7 : 𝙸𝚕𝚜 𝚐𝚊𝚛𝚍𝚎𝚛𝚘𝚗𝚝 𝚊̀ 𝚓𝚊𝚖𝚊𝚒𝚜 𝚌𝚎𝚝𝚝𝚎 𝚙𝚎𝚗𝚜𝚎́𝚎
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Après cette petite sieste aux doux goûts de liberté, Jannot et Agathe reprirent tous les deux leur chemin. À leur vue se dessina bientôt une immense maison noire, faisant tâche dans le décor floral.
« On est arrivés chez toi, murmura Agathe.
─ Oui, on est à la Maison. »
Et sans un regard pour celle-ci, il continua à tracer son chemin, Agathe à ses côtés.
Un peu plus tard, alors que leur ventre criait famine, ils arrivèrent au point où tout avait commencé, la roche surplombant le lac. Rien n'avait changé, mis à part eux deux, qui en seulement vingt-quatre heures semblaient ne plus pouvoir se quitter.
Inconsciemment, ce fut Agathe qui reprit la tête du chemin.
« Je n'ai pas marché beaucoup avant de tomber sur toi, à peine une vingtaine de minutes.
─ Vu comme ta robe était encore immaculée, c'était évident...
Gloussant à ces mots, Agathe vint prendre la main de Jannot lui offrant un sourire à la fois heureux mais également effrayé. Ses parents devaient être morts d'inquiétude, ils la tueraient sûrement en la voyant débarquer dans ces habits et après qu'elle soit partie autant de temps ! Mais la joie de les retrouver était plus forte et les paroles que Jannot lui avaient dit après leur sieste lui revinrent en mémoire.
« Quoi que tu en dises, je suis sûr que tes parents t'aiment aussi fort que ce que tu ressens pour eux. Ton père te reviendra sain et sauf, et tu te dois de le soutenir dans cette épreuve, qui, j'en suis certain, ne le ravit pas plus que toi. Vous êtes une famille et vous devez rester unis pour chacun des membres la constituant. Je suis sûr que Capitaine Finch ne quitterait pour rien au monde ses enfants et sa renarde, mais s'il y était obligé, il aimerait pouvoir partir en sachant sa famille en sécurité et le soutenant chaque jour malgré le fait qu'il soit loin. Tu dois être la fille que ton père a élevé. Et même si cela te brise le cœur, cette douleur n'est rien comparée à ce que ton père doit ressentir. »
Jannot ne savait pas trop d'où ces paroles lui étaient venues, mais le fait est qu'elles étaient sorties de sa bouche et avaient réussi à achever de convaincre Agathe.
Perdus dans leurs pensées, les enfants n'avaient pas vu la forêt se désépaissir et progressivement une plaine y apparaître.
À seulement une centaine de mètres, une grande maison respirant l'opulence se dressait, une voiture noire y bourdonnait devant et Jannot vit plusieurs personnes sur le perron.
Il ne venait jamais dans cette partie de la forêt, le Père le lui avait expressément ordonné et, jamais, jamais Jannot n'aurait pu lui désobéir.
Enfin, ça, c'était avant.
« Je crois qu'il est temps.
Agathe sentit des larmes se bousculer à ses yeux et son coeur accélérer dans sa poitrine. Elle prit Jannot dans ses bras, enfouit sa tête dans sa poitrine et les pleurs inondant son visage mutin lui demanda fébrile :
─ S'il te plaît... Reste avec moi ! Je t'en prie, tu seras heureux. Papa est bon et maman aussi ! Ils ne te traiteront jamais comme celui avec qui tu vis ! Tu ne souffriras plus jamais...
Un silence accueillit sa déclaration. Et d'une voix basse, Jannot commença.
─ D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été avec le Père. Il m'a élevé, m'a éduqué, m'a appris à compter et à lire. Il m'a cultivé, et ma offert beaucoup de livres. Et je l'en remercie pour tout ça. Grâce à toi, je sais que je ne suis pas seul et qu'une multitude de merveilles m'attendent. Je ne sais pas pourquoi le Père ne m'a jamais rien dit, et je ne pense pas qu'il me le dira. Mais c'est lui que j'ai toujours connu, alors le quitter comme ça serait faire preuve de la pire des ingratitudes. Désolé Agathe. Mais tu devras rentrer seule. Pour l'instant je dois rester dans ma forêt.
Les pleurs d'Agathe devinrent de plus en plus violents. Elle ne voulait pas qu'il parte, en enfant gâtée, elle voulait tout : Jannot et sa famille. Or elle ne pouvait actuellement qu'avoir l'un ou l'autre.
─ Je ne veux pas ! Partons tous les deux alors !
─ Agathe, s'il te plaît. »
C'était la première fois qu'il disait son prénom sur ce ton là. Et c'était la première fois qu'il la regardait avec ces yeux. Emplis de tristesse, de regret, mais également d'autre chose. Alors elle se résigna.
S'éloignant de lui, elle le regarda longtemps afin d'avoir son image gravée dans sa tête, et pouvoir le dessiner une fois chez elle.
Sa silhouette gracile, et ses longs membres. Sa peau parsemée de tâches de son et sa crinière rousse comme les feux d'été. Et ce visage... Ses yeux bleus aux reflets du ciel, ses lèvres élégantes dansant sur ce visage, ou encore son petit nez en trompette que la jeune fille mourait de toucher du bout des doigts. Alors qu'elle se faisait la réflexion qu'elle l'aimait vraiment beaucoup, Jannot pensait à des choses similaires. À sa façon. Il se disait qu'Agathe était semblable à une pensée. Ces fleurs si belles qui restaient inlassablement bloquées dans des songes sans fin. Agathe était l'une d'elles, sombre et perdue au milieu de rêves inaccessibles. Il se fit la promesse de toujours garder une pensée avec lui.
Et c'est quand il fixa Agathe que la réalité s'imposa avec force à lui. Il la voulait avec elle. Alors pour empêcher ses lèvres de dire des choses qu'il regretterait, il posa ses petites lèvres sur celles d'Agathe, dans un baiser timide et chaste.
Quelques instants plus tard, ils se détachaient et Jannot murmurait sa promesse.
« Je te le promets Agathe. On se reverra. Quand tu te sentiras triste, cueille une pensée mets là dans de l'eau, et tous nos souvenirs te reviendront. Et un jour je viendrai te chercher et on fera le tour du monde. Car j'ai raté beaucoup de choses.
─ Oui, mille fois oui ! Je t'attendrai ici dans cette maison, mais ne tarde pas... »
Et c'est ainsi qu'Agathe quitta la chaleur du corps du roux pour marcher à découvert.
Jannot assista à toute la scène, le cœur lourd.
Il vit comment est-ce qu'une femme, à la chevelure de jais et à la robe blanche se mit à crier puis à courir vers Agathe, tenant ses robes à bras le corps. Comment est-ce qu'elle s'agenouilla face à cette dernière et la serra, en pleurant fort. Comment est-ce qu'un homme sortit brusquement de la maison, dans un costume noir, et vint rejoindre les deux femmes. Comment est-ce que les sanglots d'Agathe parvinrent jusqu'à ses oreilles.
Mais il ne sut jamais qu'elle ne pleurait qu'uniquement pour ce trésor roux qu'elle avait perdu si tôt.
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