Chapitre 53. L'année ne pouvait pas mieux commencer
Elias et Saskia reviennent auprès de nous avec les consommations juste à temps pour le décompte. Les cris de joie des fêtards surexcités retentissent dans tout le bar et au-delà, mêlés au bruit des bouchons qui sautent et au tintement des verres qui s'entrechoquent. Question musique, je suis un peu larguée. À croire que le mythique morceau Celebration de Kool & The Gang a été détrôné par des nouveautés plus... dans l'air du temps.
Nous trinquons avec allégresse en échangeant nos vœux au milieu de la foule en délire. Je ne manque pas d'observer des œillades et des frôlements furtifs entre Saskia et David. Mes soupçons tendent à se confirmer : il pourrait bien se passer quelque chose entre eux.
Je profite de ces moments de liesse, cependant, j'ai peut-être surestimé ma capacité à supporter une virée nocturne dans mon état. Après quelques danses endiablées, je commence à fatiguer. J'ai mal aux lombaires et les pieds en feu. Sans compter qu'il fait une chaleur terrible dans ce bar. Bien que je ne craigne pas spécialement de me trouver au milieu d'une foule en délire, mon souffle devient irrégulier à mesure qu'un sentiment d'oppression s'empare de moi. Je ressens le besoin de me réfugier au calme dans mon appartement.
— Je vais y aller, je glisse à l'oreille d'Elias.
— Quelque chose cloche ?
— Non, ne t'en fais pas. Je suis juste fatiguée et il est plus raisonnable que je rentre me reposer.
— OK, je vais te raccompagner.
— Tu n'es pas en état de conduire, Elias. Et je ne voudrais pas te priver de bons moments, la nuit est loin d'être terminée.
Même si cela me crèverait le cœur qu'il la passe avec une inconnue...
— Détends-toi, je suis loin d'être saoul et il est hors de question que je te laisse retourner seule chez toi à cette heure-ci.
— Comme tu préfères. Saskia ? j'interpelle mon amie, en train de roucouler.
— Oui, ma biche ?
David et elle lèvent les yeux vers moi.
— On se voit demain ?
— Tu pars déjà ?
— Oui, j'ai besoin de repos. Tu m'appelles quand tu es dispo ?
— Sans faute.
Elle s'approche pour m'étreindre affectueusement et en profite pour me confier :
— J'ai très envie de passer la nuit avec David.
— Fonce, ma poule. Si tu veux mon avis, il n'attend que ça.
Je l'embrasse sur la joue tout en la serrant fort contre moi puis je salue David d'un petit signe de la main. Elias leur souhaite une bonne fin de soirée et nous nous faufilons jusqu'à la sortie du bar.
Dès que nous atteignons l'extérieur, j'emplis mes poumons d'air frais, soulagée d'avoir bravé la marée humaine pour quitter cette fournaise. Je recouvre mon souffle et m'apaise petit à petit.
— Tu es sûre que ça va, Maya ? Tu as mauvaise mine d'un coup, remarque-t-il en frôlant ma joue de ses doigts chauds.
Je lève les yeux vers lui et mon cœur rate un battement tant je suis, une fois de plus, subjuguée par cet homme.
— Serre-moi dans tes bras, Elias.
— Tout ce que tu veux, ma petite abeille.
Et dis-moi que tu m'aimes...
Il m'enveloppe avec son manteau et je me blottis contre lui autant que mon ventre me le permet ; le nez dans son cou, j'inhale son odeur à pleins poumons. Elias est ma came.
Je frissonne et il m'étreint plus fort, pensant probablement que je grelotte de froid, alors qu'en réalité, je suis sous le coup de mes sentiments pour lui. Il frotte mon dos pour me réchauffer et m'embrasse le sommet du crâne avec tendresse. Je me sens tellement bien dans ses bras protecteurs ; j'ai la conviction que rien ne pourrait m'atteindre quand je suis près de lui. Autour de nous, les cris de joie résonnent, les feux d'artifice s'élèvent dans les airs et illuminent le ciel nocturne.
— On ne devrait pas traîner, il fait frais.
À contrecœur, je me détache de lui et suis aussitôt saisie par le froid mordant de l'hiver. Nous nous hâtons de regagner mon appartement en tram. Arrivés devant l'immeuble, je reçois un message vocal sur WhatsApp de la part d'Axel. Le brouhaha derrière lui est tel que je n'entends pas très bien ce qu'il me raconte. Je parviens à décrypter quelques mots. A priori, il s'éclate avec ses amis et je m'en réjouis pour lui.
— Bonne année à toi aussi, fiston ! Amuse-toi bien et vas-y mollo sur le jaja si tu veux voir le soleil se lever ! j'enregistre à mon tour pour lui répondre.
— Il a l'air de bien en profiter contrairement au début de soirée, observe Elias. Tu sais que j'ai été très étonné de me retrouver au resto avec son père.
— Je ne pensais pas que tu le connaissais si bien, je remarque, un brin caustique en songeant à notre engueulade dix jours plus tôt.
— N'exagère pas, je ne l'ai rencontré qu'une fois ou deux, lors de déplacements pros. Tu m'as surpris, je ne t'avais jamais vue aussi piquante avec quelqu'un.
— Tu as entendu comment il parlait à son fils ? je m'insurge en ouvrant la porte d'entrée de l'immeuble. Je ne pouvais pas rester silencieuse !
— Pourquoi tu t'emballes d'un coup ? C'est dingue, tu es une vraie mère poule avec ce gamin.
Je quitte mes chaussures pour soulager mes pieds endoloris et entame la montée des marches d'un pas lourd.
— Je n'y peux rien, je me suis attachée à lui. Et je ne me suis pas privée de dire à David ce que je pensais de sa relation avec son fils.
— Pourquoi cela ne m'étonne pas ? réplique Elias, derrière moi, en prenant un fou rire. Rassure-moi, tu y as mis les formes au moins ?
— Bien sûr. Tu me connais, non ?
— Justement. Toi qui étais toujours si pondérée auparavant, tu es devenue une vraie guerrière, Maya chérie.
Oh oui, appelle-moi encore comme ça.
Je stoppe ma marche, le cœur battant à tout rompre et quelque peu essoufflée. Elias saisit mon visage entre ses mains et dépose un baiser sur mon front. Un simple courant d'air pourrait me soulever tellement je me sens légère d'un coup.
— D'avance, je plains toute personne qui oserait s'en prendre à notre enfant, se moque-t-il gentiment. Encore que, fille ou garçon, je prédis que notre progéniture aura sûrement un sacré caractère.
— Pas trop tout de même, je l'espère, sinon, on va s'en voir au quotidien.
Nous gravissons les dernières marches, et maintenant que nous sommes arrivés à destination, je suppose qu'Elias va repartir. Pourtant, je ne veux pas qu'il me laisse. J'avais prévu de lui annoncer le sexe de notre bébé pour son anniversaire, toutefois, il me semble que cette nuit de Nouvel An est une belle occasion. Et je doute vraiment que Saskia parvienne à tenir sa langue.
— Elias, il faut que je t'avoue quelque chose, je commence en triturant mes doigts.
Il fronce légèrement les sourcils, ses iris brillants rivés sur moi. Je déglutis et baisse la tête comme une petite fille honteuse. J'espère qu'il ne m'en voudra pas de lui avoir caché la vérité pendant quelques jours.
— Je ne t'ai pas tout dit à propos de notre bébé...
— Oh bon Dieu ! Qui y a-t-il ? C'est grave ?
— Mais non, détends-toi. Seulement, on va pouvoir commencer à préparer son arrivée.
— Euh, on a déjà commencé, je te signale, me réplique-t-il d'un air dubitatif.
— Oui, enfin...
Elias passe la main dans ses cheveux et me fixe, cherchant à décrypter le mystère que je laisse volontairement planer.
— Qu'est-ce que tu me caches ?
— Tu te souviens de notre discussion sur les prénoms ?
Il se gratte le menton et acquiesce d'un hochement de tête. Je reste muette, me contente de l'observer. Il réfléchit quelques secondes et son visage s'éclaire.
— J'étais sûr que tu m'avais fait marcher... Avoue, tu connais le sexe, c'est ça ?
J'opine du chef et esquisse un large sourire. Je m'approche de lui et chuchote à son oreille :
— Bébé est une fille.
Elias recule la tête et pose son regard sur moi. J'y décèle un mélange de joie et de fierté. Il semble secoué par mon annonce et incapable de parler, lui qui, d'habitude, ne manque pas de répartie. Je frôle sa joue du bout des doigts, ses paupières se ferment et il inspire profondément.
— Une petite princesse...
— Princesse guerrière, je le corrige en riant.
Elias rouvre les yeux et s'empare de ma main, la porte à sa bouche pour y déposer un baiser léger comme une plume.
— Ce bébé avec toi est la plus belle chose qui soit arrivée dans ma vie.
Alerte ! Mes jambes menacent de se dérober, alors qu'une vague d'un bonheur incommensurable me laisse pantelante. C'est l'une des confidences les plus touchantes qu'il m'ait faites.
Happée par ses iris charmeurs, je ne peux résister plus longtemps et approche mon visage du sien, jusqu'à inhaler son souffle et, enfin, sentir ses lèvres douces et chaudes contre les miennes. Il m'enlace et nous nous embrassons. Un baiser intense, lascif, de ceux qui réchauffent et éveillent le désir enfoui. Mes joues rosissent de plaisir, mon cœur bondit dans ma poitrine, une chaleur indécente parcourt mes veines.
Je me détache de lui pour déverrouiller la serrure et nous entrons dans mon appartement, éclairé par la lumière en provenance de l'extérieur, filtrée par les voilages aux fenêtres. Elias m'attire contre lui, passe ses doigts dans mes cheveux et dévore mes lèvres à nouveau. Je frémis, réduite à l'envie d'assouvir mon désir dans ses bras une nouvelle fois. Cinq mois sans sexe, ça commence à faire long. J'ai les hormones en ébullition en ce moment. Et je devine sans peine en aventurant mes mains sous sa ceinture qu'Elias est dans le même état que moi.
Je l'entraîne vers ma chambre.
— Serait-ce une invitation ? plaisante-t-il derrière mon dos.
— Hum oui... Et ne t'avise pas d'essayer de t'enfuir.
— Inutile Maya, il faudrait que je sois fou pour laisser une femme aussi désirable que toi.
— J'ai tout un programme en tête pour les heures à venir qui devrait te plaire.
— L'année ne pouvait pas mieux commencer, se réjouit-il.
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