Intégration
Hello !
Me revoilà ! Désolé de ne pas avoir update cette fic pendant longtemps, j'ai été pas mal occupé avec mes romans "Tant qu'il le faudra" et "L'éveil des sorcières" (n'hésitez pas à y jeter un oeil d'ailleurs, si vous aimez mon écriture de fanfic, vous aimerez peut-être mes romans ^^).
En tout cas c'est un plaisir de reprendre cette fic !
Bonne lecture
Note : cet OS prend place après "Séduction"
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Love's a real time suck
It really gets your mind stuck
On things that later on you'll be like why?
Like when's he gonna text?
Or when will I see him next?
Then suddenly the lakes have all gone dry and it's all your fault
Without love
You can save the world, save the world
Clear space in your brain for better things, better things
Without love
You can save the world, save the world
Not being tied to a bed
Can really give you wings
Without Love You Can Save The World – Crazy Ex-Girlfriend
Octobre 844
Il est ridicule. Vraiment ridicule. Et ce foutu cadeau l'est encore plus.
Et pourtant, il frappe à la porte du bureau du capitaine, un petit paquet à la main.
S'il n'est pas dans son bureau, c'est le signe qu'il doit abandonner cette idée ridicule d'offrir un cadeau d'anniversaire à son foutu supérieur.
Et même plus que ça : le supérieur de son supérieur de son supérieur. Un simple soldat comme lui n'a pas à offrir des cadeaux à un capitaine. Même si c'est son anniversaire. Seuls les officiers peuvent se le permettent. À la rigueur, les chefs d'équipe de l'escouade de Blondie. Ils se sont d'ailleurs tous cotisés pour lui offrir un coffret de correspondance contenant des plumes (il ne voit pas l'intérêt d'en avoir plusieurs, mais admettons), du papier de grande qualité, et un sceau avec ses initiales accompagné de tout le nécessaire pour cacheter du courrier.
Il aurait mieux fait de foutre au feu le paquet. Ou mieux : de ne jamais l'acheter. Ce n'est même pas un beau cadeau. Juste... une putain de paire de gants en laine. Gris, moches, probablement pas de grande qualité. Parce qu'il a entendu Blondie se plaindre d'avoir perdu les siens et de ne pas en avoir trouvé à sa taille dans le stock du Bataillon. Parce que bien sûr, Blondie a de telles paluches que la taille standard est trop petite pour lui.
Il est encore temps de faire demi-tour. Et en même temps... Il a envie de le lui donner. En plus, les températures ont drastiquement chuté. Blondie a besoin de gants. Sinon, ses doigts vont geler et il se sera plus capable d'écrire ses longues lettres à l'attention des nobles de la capitale sur son papier de bourge, avec sa plume de bourge et son sceau de bourge. Et à cause de ça, le Bataillon pourrait ne pas récolter les fonds nécessaires pour... la bouffe, les fringues, la paie des soldats. Sa paie à lui. Donc si on y réfléchit, c'est un service qu'il se rend à lui-même. Garder les doigts du capitaine au chaud pour assurer son salaire.
Oui, c'est un calcul. Un cadeau par intérêt, un investissement sur l'avenir. Et ça n'a absolument rien à voir avec son stupide béguin pour cet homme aux mains beaucoup trop grandes. Cet homme avec qui il s'entraîne à la manœuvre en duo depuis dix jours. Cet homme qui occupe maintenant ses fantasmes, malgré toutes ses tentatives pour se le sortir de la tête.
Bordel, dans quel merdier s'est-il encore fourré ?
— Entrez, lance la voix grave du capitaine à travers la porte.
L'espace d'un instant, Levi envisage très sérieusement de prendre la fuite.
Mais se ravise.
Et puis merde, ce n'est pas comme si il se ramenait avec un bouquet de 50 roses rouges. Il a bien le droit d'offrir un cadeau à un... camarade. En plus, Smith lui-même-lui a offert un cadeau il n'y a pas si longtemps. Avec ça, ils seront quitte. Même si, à y réfléchir, il aurait peut-être dû trouver une meilleure idée. Parce que les portraits d'Isabel et Furlan ont bien plus de valeur qu'une paire de gants achetés deux pièces d'argent.
Décidé à en finir le plus vite possible, Levi ouvre enfin la porte et prend soin de la refermer derrière lui. Ce moment promet d'être suffisamment gênant, pas besoin de rajouter du public.
Le capitaine est installé à son bureau, visiblement occupé avec de la paperasse. Levi se demande furtivement si c'est l'une de ses nouvelles plumes qu'il a entre les doigts. Il n'a pas bien fait attention hier, et ce n'est certainement pas parce qu'il était trop accaparé par le sourire du héros de la soirée pour s'intéresser au contenu des paquets qu'il ouvrait.
— Levi ? Si c'est au sujet de ta proposition de faire le grand ménage dans la caserne avant l'hiver, sache que je dois en parler à Shadis à la réunion de demain. Mais si j'étais toi, je ne me ferais pas trop de souci. Il n'y a pas de raison pour que l'idée soit rejetée.
— C'est... bien. Très bien.
Smith sourit. Derrière lui, le soleil du matin perce par la fenêtre. Il illumine ses cheveux dorés. Et Levi en oublierait presque le paquet caché dans son dos.
— Que puis-je faire pour toi ?
C'est le moment. Levi se rapproche du bureau. Son cœur bat beaucoup trop vite et ses joues le brûlent. Putain, il aurait dû préparer son discours. Comment amener ça ? En plus son anniversaire, c'était hier.
— Je... j'étais de repos hier et... enfin je suis allé à Shiganshina avec Kai et...
— Oui, j'ai entendu parler de votre rendez-vous. Je te rassure tout de suite : aucune règle n'interdise les soldats de rang équivalent à se fréquenter. Ce serait autre chose si tu avais... disons jeté ton dévolu sur... Julian qui est ton supérieur hiérarchique, par exemple. Il aurait fallu te changer d'équipe, et peut-être même d'escouade.
En entrant dans le bureau de Smith, Levi avait imaginé plusieurs scénarios. Que Smith refuse son cadeau pour commencer. Qu'il se foute de sa gueule. Qu'il accepte le présent par politesse. Qu'il le remercie avec un sourire éclatant. Mais ça... ça, Levi ne l'attendait pas du tout. Si bien que la seule réponse qui lui vient à l'esprit est un très éloquent :
— Hein ?!
Face à lui, Smith fronce ses énormes sourcils. Est-ce qu'il les brosse le matin pour qu'ils soient toujours aussi parfaitement dessinés ?
— Eh bien... Kai et toi, vous n'êtes pas... ?
— Kai ? Non mais ça va pas ?! Il a douze ans et demi ! s'indigne Levi.
— Dix-sept, rectifie Smith dont les joues commencent à rosir.
— C'est ce que je dis ! C'est un gosse ! Non mais tu me prends pour qui, sérieux ?!
Il ne pense pas avoir un jour vu le capitaine aussi rouge. Du moins, sans qu'il soit ivre. L'homme se racle la gorge.
— Alors pour ma défense... c'est lui-même qui s'est vanté d'avoir rendez-vous avec toi. Cette annonce a d'ailleurs attisé quelques jalousies.
Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? Kai aurait prétendu avoir un genre de... rendez-vous galant avec lui ? Pourquoi faire un truc pareil ? Pour se faire mousser ?
— Non mais il est pas bien, ce gosse ? J'ai juste accepté qu'il me montre ce nouveau salon de thé qui a ouvert en ville et on a...
Oh.
Pris un thé en tête à tête, dans cette charmante boutique qui sentait bon le thé noir et les fleurs séchées. Et après ça, Kai lui avait proposé de lui tenir compagnie pendant ses petites emplettes, et Levi n'avait pas osé refuser. Ça avait l'air de lui faire tellement plaisir. Et il avait promis à Smith de faire des efforts avec ses camarades du Bataillon, d'être plus accessible, en particulier avec les jeunes recrues, d'essayer d'être un mentor.
Maintenant, il comprend mieux pourquoi l'adolescent semblait sur un petit nuage.
— Merde...
Toujours assis à son bureau, Smith se mord les lèvres, sans doute pour ne pas rire. En cet instant, Levi a juste envie de lui jeter son cadeau à la figure (qu'il tient toujours dans son dos) et de partir en claquant la porte si fort qu'on l'entendrait jusque dans les Bas-Fonds.
— Je suis désolé, ce n'est pas drôle mais...
Et c'est parti... Le voilà qui se marre maintenant. Levi aimerait être en colère, parce qu'il déteste qu'on se foute de sa gueule, mais le rire de Blondie est beaucoup trop éclatant pour qu'il parvienne à lui en vouloir. Surtout que le capitaine ne rit pas souvent. Pas assez franchement. Des petits rires, oui bien sûr. Mais des grands éclats de rire, presque jamais. Et pourtant, Levi est parvenu à lui en arracher par deux fois déjà.
— C'est ça, marre-toi... marmonne-t-il en contenant son propre sourire. On voit que c'est pas toi qui vas devoir aller briser le cœur d'un pauvre môme.
Smith essuie ses yeux avec son index. C'est qu'il en pleure, ce con. Levi ne peut s'empêcher de trouver ça adorable.
— Et moi qui t'en parles très sérieusement et ne me doute pas une seconde qu'il y a un truc qui cloche, réalise l'homme en secouant la tête.
— Ouais, on peut se demander qu'est-ce qui est le pire ? Que j'ai pas compris qu'un gosse me draguait ou que tu aies cru que je voulais me le faire...
C'est sorti tout seul. Avant qu'il ait pu réaliser que ce n'était peut-être pas une chose à dire à un officier. Il est définitivement beaucoup trop à l'aise avec Smith. Et en même temps, c'est lui qui laisse Levi le tutoyer sans jamais le reprendre, lui sert des grands discours où il lui explique vouloir être son égal et son allié, et lui parle comme s'ils étaient du même rang. Levi est clairement le seul soldat non gradé à pouvoir s'adresser aussi familièrement au capitaine du Bataillon. Et en même temps, il est le seul à avoir été débauché personnellement par le dit-capitaine. Pas étonnant que leur relation soit tout sauf ordinaire.
— Je pense clairement être le plus en faute, admet l'homme en levant ses paumes en signe d'apaisement.
Au moins, il le reconnait. Levi lui offre un demi-sourire. Il en a complètement oublié la raison initiale de sa venue. Ce qui l'inquiète maintenant, c'est de savoir à qui Kai a bien pu raconter qu'il y avait quelque chose entre eux. Il va vite devoir démentir et clarifier les choses avec l'adolescent s'il ne veut pas que tout le Bataillon le prenne pour un pervers qui profite des jeunes recrues.
On frappe à la porte. C'est Paula qui apporte du thé à Smith. Elle dépose sur le bureau le plateau sur lequel sont disposés une jolie théière en porcelaine blanche à fleurs bleues, avec la tasse, le sucrier et le petit crémier assortis, avant de prendre congés. Levi a toujours rêvé d'un tel service à thé. Il pourrait s'en acheter un maintenant qu'il a l'argent pour et surtout accès aux boutiques de la surface, mais pour quoi faire ? Il ne prend ni sucre, ni lait dans son thé. Une tasse et une théière lui suffisent amplement.
— Bon bah... je vais te laisser, déclare Levi, se sentant de trop.
— Sans me donner ce que tu caches derrière ton dos depuis tout à l'heure ? s'étonne Smith avec un petit sourire. Ça ressemble drôlement à un cadeau. Et compte tenu que c'était mon anniversaire hier...
Grillé... Sentant ses joues chauffer, Levi décide d'en finir. Cette histoire n'a que trop duré.
— Quel esprit de déduction, raille-t-il en s'avançant pour déposer le paquet sur le bureau.
— Qu'est-ce que tu crois ? On ne m'a pas nommé capitaine pour rien. Il y en a là-dedans, renchérit l'homme en tapotant son index contre sa tempe.
Il prend le paquet avec délicatesse. Il est vraiment tout petit dans ses mains, c'est ridicule. Levi aurait dû choisir quelque chose de plus... digne de Smith. Une écharpe par exemple, ou un pull. Le paquet aurait alors été plus gros. Par contre, Levi est content d'avoir choisi ce papier rouge et un ruban doré. C'est un peu joli. Quoi que, à force de le serrer dans ses mains, le papier est tout froissé...
— Merci, Levi.
— Tu sais même pas ce que c'est.
— C'est l'intention qui compte. Et je te remercie d'avoir pensé à moi.
— Si ça se trouve, c'est une botte de radis.
Il ne peut vraiment pas s'empêcher de dire de la merde. Mais c'est la faute de Smith. Avec ses grands sourires, il lui fait perdre ses moyens.
— J'adore les radis.
Smith prend son temps à ouvrir son cadeau. Il défait soigneusement le nœud du ruban, puis déplie le papier sans le déchirer. Debout face au bureau, Levi est en apnée.
Au bout de ce qui lui semble être une éternité, Smith découvre enfin la paire de gants. Ils sont gris foncés, tout ce qu'il y a de plus ordinaire. Mais sur chaque poignet est brodé un petit oiseau blanc. C'est pour ça que Levi a choisi ceux-là en particulier. Parce que les oiseaux lui font penser aux ailes de la liberté. Et donc à Erwin.
Et au sourire qui étire – pour la énième fois – les lèvres de l'homme, Levi comprend qu'il a fait le bon choix.
— Merci, Levi. J'avais justement besoin de nouveaux gants.
— Je sais, c'est pour ça que...
Il ne termine pas sa phrase, Smith a très bien compris. Levi se force à détourner les yeux, mal à l'aise. Au moins, c'est fait. Finalement, ça en valait la peine.
— Mais je t'en prie, prends une chaise. Tu es amateur de thé, si je ne me trompe pas. Il faut que tu goûtes celui-ci. Keith me l'a offert l'an dernier, il est importé d'Utopia. Je crois que c'est mon préféré. Je fais durer la boîte autant que possible, mais j'arrive à la fin.
Alors qu'il s'apprêtait à partir, Levi se retrouve désarçonné par cette soudaine proposition. Mais la meilleure défense reste encore l'attaque.
— Si c'est pour que tu racontes à tout le Bataillon que c'était un rendez-vous, ça ira.
Cette réplique a le mérite d'arracher à l'homme un petit rire.
— Voilà qui me fend le cœur, Levi. Plus sérieusement, assieds-toi.
Même s'il sait pertinemment qu'il devrait refuser, Levi se retrouve à tirer une chaise pendant que Smith lui offre une tasse de thé. Celle-là même qui était posée sur le plateau. Levi fronce les sourcils en voyant l'homme réutiliser la tasse très certainement sale jusqu'alors oubliée sur une pile de dossiers. Il espère simplement qu'elle ne trainait pas ici depuis trop longtemps. Malheureusement vu l'état du bureau de Smith, et le nombre de tasses qu'il peut compter ça et là : deux sur la bibliothèque et une sur le guéridon... Il préfère ne pas y penser.
— Pas de sucre, n'est-ce pas ?
— Jamais, confirme Levi.
Le sucre masque trop le goût du thé. Et c'est une question d'habitude. Hors ce n'est pas dans les Bas-Fonds qu'on trouve du sucre et du lait. C'est déjà suffisamment difficile de se procurer du thé.
Par contre, il sait que Smith prend toujours son thé avec un nuage de lait. Et il n'est pas détrompé.
Putain, si on lui avait dit quand il est entré dans le Bataillon qu'un jour il prendrait le thé avec Blondie sans avoir pour objectif de verser en douce du poison dans sa tasse...
Ce qui est sûr, c'est que le thé est excellent. Le goût est très prononcé. Beaucoup de feuilles ont dû être utilisées. Et peut-être même des épices. Même si aujourd'hui, il peut se payer le luxe de racheter du thé régulièrement, Levi a gardé l'habitude de n'en utiliser que très peu et de le faire infuser plusieurs fois. Jusqu'à ce que le thé soit si léger qu'on ne sent presque plus que le goût de l'eau chaude.
— Verdict ? lui demande Smith
— C'est pas mauvais.
Encore un sourire. Levi baisse les yeux. Qu'est-ce que le capitaine lui veut ? Il n'est pas le genre d'homme à faire quoi que ce soit de désintéressé. Et Levi sait pertinemment qu'il n'est pas la plus agréable des compagnies. Lui, l'enfant du bordel qui ne sait même pas lire. Smith a forcément une idée derrière la tête. Mais laquelle ? Si Levi a toujours été doué pour déchiffrer les intentions des hommes grâce à l'Instinct, Smith reste incompréhensible. Imprévisible. Et donc dangereux.
— Je tenais à te féliciter. Tu as fait beaucoup d'efforts ce mois-ci pour t'intégrer au Bataillon. Julian ne tarie pas d'éloges à ton égard que ce soit sur tes aptitudes physiques ou ton comportement.
Gêné par ces compliments, Levi fixe le contenu de sa tasse.
— Avec Keith, nous commençons à réfléchir aux futurs promotions. Comme tu le sais, nous avons malheureusement perdus de nombreux soldats cette année, y compris des chefs d'équipe ainsi que des officiers. Et avec l'arrivée prochaine de nouvelles recrues, il devient essentiel de former de nouveaux chefs d'équipe. Et je ne te cache pas que...
Comprenant où Smith veut en venir, Levi ne le laisse pas terminer.
— C'est mort, Blondie. Il est hors de question que je sois le chef de qui que ce soit.
— Je pense qu'au contraire, tu serais un excellent leader.
— Je suis arrivé cette année, et tu as des vétérans qui méritent largement de...
— Ce n'est pas une question d'ancienneté, Levi.
— J'ai dit non.
Smith pousse un profond soupir. Levi refuse toujours de relever la tête. Quelle merde. Il aurait dû se préparer à cette éventualité. Mais quand Smith avait parlé de vouloir faire de lui le meilleur soldat de l'Humanité, Levi avait supposé qu'il ne le voulait que pour sa force. Il pensait que l'homme ferait de lui son bras armé. Un bras qu'on commande et qui obéit sans discuter. Et Levi était prêt à devenir cette arme. Mais monter en grade, commander d'autres soldats et être responsables de leur vie comme de leur mort... non, ce n'était pas au programme.
— Promets-moi au moins d'y réfléchir.
Levi préfère ne pas le contredire. Même si c'est tout réfléchi. C'est non. Jamais. De toute manière, il n'a pas les compétences pour. Et plutôt crever que de devoir admettre ne savoir ni lire, ni écrire. Mais même si c'était le cas, sa réponse serait la même. Trop de responsabilités. En plus, il ne saurait même pas comment faire. Il est bien trop stupide. Il est fait pour obéir et se battre, pas pour diriger.
— Elles arrivent quand ? Les nouvelles recrues ?
Il préfère lancer Smith sur un autre sujet.
— Ils choisissent leur corps d'armée fin décembre. Ce qui nous laissera trois à quatre mois pour les préparer avant la prochaine expédition.
— Combien on en récupère en général ?
— J'espère en convaincre une trentaine.
— C'est moins que ce tous ceux qu'on a perdus cette année, s'étonne Levi.
— Je sais. Mais cette année nous avons organisé deux grandes expéditions, ça n'était pas arrivé depuis très longtemps. L'an prochain, il est possible que nous nous contentions de missions plus modestes. Et il faudra attendre la promotion de l'hiver prochain pour préparer une grande expédition. D'ailleurs il est avéré que les années où les pertes sont moins importantes, de nouveaux soldats rejoignent le Bataillon plus volontiers.
— Je vois.
Smith repose sa tasse. Levi sent son regard intense posé sur lui et se force à ne pas relever les yeux. Un silence s'installe. Levi en profite pour boire son thé. Il est vraiment bon. Il en savoure chaque gorgée.
— Ça va aller avec Kai ? demande soudainement Smith.
Ils en ont déjà fini avec les conversations sur le Bataillon ? Et évidemment, Smith se sent le devoir de faire ami-ami. C'est bizarre. Levi n'aime pas ça. Ils ne sont pas amis. Enfin, aux dernières nouvelles.
— Ouais... Je vais me démerder.
— Il faut voir le côté positif, maintenant tu sais quelles sont les règles concernant les relations entre soldats. Ça te servira bien un jour où l'autre.
— Ça, j'en doute...
C'est sorti tout seul. Levi regrette immédiatement d'avoir laissé échapper cette phrase. Il aurait simplement dû hocher la tête et laisser Smith penser ce qu'il voulait.
— Pardonne-moi, j'avais oublié que...
Levi fronce les sourcils. Oublié quoi ? Le capitaine lui ressert d'office du thé et poursuit après un temps d'arrêt.
— Je sais ce que c'est de perdre un amant. C'est le genre de blessure difficile à cicatriser.
Mais quel est le rapport avec lui ? Et le pire, c'est que Blondie continue ses confidences, les yeux perdus dans le vague.
— La dernière... la dernière personne avec qui j'ai été... Elle s'appelait Ronja. Elle était ma subordonnée. Je pensais que j'étais au-dessus des règles et que de toute manière, c'était une règle stupide. Résultat elle... elle est morte pendant une expédition. Alors qu'elle était sous mon commandement. Depuis, je... disons qu'il n'est pas aisé de vivre avec une telle culpabilité.
Furlan. Smith parle de Furlan. Il pense que... Décidé à clarifier les choses, Levi se résigne à confier :
— On n'était pas ensemble. Avec Furlan. Enfin, plus depuis longtemps.
— Vraiment ? Je pensais que...
— Ça n'avait pas marché.
Ça ne marche jamais. Il s'est fait une raison.
— Je suis juste... pas fait pour ces trucs-là. Je suis mieux tout seul, affirme Levi avec autorité.
Il n'a pas envie de s'étendre là-dessus. D'expliquer pourquoi.
— Je comprends. Je suis pareil, déclare Smith en levant ses grands yeux bleus sur lui.
— Ça m'étonnerait...
En presque un an, Levi a vu beaucoup de choses. Même si ce n'est pas arrivé très souvent, il a déjà vu Blondie quitter la taverne, une femme à son bras. Et même un homme, une fois. À l'époque, Levi s'en fichait complètement. Mais y repenser aujourd'hui lui noue l'estomac.
— Tu as de toute évidence des raisons qui t'appartiennent, mais j'ai aussi les miennes. Je suis capitaine maintenant, et je prendrai un jour la suite de Keith. Je ne peux pas me permettre d'entretenir une relation avec un autre membre du bataillon, parce que cela voudrait dire devoir un jour ou l'autre lui ordonner de mourir. Sans compter que cela compromettrait mon aptitude à prendre les bonnes décisions. J'ai déjà fait cette erreur une fois et ça m'a servi de leçon.
Cette explication fait à Levi l'effet d'une gifle. Bien sûr. Qu'est-ce qu'il croyait exactement ? Que Smith était à sa portée ? Qu'il voudrait de quelqu'un comme lui ? Quelqu'un qui n'est même pas capable de baiser ? Évidemment que Smith n'est pas un homme qui se tape ses subordonnés. Enfin, il l'a fait une fois et ça a mal tourné. Et il pensait quoi, qu'il ferait une exception pour lui ?
Il est vraiment pathétique. À toujours chercher son approbation. Essayer de le faire sourire. Accepter de manœuvrer en duo avec lui juste pour qu'il le touche. À aller jusqu'à offrir un putain de cadeau d'anniversaire.
— Rien t'oblige à taper dans le Bataillon, raille Levi avec une indifférence feinte.
— Les autres ne comprennent pas. Ils s'attendent toujours à ce qu'un jour, on quitte le Bataillon pour être avec eux. Alors que les titans et la victoire de l'Humanité seront toujours mes priorités.
Tant mieux. Il peut au moins se consoler avec l'idée que personne n'aura jamais Smith. Non pas qu'il le veuille pour lui tout seul. Peut-être un peu. Ou pas du tout.
Smith a un rire forcé. Il est gêné. Il ne voulait pas se confier ainsi. Et Levi lui-même ne comprend pas pourquoi il lui a raconté tout ça.
— Enfin bref, désolé. Je ne voulais pas... m'épancher comme ça. Mais au moins, il nous reste le... les plaisirs de la chair, pourrait-on dire.
Quelle expression de merde. « Plaisirs », mon œil. On voit bien que Blondie n'est jamais celui qui se la prend.
— Parle pour toi.
— Vraiment ?
— Je déteste ça.
Au moins, c'est dit.
— Je vois.
Ça étonnerait beaucoup Levi que ce soit le cas. Personne ne comprend.
— Parce que... ?
— On va pas avoir cette conversation, capitaine.
— Ne m'appelle pas comme ça, soupire le concerné, agacé.
— Pourtant je devrais.
— C'est vrai, admet l'homme avec un soupir. Mais je préfère tes Blondie.
Levi retient un sourire. Il aime vraiment ce surnom ? Lui aussi. Personne d'autre que lui n'oserait appeler le capitaine ainsi. Ça lui donne l'impression d'être spécial.
— Je me répète, Levi, mais je n'ai pas envie de faire de toi un simple pion sur un échiquier. J'ai besoin de toi comme allié. Je veux que tu sois la reine.
La reine ?! Levi a beau être étranger aux échecs, il a souvent joué aux cartes. Et la reine est l'une des cartes les plus fortes. Derrière le roi. Smith se prend-il pour le roi ? Probablement pas. Le roi, c'est sans doute l'Humanité. Non pas que Levi en ait quelque chose à foutre. Mais Smith, oui, certainement.
— La hiérarchie est ce qu'elle est, et il est vrai que j'apprécierai que tu me donnes du « capitaine Smith » devant les autres, mais en privé, je suis ton égal et non ton supérieur. D'autant plus que nous avons le même âge.
Les yeux de Smith n'ont jamais autant brillé. Si bleus... Tellement bleus... Il en a le cœur qui bat trop vite.
— Et je sais que nous avons eu... des débuts difficiles. Mais j'aimerais aussi que tu me vois comme un ami.
« C'est déjà le cas » voudrait répondre Levi. Il ne peut pas s'en empêcher. Même s'il sait qu'il ne devrait pas. Que c'est un peu trahir la mémoire d'Isabel et Furlan. Mais voilà, Smith est doué pour se faire aimer. Ce n'est pas pour rien que Shadis l'embarque toujours avec lui à la capitale. Il doit être doué pour séduire les nobles et les convaincre à cracher leur argent.
— J'y réfléchirais, répond simplement Levi en se levant.
Il a terminé son thé. Et il a assez parlé pour la semaine. Ça suffit. Et il n'a pas envie que Smith revienne sur le sujet des « plaisirs de la chair ».
— Merci pour le thé.
— Merci pour les gants.
Cette fois, Levi ne peut retenir un petit sourire. C'est plus fort que lui. Il a l'impression d'avoir treize ans. Merde. Il faut que ça s'arrête. Au moins, maintenant il est sûr qu'il ne se passera jamais rien. Parce que tout ce que Smith consent à donner, c'est du sexe. Et que c'est justement ce que Levi est incapable d'offrir.
Alors il s'en va. Laisse Smith à ses dossiers, avec son thé importé d'Il-ne-sait-plus-où. Et les gants qu'il lui a offerts. Quelle idée de merde. Il n'aurait pas dû faire ça. Il faut qu'il arrête. Ils sont amis. Rien de plus. C'est déjà pas mal.
C'est même déjà beaucoup.
*****
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