19 - Le motel
Ziggy fixa d'un air songeur son reflet dans l'écran noir de son nouveau téléphone portable. Il venait tout juste de sortir de la boutique, après avoir écouté attentivement le vendeur, qui lui avait expliqué quel était celui qui faisait de meilleures photos ou lequel avait le plus de mémoire. Ziggy avait finit par choisir celui qui avait la meilleure qualité de photos et acheta une carte SD à part. Le vendeur lui offrit une paire d'écouteur avec ses achats et il le remercia.
Dehors, Kayden était accroupi devant la devanture, attendant sagement Ziggy. Lorsqu'il le remarqua, le Normal fronça les sourcils.
« Qu'est-ce que vous faites par terre ?
— Bah je t'attends, pourquoi ?
Ziggy songea à lui dire qu'il pouvait l'attendre debout, mais rien que l'idée de cette conversation avec Kayden l'épuisa. Il se contenta de secouer la tête.
— Je vais devoir aller faire un tour au poste, déclara Ziggy, déjà pour leur dire que je suis en vie, et ensuite pour leur dire tout ce qu'il m'arrive.
Kayden marqua un temps.
— Que tu te fais sucer par un Super ?
Ziggy eut un hoquet de surprise et il donna un coup à l'épaule de Kayden par réflexe. Le Super ricana avant de se redresser.
— Pour des raisons évidentes, je ne vais pas t'accompagner là-bas. Est-ce qu'on peut se retrouver quelque part ?
— Vous êtes sûr de vouloir venir avec moi ? Même si vous êtes un Super, vous restez un civil.
Kayden haussa les épaules.
— J'ai toujours voulu voir la plage.
Le Super se tourna vers Ziggy, le regardant dans les yeux.
— Et rendre ma sœur jalouse. Elle va me détester, ça en sera jouissif ! Mais moins qu'avec toi, t'inquiète pas.
Ziggy se contenta de soupirer.
— Je n'en aurai pas pour très longtemps, se contenta-t-il de dire, nous n'aurons qu'à nous retrouvez à la frontière entre le quartier Normal et Super, cela vous convient ?
— Ouais, carrément. À toute ! »
Le Normal lui adressa un faible sourire et ils se tournèrent le dos, chacun partant de son côté. Ziggy prit sur lui et marcha lentement en direction du poste, pour épargner sa jambe.
Après une longue marche, il arriva devant les portes. Lorsqu'il les passa, il eut un élan de soulagement. Rien n'avait changé sur son lieu de travail. À peine eut-il le temps d'arriver à son bureau qu'un de ses collègues le reconnu et poussa un cri de surprise.
« Ziggy ! cria-t-il pour attirer son attention.
Le policier lui sourit du mieux qu'il le put et accepta son accolade.
— Désolé de ne pas vous avoir prévenu de moi-même, j'ai été un peu dans les vapes.
— La nana de l'hôpital m'a dit que tu avais des broches en fer dans la main.
— Oui, et je vais devoir faire de la rééducation pour ma jambe en plus. Et Nishani...
Ziggy n'eut pas le courage de terminer sa phrase.
— Ouais, c'est chaud, répondit son collègue, le regard fuyant, ses obsèques sont prévues samedi qui arrive, dans l'après-midi. Même si tu es en repos, il faudrait que tu sois là.
— Je me doute bien. J'ai aussi un nouveau téléphone, l'ancien s'est fait transpercé pendant l'émeute.
— Oh, merde !
— Apparemment, ça m'a évité de mourir, donc c'est plutôt cool. Enfin bref, je te passe mon nouveau numéro, tu n'as qu'à m'envoyer un message, ça ira plus vite.
— Oh... C'est plutôt cool, alors. Tu veux sortir boire un verre ce soir ?
Par réflexe, Ziggy faillit accepter, avant de se souvenir que Kayden l'attendait certainement. Il sourit poliment à son collègue et lui donna un tape sur l'épaule.
— Je vais éviter de mélanger alcools et anti-douleur. Mais dès que je suis remit sur pieds, on fêtera ça tous ensemble, d'accord ?
— Carrément ! Eh, je peux passer ton numéro à tous les autres ? Ça t'évitera de faire le tour.
— Ah, merci, ça m'arrange. À bientôt !
— Eh, Ziggy !
L'officier se retourna.
— Je suis content que tu sois en vie, ajouta sincèrement son collègue. »
Ziggy lui sourit une dernière fois et le remercia avant de repartir. Il était plutôt satisfait que son détour par le poste ne lui ai pas prit trop de temps. Il se contenta de faire le chemin inverse jusqu'à son appartement. Faire son sac fut assez rapide ; il ne prit que le nécessaire, sachant qu'il ne partait que pour la semaine.
Sur le chemin, il téléphona à une compagnie de location de voiture. Au vue de son statut de Normal et de sa fonction, il réussit à louer une voiture spacieuse, confortable et automatique sans trop de difficultés. Ainsi, il n'aurait pas à utiliser sa jambe lorsqu'il conduirait. Le Normal fit cependant un petit tour de la ville rapidement pour s'habituer à la voiture et il rejoignit Kayden à leur point de rendez-vous.
Le Super l'attendait déjà, un sac à dos en piteux état à ses pieds. Ziggy s'arrêta devant lui et baissa la vitre.
« Montez, on a de la route à faire, dit-il en souriant.
Kayden lui sourit en retour et il monta sans hésitation.
— Vous pouvez poser votre sac sur la banquette arrière ou dans le coffre, si vous voulez.
— Banquette arrière, c'est parfait, commenta le Super, c'est quoi notre prochain arrêt ?
— Si on a de la chance, on arrivera à un petit motel en bord de route où on pourra passer la nuit.
— Pour quoi faire ? Je peux très bien conduire de nuit, personnellement.
— Vous n'avez pas le permis, Monsieur El Khir, commenta distraitement Ziggy.
Kayden roula ses yeux dans ses orbites.
— Il n'empêche qu'on aurait pu aller bien plus vite.
— C'est non-négociable. Je ne veux pas risquer un passage à la prison pour venir sortir votre cul. On risque de perdre du temps.
— T'en deviendrais presque sentimental, dit donc ! »
Ziggy lui adressa un regard empli de lassitude. Kayden ricana et il se contenta de regarder la route.
———————
Le Normal claqua la portière de la voiture. Mais quel emmerdeur, ce Super ! Après quelques heures de route, il avait réussit à comprendre comment l'auto-radio marchait, et il s'était amusé à changer de station chaque fois qu'il trouvait qu'une musique ne « vibait » pas .
Ziggy avait l'impression que sa tête allait exploser. Il ouvrit la porte de la réception du motel qu'il avait repéré un peu brusquement, Kayden sur ses talons.
« Une chambre pour deux s'il vous plait, demanda-t-il au réceptionniste.
Il se tourna vers Kayden, qui regardait le pinball avec un grand interêt. Il fouilla ses poches à la recherche de quelques pièces pour lancer une partie.
— Avec deux lits, précisa-t-il, merci.
Le réceptionniste consulta son ordinateur, et après avoir froncé plusieurs fois ses sourcils, il reporta son attention vers Ziggy.
— On n'a plus de chambre disponible avec deux lits.
— Dites-moi que c'est une blague, marmonna Ziggy en se frottant la tempe, donnez-moi n'importe quelle chambre du moment qu'il y a de la place pour deux adultes alors.
— Ah ! On a de la place ! C'est la chambre 207, à l'étage. Et le paiement se fait lorsque vous me rendez la clé.
— Parfait, ça sera juste pour cette nuit. Merci. »
Le Normal se retourna et regarda quelques instants Kayden, qui était bien trop concentré sur sa partie pour entendre la moindre chose. Lorsqu'il perdit, Ziggy souffla de soulagement et il fit signe à Kayden de le suivre.
Les deux hommes empruntèrent l'escalier qui menait au premier étage, et le Super se contenta de le suivre jusqu'à ce qu'il ouvre une des portes. Ziggy eut un discret soupir de soulagement lorsqu'il constata que la chambre était dans un état plutôt correct. Il s'empressa de jeter son sac sur l'un des côté du lit.
« Je dors à gauche, prévient-il à l'intention de Kayden.
— Oh mon dieu, pincez-moi, tu as prit un lit double ?!
— Non, j'ai prit la première chambre où deux adultes pouvaient rentrer. Il n'y avait plus de chambre avec deux lits.
— Avoue que ça aurait été moins fun.
— « Moins fun » ? Pourquoi ?
— Laisse tomber, tu comprendras quand tu seras grand.
Ziggy ouvrit la bouche pour répliquer, mais Kayden le coupa.
— Je vais prendre un douche, rejoint-moi si tu veux, d'accord ? »
Encore une fois, Ziggy ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais il reçut sur sa tête comme seule réponse le t-shirt que portait Kayden sur lui et il entendit une porte se refermer. Ik fut un instant tenté de rejoindre le Super, mais son téléphone vibra au même moment ; tous ses collègues avaient maintenant son nouveau numéro et ils lui envoyaient tous des messages. Avec un sourire, Ziggy attrapa son téléphone et entreprit d'y répondre.
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