Chapitre 14
Mercredi, il n'est pas là. Je le cherche partout mais aucune trace de Julien. C'est étrange, il ne rate jamais les cours, même malade. Je me suis rendu chez Exki puis je l'ai attendu devant l'école mais il n'est jamais venu. Noah m'a traîné en classe en grognant que Julien devait être en retard.
Mais c'est faux. Il n'est pas en retard. Et apparemment, je ne suis pas le seul à remarquer son absence car pendant la journée, plusieurs personnes viennent me demander si je sais où il est. Je leur réponds que non ce qui les étonnent davantage. Nous sommes très rarement séparés et pour cela cette semaine doit vraiment les intriguer. Tous ces vautours en attente d'une info croustillante à se mettre sous la dent. Il m'arrive de temps en temps d'avoir envie de leur dire de s'intéresser à leur propre vie.
Je n'ai pas dormi. Les informations que j'ai lues sur internet ayant tourné en boucle dans ma tête durant toute la nuit. J'ai fixé les photos de Julien depuis mon lit jusqu'à ce que le jour se lève. Je l'admet enfin, il était clair qu'il n'a jamais été que mon meilleur ami. Depuis toujours l'idée de le voir me rendait fébrile. Ce que je ressens pour lui dépasse la simple amitié.
Je me souviendrai toujours des vacances en Espagne avec Julien. Elles ont été les pires et en même temps les meilleurs qu'on a passé ensemble. Nous dormions dans la même chambre dans un lit double d'une taille complètement aberrante. Il faisait extrêmement chaud et l'air rendait nos peaux moites. Nous dormions donc avec les fenêtres grandes ouvertes et en caleçon. Pendant une nuit, je l'ai observé minutieusement. Il était plus fin que moi et déjà assez élancé. La course lui avait forgé un corps musclé, tonique. Tandis que mon regard parcourait tout son corps, j'ai senti mes instincts primaires ce réveiller. Tandis qu'il dormait, il faisait une moue boudeuse qui faisait ressortir ses lèvres rebondies. Son torse se soulevait doucement au rythme de sa respiration toujours aussi calme. Il régnait dans la chambre une quiétude qui était en parfaite opposition au déluge de sentiments et de sensations que je ressentais à ce moment. Ma gorge était tellement nouée que j'avais du mal à avaler ma salive. L'excitation m'avait assaillie violemment. Pendant un bref instant,je m'étais imaginé collant mes lèvres aux siennes et laissant cours à tout ce désir. Mais l'horreur de ce que j'imaginais m'avait assailli. Complètement perturbé, j'avais quitté la chambre. Je m'étais pris une douche glaciale. Je tremblais mais je préférais me dire que c'était à cause de l'eau froide.
Le lendemain, je n'arrivais pas à regarder mon meilleur ami dans les yeux. Je me sentais malade d'avoir eu ce genre d'idées pendant la nuit. Cependant, tandis que nous étions sur la plage, je m'étais aperçu d'un couple. Un couple d'hommes qui s'embrassaient dans l'eau. Il avaient l'air extrêmement heureux. Je l'avais fait remarquer à mon ami et en le voyant sourire à cette vue, je m'étais dit que mes pensées de la nuit n'étaient peut être pas si dégueulasses. Mais c'était sans compter sur l'apparition du paternel.
Je me souviendrais toute ma vie de son visage dégoûté. Il avait dit ces mots précis : « Quelles bandes de pédales. Ils ne sont pas obligés de faire ça en public, y'a des enfants. C'est vraiment répugnant. »
Et il m'avait regardé avec insistance en attendant que j'approuve son propos alors j'avais hoché la tête. Mais intérieurement, une bombe atomique venait d'exploser dans mon cœur. J'avais envie de pleurer et de vomir à la fois. À cette époque, mon père était mon exemple. Je ne souhaitais qu'une chose, pouvoir un jour lui ressembler. C'était un battant. C'était la première fois que le détestais. S'il avait su ce que j'avais pensé cette nuit. Je n'ose même pas imaginer sa réaction. Je crois que si je voyais cet air de dégoût sur son visage à mon propre égard,j'en mourrais.
Je n'ai pas pu regarder Julien jusqu'à la fin du séjour. Je me dégoûtais moi même. La semaine qui suivit, nous ne sommes pas vu? C'était la première depuis tout petit. Il m'en voulait, je ne sais pas pourquoi. Mais moi j'étais heureux de ne pas le voir. Je ne voulais plus jamais le voir. Je me dégouttais en sa présence, j'avais honte de moi. Il me faisait peur.
Finalement cette semaine -là, je coucherais pour la première fois avec une fille. Par la suite, j'étoufferais tout ce que je ressentais, toute mon attirance pour lui avec le corps de ces filles qui étrangement m'attirait aussi. Jusqu'à maintenant,j'ai toujours réussit à enfermer tout ça bien loin dans mon esprit. Malheureusement, le verrou à sauter, mes sentiments sont ressortis et mon cœur s'est ouvert. Et il est trop tard pour que je puisse le refermer.
Je rentre en bus l'après-midi, Iris restant chez Jozz avec Noah. Je n'ai pas pu aller chez Julien hier mais aujourd'hui rien ne m'en empêchera. Je rentre chez moi et prends mon sac d'athlétisme. Après l'entraînement j'irais chez lui. Et je me fous s'il me rejette. Je lui parlerai un point c'est tout.
Au salon, je rejoins ma mère.
- Maman, je vais chez Julien après l'entraînement mais je ne sais pas encore à quelle heure je rentre.
Elle hoche la tête et m'observe plus attentivement. La bonne chose avec ma mère, c'est qu'elle me fait confiance. Et elle me laisse donc la plupart du temps faire ce que je veux. Cependant maintenant, son regard maternel imbattable me scrute.
- Tout va bien mon cœur ?
J'acquiesce, légèrement gêné. Pourquoi les mères doivent elle avoir un sixième sens pour ce genre de choses ? Il y'a que dans ces cas-là que j'ai droit à ses petits surnoms extrêmement gênants.
- Tu m'envoies un sms quand tu es là-bas d'accord ? Et si tu dors, tu me préviens aussi.
- Oui, je dis avant de partir le plus vite possible.
J'espère qu'il sera chez lui et surtout qu'il acceptera de me parler. Sinon, je ne sais vraiment pas ce que je vais faire.
Pendant l'entraînement, je ne cesse de penser à lui. Est-ce à cause de moi qu'il ne vient pas ? Je ne comprends pas. Les autres jours, malgré les marques sur son visage, ils n'avaient pas l'air d'aller aussi mal. Il n'y a aucune logique pour son absence. Et ça m'angoisse. La dernière fois qu'il n'est pas venu, c'était à cause de l'enterrement de ses parents et d'Ambre. J'étais avec lui ce jour-là. Ce fut l'un des pires de ma vie. Il est resté muet toute la journée, ne regardant même pas les gens qui lui parlaient. Il était brisé de l'intérieur, alors j'e suis resté à ses cotés et je me suis montré aussi fort que possible pour lui. J'ai passé la nuit chez lui et il s'est finalement mis à pleurer. Un flot de larmes intarissable.
Tandis que je m'habille le plus rapidement possible après l'entraînement, Rose s'approche de moi. Elle croise les bras sur sa poitrine. Elle boude, ses yeux sont plissés et elle serre les lèvres.
Je me relève après avoir fait les lacets de mes converses et me mets face à elle.
- Qu'est ce qui y'a ? je demande pressé.
Elle soupire.
- Tu n'a pas répondu à mes messages hier soir.
Mince, au fil de la soirée, j'avais complètement oublié ses messages. J'étais tellement concentré sur Julien que ça m'a échappé.
- Je suis désolé Rose mais ...mon père était à la maison et tu le connais. Quand il est là, j'ai la tête ailleurs.
Elle hoche doucement la tête mais son visage est triste.
- J'ai l'impression qu'on ne se voit presque plus Syrius, dit elle la voix tremblante.
- Mais je suis venu chez toi dimanche, je dis en m'approchant d'elle et en caressant son visage du pouce.
Ses lèvres trembles.
- Ouais, mais tu étais dans la lune Syrius. Je n'avais pas vraiment l'impression que tu étais là. Je sais que tu t'es disputé avec Julien mais... je suis la moi aussi, murmure-t-elle.
Je fais la moue. Je me sens mal par rapport à elle. Elle à l'air vraiment malheureuse. Et c'est ma faute.
-Tu sais, je te comprends pour ton père, le mien est pareil. Ils ne sont pas amis pour rien. Mais ces derniers temps, j'ai l'impression que je n'existe pas pour toi.
À la mention de nos pères, mon ventre se tord mais je n'en laisse rien paraître.
- Je..je me demandais. Est-ce que je ne t'intéresse plus ? Tu me trompes ?
Je serre les poings.
- Bien sur que non Rose. Je ne te trompe pas !
Elle hoche la tête mais elle ne parait pas convaincue.
- Je suis la seule fille qui t'intéresse ?
Je la regarde avec les yeux ronds.
- Bien sure que tu es la seule fille qui m'intéresse.
Le pire, c'est qu'en lui disant cela, je ne lui mens même pas. Concrètement, la personne qui m'obsède est un garçon. Quelle ironie.
- Tu sais que je t'aime Sirius, murmure-t-elle avec ses yeux brillants.
La gorge nouée, je lui souris tristement.
- Moi aussi Rose, je souffle.
Je caresse son visage et la serre contre moi. Elle parait d'abord surprise puis répond à mon étreinte. Je ne suis qu'un menteur. Je ne suis pas amoureux d'elle et pourtant je joue la comédie. Tellement bien que j'ai longtemps réussi à me convaincre moi même. Quand elle le découvrira, elle me détestera. Et je ne pourrais pas lui en vouloir.
- Tu veux venir chez moi ce soir ? Demande-t-elle doucement contre mon oreille.
Je m'écarte légèrement d'elle.
- Je ne peux pas ce soir, désolé.
Elle paraît déçue, elle baisse le visage. Je pose ma main sous son menton et le redresse.
- Je dois aller voir julien, je crois qu'il ne va pas bien.
Elle fronce les sourcils et soupire.
- Et moi tu crois que je vais bien ? J'ai aussi besoin de toi.
Mon cœur tambourine dans mon torse.
- Rose...Julien c'est...
- Ton meilleur ami, oui je sais ! Mais il passe toujours avant moi ! Soupire-t-elle.
Je me crispe. C'est vrai, il passe toujours d'abord. Mais maintenant,je comprends pourquoi.
- Ecoute, je te promets qu'on fera quelque chose ensemble bientôt. Mais maintenant, il faut vraiment que je le vois. Avec ce qui s'est passé dimanche, on n'a pas encore réussi à parler.
Elle hausse les épaules.
- Ok comme tu veux, peste-t-elle, son visage déformé sous la colère avant de quitter les vestiaires.
Je me masse la nuque et soupire avant d'attraper mon sac et de courir jusqu'à l'arrêt de bus. Il fait noir, la nuit tombe de plus en plus tôt. L'hiver arrive. Je suis illuminé par les lampadaire et mon souffle laisse sa trace dans l'air glacial. Je frissonne malgré ma grosse veste.
Les choses changent et ça me fait peur.
Je sonne, les mains tremblantes. Claire, la sœur de Julien m'ouvre.
- Syrius ! Dit-elle l'air surprise de me voir.
- Salut, est ce que Julien est là ?
Elle soupire et hoche la tête.
- Viens avec moi.
Je la suis et ferme la porte derrière moi. Elle se met sur le fauteuil et je la regarde sans comprendre.
- Viens, petite tête.
Je hausse un sourcil et m'assieds à ses côtés.
- Ecoute, Julien n'est pas bien aujourd'hui. Vraiment, alors si ce n'est pas pour lui dire des choses sympas, je ne sais pas si je te laisserai le voir.
Je baisse la tête.
- Claire, je suis désolé pour ce qui s'est passé dimanche.
Elle soupire.
- Je te connais Syrius, mais je dois protéger mon frère et si tu ne supportes pas qui il est ... je ne sais pas ce que je suis supposé faire, murmure-t-elle.
Je pose ma main sur la sienne.
- Ce que j'ai fait est impardonnable et je m'en veux terriblement. Mais je ne peux pas rester sans lui, Claire.
Elle lève les yeux vers moi.
- Je ..il est très important moi, je ne veux pas le perdre.
Elle m'observe un moment en plissant les yeux mais un léger sourire se dessine sur ses lèvres.
- Je crois qu'il a besoin de toi maintenant, murmure-t-elle. Il s'est passé quelque chose hier avec Maël et il n'a pas voulu m'en parler.
- Ils sont ensemble ? Je demande.
Elle secoue la tête.
- Non, ils l'ont été mais ils ne le sont plus depuis un moment.
Je hoche la tête.
- Allez petit pingouin, tu peux monter.
Je lui fais les gros yeux.
- Quand arrêteras-tu de m'appeler comme ça ?
- Jamais petit pingouin.
- Tu es grave, je soupire en lui souriant.
Elle se lève et m'étreint brièvement.
- Je sais mais c'est tellement drôle, murmure-t-elle.
Quand on était plus jeune, Claire et Ambre nous gardaient parfois quand nos parents sortaient. Julien, Noah et moi. Un jour, on a décidé de monter une petite pièce avant le retour des parents. Vous l'aurez compris, je jouais Mister pingouin. Et elle m'empêche de l'oublier.
Allongé sous ma couette, j'attends que le temps passe. La dernière fois que j'a regardé mon réveil, il indiquait quinze heure. J'ai passé ma journée au lit. J'ai pensé à Ambre, à Syrius et à Maël.
Je me suis vraiment comporté comme un imbécile avec lui.
Nous nous sommes rencontrés grâce à Ambre, ma cousine. À l'époque elle avait vingt ans et était également à la Cambre. C'était le genre de fille pétillante. Quand elle vous souriait vous aviez l'impression qu'elle souriait au monde. Elle était d'un positif déconcertant.
Elle habitait chez moi. Elle était vraiment originale, c'était une grande fan de k-pop, un milieu que j'ai toujours eu du mal à appréhender, surtout lorsqu'elle mettait du G-dragon à fond dans sa chambre. Mais c'était également une grande fan de comics. Particulièrement de Red Hood alias Jason Todd. Elle pouvait passer des heures à nous parler des aventures de son justicier favoris. Elle était vraiment mutli-facettes et je l'aimais pour ça. Parfois on s'installait dans sa chambre et on passait des jours entiers à lires tous les comics qu'elle ramenait de la bibliothèque. Pour Claire et moi, elle était comme une sœur. On vivait ensemble depuis qu'on était enfant et on s'entendait extrêmement bien. Mais elle a disparu dans le même accident qui à emporter mes parents, il y'a deux ans. Cette froide nuit de mars. C'est étrange car avant, ce mois était mon préféré. Il marquait le début du printemps et on y fêtait mon anniversaire. Maintenant, je ne peux plus en entendre parler. Mars est la période où je me remets à pleurer et où je n'arrive plus à parler. Après l'accident, j'ai cru que mon monde explosait en des milliers d'éclats qui me transperçaient de partout. Brisant et déchirant chaque parcelle de mon être. Pour moi, ce jour-là, j'ai perdu mes parents et une sœur.
Maël et Ambre étaient les meilleurs amis du monde depuis toujours. Je le croisais souvent en coup de vent quand il venait la chercher. Mais c'est quand j'ai eu seize ans que je l'ai vraiment rencontré. C'était la journée porte ouverte à la cambre et il y'avait donc une présentation des travaux. Ambre courait partout pour aider et elle m'a laissé avec lui. Ce jour-là, il m'a tapé dans l'œil. Ces boucles brunes entouraient son visage, il ne s'était pas encore rasés sur les cotés . Il avait déjà un charisme hors norme. Lorsqu'il se déplaçait, je ne voulais pas rater une miette de ses mouvements. À cette époque, je pensais déjà que j'aimais les garçons et pas les filles. Et le voir m'a conforté la-dedans.
Il m'a donc emmené devant toutes les créations et m'a expliqué la démarche artistique de chaque œuvre. En l'écoutant parler, j'ai craqué. Je le trouvais beau à en crever.
Avec ses mains serties de bagues en argent, il me montrait les différentes courbes et tendances de chaque tableau. Il m'expliquait pourquoi chaque artiste avait privilégié certaines gammes de couleurs plutôt que d'autres, et la raison pour laquelle ils avaient mis en avant certaines facettes de leur sujets. Pour moi ces toiles étaient justes belle mais avec lui tout prenait un sens. Chaque toile racontait une histoire qu'il me contait avec brio et je trouvais cela passionnant.
Après « l'exposition », Ambre est resté aidé pour ranger et Maël à proposer de me ramener. Nous avons finalement discuté toute la soirée dans sa voiture. Nous avons parlé de tellement de sujets. Je ne me suis pas ennuyé un instant avec lui. C'était déjà un grand fan de BD et l'un de ses rêves était d'un jour pouvoir créer la sienne. Chose qu'il est effectivement occupé à faire maintenant. Étant un créateur de génie et un dessinateur hors paire, il ne pouvait que y arriver.
Nous nous sommes revus chaque semaine et après un petit moment, nous nous sommes mis ensemble. Nous faisions énormément de sorties avec Ambre. Quand nous lui avons annoncé que nous étions en couple, elle a sauté de joie, littéralement. À partir de là, elle nous a dis en permanence qu'elle était « fan » de notre couple. C'est l'une des qualités que j'aimais en elle. Elle bannissait les préjugés et ne souhaitait que le bonheur des autres. Les gens ne la connaissant pas auraient pu dire que ce n'était qu'une façade et qu'étant humaine, elle avait d'office des pensées négatives pour certaines choses. Mais ce n'était pas le cas. Même pour sa mère qui n'avait pas été capable de s'occuper d'elle convenablement,elle n'éprouvait pas de ressentiment. Juste de la peine de ne pas avoir pu la connaître.
Pour moi, elle relevait de la perfection et c'est peut dire que j'étais fier de clamer qu'elle était ma sœur.
Cette période fut formidable. J'avais rarement été aussi heureux. Et cela serait faux de dire que je n'ai pas eu de sentiments amoureux à l'égard de Maël à ce moment. Je l'aimais énormément et c'est toujours le cas. Mais Syrius lui était aussi toujours dans ma tête.
Puis il y'a eu l'accident. Je me souviendrai toujours de la dernière fois que j'ai vu Ambre. Elle était heureuse, comme d'habitude. Les parents et elle allaient enfin chercher sa voiture. Sa première voiture. Avant de partir, elle s'est tournée et m'a fait son petit clin d'œil fétiche.
Ce matin là, elle m'a confié qu'elle se sentait la reine du monde. Qu'à partir d'aujourd'hui, elle était enfin libre d'aller là où elle voulait et qu'elle nous emmènerai avec elle, Maël et moi, ses fidèles acolytes. Nous avions prévu d'aller chercher à manger au drive-in avec sa nouvelle caisse pour la fêter et de déguster sur la citadelle à Namur. Il n'en fut rien. C'était sans compter le conducteur de camion qui avait bu et qui n'a pas réussis à redresser son putain de camion sur la route parce qu'il avait été inattentif et que ses réflexes étaient engourdis. Claire et moi avons passé la soirée au commissariat.
Ils étaient tous mort sur le coup.
Maël et moi étions en couple depuis un an à ce moment-là. J'ai eu si mal que de nombreuses fois, j'ai pleuré en me demandant pourquoi je n'étais pas monté dans cette foutue bagnole avec eux. Après ça, je n'arrivais plus à voir Maël. Il me faisait trop penser à Ambre et cela me tuait. Lui avait perdu sa meilleure amie, et moi une sœur.
Il est peu dire qu'on était tous les deux misérable.
À ce moment, Syrius s'est montré présent pour moi à chaque instant. Quand je voyais son visage à lui, j'oubliais légèrement ma peine, je respirais. J'arrêtais de penser à la façon dont je pourrais rejoindre ceux que j'avais perdus. Mais pas avec Maël. Car il était tout aussi détruit que moi.
Nous nous sommes séparés et je ne l'ai plus revus pendant près de quatre mois. À ce moment-là, j'étais l'ombre de moi-même. Je ne savais plus qui j'étais et je ne voyais pas à quoi servait la vie. Une vie sans Ambre et mes parents, je ne voyais pas ce que cela pouvait avoir de bien. Claire était désespérée et moi je voulais crever.
Mais petit à petits, les plaies à vif ont commencé à se colmater, puis à cicatriser. J'ai réappris à sourire. Syrius m'y a aider. Pour moi, ce garçon est une une explosion stellaire. Il a une telle énergie dans tout ce qu'il entreprend. En le voyant aussi bouillonnant de vie, j'ai eu envie de me remettre à vivre. Pour lui.
Par la suite, Maël et moi nous sommes recroisés et on a repris contact. Les choses ont évolué entre nous. Je lui ai parlé de mes sentiments pour Syrius et il m'a dit qu'il l'acceptait. Nous sommes donc devenus amis. Et pourtant, je sais bien que les choses n'étaient pas si simples entre nous.
Hier, j'ai franchi la limite. Je m'en veux tellement. Je ne peux pas le perdre encore une fois.
Allongé dans le noir. Je laisse encore les larmes coulées sur mes joues.
Des coups résonnent à la porte, je sèche mon visage d'un geste vif mais ne réponds pas. La porte s'ouvre doucement.
- Julien ?
Je me fige et mon cœur s'arrête un instant. Je reconnaîtrais cette voix entre mille. Pourtant, j'ai encore davantage envie de pleurer en l'entendant.
- Laisse-moi, je dis la voix tremblante.
Mon lit bouge, il s'est assis.
- Non, dit il la voix plus dure.
Je soupire et me redresse tant que mal. Il est assis à l'autre bout de mon lit. Heureusement que j'ai un lit deux places, je n'aurai pas supporté d'être trop proche de lui.
-Pourquoi tu es venu ?
J'allume ma lampe de chevet et il m'observe attentivement. Il se crispe en voyant mon visage ce qui ne me fait pas particulièrement plaisir. Je ne suis pas beau à voir en ce moment. Mon bleu est horrible et la plaie sur ma lèvre cicatrise mais ne m'avantage pas non plus. Ça plus mon visage qui doit être bouffi par ma nuit à chialer comme un gamin. Je dois pas vraiment ressembler à un prince.
- Je veux qu'on parle.
Il a l'air déterminé. Je m'adosse au mur et croise les bras devant mon torse nu qui je vois le met mal à l'aise. Tant pis pour lui.
- Vas-y, parle, je souffle.
Il prend son inspiration puis commence :
- Je m'en veux de t'avoir frappé. Vraiment, j'ai réagi au quart de tour sans réfléchir et je t'ai blessé. J'ai agi comme un idiot. Je ne veux pas que cela détruise les choses entre nous...Tu es mon meilleur ami, je suis perdu quand tu n'es pas avec moi, dit-il la voix tremblante.
Je pince les lèvres mais une larme coule sur ma joue.
- Tu pleures ? Me demande-t-il.
- Bien sure que non, je renifle mais les larmes coulent d'elles-mêmes sur mes joues.
Je mets mes mains devant mon visage, cachant les traîtresses que je n'arrive pas à interrompre. Bientôt je n'arrive plus à retenir mes sanglots.
- Julien pourquoi tu pleures ? Me demande-t-il la voix tremblante.
Il prend mes mains et les enlève de mon visage.
Je le regarde, flou, sous mes larmes.
- Je gâche tout ! Je marmonne.
- Bien sure que non ! C'est moi qui t'ai frappé ...
Je secoue la tête.
- Mais si je n'avais pas fait le con avant tu ne l'aurais jamais fait ! J'agis toujours de manière irréfléchie ! D'abord avec toi et hier avec Maël ! Je gâche toujours tout ! Je vais tous vous perdre ! Comme Ambre et mes parents !
Je le vois tressaillir à l'allusion mais il s'approche de moi et me prend dans ses bras. Il me serre fort contre lui.
-Tu ne me perdras jamais julien, murmure-t-il, la voix rauque contre mon oreille.
Je secoue la tête.
- Qu'est-ce que tu en sais ? On ne peut jamais prévoir ce qui arrive. Parfois, j'aimerais être mort avec eux ! je pleure.
Il prend mon visage entre ses deux mains et m'oblige à le regarder. Il tremble et parait bouleversé.
- Julien, je t'interdis de dire ça ! Tu ne peux pas ! Tu m'entends ?! Tu peux pas dire ça !
Je ferme les yeux.
- Regarde-moi ! S'énerve-t-il la voix tremblante.
J'obéis.
- Promets-moi que tu ne feras pas d'acte stupide, je t'en supplie !
Je ne réponds pas et les larmes se mettent à couler sur ses joues.
- Tu crois que c'est ça qu'Ambre aurait voulu pour toi ? Qu'à chaque fois qu'il se passe quelque chose de mauvais dans ta vie, tu cherches l'échappatoire en ayant envie de crever ?! Souviens toi d'elle bon sang et honore là en vivant comme jamais !
J'essaie de détourner le visage mais il m'en empêche.
-Arrête, je gémis.
Il lâche alors mon visage et je le vois essayer ses propres larmes en secouant la tête.
- Je ne peux pas t'entendre dire ça Julien. Si tu n'es plus là, je n'aurais aucune raison de rester non plus. Sache-le.
Je le vois assis en face de moi occupé à pleurer et ses mots me bouleverse. Il ne peut pas faire ça, pas lui. L'image de toutes ces choses que Syrius à déjà accomplit et qui disparaîtraient sans lui, me fait mal . Un monde sans lui serait un tel gâchis. Je sèche mes larmes. Je me penche vers lui et le prends dans mes bras.
- Arrête de pleurer, pardon, je suis désolé, je retire ce que j'ai dit, mais arrête de pleurer.
Je m'écarte et essuie une larme sur sa joue.
Nous nous regardons silencieux. Il s'est mis à pleuvoir, les gouttes tambourinent sur mes fenêtres. Nous avons tous les deux arrêté de pleurer il y'a un bon moment et nous nous regardons dans les yeux.
- Il s'est passé quoi avec Maël ? Demande-t-il finalement.
Je me remets à trembler de plus belle.
- J'ai...j'ai joué avec ses sentiments, je dis et je le vois se crisper.
Il parait dans ses pensées un moment. Mais il finit par relever le visage et il me sourit tristement.
- Regarde, les choses vont aller mieux entre nous alors pourquoi ne serait ce pas le cas avec lui ?
Je me mords la lèvre.
- Mais avec toi ce n'est pas la même chose, je murmure.
Il fronce les sourcils.
- Tu l'aimes ? Me demande-t-il sérieusement.
- Oui, enfin non, c'est compliqué. Je ne suis pas amoureux de lui, je murmure.
Il hoche la tête.
- Ecoute, je suis sur que ça ira . Vous êtes proches, vous trouverez un moyen de réparer ça.
Je soupire.
- J'espère.
Il hoche la tête et je remonte un peu ma couette sur moi.
- Donc finalement, tu sais que je suis gay, je soupire en me passant la main dans les cheveux.
Il acquiesce et me sourit timidement.
- Et cela ne te gêne pas ?
Il hausse les épaules.
- Je peux travailler là-dessus. Si tu veux le dire au monde entier, je t'aiderai. S'il faut ça pour que tout reste bien être nous, je le ferais.
Je secoue la tête.
-Ne t'inquiètes pas, je ne le crierais pas au monde entier, c'est mes affaires. Mais c'est sympa de t'entendre dire ça.
Il regarde mon réveil, il affiche vingt-trois heure.
- Je peux dormir ici cette nuit ?
Je lui fais un petit sourire cocasse malgré ma sale tronche et hausse les épaules.
- Ça dépend tu n'as pas peur que je me colle à toi ? Je dis la voix encore légèrement tremblante.
Il se fige et fronce les sourcils ce qui me fait sourire.
- Si tu voyais ta tête, non mais franchement !
Il secoue la tête.
-Tu es con, grogne-t-il.
Il rougit à cet instant autant que son frère devant la jolie Iris et un espoir naît en moi. Peut-être que Maël a raison finalement.
Il se change devant moi. Tandis qu'il enlève son t-shirt, je ne perds pas une miette de son torse musclé. Il met un bas de jogging, chose qu'il ne fait pas d'habitude mais s'il se sent d'avantage en sécurité comme ça, soit.
Il se met sous la couette en grelottant. Il reste le plus loin possible de moi. Il tombe presque du lit. Ça me fait sourire.
- Je rigole hein Syr, je vais pas te toucher ou quoi que ce soit, rapproche toi sinon tu vas tomber.
Mon lit deux places est assez grand, il n'a donc aucune raison d'avoir peur.
- Euh... dit-il gêné.
- Mec, on dort ensemble depuis qu'on est gamin, sérieux, je suis toujours le même.
- Ouais, dit-il avant de se rapprocher un peu.
J'éteins la lumière et ferme les yeux. Je frissonne encore à cause de tout ce que je lui ai dit. J'ai mal mais il est là pour me changer les idées, comme toujours.
- Je peux te demander quelque chose ?
- Hmmm.
Il ne continue pas. J'attends un moment avant d'ouvrir les yeux.
- Tu veux me demander quoi ?
Il soupire.
- Comment tu as su que tu étais gay ?
Je souris mais il ne le voit pas dans le noir.
- Je suis attiré par les mecs. Tu vois quand on parlait des gens qu'on rêvait d'embrasser ?
- Sans blagues, les soirées pop-corn.
- Ouais, bah moi c'était des mecs que j'avais envie d'embrasser. Je disais n'importe quoi au sujet des nanas. Les filles sont jolies ou belles mais elles ne m'attirent pas. Je suis attiré par les garçons, ce sont eux qui me font de l'effet. Et ça a été sur quand j'ai été avec Maël, je dis la voix vacillante.
Il bouge, sûrement mal à l'aise. Mais c'est lui qui veut savoir.
- Mais tu n'as jamais été attiré par une seule fille ?
Je soupire.
-Non. Enfin, je trouve que certaines filles sont sublimes mais ça s'arrête là. Je n'aurai certainement pas envie de faire ... quoi que ce soit avec elles.
Je me tourne vers lui. J'entraperçois son visage dans la pénombre.
- Maël et toi, vous avez -sa voix s'étrangle légèrement- tu vois quoi.
Le visage de Maël me revient en tête et je ferme les yeux.
- Oui on a couché ensemble.
Il se met à rire nerveusement.
- Bordel quoi ...je ne me rendais compte de rien !
- Je faisais attention à ce que tu ne le saches pas.
- Pourquoi ?
Malgré le fait qu'il ne peut pas bien me voir je désigne mon visage.
- Vraiment ? Tu es sérieux ou quoi ? J'en ai les marques sur la tronche.
- Oh... désolé.
- Je propose qu'on laisse ça derrière nous, je soupire.
- Ça me semble bien, murmure-t-il.
Pendant un instant, il ne parle plus et j'ai l'impression qu'il s'est endormis.Mais il reprend :
-J'ai l'impression que tu connais tout de moi mais que l'inverse n'est pas vrai,murmure-t-il et je sens la tristesse dans sa voix.
Je serre les poings.
- Syrius, ne dis pas ça. Je ne me résume pas à ça et c'est la seule chose que tu ne connaissais pas de moi. Cela n'a pas d'importance.
Il bouge dans le lit et je sais qu'il se retourne vers moi, même si je le distingue à peine.
-Si ça a beaucoup d'importance pour moi Julien.
Mon cœur s'arrête un instant, il a vraiment dit ça ? Que veut-il dire par là ?
En pleine nuit, il se rapproche de moi. Il fait partie de ses marmottes qui cherchent toujours les sources de chaleur la nuit. Il a glissé vers moi et il pose maintenant son front frais sur la peau brûlante de mon dos. Je suis tétanisé et je prie pour qu'il ne se réveille pas. Son souffle est calme sur ma peau. Nos jambes se touchent et son bras passe autour de moi. Si je me retournais, je serais dans ses bras. Je me mords la lèvre et ferme les yeux, sentant certaines parties de moi se réveiller à son contact. Ce n'est pas le moment Julien. J'essaie de rester calme et le plus immobile possible.
Mais je profite, beaucoup même.
@poulpex Merci pour ta bannière ! Je l'adore ! 😘
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