Ne te fie jamais aux apparences.

Des larmes peuvent se cacher derrière les plus beaux sourires.

POINT DE VUE DE JUNGKOOK :

1 an plus tard...

Nous sommes installés dans un parc, le soleil caressant nos visages de ses rayons lumineux. Le temps s'adoucit enfin, et bien que la chaleur soit parfois étouffante, elle nous redonne de l'énergie. La ville reprend vie, animée par ce retour de la belle saison.

Hoseok et moi sommes allongés sur l'herbe, grignotant des chips en savourant ce moment de détente. S'il y a bien une chose à laquelle je me suis vite habitué, c'est la nourriture. La variété, les saveurs... tout est exquis, un véritable plaisir pour les sens.

— Taehyung est encore à la bourre, c'est pas croyable, râle Hoseok, une pointe d'agacement dans la voix.

Je ris, bien incapable de nier ses propos. L'année dernière, nous lui avons offert une montre pour son anniversaire, pensant résoudre le problème, mais il semble plus lui servir d'accessoire de mode que d'outil pour gérer son temps.

Malgré tout, Taehyung va mieux. Chaque jour, son sourire s'élargit un peu plus. Nous vivons tous les trois en colocation et, même si Hoseok a rechigné à l'idée que Taehyung s'installe dans ce qui était son dressing, nous sommes heureux d'être ensemble. C'est comme si nous formions une petite famille. Nous apprenons à nous apprivoiser les uns les autres, à cohabiter malgré les disputes, les crises de larmes, et les éclats de voix. Mais surtout, nous sommes là les uns pour les autres. Ce sentiment de soutien mutuel, le fait de ne pas se sentir seul, est quelque chose d'incroyable.

J'ai l'impression d'avoir enfin trouvé ma place.

Chacun de nous a beaucoup évolué cette dernière année. Hoseok s'apprête à entrer en deuxième année de master en droit et file le parfait amour avec Léna depuis plus d'un an. Taehyung, quant à lui, s'épanouit de jour en jour. Depuis son retour, il travaille comme serveur dans un bar, prenant le temps de réfléchir à sa vie et de se reconstruire. Il a développé une passion pour la photographie, capturant chaque instant avec son appareil. Je suis persuadé qu'il voudra en faire quelque chose de plus sérieux à l'avenir, il en parle de plus en plus. Il est toujours suivi par un psychologue, mais son traitement médicamenteux est en train de diminuer, signe que les choses s'améliorent.

De mon côté, je suis toujours également suivi, en plus de mes séances régulières de boxe. Cela m'aide à canaliser mes émotions, à apaiser les angoisses qui me tenaillent encore. C'est une véritable libération pour moi.

Taehyung n'a pas eu une année facile, d'autant plus que ses parents ne lui ont apporté aucun soutien. Il a perdu son procès contre eux, ce qui n'était pas vraiment une surprise, étant donné le manque de preuves et le fait que son père soit un avocat réputé dans le milieu. La justice n'est pas toujours juste, il le savait, mais franchir ce cap était ce qui comptait le plus, comme une page qui se devait d'être tourné. Aujourd'hui, Taehyung a coupé les ponts avec eux, une décision douloureuse mais nécessaire. Ses parents sont toxiques, et il sait au fond de lui que c'est mieux ainsi.

Pour ce qui est des miens, ils continuent d'être ce qu'ils ont toujours été pour moi : inexistants. Petit à petit, je commence à oublier leurs visages, puis, progressivement, leurs stigmates ne sont plus que des cicatrices qui recouvrent mon corps et mon cœur. Mon passé ne peut être effacé, supprimé de ma mémoire, mais je peux choisir s'il doit me contrôler ou bien en tirer une force qui me permettrait de déplacer des montagnes.

Après vingt minutes de retard, Taehyung arrive enfin, un grand sourire illuminant son visage. Il porte une chemise rouge qui s'accorde parfaitement avec sa chevelure flamboyante, mettant en valeur ses courbes que je ne peux m'empêcher de suivre du regard. Cela fait un petit temps que j'ai réalisé pourquoi mon corps réagit si violemment à sa présence. Il me plaît, sur tous les plans. Et je crois que ça a toujours été le cas, même si je n'arrivais pas à mettre des mots dessus.

Ice, qui s'amusait à courir autour de nous, s'excite à l'arrivée de Taehyung, lui faisant une fête endiablée. Il s'est attaché à lui, et l'affection est réciproque. Taehyung le cajole pendant une minute, puis s'assoit à côté de nous, Ice posant son museau sur ses jambes découvertes, simplement vêtues d'un short en jean.

Je tente de ne pas fixer cette peau mise à nue, mais c'est difficile. Hoseok dit que c'est à cause des hormones, mais elles me rendent dingue, car je lutte constamment contre l'envie d'y céder.

— Salut, les gars ! Faut que je vous annonce un truc, s'exclame-t-il en brandissant une enveloppe que je n'avais pas remarquée.

— Vas-y, balance, rétorque Hoseok, curieux.

— Mes photos ont été remarquées par un photographe, et il souhaite me prendre en tant que stagiaire pour m'apprendre le métier. Et si ça se passe bien, je pourrais même exposer dans sa galerie.

— Putain, félicitations, m'écrié-je en même temps que Hoseok, avant que nous ne lui sautions littéralement dessus, riant de notre enthousiasme.

— Je suis tellement heureux pour toi, flocon, lui chuchoté-je à l'oreille, et je sens son corps frissonner sous le mien.

La sonnerie d'un téléphone interrompt notre moment, et Hoseok se lève, lançant un regard d'excuse.

— Désolé, c'est Léna, dit-il simplement en s'éloignant pour répondre.

Une fois seuls, Taehyung et moi nous allongeons sur le dos, côte à côte. Sans un mot, je glisse ma main dans la sienne. Nos regards se croisent, et je vois dans ses pupilles le feu que j'aime tant, celui d'un guerrier blessé, mais qui n'abandonne jamais, qui se relève toujours.

— Nous avons fait du chemin, murmure-t-il en se tournant vers moi.

Je me relève sur un coude, face à lui, répondant doucement :

— Oui, et nous pouvons en être fiers. Tu as enfin laissé tomber le droit pour faire ce qui te passionne vraiment, ce qui te fait vibrer. Et ça se voit, tu rayonnes.

Sa main effleure ma joue avec une douceur infinie, et je ferme les yeux, savourant ce contact. Ces dernières semaines, notre proximité s'est intensifiée, mais je ne m'en plains pas. Bien au contraire.

— Toi aussi, tu as beaucoup évolué. Tu t'ouvres au monde, tu tentes de te sociabiliser, même si je vois bien à quel point ça te coûte.

J'ouvre les yeux, il a raison. J'essaie d'être plus à l'aise en société, mais en dehors de lui et de Hoseok, j'ai encore du mal. Pourtant, chaque jour est une petite victoire. Je commence même à sortir une fois par semaine avec mes collègues du supermarché où je travaille, bien que désormais, je sois à la caisse. En parallèle, je continue ma remise à niveau, et si tout se passe bien, je compte intégrer une faculté de lettres l'année prochaine. J'ai rencontré mes futurs professeurs et, bien que mon parcours soit atypique, ils sont prêts à m'accepter. J'ai dû leur raconter mon histoire afin de justifier mon parcours scolaire inexistant, mais surtout mon absence de diplôme. Ils ont été surpris, voire choqués, mais aussi touchés par ma détermination et mon souhait de prendre une certaine revanche sur la vie. Pour intégrer l'école et afin de mériter ma place, ils m'ont défié d'écrire mon histoire, de la relater sous la forme que je désire, et je sais que ça a à la fois un but thérapeutique, en plus de leur permettre d'évaluer mon niveau.

Ce n'est qu'une ébauche, mais INHUMAIN est en train de doucement prendre forme...

— Je suis tellement heureux de t'avoir rencontré, Taehyung, dis-je en plantant mon regard dans le sien. Tu m'as sauvé la vie.

Il me sourit tendrement, posant son front contre le mien. Mon cœur s'emballe, et ma respiration s'accélère, comme à chaque fois qu'il est un peu trop proche de moi.

— Moi aussi, Jungkook. Non seulement tu m'as littéralement sauvé la vie, mais tu m'as aussi appris à accepter ce que je ressens, à être pleinement moi-même, avec mes qualités et mes défauts. C'est la plus belle chose qu'on ait faite pour moi.

Je ne peux plus résister, je capture ses lèvres dans un baiser, d'abord doux, mais qui ne tarde pas à s'intensifier. Tout mon corps frissonne, et je ressens une chaleur agréable envahir chaque fibre de mon être. Lorsque je réalise qu'il ne me repousse pas, je glisse ma main sur ses hanches pour le rapprocher de moi. Le baiser s'approfondit, et je tremble presque sous l'émotion qui m'envahit, celle que j'ai refoulée pendant si longtemps.

Il recule légèrement, juste assez pour murmurer contre ma bouche :

— Merci d'avoir été patient, d'avoir attendu. J'avais besoin de me retrouver d'abord.

— Taehyung, je n'aurais pas pu faire autrement. Nous étions faits pour en arriver là, on s'est rencontrés pour ça.

— Pour quoi, au juste ? rit-il.

— Pour apprendre, expérimenter, évoluer.

Il plonge son regard dans le mien, son expression pleine de sincérité.

— Je crois que je t'aime, Jungkook. Depuis longtemps déjà.

Je reste sans voix, ces mots me transpercent le cœur. C'est la première fois que je les entends, c'est la première fois que l'on m'aime. Ces mots ne m'ont jamais été destinés, on m'avait souvent fait miroiter que l'amour était possible, qu'il existait pour chacun, mais au fond de moi, j'avais toujours cru que je n'y aurais jamais droit. Ce sentiment, si intense et pur, m'avait toujours semblé hors de portée, comme un rêve inaccessible réservé aux autres.

Et pourtant, voilà que ces paroles prennent vie, résonnent dans l'air entre nous, m'enveloppant d'une chaleur nouvelle, d'un espoir que je n'osais plus nourrir.

Je me rends compte que tout ce que j'ai vécu, toutes les douleurs et les désillusions, m'ont conduit à cet instant précis.

— Moi aussi, flocon. Si tu savais...

Je l'embrasse à nouveau, plus intensément cette fois.

— Putain, il était temps ! s'exclame soudainement Hoseok en revenant vers nous. Par contre, ne faites pas trop de galipettes, je tiens à dormir la nuit !

Et nous rions tous ensemble, heureux.

Ice à mes pieds, Hoseok à mes côtés et Taehyung dans mes bras, je prends conscience de la chance que j'ai. Ce dernier m'a offert la plus belle chose qui puisse exister : la liberté. Enfin, je ne ressens plus ce vide, ce néant qui m'habitait sans cesse, évitant la chute inévitable vers laquelle je m'enfonçais toujours un peu plus. Taehyung m'a appris à vivre, à prendre un nouveau départ, à recommencer, à ne plus rester les bras ballants, sonné, face à mon passé, face à mes cicatrices. Depuis son retour, nous avons tissé un lien et approfondi notre relation par l'amitié. Nous avons échangé, partagé, malgré certaines tensions, tantôt sexuelles, tantôt conflictuelles, et j'ai appris à lui faire pleinement confiance. Ça n'a pas été facile, il s'est montré instable et irréfléchi parfois. Nos angoisses n'étaient jamais très loin et régissaient encore nos vies, mais nous étions là l'un pour l'autre, malgré tout, envers et contre tous. Avant lui, j'étais un être meurtri, blessé, abandonné, mais il a finalement su faire preuve de miséricorde et d'indulgence avec moi. Il m'a pris tout entier, même qu'il sait ce que j'ai fait, que je suis un meurtrier, un monstre. Ma misanthropie est partie en fumée à chacun de ses sourires, chacune de ses larmes, chacun de ses gestes.

Je ne pourrai jamais résister à Kim Taehyung.

J'ai longtemps pensé que l'Homme était incapable de surpasser ses démons, qu'il était irrémédiablement corrompu jusqu'à la moelle. J'ai été victime de ses pires vices : la colère, la perversion, la perfidie, la cruauté. Ces expériences ont forgé en moi une vision sombre, presque désespérée, de la nature humaine. Pendant longtemps, j'ai cru que le mal était inhérent à notre condition, une tare que l'on ne pouvait ni éviter ni expier.

Mais avec le temps, j'ai compris que retirer le bénéfice du doute à chaque être que nous croisons est une manière simpliste et trompeuse de se protéger. C'est un voilement de façade, une manière de se convaincre que tous sont pareils, pour éviter de revivre la douleur. Mon passé, avec tout son poids de souffrance, me suivra toute ma vie. J'essaierai de faire le deuil de ces blessures, de ces cicatrices qui marquent mon âme, mais je sais que je ne pourrai jamais les oublier complètement. Elles font partie de moi, de mon histoire, et ont façonné la personne que je suis devenue.

Cependant, ce que je réalise seulement maintenant, c'est que faire preuve d'humanité ne se résume pas à partager un patrimoine génétique ou à appartenir à une même espèce. L'humanité, la véritable humanité, réside dans notre capacité à choisir, à lutter pour le bien malgré tout ce qui nous pousse vers le mal.

L'humain et l'inhumain sont en réalité les deux faces d'une même pièce, les deux parties d'une seule et même personne. Chaque être humain porte en lui cette dualité, cette lutte intérieure qui ne cesse jamais vraiment. C'est une bataille éternelle, où l'on doit sans cesse choisir de quel côté faire pencher la balance. Accepter cette lutte, reconnaître qu'elle fait partie de notre nature, c'est le premier pas vers la véritable humanité. C'est comprendre que même si l'inhumain est présent en chacun de nous, il ne définit pas ce que nous sommes. Ce qui nous définit, c'est la manière dont nous choisissons de vivre avec cette dualité, de combattre nos démons, et d'avancer malgré eux.

Sommes-nous pas tous bons et mauvais à la fois ?

Humains et inhumains ?

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NOTE DE L'AUTEURE :

C'est dur de poster ce dernier chapitre, j'ai un petit pincement au cœur...

Qu'avez-vous pensé de cette fin ? Vous convient-elle ?

Je n'épilogue pas trop ici, on se retrouve tout de suite dans le prochain segment dédié aux remerciements ;)

Era xx