5- Confrontation
Javier
La salle de réunion est devenue une zone de guerre, dans laquelle les terreurs de mon service attaquent agressifs. J'essaie de les aider, en tempérant leurs propos, cependant ils se sabordent en disant des bêtises, que Léonard leur renvoie en boomerang.
Ils se font laminer, par un L que je découvre.
J'aurais des cours à prendre auprès de lui, sur comment gérer des fous furieux.
Bon je ne vais pas me plaindre, on a fait mieux. J'ai envie d'écrire en douce un message à mes copains, je me demande si je vais me payer le culot de le faire, quand Sébastien me bouscule.
─ Tu rêves ? Il me désigne de la tête Léonard qui répète : Javier ?
La honte.
─ Je vais pour conclure vous emprunter votre directeur en essayant de ne pas le manger. Vous pouvez nous laisser !
Son bras droit, l'horrible Julien, me regarde méchamment, nullement soucieux de partir, jusqu'à ce que Léonard le vire d'un signe de tête. Nous sommes donc seuls dans cette salle insipide qui sent la transpiration, avec en bruit de fond une clim bruyante.
J'attends des explications qui ne viennent pas et il me fait signe de le suivre à son bureau. Moi, je n'ai jamais réussi à avoir de bureau individuel, je n'ai jamais osé m'imposer et c'était plus pratique de m'installer avec mon équipe. Je le savais ce gars et moi, on ne joue pas dans la même catégorie. J'ai envie de réclamer une pause, pour envoyer un message à mes amis.
Je suppose qu'il m'a reconnu ! Peut-être que je me berce d'illusions. Je ne vais quand même pas lui demander s'il se souvient de moi ?
─ Faites-moi un café, ordonne-t-il à Mona.
Je suis ébahi par son ton autoritaire, si je lui parlais comme ça, elle me claquerait.
─ C'est généralement Javier qui s'en occupe, rétorque Mona vexée comme un pou.
Il va se prendre une vacherie de sa part très bientôt et elle est douée.
─ Javier, un café ? demande Léonard.
Je grimace, je le lui balancerais bien à la tête son café. Au moins je vais en profiter pour envoyer un message à mes copains. Les connaissant, ils vont être excités comme des puces.
Vous n'allez pas le croire ... j'ai retrouvé L : vous n'allez pas le croire ! C'est lui qui me vire et me fait des misères. Il ne m'a pas reconnu et il n'est pas très sympa. J'ai tellement hâte de vous retrouver... je vous raconterai tout à l'heure.
Je l'entends dans mon dos.
─ Mona, réservez-moi un voyage à Cannes pour demain soir, deux personnes et une nuit dans le meilleur hôtel s'il vous plait.
─ Désolée, je suis overbookée ! je n'en peux plus ! Les réguls des réclamations sont pour moi, ce qui d'ailleurs n'est pas normal ! Je n'aurais pas le temps ! rétorque mon colonel en chef.
Là je la retrouve ! Et toc ! Débrouille-toi avec ça L !
Mes copains se marrent comme des bossus quand je leur raconte mes misères avec cette peau de vache. Je suis content qu'elle envoie promener Léonard comme elle le fait avec moi.
─ OK, alors tapez-moi une lettre de licenciement, c'est prioritaire avant vos réguls. Ne trainez pas !
Ça ! Je suppose que c'est pour moi. Je ne vais pas lui parler de notre nuit, à quoi bon ! J'essaie d'oublier les images qui reviennent, ce n'est pas du tout l'endroit. Honnêtement il est encore plus beau que dans mes souvenirs.
Je reçois des tonnes de notifications bruyantes, mes copains ont lu mon message et s'affolent.
Je me dépêche de couper le son, maudissant ma stupidité.
Léonard
Je commence à cerner le personnage adorable, tel que je l'ai rencontré l'an dernier et dont tout le monde a abusé. J'avais aimé sa délicatesse. Je comprends ce qu'a voulu dire le PDG, en me disant qu'il est un bon élément, qu'ils n'ont pas su apprécier. S'ils m'avaient eu à la place, ils auraient tous dégagés depuis belle lurette.
La secrétaire alias la vieille harpie, à qui j'ai fait faire un dernier test, l'a raté en beauté et je l'envoie taper sa propre lettre. J'ai demandé un séjour dans le sud sur une impulsion où j'aurai emmené Javier en amoureux.
J'envoie un message à Anet en douce :
Annule tous mes rendez-vous !
Elle me regarde, mais je baisse la tête. Elle a compris, ça veut dire exécution.
Je n'avais nullement prévu de l'interroger, ce n'est pas nécessaire, cependant c'est une occasion comme une autre, pour discuter avec lui. J'espère encore qu'il va détruire le mythe, que je vais réaliser qu'il n'est qu'un imbécile mignon ne valant pas le coup d'y retourner.
Ça se trouve l'absence m'a permis de l'idéaliser et mon enthousiasme va se dégonfler comme un ballon de baudruche.
Il fait toujours aussi gamin, pas crédible comme responsable, surtout qu'il n'écoute pas en réunion et là les messages bruyants, il me donne envie de rire.
Nous travaillons tous les deux, sans qu'il ne fasse d'allusion à notre nuit.
Julien passe une tête dans mon bureau, essayant de s'incruster et je suis obligé de le virer sèchement.
J'ai confirmation qu'en effet Javier a la tête bien pleine et qu'il a toutes les compétences de la boite. Il a réponse à tout, ses explications sont claires et il est gêné de devoir rectifier des bêtises de ses collaborateurs.
Quand Mona arrive, un sourire sadique aux lèvres, avec la lettre qu'elle aura mis d'une heure à préparer quand même. Je la remplis devant eux, puis la lui tends.
─ Vous allez au service du personnel, tout de suite, et vous ne revenez pas !
Elle regarde incrédule son nom, Javier est blême.
Elle gueule menaçante, mais je peux aussi hausser le ton, les faisant sursauter tous les deux.
─ Écoutez-moi bien Mona ! Je vous donne une minute pour partir, si je dois passer un appel à la sécurité, je fais diviser votre indemnité par deux.
Elle part vaincue alors que la sécurité arrive déjà. Anet, les a appelés, elle a l'habitude de ce genre de scène.
─ Reprenons ! je fais penaud, réalisant que Javier a détesté.
Quel con ! Ce n'est pas comme ça que je vais le reconquérir. J'ai l'impression de ne faire que des conneries.
Plus tard Anet passe une tête.
─ Léonard ? Normalement tu as un comité dans cinq minutes. Benoit vient de me relancer.
─ J'arriverai un peu en retard.
Je me tourne vers l'objet de mes pensées.
─ Ça va J ?
Il sursaute, réalisant que je l'appelle J. comme dans notre jeu dans le train.
─ Je croyais que la lettre était pour moi, reconnait-il.
La sienne est dans la poche de mon veston, il n'est plus question de la lui donner.
─ Plus tard mon amour, je n'en ai pas fini avec toi !
Il écarquille les yeux. C'est vrai que je ne suis pas très prudent.
─ Tu te rappelles ?
─ Bien sûr ! On continue de travailler ?
Je fais exprès, pour provoquer une réaction, mais il reprend vraiment le travail, alors que dehors, le ciel s'assombrit déjà.
─ On va s'arrêter là pour aujourd'hui. Tu habites où ?
Il me regarde indéchiffrable, visiblement pas très convaincu par ma prestation. Je m'attends à des injures ou des reproches.
─ À Maisons-Alfort.
Une réponse brève, qui ne me dit pas grand-chose sur son humeur.
─ Si tu restes encore un peu, je pourrais te raccompagner ?
Je me demande jusqu'où ira ma chance avec lui.
Il me fixe silencieux, se demandant ce que j'ai en tête.
─ Si tu veux, je pensais rester un peu encore, de toute façon.
Il me rend très heureux.
─ Pour mon équipe ...tu as de la visibilité à me donner ? ajoute-t-il.
─ On verra qui on garde c'est tout ce que je peux dire. On ne devrait garder que trois ou quatre personnes !
─ Ça ne va pas les aider.
─ Dis-leur qu'on réfléchit encore un mois, sauf abus caractérisé.
─ Abus caractérisé ?
─ Des tirs au flanc ou ceux qui mettent une mauvaise ambiance.
─ OK ça leur laisse juste le temps de faire leur CV.
─ Normalement, on fait partir les gens en une semaine. Je vous fais une fleur.
Il n'a pas l'air très convaincu et je vois bien qu'il se retient de me jeter mon bouquet de fleurs virtuelles à la tête.
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