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- - - - - PDV Eerika - - - - -

N'ayant pu refuser la proposition de Jarod, me revoilà dans cette maison dénuée de toute décoration de Noël, Kalle présent avec nous cette fois. Je me défais de mon manteau que le beau militaire récupère poliment pour l'accrocher au porte-monnaie. Sous ses allures fermées semble se cacher un vrai gentleman... Avoir parlé de mes origines avec lui m'a fait plaisir. Il s'intéresse à moi et ne me traite pas ovuertement de folle. Je sais qu'à l'âge adulte, plus rien n'a de magique dans les fêtes de fin d'année, si ce ne sont les étincelles qui brillent dans les yeux des enfants. Le père Noël, les lutins, tout ça ne sont que des contes pour les humains, alors que nous sommes bien réels.

Les cadeaux qui sont livrés au pied du sapin le vingt-cinq décembre, ils pensent que c'est soit leur partenaire qui les y a mis, et inversement. Personne ne soupçonne qu'un homme barbu entre par la cheminée ou par l'ouverture minime des fenêtres, sous forme d'étoile filante. Il parvient à faire le tour du monde en seulement une nuit, sans jamais se faire voir. Et si un enfant ne dort pas, Nicolas créé une diversion pour pouvoir s'infiltrer sans bruit dans les foyers.

J'ai volotairment omis de dire à Jarod que je ne suis née qu'à partir d'un flocon, durant la nuit des aurores boréales au Pôle Nord. Tous les anges de Noël naissent ainsi, nous ne voyons pas le jour comme un bébé humain, ou comme les rennes. Nos parents ne sont biologiquement pas reliés à nous, un couple est simplement désigné pour nous élever et nous inculquer les valeurs de notre communauté. L'école des créatures féériques fait ensuite le reste sur notre éducation. On apprend à jouer notre rôle à la perfection, nous tissons des liens (ou pas !) avec les lutins, les elfes, et même les fées. La fée Clochette est d'ailleurs l'une de mes cousines, je la vois lorsque je passe au-dessus de la Vallée des fées, mais mon passage se fait très rare ces derniers temps.

Il est beaucoup plus difficile pour nous de voler sans se faire voir. Pour les fées, c'est facile, elles sont minuscules et peu visibles à l'oeil nu lorsqu'elles sont sous les nuages. Les humains n'ont pas une telle faculté de vision pour les repérer. Les animaux à la limite le pourraient, mais ils n'ont pas l'usage de la parole, ce qui préserve ainsi notre identité. Pour les anges, c'est plus compliqué. Nos ailes sont faites de plumes immaculées, éclatante comme la lumière du Paradis. D'une envergure très imposante, un enfant pourrait nous repérer à une distance de plusieurs mètres. C'est pourquoi le père Noël a instauré une règle des plus strictes : interdiction de déployer nos ailes lors de nos missions dans le monde des humains. S'ils venaient à découvrir notre existence, mon espèce serait menacée. Exactement comme le mythe des sirènes, qui n'en est finalement pas un puisqu'elles sont toujours présentes dans les fonds marins, simplement à l'abris des regards des plus mesquins pirates. A cause de ces derniers, beaucoup de femmes ont perdu la vie. Ils ont vu une certaine richesse sur leurs écailles aux vertues médicinales, et n'ont pas hésité à faire un massacre (*future histoire de l'auteure disponible en 2023). Nicolas refuse qu'une telle chose arrive à ses anges de Noël. Il a besoin de nous pour aller raisonner les enfants sages devenus rebelles, sans nous, il pourrait y laisser sa vie. Et ce serait une catastrophe : Noël n'existerait plus ! A la simple pensée qu'une telle chose puisse arriver, une nausée me prend. Qu'est-ce que je deviendrai ?

Jarod : - Eerika ? Ne m'as-tu pas entendu ?

Je sursaute lorsque la voix de Jarod me ramène dans la réalité. J'étais si absorbée par mes pensées que je n'ai pas fait attention à eux.

Eerika : - Oh, euh, pardon, je pense à mille choses en même temps. Qu'est-ce que tu me disais ?

Il comble soudainement la distance entre nous, levant doucement sa main pour la déposer contre ma pommette. Instnatanément, le rouge me monte aux joues et des picotements se propagent sur mon épiderme. Lorsqu'il me touche, j'ai l'impression qu'une décharge électrique me parcourt de la tête aux pieds !

Jarod : - Tu es certaine que tout va bien ? Tu trembles... Je vais aller allumer un feu et...

Eerika : - Oh non, ne t'en fais pas, vriament. Je vais bien ! Où est Kalle ?

Jarod : - Je vais tout de même faire un feu. Il est allé en cuisine pour chercher nos desserts.

Je penche la tête sur le côté, en profitant pour lover davantage ma joue contre sa paume. Mais le contact n'est qu'éphémère puisque Jarod se recule pour se rendre dans le salon. Je ne loupe aucun de ses gestes lorsqu'il s'accroupit face à la cheminée pour y déposer des bûches parfaitement rangées à quelques centimètres de lui, dans un beau meuble fait en sapin brut. Je reconnaîtrai cette odeur entre mille.

Kalle : - Eerika, tu veux aussi une glace ?

Je sursaute. Encore. Décidément ! Je me détourne de ma contemplation de Jarod pour rejoindre son fils que je cherche dans la cuisine. Je le retrouve accroupi devant le tiroir du congélateur, sous le frigo. Les mains remplies de cônes glacés, je secoue la tête.

Eerika : - Kalle, non ! A l'approche des fêtes, ça ne va pas. On ne va pas prendre quelque chose que tu manges toute l'année !

Son petit trémousse soudainement et ses sourcils se froncent. Je place les mains devant moi pour l'intimer de se calmer.

Eerika : - Attends, doucement... Ne crie pas s'il te plait. Je disais simplement qu'on pourrait...

Kalle : - T'es pas ma maman, je fais ce que je veux !

Eerika : - Bien sûr, il n'était pas question d'autre chose, mais je te parlais... De cuisiner. On pourrait faire quelque chose de cool, tu ne crois pas ?

Kalle : - Je cuisine qu'avec ma maman !

Et il se relève, emportant deux cornets avec lui. Je soupire lourdement, cela va s'avérer compliqué de l'approcher s'il se braque dès que je fais un pas vers lui... Je range correctement le tiroir et referme le tout, avant de fixer la cuisine. C'est plus fort que moi, je dois tenter de mettre un peu de magie de Noël ici... C'est beaucoup trop triste. Je m'arme aussitôt d'un tablier que je noue autour de ma taille, prépare tout le nécessaire dont j'ai besoin pour faire des cookies. Rien ne vaut une recette venue tout droit du Pôle Nord !

Je commence à mélanger les ingrédients secs, puis je m'occupe de ceux liquides. Je touille le tout avec d'incorporer une préparation dans l'autre que je mélange lentement, sans casser les blancs montés en neige. Le bruit du robot a dû interpeller Kalle puisque j'entends une petite voix fluette dans mon dos.

Kalle : - Qu'est-ce que tu fais ?

Sans me retourner, je continue de cuisiner, approchant la petite plaque que j'ai préalablement sortie du four avant de moi. Je glisse de la pâte contre l'une de mes paumes et je joins mes mains que je frictionne afin de créer une boule parfaite. Je dépose cette dernière sur la feuille de papier cuisson, tout en répondant au petit garçon.

Eerika : - Des cookies.

Kalle : - Nan ! T'as pas le droit ! C'est ma maman qui faisait ça !

Je garde mon sourire. C'est peut-être une petite brèche pour me permettre de lui parler sans qu'il ne hurle.

Eerika : - Je sais que ta maman adorait préparer des gâteaux, surtout avec toi, j'imagine. Mais là, je fais les cookies du père Noël. J'ai sa recette super secrète que je ne partage qu'avec mes amis.

Je fais une seconde boule, puis une troisième. Je jette un oeil à ma droite et constate que Kalle s'est rapproché, intrigué. Il pose ses cornets sur le plan de travail, fixant mon bol et les préparations que je fais.

Kalle : - Maman faisait comme ça aussi.

Eerika : - Tu veux essayer ?

Je lui tends ma main, mais il recule. Bien, il est trop tôt. Le point positif, c'est qu'il ne m'a pas crié dessus. Je termine de remplir toute une plaque, et je l'enfourne. Avec mes dons d'ange, je peux rapidement accélérer le temps de cuisson, ce qui fait qu'en quelques secondes, je ressors le tout pour le poser sur l'ilôt central. Kalle écarquille les yeux et vient se hisser sur un des tabourets pour observer ma réalisation.

Kalle : - Quoi ?! C'est déjà cuit ?!

Je lui adresse un clin d'oeil, passant la main par-dessus la plaque pour refroidir mes gâteaux devenus plats mais légèrement galbés sur le dessus.

Eerika : - Je te l'ai dit... C'est la recette du père Noël... Mais tu dois me promettre de ne rien dire. Est-ce que tu veux m'aider à les décorer ?

Je le vois demeurer bouche bée face à ce que je viens de faire, alors que je commence à préparer mon glaçage. Je mets un peu de colorant alimentaire rouge à mon sucre glace, que je dilue légèrement avec quelques gouttes d'eau. J'appose ma préparation sur un des cookies, et je rajoute des paillettes blanche et verte sur le dessus avant que ça ne sèche.

Kalle : - Wow... Ils ont l'air magique !

Eerika : - Et ils le sont... Mais tu dois garder le secret !

Je lui tends ma petite poche à douille contenant le glaçage. Hésitant d'abord, il finit par m'adresser un magnifique sourire et s'empare de l'ustensile pour décorer un cookie à son tour. Même triste et détruit intérieurement, un enfant reste un enfant. Curieux, et friand de travaux manuels. Je le laisse faire à sa guise, relevant soudainement la tête quand je sens un regard sur nous. Je découvre Jarod adossé à l'entrée de la cuisine, nous fixant les larmes aux yeux. Peut-être me suis-je trop emballée et me voir avec son fils ainsi lui rappelle Aada. Quelle piètre sotte je fais !