Nos ennuis ont commencé un Mercredi soir, bien qu'aujourd'hui, avec du recul, je me rende compte qu'ils avaient commencé bien avant.

Assise avec mon mari dans le confort de notre salon, nous regardions une émission quelconque à la télévision, quand tout à coup on a entendu frapper à la porte.

Je me suis tout de suite redressée. Alarmée. Les raisons en étaient simples.

Tout d'abord, il était déjà plus de vingt-deux heures. Un peu tard pour rendre visite à quelqu'un. Ensuite, les coups avaient été frappés avec force. En d'autres termes, la personne de l'autre côté de la porte n'en avait rien à faire des règles les plus élémentaires de courtoisie.

Mon regard a glissé vers mon mari. Il semblait tout aussi interloqué :

—Qui peut bien venir nous déranger à une heure pareille ?

Juste au moment où je m'apprêtais à lui répondre, une voix rauque, venant de l'extérieur, l'a fait à ma place :

—Police ! Ouvrez ! Si vous ne le faites pas, nous serons obligés de défoncer la porte.

Cette fois-ci, plus besoin de le nier : j'étais terrifiée.

Je me suis levée tout doucement et me suis dirigée vers la porte d'entrée, à moitié consciente de ce que je faisais. C'était un peu comme si j'avais quitté mon corps et que ce dernier agissait de lui-même.

J'ai ouvert.

Deux hommes se tenaient debout devant moi. L'un, brun avec un physique de déménageur, l'autre, blond, plus frêle. Les deux policiers m'observaient sans aménité.

—Mme Johnson ? a dit le brun.

—Oui, c'est moi, ai-je répondu dans un souffle.

—Votre mari est là ?

J'ai honte de le dire, mais à cet instant je n'ai pas pu m'empêcher d'être un peu soulagée. J'étais convaincue qu'ils étaient là pour moi.

Je me suis retournée vers mon mari.

Ce dernier, ayant entendu notre échange, est venu nous rejoindre, toujours avec cet air alarmé.

—Je suis Albert Johnson. En quoi puis-je vous aider ?

—J'ai, monsieur, un mandat d'arrestation vous concernant, a poursuivi le flic brun. Vous êtes accusé d'avoir, le 19 Décembre dernier, agressé sexuellement Emily Powell, une fillette de dix ans, avant de la tuer. Il est de mon devoir de vous prévenir que tout ce que vous pourrez dire désormais pourra être et sera utilisé contre vous au procès.

J'étais sans voix. C'était tout simplement impossible. Il devait s'agir d'une erreur ou alors d'une plaisanterie de très mauvais goût. Ou peut-être était-ce un cauchemar.... Et dans ce cas, je n'allais sûrement pas tarder à me réveiller...

Non, ce n'était pas mon Albert à qui ces deux flics venaient de passer les menottes et qu'ils emmenaient maintenant dans leur voiture. Ce n'était pas lui non plus qui, la mine sombre, m'a demandé d'appeler son avocat...

Pourtant, au fur et à mesure que leur voiture s'éloignait avec un bruit sonore, j'ai dû me rendre à l'évidence.

C'était bien mon mari qui venait d'être arrêté.

Et c'était bien lui qui, pas une seule fois depuis qu'on l'avait emmené, n'avait proclamé son innocence.