Chapitre 5 - Entrer dans la meute
Plus les jours passèrent, plus je me sentais épanouie. Frédéric, qui insistait pour que je l'appelle par son prénom, veillait sur mes transformations comme un père, et m'encourageait sans cesse à continuer l'acceptation de ma part animale. Cela faisait une semaine et demie déjà que ne m'était plus transformée contre mon gré, et ma mère s'étonnait de ne plus me voir partir la nuit. Toutefois, je ne lui disais rien, ayant trop peur de retourner en arrière en cas d'erreur. Je voulais la rendre fière de moi, et il m'était impossible de la décevoir à nouveau... Mais sa mine ravie en me voyant dévorer ses repas ne me trompait pas : elle savait que j'allais mieux et comptait en profiter.
En effet, nous enchaînions les sorties mère-fille, dans les magasins, au cinéma, en promenade dans le quartier. En plus de contribuer au bon fonctionnement de notre relation, ces sorties me permettaient de travailler sur un point important du contrôle de ma part animale : le contrôle des émotions. Le flot incessant de gens et les sentiments qu'ils provoquaient en moi m'entraînaient à canaliser mes sentiments. Depuis toujours, la peur de la foule m'avait éloigné des espaces publics, et je devais y ajouter maintenant la peur de me transformer de manière incontrôlée en cas de panique. Heureusement, j'avais deux personnes pour m'aider à contrôler mes peurs : ma mère et Frédéric.
Ce fut d'ailleurs avec lui que j'avais cours ce jour-là, sur ce fameux contrôle des émotions. Le père de famille, sachant que j'apprenais déjà à contrôler la peur, souhaitait m'entraîner à contrôler la colère, qui était également une des émotions susceptibles de me forcer à me transformer. Etant donné que je souhaitais commencer à travailler aussitôt que possible, n'ayant pas pu m'inscrire pour cette année-là en école supérieure à cause de ma transformation, il était primordial pour moi de savoir me gérer en toute circonstance.
C'est ainsi que je me retrouvais face à un homme-ours rouge de colère, qui me hurlait des atrocités dessus depuis un bon moment, tentant de me faire réagir. J'encaissais toutes les insultes, les phrases provocatrices, ignorant la colère qui montait en moi, jusqu'à la phrase de trop :
- Ton père serait déçu de voir ce que tu es devenue.
Il n'en fallut pas plus, dans un hurlement de colère, je me jetais sur lui, prêt à lui faire ravaler ses paroles, et le détruire physiquement. Je ne m'attendais pas à me faire balayer sur le côté comme un vulgaire moucheron, et la chute entraîna dans mon être, encore un peu plus de rage qu'au début. Douloureusement, la bête voulu sortir pour me défendre et alors que mes dents commençaient à devenir de plus en plus pointues dans ma bouche, Frédéric arriva auprès de moi. Une fois accroupi, il comprit qu'il ne devait pas me toucher et dit simplement :
- Bravo Emilia, je m'attendais à ce que tu te transforme à cette phrase-là, mais je ne pensais pas que tu arriverais à utiliser ta force animale sans même te transformer. N'oublie pas, les personnes qui t'insulteront ne savent pour la plupart, rien de toi. Leur seule intention est de te blesser, ne les laisse pas réussir. Puis s'ils vont trop loin, pète-leur la gueule.
J'éclatais de rire, surprise par ces propos. Il m'adressa un sourire et m'indiqua que le repas était servi. En effet, je sentais déjà au loin l'odeur d'un bon nombre de grillades que Carmen faisait cuire. Il m'arrivait souvent de manger chez eux le midi, et je m'étais attachée au couple, ainsi qu'à leurs deux enfants, Esteban et Louise, qui agrémentaient les repas de leurs pitreries et de leurs éclats de rire. Durant ces repas, Frédéric me parlait de la meute, sa meute et de son fonctionnement.
S'il en était le chef, chacun des quinze métamorphes qui la composaient avaient le droit de donner leur avis sur toutes les décisions qu'il prenait. Bien que je ne les aie encore jamais rencontrés car j'étais encore en phase d'apprentissage, Frédéric me parlait d'eux comme un groupe très soudé, et si jamais je rejoignais leurs rangs, j'avais peur de ne pas m'y intégrer.
On m'avait enseigné, que les métamorphes qui restaient seuls sombraient dans la folie, car ils vivaient sans but dans leur existence et sans l'amour qu'apporte une meute. J'avais peur de finir comme ces métamorphes solitaires dont on me peignait le portrait et m'imposais un rythme effréné dans mon apprentissage pour pouvoir rentrer dans la meute le plus tôt possible.
Sur le chemin, alors que j'étais perdue dans mes pensées, n'entendant pas les rires et les discussions animées ayant lieu dans la maison du chef de meute, Frédéric me demanda :
- Alors petite, prête à rencontrer la meute ?
Il n'en fallait pas plus pour me réveiller, je me redressais sur mes jambes, les sens en alertes :
- La... la meute ? Maintenant ? Là, ce midi ?
- Oui Emilia, ce midi. On a décidé que le moment de te faire rencontrer tout le monde pour commencer les missions était arrivé. Le repas de ce midi va être une bonne occasion pour toi de nouer des liens.
- Mais je ne suis pas prête !
- Bien sûr que tu es prête Emilia, je sais que tu as travaillé dur jusqu'ici pour faciliter ton insertion.
- Mais je ne connais personne !
- Tu commences toute tes phrases par un "mais" ? Allez, tu es courageuse non ? Bouge tes fesses, tout le monde t'attend !
Dire que tout le monde m'attendais n'étais pas un grand mot, non, une fois à l'orée de la forêt, tous les visages semblaient tournés vers moi et le chef de meute, qui semblait visiblement très heureux de voir tous les membres de son groupe ainsi réunis. Tétanisée par la peur de ce trop grand nombre de gens, je plaquais un sourire sur mon visage et avançais doucement, prête à faire demi-tour à la moindre personne qui s'approcherait un peu trop près de moi. Je laissais tout de même Carmen me prendre dans ses bras, pour lui chuchoter :
- Je suis terrorisée.
- Je sais, tu sens la peur à plein nez. Respire, si Frédéric a accepté de te faire rentrer dans la meute, c'est qu'il sait que tout se passera bien.
Vint ensuite une présentation rapide de chacun des membres, si bien que je ne retenu les noms uniquement de Sébastien et Olivier, les deux autres ours présents avec Frédéric l'autre soir, et aussi Anna et Tom qui semblaient être les deux seuls métamorphes de mon âge.
Le repas fut animé, et mon appréhension tomba bien vite quand je me rendis compte que toutes les personnes présentes étaient sincèrement contentes de me rencontrer. On aurait dit les retrouvailles d'une très grande famille dont les valeurs principales étaient l'amour et le partage. Ce tableau me semblait si idyllique que j'eus peur que tout cela ne soit qu'une façade. Ma peur grandit lorsque Sébastien prit la parole, alors que la conversation avait dérivée sur les problèmes que traversaient la meute :
- Frédéric, notre dernière patrouille nous a fait découvrir que les chasseurs en ville posaient des pièges un peu partout dans la forêt. Des pièges pour les métamorphes.
- Comment ça ? tonna le chef. Nous avions conclu un accord !
- D'autres les ont rejoints, venant du Nord du pays. Là-bas, un sorcier a fait des siennes et a entraîné deux métamorphes avec lui.
- Les sorciers existent ? Des chasseurs ? Mais des chasseurs, ça n'attaque que les animaux sauvages, non ?
- Emilia, ces chasseurs-là ne tuent pas les animaux. Ils tuent les créatures surnaturelles, comme les vampires, les métamorphes, et les sorciers.
- Les vampires existent ? Pourquoi tu ne m'as jamais parlé des autres créatures qui vivent parmi nous ?
- Tant que tu n'es pas encore reliée à la meute, l'objectif est de contrôler ta nature. Mais ne t'inquiètes pas, nous t'enseigneront tout ce que tu as à savoir, et nous allons accélérer ton entrée parmi nous. Ce soir, avec Tom, vous partirez faire le tour de notre territoire pour y cartographier les différents pièges. Ne vous transformez que si nécessaire. Si vous voyez les chasseurs, ne leur montrez pas votre visage, et partez sans vous faire suivre. En attendant, personne ne sort dans la forêt jusqu'à demain, c'est clair ?
Tout le monde acquiesça, et les chuchotements d'inquiétude commencèrent. Pourtant, chacun des membres arrivèrent à se rassurer les uns les autres, se disant que leur interdiction ne durerait qu'une journée.
Le reste du repas continua comme il avait commencé, dans la joie et le partage. Le dénommé Tom, avec qui je devrais surveiller le territoire ce soir, me fixait avec insistance, comme s'il cherchait à connaître mes intentions. Ses yeux bruns effilés semblaient essayer de savoir s'il me laisserait entrer dans sa meute ou non.
Je pense que la soirée prochaine sera décisive...
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NDA !
Tout d'abord, une bonne année à tous, qu'elle vous soit pleine de bonheur !
Ensuite, merci à tous de suivre mon histoire, tous vos votes me font chaud au coeur, et m'encouragent à continuer l'écriture.
Je m'excuse par avance du temps que je mettrais entre chaque chapitre, le boulot à l'école me submerge un peu, plus que je ne l'aurais imaginé.
Toutefois, je m'engage à poster le plus régulièrement possible, pour que vous puissiez suivre les aventures d'Emilia sans trop de mal !
Bonne soirée à vous ! ♥
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