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22 | Le retour à l'appartement

            La nuit était tombée. Les étoiles ne brillaient pas. Le ciel était d'un noir profond, et les ombres avaient investi les marécages. J'avais la tête qui tournait et les yeux encore bouffis par les pleurs qui s'étaient déclenchés au cours de ma fuite du bar, quelques heures auparavant. Je me passai la main sur le visage, en chassant de la terre séchée. Je me doutais que j'avais une sacrée allure ; les vêtements recouverts de sang, les yeux fatigués, et le teint blanchâtre strié de restes de boue marronnasse.

           Le retour vers l'appartement serait discret grâce à l'obscurité profonde qui était tombée sur la ville. C'était une chance qu'il fasse nuit, malgré le fait que j'en aie des frissons. Il faisait si froid, et l'atmosphère était étouffante. Le moindre bruit autour de moi me faisait sauter à un mètre de distance, ce qui était stupide, car après tout, Jae était mort et enterré, pas vrai ? Jae ne reviendrait pour moi, c'était un mort, et les morts ne peuvent pas revenir, jamais. Le lieu était effrayant car c'était la nuit, et il  était ridicule d'avoir peur à chaque bruissement dans le secteur ; pourtant, je ne pus m'empêcher de récupérer le poignard pendu à ma ceinture et de le tendre devant moi alors que j'avançais avec difficulté au milieu des marécages.

          Un pas devant l'autre. Régulation de la respiration, détente des muscles. Un autre, puis encore un autre pas. Avancer sans réfléchir, quitter les lieux. Retrouver Dave. Un, deux, trois, dix pas. Quitter les lieux. Quitter les lieux.

            La dernière instruction que je m'étais imposée se répétait en boucle dans mon cerveau. Il fallait que je sorte de là, et vite. J'avais les poumons saturés, je ne supportais plus de respirer l'air vicié de la peur, de la honte et du regret. Je ne supportais plus de respirer ces sentiments à plein nez, parce que je savais pertinemment que ç'avait été les miens et que j'étais la criminelle. Par dessus tout, je ne les supportais plus parce que pourtant, je ne ressentais plus rien.

          J'avais le cerveau envahi de pensées mais les émotions m'avaient désertées. Etait-ce cela, de tuer quelqu'un ? Etait-ce n'être plus capable de rien ressentir si ce n'est l'instinct de survie ? La peur était bien là, elle. La douleur était sans doute présente elle aussi, mais j'avais l'impression d'avoir été remplie d'ouate et de ne pas pouvoir accéder aux sentiments enfouis en dessous du brouillard, bien trop moelleux pour être agréable. J'avais l'impression d'être enfermée à l'intérieur de moi-même, de n'être plus qu'une coquille vide, dont l'âme aurait été jetée derrière des barreaux eux-mêmes délocalisés sur une île déserte à quelques centaines de milliers de kilomètres.

          Je parvenais tout juste à sentir un lien qui me reliait encore à  mes émotions, mais il était si faible que tout ce qu'il parvenait à faire était de créer de la frustration en moi. C'était comme si je tendais la main vers un objectif que je peinais à voir, et qu'à un nanomètre de l'atteindre, mes doigts ne parvenaient pas à toucher la cible. Ce qui était le plus insupportable, c'était la peur, qui persistait. Maintenant que j'avais mis le pied hors des marécages, ce n'était plus ma sécurité qui m'inquiétait. Cette fois, c'était ma santé mentale. Si j'avais été capable de tuer un homme de sang-froid, et si je l'abandonnais désormais sans ressentir autre chose qu'un vague malaise, en quoi étais-je meilleure qu'Ilhan ?

[...]

« Tu vas me rendre dingue, Thalia », balbutia Dave en se passant un main sur le visage. «T'es complètement malade d'être sortie sans me prévenir ! »

             Je ne dis rien, incapable de trouver quoi que ce soit pour ma défense.

« Putain... Thalia, merde, quoi ! C'était pas assez évident  que le danger se trouve partout ? T'as pas vu leurs regards, dans la rue, aux gens ? T'as pas entendu comment les gars dans la faction te méprisaient parce que t'étais une femme ? Etre un homme dehors, c'est dangereux, mais être une femme, c'est risquer sa vie ! Arrête de croire que la Terre est restée ce qu'elle était quand tu es partie, bordel ! Cinq ans, c'est long, crois-moi, et que tu le veuilles ou non, sortir seule c'est plus quelque chose que tu peux faire ! »

             Je sentis la colère quitter peu à peu ses yeux au profit de l'inquiétude. Il s'approcha de moi et me prit le visage entre ses larges mains. Mes yeux étaient secs mais les siens étaient brillants de larmes.

«Thalia, qu'est-ce qui t'est arrivé ? Parle-moi, je t'en supplie, ajouta-t-il, ne recevant pas de réponse. Tu reviens au milieu de la nuit, recouverte de sang, de boue, et refusant d'ouvrir la bouche. S'il te plaît, dis moi ce qui est arrivé. »

           J'avais la bouche sèche et je peinais à formuler des pensées cohérentes. Les vertiges avaient repris. Je sentais qu'il fallait que je prenne une douche froide pour me revigorer. Mes yeux plantés dans ceux de Dave, je soufflai :

« Je peux pas en parler pour l'instant. Je suis désolée, je ne peux vraiment pas... »

           Je vis dans les yeux de mon compagnon qu'il était déçu par réponse, mais il s'efforça de le cacher par un sourire encourageant.

« Quand tu pourras en parler, je serai là pour t'écouter. »

         Je le serrai dans mes bras, trouvant du réconfort dans son étreinte chaleureuse et son odeur désormais familière.

«Tu as besoin d'aide, pour nettoyer tout ça ? » finit-il par demander en désignant mon visage et mes vêtements.

          J'aquiescai lentement.

« Je vais me laver, est-ce que tu pourrais passer un coup d'eau sur mon tee-shirt pendant ce temps s'il te plaît ? Je... peux plus - j'peux plus supporter l'odeur du sang. »

          Il me sourit d'un air désolé, je lui jetai le tee-shirt et il se dirigea vers l'évier de la cuisine pour se mettre à l'ouvrage. A mon tour, je quittai le salon et entrai dans la salle de bains. Elle aussi était exigüe et dégageait une impression misérable. Nous n'avions qu'une petite baignoire qui fonctionnait à l'eau courante, par chance, malgré le fait qu'elle ne soit pas chauffée. L'eau chaude était un luxe que les habitants du quartier ne pouvaient pas se payer.

          Je commençai à me déshabiller, retenant un gémissement lorsque je retirai mon pantalon. La lame avait traversé le tissu de mon pantalon kaki au cours de mon épopée au milieu des marécages. La plaie semblait peu profonde, pourtant, mais la douleur irradiait dans toute ma jambe. Maintenant que l'adrénaline était retombée, de violents tiraillements poignaient dans les muscles de mes bras et jambes ; tout se réveillait à la fois. J'enjambai le rebord de la baignoire avec une grimace et m'immergeai dans l'eau froide, tremblant de tous mes membres, les yeux fermés.

         La fraîcheur de l'eau eut l'effet d'un coup de fouet sur mon organisme. Des décharges électriques remontèrent ma colonne vertébrale et je me redressai, de l'eau dégoulinant de ma chevelure sur mon visage fermé. Le liquide s'était coloré de brun et de vermeil le temps de mon immersion, et des gouttelettes d'eau accrochées sur mes cils dessinaient de larges auréoles bleutées sur ma vision. Mon corps s'habituait doucement à la fraîcheur du bain, qui avait un effet étonnamment lénifiant. Je fermai les yeux et m'endormis.

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