous dire pourquoi il ne veut pas venir, mais je suis sûre que c'est pour ça. Je n'ai pas besoin du dossier, j'ai juste besoin de savoir s'il y aurait le droit. S'il vous plait.
Mme Frey me regarda quelques instants, puis céda. Elle n'était pas bien difficile à convaincre, cela se voyait qu'elle voulait faire plaisir.
- Le nom de votre ami ?
- Jughead Jones, annonçai-je.
Elle pianota sur quelques touches de son ordinateur et annonça :
- Il y a droit.
Super ! Jughead allait pouvoir partir !
- Mais ce Jughead est déjà passé ici, continua Mme Frey, et malheureusement les aides ne couvrent pas l'intégralité du prix.
- Elles couvrent combien ? voulus-je savoir.
- Je ne peux pas vous dire, cela varie en fonction de la situation familiale. Et c'est confidentiel.
- Mais si je savais combien il restait à payer, je pourrais l'aider, murmurai-je. Sinon, il ne partira pas, parce que vous avez refusé de me dire combien...
- Très bien ! me coupa Mme Frey, visiblement attendrie par mes mots. Les aides couvrent 65€, alors il reste 60€ à payer.
Je la remerciai de manière insistante, parce qu'elle m'avait permis d'aider Jughead alors qu'elle n'en n'avait normalement pas le droit. Je lui dis au revoir et partis.
Au moins, c'était bon à savoir. Il ne restait que 60€ à payer et je savais que si on se cotisait tous un peu, on arriverait facilement à cette somme. Le plus grand problème serait de convaincre Jughead d'accepter notre aide mais ça, c'était une autre histoire. Il nous restait deux semaines pour le convaincre.
La sonnerie ne tarda pas à retentir et je me rendis en cours. J'avais une heure d'anglais et une heure de maths alors l'après-midi passa vite.
En sortant des cours, je vis Cheryl au loin. Et là, j'eu comme un choc : j'étais au courant que son frère avait été kidnappé avant d'être tué par une balle dans la tête et elle, n'en n'avait strictement aucune idée. C'était insupportable, parce que je savais que je ne pouvais pas en parler, parce que ça mettrait Nolan en difficulté.
Mais après tout... si je racontais l'histoire à Cheryl sans dire le nom de Nolan ? Je savais qu'elle ne répéterait pas parce que lorsqu'il s'agissait de son frère, Cheryl était digne de confiance. Et je suis sûre qu'elle ignorait même l'existence de Nolan alors après tout, je pouvais peut-être lui dire. Elle avait le droit de savoir, et pour ma part, c'était un secret trop lourd à garder.
- Salut, Cheryl ! lançai-je en m'approchant d'elle. Tu as fini les cours ?
- Heureusement, j'ai eu deux heures de physique-chimie et je n'en pouvais plus ! Quoi de neuf, Jenna ? J'ai cru remarquer qu'il y avait de l'eau dans le gaz entre Mme Parfaite et Jughead. Alors, contente ?
Elle me lança un clin d'œil.
- C'est compliqué, murmurai-je. Je sais que ça affecte Jughead alors je ne vais pas sauter de joie. Tu as un moment pour parler ?
- Euh, oui, me répondit-elle, certainement un peu surprise. Mais on ne va pas rester là. Ça te dit qu'on aille chez moi ? En plus on sera tranquille, mes parents ne sont pas là.
- Alors va pour chez toi ! m'exclamai-je. J'ai ma voiture alors suis-moi.
Le trajet ne fut pas long et nous parlâmes rapidement de Jughead, sans bien sûr mentionner le fait qu'il m'avait embrassé à deux reprises parce que je préférais garder cela pour moi. Nous arrivâmes donc à Thornhill et Cheryl me servit un thé goût fruits rouges.
- Bon, dit-elle, arrête de tourner autour du pot et dis-moi ce qui te tracasse.
- Je... c'est compliqué à dire, Cheryl, annonçai-je. Avant tout, il faut que tu me promettes de ne jamais le répéter. Vraiment jamais.
- Continue, lança-t-elle simplement.
- Ça concerne Jason. Promets-moi que même si ça pourrait faire avancer l'enquête, tu n'en parleras ni à tes parents, ni à la police.
Cheryl, les sourcils froncés, avait un air très sérieux, et ses lèvres tremblaient légèrement. Dès qu'il s'agissait de Jason, elle était dans tous ses états. Elle me fit la promesse de ne rien dire, alors je commençai :
- Tu sais, Jason avait disparu, puis on a retrouvé son corps bien plus tard. Or, son corps était presque intact, il venait tout juste de se faire assassiner. Et bien pendant tout ce temps, on l'avait capturé. Des hommes notamment, et ils étaient plusieurs. Je n'ai aucune idée de qui ils sont, ni pourquoi ils ont fait ça. Je ne peux pas non plus te dire qui m'a raconté ça parce que ça le mettrait en danger mais crois-moi, c'est la vérité. N'en parle à personne.
Cheryl hocha la tête. Mais c'est que je ne savais pas à ce moment précis, c'est qu'une silhouette, cachée dans l'ombre du couloir, écoutait notre conversation.
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