21- Les vacances de noël
Léonard
Javier est heureux dans son nouveau travail. Il a des horaires cools, souvent il se lève tard et déjà deux jours de télétravail voir parfois la semaine. Quand je rentre il a eu le temps de cuisiner et de travailler. Je réalise que c'est égoïste d'imposer de venir tôt à mes collaborateurs, nous n'avons pas tous les mêmes rythmes.
Je me mets à cogiter sur les vies des autres, une nouveauté et une autre c'est qu'il m'arrive d'avoir du mal à le quitter le matin.
Je me suis renseigné sur sa nouvelle boite. C'est une entreprise spécialisée, dans un secteur de niche et pépère. Il y est heureux et il est fier de ses voyages en Europe, il me ramène toujours un souvenir.
Sans rien dire à personne, j'ai investi dans la boite d'Ira. C'est même une bonne affaire, car si elle ne marche pas tellement en France, elle décolle en Asie et en Amérique du Sud.
Ira cherche à savoir qui est son actionnaire et m'adresse des messages, sans que je réponde.
Noël approche et nous sommes toujours ensemble, contre toute attente, notre histoire dure.
Javier rouspète, car il va devoir aller chez ses parents. Je remarque qu'il ne me propose pas de me présenter sa famille, ce qui me vexe un peu. Moi, je compte aller quelques jours à New York.
Benoit et Tanguy savent que j'ai quelqu'un dans ma vie. Comme je ne le leur présente pas, ils sont persuadés que c'est sérieux. Moi je garde ma mine impassible de joueur de poker.
Souvent Javier est contre moi, quand ils m'appellent.
Javier
Ma boite est géniale, J'ai pu poser des congés sans problème. J'apprécie l'ambiance cool et mon patron, Tony, toujours en pantalon usé de velours et vieux gilet, me fait penser à un grand-père qui a quitté son coin de cheminée, en réalité il est malin le papy.
J'ai trois collègues informaticiens, ils sont cool, sympas, sportifs. Plus de collaborateurs à faire bosser et qui ne bosse pas. Nous nous répartissons les secteurs, j'ai eu l'Europe.
Notre boite installe des câbles dans le monde entier et les quatre informaticiens nous maintenons les logiciels de surveillance.
Je prépare ma valise en bougonnant, je suis obligé de retourner chez mes parents pour la semaine de noël.
Je n'ai pas envisagé une seconde d'emmener Léonard, ça n'arrivera pas !
Mes parents n'accepteront jamais mon homosexualité et à quoi bon s'inquiéter, Léonard m'aura largué avant.
À la descente du TGV, je prends un taxi qui me dépose devant la caserne.
Derrière une clôture de bois blanc se dresse le bâtiment principal avec les bureaux et derrière les deux immeubles d'habitation de quatre étages. Une dizaine de voitures de gendarmerie sont garées sur le parking.
Le chauffeur de taxi me regarde avec des yeux curieux, il se demande ce que j'ai pu faire, qui m'oblige à venir ici !
Quand j'arrive à l'interphone, je me garde d'activer celui destiné à appeler les bureaux, il sert aux plaignants et aux condamnés. Le second interphone est réservé pour les familles. Je sonne chez moi, la boule au ventre coutumière est revenue.
Nous habitons au deuxième étage du bâtiment sur le côté. L'immeuble est constitué de pierre blanche avec des volets marrons. Des petits balcons devant les salons. Maman ouvre la fenêtre pour me faire des grands signes, je lui réponds avec un sourire faux.
Mon père sort déjà de son bureau en uniforme pour venir à ma rencontre. Je ne vois pas comment il peut savoir, à moins d'avoir mis un micro dans l'appartement ou alors il guette les caméras de sécurité. Comment savoir avec lui ?
─ Tu aurais pu appeler, je serais venu te chercher !
Il ne sait pas ce qu'il veut. Une fois, je l'ai appelé et il m'a engueulé car il était en mission. Je préfère payer un taxi et je suis déterminé, je ne l'appellerais plus jamais !
S'il savait que j'ai un mec, il en ferait une attaque. Parfois, j'ai envie de lui balancer la vérité à la figure.
─ Je vais t'aider ! Il prend mon sac, que je me dépêche de lui reprendre.
─ C'est bon papa, tu dois avoir du travail non ? Je vais saluer maman.
─ Je peux profiter de mon fils que je vois trop peu quand même ! bougonne-t-il.
L'appartement est douillet, décoré avec les tableaux peints par ma mère. Le salon cosy contient des meubles en bois astiqués. Une bonne odeur provient de la cuisine.
Je vais déposer mon sac dans ma chambre. Elle donne sur le parking, j'ai toujours détesté ça. Mon lit est recouvert de sa housse de couette écossaise et mon bureau où j'ai travaillé si fort. Rien n'a changé et je frissonne malgré moi. Heureusement, j'ai de quoi m'évader : j'ai mon pc. Ma mère frappe à la porte me regardant installer mes câbles.
─ On ira chercher un sapin ?
─ ...
Je la regarde un moment surpris, car nous ne faisons pas de sapin, à mon grand désespoir quand j'étais enfant. Je lui rappelle ce qu'elle m'a seriné toute mon enfance.
─ Papa ne veut pas !
─ Je lui ai dit que je voulais !
Je ricane intérieurement... c'est juste quinze ans trop tard ! J'en avais envie à dix ans, maintenant, elle me fait pitié.
─ Si tu veux, je réponds hypocrite. Renonçant à lui balancer mes vérités.
J'ai négocié ce séjour chez eux, au plus sec : je n'ai pas réussi à faire moins de quatre jours, le temps va me paraitre interminable.
─ Et si on allait au musée des beaux-arts, ils l'ont réaménagé ! ça te ferait plaisir ? Je suis si contente, on te voit bien trop rarement.
─ Bien sûr.
Si ça ne tenait qu'à moi, il ne me verrait plus !
─ Tu as l'air heureux ? s'étonne ma mère.
J'ai un mouvement de recul, me demandant si mon bonheur avec Léonard pourrait transparaitre.
─ Non, j'ai l'air normal.
Je ne leur ai pas dit mon changement de poste, j'ai une règle simple, leur en dévoiler le moins possible. Je suis un dissimulateur né grâce à eux.
─ Ça va ton travail ?
─ Toujours beaucoup de travail !
─ Papa a su que tu allais beaucoup à l'étranger.
Je ferme les yeux, agacé, il a accès au contrôle des passeports aux frontières et il me surveille grâce à son boulot. Je suis sûr que si j'ai une amende, il le saura, car il a dû mettre une alerte sur mon nom.
─ Il a des questions, continue ma mère.
Et merde !
Quand on parle du loup, Le lieutenant Jallabert rentre à la maison, alors qu'il n'est que seize heures et me propose une balade en vélo. Il fait déjà nuit mais cela ne l'a jamais arrêté pour faire du vélo. J'ai vraiment envie de refuser, mais je sais qu'il va me prendre la tête toute la soirée si je ne cède pas. Nous partons donc quelques minutes plus tard, l'air est doux et il n'y a pas de vent. Je me surprends à apprécier la balade. Alors que nous pédalons, il se met à ma hauteur.
─ Tu as changé d'entreprise ?
Je hoche la tête, prenant une gorgée d'eau. Renonçant à lui demander comment il peut être au courant.
─ Tu aurais pu nous le dire ! rouspète mon père.
Je pourrais lui dire qu'il n'a pas le droit de me surveiller, ce serait parler dans le vide.
─ Je me débrouille financièrement, je ne voulais pas vous inquiéter.
J'élude le sujet.
─ J'ai trouvé des photos de toi sur les réseaux, comme mannequin c'est quoi cette bêtise ?
─ Rien du tout !
J'accélère pour l'empêcher de parler. Le soir, alors que nous sommes à table, il continue son interrogatoire.
─ Bon j'ai vérifié tes comptes, rien d'anormal !
Je me liquéfie, écœuré et me promets de passer un savon au banquier à mon retour.
Ils me réclament à venir voir la maison que j'ai achetée l'an dernier, j'ai toujours botté en touche, prétextant avoir trop de travail.
Le repas est succulent, cependant, je n'ai pas faim. Je n'ai pas écrit à Léonard, car je ne veux pas que mon père se doute de quoique ce soit, dans le doute, j'ai mis mon téléphone en mode avion.
Le jour de Noël, toute la caserne se réunit pour un repas collectif, je bavarde avec l'adjudant Moreau dont le fils brillant a été un de mes élèves. Je lui donnais des cours particuliers quand j'étais ado. Le garçon plus jeune que moi, était intelligent, rusé et autoritaire, amoureux de moi, mais dans cette caserne, je n'aurais jamais franchi le pas. J'ai fait semblant de ne rien voir.
Je lui demande des nouvelles de son fils, il a fait une grande école lui aussi.
Il me propose de me mettre en contact avec son fiston, j'ai pris ses coordonnées pour lui faire plaisir mais je ne compte pas le revoir. Bien vite, je remonte à l'appartement lassé de leur bavardage.
Mon père le lendemain regarde un match de rugby à la télévision. Je suis prié de venir près de lui, je n'ai jamais eu le loisir de refuser.
Enfin le séjour se termine, dans le train j'ai un paquet de notification, de Léonard et de mes amis. J'écris à mes copains que j'ai un père qui m'espionne, ils rigolent morts de rire.
Je ne passe qu'une journée chez moi pour câliner mon chat et ranger avant de rejoindre mes copains à l'aéroport.
Chez Tonton Grégoire, nous vivons en bermuda et maillot de bain, je traine pas mal en slip moulant. Mes copains s'exclament que je deviens allumeur. Je veux bien l'admettre, je donnerais cher pour que Léonard soit là.
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