Troisième partie: Chapitre 1
-Point de vue d'Annabelle-
Je fermai les rideaux. Je n'avais aucunement honte de ce que j'allais faire mais j'avais peur qu'un des voisins me voie et vienne m'en empêcher. J'avais encore un peu de mal à réaliser que j'allais le faire, mais quand faut y aller, faut y aller... J'allumai tous les écrans, c'est-à-dire, portable et ordinateur, je débloquai tous ceux que j'avais effacés de mon Facebook, je m'exposai à eux, mais ils s'exposaient eux aussi. Il ne fallait pas croire qu'ils allaient s'en tirer aussi facilement après ce qui allait se produire dans ma chambre. Je branchai mes appareils, histoire qu'ils ne soient pas éteints quand mes parents seraient rentrés. Mes parents... La chose la plus horrible que je pouvais leur faire... C'était ma vie ou la fin de ma souffrance. J'avais respecté leur choix de me garder ici pour me protéger, mais je demandais souvent s'ils avaient bien fait. Cela faisait un mois que je n'avais pas mis un pied hors de chez moi, du moins, sans un adulte... En dehors de mes parents, que je voyais tous les jours, de J-F, qui venait deux fois par semaine me faire cours de littérature, et de ma psy, avec qui j'avais des séances toutes les semaines, je ne voyais aucun autre visage. Je m'en voulais d'envoyer balader Ally, mais je ne pensais pas que lui dire que j'avais été agressée à cause de mon homosexualité l'aurait aidé à se sentir moins effrayée et mieux dans sa peau. Je n'avais rien dit à Meredith non plus, car je lui aurais fait promettre de ne rien dire à Ally et cela aurait créé des embrouilles dans leur couple parce que l'une aura caché la vérité sur une personne chère à l'autre... C'était trop compliqué... Mes parents n'allaient pas tarder à rentrer, il fallait que je me magne. Je gagnai la salle de bain. Au moment où j'allais ouvrir l'armoire à pharmacie, mes yeux s'arrêtèrent sur le miroir. Moi qui étais légèrement ronde à la base, j'avais tellement maigri que des petits creux commençaient à se former dans mes joues, des cernes violets gigantesques s'étaient creusés sous mes yeux, car je ne dormais plus. J'avais pâli aussi, mes taches de rousseur paraissaient noires sur ma peau, dont la couleur se rapprochait de plus en plus de celle de la farine. Mes cheveux roux n'avaient pas perdus de leur éclat, j'avais eu de la chance, ce n'était pas ce roux orange qui donnaient à certains le surnom « Poil de Carotte ». Non, ma chevelure flamboyante presque rouge a fait que l'on m'appelait « La petite sirène » quand j'étais enfant. Je ne reconnaissais plus la couleur de mes yeux. Ils étaient noisette à la base, mais là ils avaient l'air plus foncés qu'avant, rajoutez à cela le fait qu'ils étaient entièrement injectés de sang. Je détestai ce que je voyais dans le miroir, c'était comme si l'on m'avait collé un aspirateur sur la figure et aspiré ma beauté. Ne me prenez pas pour une personne narcissique, j'aimais le corps et le visage que l'on m'a donné, d'autant plus que cela fait du bien à une femme de se sentir belle. J'avais beau me forcer à me rappeler l'image que j'avais de moi avant, cette magnifique bombe sulfureuse et charismatique dont j'étais si fière, mais rien n'y faisait. J'étais coincée avec... Ça... Je n'arrivais pas à me décider à propos des médicaments dans l'armoire à pharmacie, alors je les pris tous. De retour dans ma chambre, j'attrapai une plume et du papier. Peu importe à quel point l'ambiance était macabre, je voulais que ce soit bien fait. J'écrivis une lettre à mes parents, lettre essentiellement composée des mots « désolée » et « je vous aime », une lettre à J-F et une lettre à Ally. Ally... Qu'est-ce que je l'aimais... Je m'en voulais tellement de ce qui s'était passé. Tout était de ma faute en ce qui concernait notre rupture. J'avais essayé de la forcer à faire son coming-out car je ne pouvais plus vivre dans le secret, mais j'avais plus forcé les disputes, les crises de larmes et notre séparation qu'autre chose... Plus j'y pensais et plus je me rendais compte que rompre était la meilleure chose à faire, on n'était plus heureuses ensemble, il y avait trop de tensions et, pour être honnête, cela me tuait de la voir aussi malheureuse... On avait beaucoup pleuré le jour où on prit notre courage à deux mains pour se dire : « C'est fini. » Il nous avait fallu plusieurs mois pour nous reparler. C'était plutôt gênant au début mais, par je ne sais quel miracle, on parvint à mettre le passé derrière nous et repartir à zéro, il était clair qu'on se préférait en tant que meilleures amies qu'en tant que compagnes...
Je me rendis compte que mon visage était noyé de larmes. Je l'essuyai d'un revers de manche et relis les lettres. Elles paraissaient un peu bateau, mais les messages étaient clairs, et puis je n'avais jamais été vraiment douée avec les mots, sauf dans mes dissertes... Je pliai les papiers et les posai sur le bureau juste à côté de mon ordinateur. J'ouvrai toutes les boites de médicaments. D'après Marilyn Monroe, les mélanges de médocs, ça marchait bien quand on voulait se suicider... Je sélectionnai les pilules afin d'obtenir le mélange le plus létal qui soit, et, puisque que voulais vraiment partir, les avaler avec de l'eau, et non avec de l'alcool, serait une erreur de débutant n'est-ce pas ? Bon, j'attendais quoi ? Quand faut y aller, faut y aller.
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