Chapitre 78
J'aurais pensé que passer quelques heures, les larmes finissent par s'arrêter d'elles-mêmes de couler.
Ce n'est pas le cas.
J'aurais pensé qu'au bout d'un moment, on s'endort d'épuisement.
Ce n'est pas le cas.
Elles coulent encore et moi, je ne dors pas.
Mon téléphone serré à m'en faire mal dans une main. Les yeux rivés sur la télévision dans l'attente de nouvelles qui ne viennent pas.
Mes parents n'ont pas trouvé le sommeil non plus. Ils ont tenté de me raisonner quand même. Il n'y avait pas qu'un avion en partance pour les USA cette nuit. Je ne sais même pas dans quelle ville il devait aller.
Oui, mais...
Mais il ne répond pas à mes appels. Clarenz non plus ne répond pas à mes appels. Depuis des heures, c'est silence radio.
Combien de temps dure un vol jusque là-bas ? 13 heures ?
Interminable.
S'il est toujours là-haut, quelque part... en sécurité dans son avion... il ne me répondra pas avant encore au moins quatre heures.
Interminable.
Insupportable.
Les larmes roulent encore. Nombreuses. Piquantes.
Mécaniquement, j'appelle encore. Rien du côté de Cléandre. Rien du côté de Clarenz. Ava ? Ava... je n'ai pas son numéro.
Il faudrait que j'appelle Jared.
Mais Jared n'est au courant de rien. Jared dort tranquillement chez lui.
Je l'appellerai... plus tard. Dans la journée. Plus tard.
Un énième flash info apparaît à l'écran, toujours sans aucune nouveauté.
C'est désespérant.
De rage, je jette mon téléphone à travers la pièce. Je crois que le cri rauque vient de moi. De ma gorge. Elle me fait mal, un peu. Beaucoup. Autant que mon cœur.
Oh bon sang, comment une douleur pareille est-elle possible ?
Cette souffrance... cette angoisse... non, cette terreur !
Calme-toi, Nath, calme-toi. Attends plus d'informations.
Je me lève pour ramasser mon smartphone, et reprends ma place sur le canapé. Devant la télé. L'appareil de nouveau serré dans ma main. Dans l'autre main, cette fois.
Du mouvement dans mon champ de vision. C'est mon père. Il vient éteindre la télé. S'assoit auprès de moi. Il me parle, mais je n'entends rien. Je continue de fixer l'écran en face de moi alors même que plus rien ne s'y affiche.
Ma mère m'apporte un thé où je ne fais que tremper les lèvres.
Ils m'entourent. Tentent de me rassurer alors qu'ils ne le sont pas eux-mêmes. Ma mère en particulier tremblote. Ses yeux sont aussi rouges que les miens.
Elle adorait Cléandre, il faut dire... non. Ne parle pas au passé. Elle l'adore encore.
Il est là, quelque part.
IL LE FAUT !
Nous tenons une heure avant que ma mère ne craque et ne remette mes informations. Elle reste à mes côtés à chaque nouveau flash. Se tend de plus en plus.
Et enfin, à la fin d'un flash, un journaliste annonce que la liste des passagers du vol a été rendue publique. Qu'on peut la consulter en ligne. Que les familles ont été prévenues.
Il ne m'en faut pas plus pour déverrouiller mon téléphone, fébrile.
Navigateur.
Adresse du site.
Faire défiler jusqu'au bon endroit.
Tapoter sur le lien qui mène à la liste.
La faire défiler avec l'impression d'exploser.
Je vois flou.
Mes mains sont moites.
Mon dos poisseux.
Ma poitrine se comprime, se compresse, m'écrase.
La tête me tourne.
Je continue.
Et soudain, je le vois.
Là.
Entre deux noms inconnus.
Terrasève Cléandre.
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