Angélique
Angélique : extase et inspiration
Il y avait ce jeu auquel Mozart se livra trop souvent, cette solution en colin-maillard, yeux fermés, vue éteinte, autres sens en exergue, ce jeu de mort, presque, dans tout ce qui disait vie, dans tout ce qui fût plaisant, dans les bouches qui se touchent, dans les vides qui se comblent et la sueur qui se bouffe.
Il y avait ce jeu auquel se livrer ce soir, car c’était trop, car il était comme obligé, son corps, seul, c’était trop, son corps et ses pétales, trop plein, et il fallait vider ça d’une manière ou d’une autre, il fallait vider tout ça.
Il y avait l’empilement de la soie, toujours là, toujours plus grand quand il s’habilla, boutonna le tissu de sa chemise, lentement, délicatement, dans sa poitrine la soie, glissement de ses bas sur ses jambes, doux, sacré, hérétique, et le sang qui pulsait au fond de ses oreilles, qui l’explosait,
son cœur qui battait de se vomir et Salieri.
Il y avait le son de ses pas, à broyer le sol et les pavés sous ses pieds, la taverne, bientôt, les hommes et les femmes, lumineux à ses sourires éteints, lunaires, faussement enjoués, une habitude et des rictus d'automate, gestes de marionnette, si bon acteur que fractions de secondes parfois dizaines de minutes il y croyait lui aussi et Salieri.
Il y avait l’alcool, le tanguement de ses sens et puis cette fille, belle il ne le savait pas, juste un corps et c’était mal, il aurait fallu au moins un peu d’affect, d’intérêt, son corps et Salieri, sauve-moi, sauve-moi, sauve-moi, le grincement de son lit, les grincements de leurs corps, de sa bouche en rose à son oreille qui ne l’écoutait pas, tendue vers des yeux froids, des yeux qui n’étaient pas là et Salieri.
Il y avait les fleurs lourdes à pourrir, lourdes, brassées brusques par ses va-et-vient, qui tanguaient en hauts-le-cœur, les fleurs et leur odeur sur celle de la chair qui claquait, sur le goût du thorax de l'autre leur miasme entêtant, les fleurs et leurs spasmes qui branlaient de sortir, et non, pas maintenant, plus tard, je vous en prie, les spasmes et Salieri.
Il y avait les soupirs de la fille emmêlés au son de ses dents qui cognaient contre les spasmes, qui l’implosaient de partout quand enfin il explosa, l'éclat d'un cri qu’il ne put pousser, qui n'eût rien d'une délivrance, yeux rivés à la sueur, lèvres fermées sur les spasmes, sur les pétales qui remontèrent en bile, qui lui prirent la gorge, qui lui prirent la bouche salées comme un homme et Salieri,
les fleurs à sortir de son corps en bouquet, à s’écraser dans la cheminée, main accrochée au rebord, Salieri en spasmes et tous ces boutons blancs, ça ressemblait à de la ciguë ces pétales qui l’empoisonnaient de Mozart, et sauve-moi, sauve-moi, sauve-moi, et Mozart,
regard écarquillé. Éclaté sur les seins de la fille qui hurlait. Rivé aux fleurs. À nager dans la souillure déjà traînée par la soif de ses lèvres. À bruire la salive qui les avaient escortées, aussi. Engluées les fleurs brillantes sous l’écume. Englué son cœur broyé sous les pétales.
Les cris de la fille, utilisée, salie et Salieri mon dieu, ça n’est même pas ça que je veux de vous, pas réellement, pas le plus important, mon dieu Salieri sauvez-moi.
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