David sortit de la douche avec un petit râle de plaisir. Ses muscles ne lui brûlaient plus comme la première fois, aussi, le sport lui était plus satisfaisant et le rinçage qui clôturait son rituel n’était que plus appréciable. Raphaël était parti plus tôt. Son fils aîné devait être cherché à l’école pour le dentiste, et Erika n’avait pas encore terminé le travail.

McFly, rapidement habillé, s’éloigna de la salle de sport en textotant. Il ne croisa personne sur son chemin, aussi, il n’eut pas besoin de relever la tête de tout le message.

[David]
Je sors de la salle, je passe au Webedia et je rentre, bisous mon cœur <3

Il n’attendit pas que Tiffany lui réponde, sachant qu’elle ne le lira qu’après le travail, et marcha en direction du bâtiment, son sac à dos glissant de son épaule par moment. Fort heureusement, il ne croisa personne en chemin. Il entra dans le bâtiment, et se tourna vers la machine à café. Toujours hors-service. Sans s’y attarder d’avantage, il prit les escaliers et se rendit dans son studio. Il n’y avait personne. Seulement lui et quelques affaires personnelles, dont son chargeur. Son téléphone vibra, et il lut le message reçu, un immense sourire aux lèvres.

[Tiffany]
À plus tard <3
Oh, autre chose… Tu te souviens que ce weekend on va chez mes parents, tu comptes venir ?

[David]
Je n’ai rien de prévu avec Raph, j’y serai.

Il était déjà de retour aux rez-de-chaussée. Vu l’heure, les fermetures menaçaient la ville. Il se dépêcha cependant de passer rapidement au bistro pour se prendre un café à emporter.

Carlito lui avait parlé d’une abonnée timide aux cheveux bleus, et il espérait la croiser, histoire de se faire un avis sur elle, et pourquoi pas la rassurer ? Il paraitrait qu’elle ait pris peur. Mais bon, son meilleur ami pouvait tout aussi bien exagérer le moindre fait. Et lorsqu’il se tint vers le comptoir, il dut bien se rendre à l’évidence qu’aucune fille aux cheveux bleus ne s’y trouvait. Peut-être qu’elle ne travaillait pas le mercredi soir ?

Sans café, il partit.
Dommage, il était trop curieux sur ce coup-là.

*

Tiffany attacha les enfants à l’arrière, et se laissa tomber à côté de McFly. Un chaste baiser échangé, une grimace d’amusement de la part de leur fille, le père démarra et s’engagea dans les rues de Paris. Ce vendredi aurait pu être davantage calme, mais les pions de la société rentraient de travail. Habilement, David choisit méthodiquement les rues pour croiser le moins de gens possible, quitte à passer devant le Webedia. Une trentaine de mètres plus loin, il traversa un carrefour et aperçut deux jeunes filles sur le trottoir, l’une en skate-board, l’autre dix mètres derrière, mais peu importait leur activité, elles étaient toutes deux dangereusement proches de la route. Mais le conducteur ne s’en inquiéta pas, optant préalablement pour la sécurité en roulant un peu plus à gauche qu’à l’accoutumé. Il sourit, amusé, se rappelant de sa vidéo sur le skate-board avec Raphaël et le cher Dr. Nozman. Sa femme lui parla. Il répondit sans entendre la question, trop concentré sur la voiture qui le frôlait du sens inverse. Heureusement, elles ne se touchèrent pas. Le youtubeur comprit sa surprise uniquement lorsque le danger fut écarté.

Il tourna le volant à droite, prêt à changer de rue, mais il vu au dernier moment, dans son rétroviseur, la silhouette s’élancer à toute allure sans savoir s’arrêter. La jeune femme, visiblement, balança ses bras et vint cacher ses yeux pour ne pas voir la fin de sa course. Son crie de détresse fut entre-coupé par le crissement des pneus. David freina brusquement, à mi-chemin d’un virage à angle droit, dans l’optique de ne pas percuter la jeune fille en skate. Malheureusement, ou heureusement ? elle termina sa course contre la voiture immobile dans un bruit sourd contre le capot. Tiffany émit un hurlement de panique, secouant l’épaule de son mari qui lui, cligna des yeux sans savoir si tout cela était réel. Comme revenant à la réalité, David bondit hors de sa voiture et accourut vers la jeune fille, allongée sur le flan, les yeux grands ouverts mais figée.

« Wow, est-ce que ça va ?! s’enquit-il en s’agenouillant près d’elle, une main sur son épaule.

- O-oui, je crois…

- Tu as mal quelque part ? »

Elle patienta quelques secondes avant de secouer la tête. Mais McFly avait vécu assez de chutes pour se douter que cela ne pouvait pas être rien. Tiffany baissa sa vitre.

« Elle va bien ? »

Manifestement, elle ne pouvait pas voir ce qu’il se passait juste sous les phares. Une voiture claxonna derrière.

« Je vais me garer plus loin, c’est bon ! rugit-elle avant de se décaler d’un siège pour prendre le volant. »

Son conjoint comprit son intention et glissa son bras sous la casse-cou dans l’optique de l’aider à se relever. Il la souleva assez aisément et quitta la route pour laisser les voitures passer. C’est alors que la seconde inconnue fit son apparition, à bout de souffle et inquiète.

« Néhémie ! Est-ce que ça va ? Oh là, c’était violent !

- Vous êtes son amie ?

- Ça fait quelques jours qu’on se connait, sa compte ? Je m’appelle Tori. Et elle, c’est Néhémie. »

David fit assoir ladite Néhémie sur le bord d’une vitrine d’un commerce fermé, et déjoua habilement de l’attache du casque pour libérer ses longs cheveux bleus. Est-ce elle l’abonnée super bizarre dont m’avait parlé Raph’ ?

« Hé, tu es sûre que ça va ? Nausée ? Étourdissement ? »

Elle voyait trouble mais ce ne devait être que le choc. Elle ressentit alors une douleur vive sur sa hanche gauche, mais ne l’exprima pas. Néhémie profita simplement de la main fraîche de David contre son front.

« David ! David ! Alors ? demanda Tiffany en arrivant à son tour, un bébé dans le bras, une petite fille tenue par la main.

- Elle n’a pas l’air en forme, répondit-il vaguement.

- Je vais la ramener chez elle, merci de vous êtes arrêtés… dit Tori en posant sa main sur l’épaule de Néhémie. »

David voyait bien qu’elle était étourdie mais elle ne s’en plaignait pas. Cependant, il n’était pas rassuré de la laisser ainsi. Heureusement, comme si elle avait entendu ses pensées, sa femme s’exclama :

« On va faire un détour pour la ramener en voiture, c’est plus sûr !

- Oui, affirma McFly, du même avis. Par contre il n’y a de la place que pour une personne en plus…

- Ne vous inquiétez pas pour moi ! Je pars chercher le skate-board et je la rejoins. »

Il se tourna vers Néhémie et se demanda si tout ira bien. Heureusement qu’il avait eu le réflexe de s’arrêter à temps…

*

Ils arrivèrent chez les parents avec une bonne heure de retard.

« Une jeune demoiselle a percuté notre voiture en skate-board, maman, expliqua Tiffany en retirant la veste de sa fille, à l’entrée. Nous l’avions ramenée chez elle, et il lui a fallu du temps pour se rappeler où elle habitait.

- Bonté divine ! David, ne sais-tu plus conduire ?! s’outra-t-elle. »

Il leva les yeux au ciel, peu d’avis à se disputer avec sa belle-mère. Elle exagérait toujours tout et s’expliquer ne servirait à rien. Il prit son fils dans les bras, contrôla une dernière fois si les freins de la poussette était fonctionnels, et l’abandonna près de la porte d’entrée, côté couloir. Sa belle-mère ferma la porte et insista pour récupérer son petit-fils dans ses bras, chose qui soulagea David alors qu’il sortit son téléphone pour répondre à Raphaël, à qui il tenait absolument à raconter cette folle histoire.

*

« David, ton téléphone, lui murmura Tiffany en faussant un sourire crispé pour que ses parents ne la remarque pas. »

Son mari rangea en vitesse son cellulaire et tendit son assiette. Il devra donc faire preuve de patience et attendre la fin du repas pour poursuivre sa longue conversation avec son partenaire… Il se figea, surpris, sentant la main brûlante de son épouse parcourir le long de sa cuisse. Il cala son visage rosit dans sa main, et de l’autre, il chercha à chasser celle de Tiffany qui prenait un malin plaisir à l’embêter. « Comme des enfants… » Finalement, ils se donnèrent à la tendresse de la poigne de l’autre, entrelacées sous la table, jusqu’au moment où ils se souhaitèrent un bon appétit collectif.

*

Bien que le froid se face ressentir abominablement, les oiseaux claironnaient. David grogna contre son oreiller, prenant soin à ne pas réveiller sa femme, alors qu’il se rendait compte qu’il était tout juste quatre heures du matin. Ces piafs n’avaient donc rien d’autre à faire ?!

Il se leva en titubant, tendit l’oreille au cas où le bébé pleurerait, puis se leva, sans ronchonner le fait qu’il gazouillait joyeusement dans un berceau à l’autre bout de la pièce.

« Bah alors, on n’a pas sommeil… ? »

Il fit glisser son doigt dans le bas du dos de l’enfant, puis constata qu’il n’avait pas à le changer, pas encore.

Visiblement, il ne voulait rien d’autre que s’agiter au clair de lune qui se reflétait contre le vieux mobile. À l’instar de son petit gars, David mourrait de soif. Il embrassa son fils sur le front et quitta, sur la pointe des pieds, l’ancienne chambre de Tiffany. Il connaissait par cœur le trajet pour aller dans la salle de bain, mais par sécurité, il prit son téléphone et se laissa guider grâce à la lampe qu’elle générait au dos. Tient, un message de Carlito. Il l’ouvrit après avoir bu une gorgée au robinet.

[Raphaël]
Did you sleep bro ?

Il datait de l’heure passée. Par simple curiosité, il répondit.

[David]
Là maintenant tout de suite, non, mais j’imagine que toi oui

[Raphaël]
Perdu

[David]
Qu’est-ce que tu fiches debout à une heure pareille ?

[Raphaël]
Le petit a fait un cauchemar, on s’en est occupé mais tu as son frère qui est arrivé… Du coup j’ai plus de place dans mon propre lit

[David]
Ah d’ac’, du coup canap’ ?

[Raphaël]
Du coup canap’. Et toi ?

[David]
Soif. Et il fait grave froid dans la chambre, j’envie mes enfants qui ont mille couches de pyjamas

[Raphaël]
LOL prends une douche ?

[David]
J’risque pas de les réveiller ?

[Raphaël]
Si t’es discret, non. Bien que peine perdu, tu peux toujours essayer

[David]
Je t’emmerde

[Raphaël]
LOKQEIFNHBRV

[David]
Je ne comprends pas les gens qui écrivent ça, c’est si peu mature

[Raphaël]
Moi non plus

Au moment où le Youtubeur reçut le message de Carlito, il s’était déjà déshabillé et glissé dans la baignoire, sans eau. Avec lenteur, il enclencha le flux, et sans même lire les bouteilles, il versa un peu de mousse pour le bain. Ça sentait bon la fraise, et les bulles ne tardèrent pas à se multiplier autour de lui.

[Raphaël]
S’ils se réveillent, fais le somnambule

[David]
Mais oui bien sûr, laisse-moi faire gaffe à ne pas faire tomber mon tel dans le bain au lieu d'écouter tes conneries

[Raphaël]
BOUH

[David]
Ça ne marche pas comme ça mais je vois clair dans ton petit jeu Carl’

[Raphaël]
😉

Son canard en plastique se perdit sous la masse légère de bulles. Est-ce que quelqu’un allait découvrir son interlope ? Qui de sensé prenait un bain au beau milieu de la nuit ?

[Raphaël]
Alors ? Comment ta trempette ?

[David]
Pas trop mal, en tout cas j’ai moins froid

[Raphaël]
Ah bah tu vois, et après on dit ne pas suivre mes conseils !

[David]
C’est vrai que pour UNE fois…

[Raphaël]
…

Il sourit et reposa son téléphone sur le bord de la baignoire. D’accord, il était waterproof, mais ça l’embêterait de devait chercher de quoi essuyer l’écran pour l’utiliser. Il prit une bonne inspiration, et plongea la tête sous l’eau chaude. Il devait être rouge mais, en se redressant, il ne put que lâcher un râle de plaisir.

[Raphaël]
« J’éjacule du style et j’en fous partout »

[David]
Dafuck ?

[Raphaël]
C’est Lomepal qui le dit, et c’est un génie. Pourquoi on n’y a pas pensé avant ?

[David]
On n’y aurait jamais pensé, je te rappelle qu’on a d’autres projets qu’inventer des citations. Genre, un jeu de plateau

[Raphaël]
Mais Vid’da, c’est différent ! On sort tout le temps des phrases rigolotes, mais je pense qu’on devrait les combiner pour en faire un rap !

[David]
Heh, pourquoi pas ? Faudra le noter pour pas oublier

[Raphaël]
Tu pourras le faire pour moi ? Trop la flemme de me lever

[David]
Oui bien sûr, j’ai du papier et un crayon dans la baignoire…

[Raphaël]
Je te baise

[David]
Hein

[Raphaël]
J’ai paniqué parce que j’avais oublié que tu prenais un bain, et je fais actuellement trop de bruit en riant

[David]
XD

[Raphaël]
Bref, je vais essayer de me rendormir

[David]
Je vais sortir du bain aussi je pense

[Raphaël]
Tu rentres quand à Paris ?

[David]
Dans l’après-midi, je t’appellerai quand je serai chez moi

[Raphaël]
T’oublies pas qu’on doit tourner pour la vidéo de Léopold

[David]
Non je n’ai pas oublié ah ah, aller bonne nuit mec

[Raphaël]
Bonne nuit Doudou, je t’aime

[David]
Je t’aime aussi

[Raphaël]
Moi doublement

[David]
Moi à l’infinie

Il attrapa une serviette et l’enroula autour de son corps, après avoir déposé son portable sur le bord du lavabo, faisant mine ne pas avoir entendu le vibreur qui annonçait un énième message de Carlito.

L’air frais frôlait chaque parcelle de sa chaire exposée, et il avait l’impression d’avoir plus froid qu’avant.