21. J'avais été prête à renoncer
En parvenant à me libérer la première, Fleur m'avait secrètement remercié quand en me précipitant vers elle, je l'avais aidé à faire de même.
- On fait quoi maintenant ? lui avais-je alors lancé avant de la voir se lever de sa chaise pour immédiatement s'avancer vers la porte du bureau fermée à clé.
Après qu'elle ait en vain cherché à l'ouvrir, mon amie s'était mise à la recherche de quelque chose qui lui aurait soit permis de la défoncer, soit de s'échapper de la pièce malgré l'absence de fenêtre.
Fleur venait d'achever son tour d'horizon, quand d'un regard perçant elle avait fixé une grille d'aération située en hauteur.
- Aide-moi, m'avait-elle dit dans un souffle et comme un seul homme, nous nous étions mises à pousser le bureau pour le coller contre le mur où s'était trouvé ce nouvel objectif.
Une fois la chose de fait, mon amie était montée sur le meuble avant d'utiliser l'ongle d'un pouce pour essayer de retirer l'une des visses qui retenait la grille. Sauf que très vite, elle s'était rendue compte que non seulement sa tentative était devenue inutile, mais qu'elle lui avait entaillé le doigt.
- Merde ! Fait chier ! s'était soudain exclamée Fleur avant de se mettre à téter son pouce comme si elle avait pu aussi simplement stopper le saignement.
En sautant du bureau pour rejoindre le sol, je l'avais en suite vue ouvrir un premier tiroir pour le fouiller et par mimétisme, j'avais fait de même avec un autre avant de lui demander.
- On cherche quoi exactement ?
- De quoi enlever cette foutue grille à la con, m'avait-elle alors répondu du tac au tac.
Cependant, même après avoir retourné la pièce, d'outils adéquats nous n'en avions pas trouvé et quand par dépit ma meilleure amie était venue s'asseoir sur le bord du bureau, je m'étais souvenue que durant ma recherche j'avais entre aperçus une boîte de pansement en bande.
Ni une ni deux, je m'étais mise à chercher ce sésame avant de le trouver. Puis, en regardant vers là où avait échoué Fleur, j'avais vu dans un pot à crayon un ciseau et en m'en emparant, j'avais été prête à découper un morceau de bande de pansements.
- Tu sais que tu es une génie toi ! m'avait soudain dit mon amie ce à quoi j'avais répondue, euh, merci, sans trop comprendre pourquoi elle avait choisi de me faire un tel éloge.
Lorsque j'en avais eu fini avec, Fleur m'avait pris des mains le ciseau sans me laisser le temps de la soigner et ce faisant, je l'avais vue bondir sur le bureau avant de littéralement venir se coller à la grille d'aération.
En utilisant la pointe de l'ustensile de découpe comme d'un tournevis, elle était vite parvenue à retirer une première vis et les autres ne lui avaient pas résisté bien longtemps.
Une fois la grille métallique tombée à terre, l'ouverture vers l'étroit conduit dont la structure labyrinthique devait parcourir tout le sous-sol m'était alors apparue suffisamment large pour y faire passer toute une personne.
Quand à mon tour j'étais monté sur le meuble pour rejoindre mon amie, elle avait cherché à s'y engouffrer, mais je l'en avais dissuadée en attrapant son coude.
- Fleur ! Ton pouce, lui avais-je alors dit avant que ses yeux ne circulent des miens jusqu'à son doigt ouvert où le sang qui coulait abondamment s'était répandu de partout.
En lui saisissant la main pour venir bander sa blessure, j'avais à nouveau croisé le regard de mon amie et alors qu'elle aurait pu m'en empêcher puisque l'urgence était tout autre, avec la même reconnaissance qu'aurait eue un enfant qui se serait écorché le genou, elle m'avait laissée faire.
Lorsque j'avais terminé d'enrouler son pouce avec le pansement tout en prenant soin de bien appuyer sur la fin pour ne pas qu'il se défasse trop vite, Fleur m'avait remercié d'un hochement de tête. Puis, sans même avoir besoin de nous concerter, je l'avais aidée à entrer dans le conduit d'aération en m'accroupissant pour qu'elle puisse prendre appui sur mon dos.
Au moment ou je m'étais redressée, tout ce que j'avais pu voir de ce qu'il restait de Fleur avait été ses pieds qui dépassaient de l'embrasure du passage et à mesure que je l'es avait fixé ils avaient fini par disparaître dans sa noirceur d'encre.
Étant bien consciente que mon amie ne pourrait jamais se retourner pour me rendre la pareille, je m'étais immédiatement mise à la recherche de quoi que ce soit qui me permettrait à mon tour de pénétrer dans le mur.
Après avoir rejoint le sol, j'avais vite trouvé de quoi m'aider et en vidant le contenu d'une caisse de rangement, je m'en étais servie comme d'un escabeau. En saisissant les bords de l'entrée du conduit d'aération et à la seule force de mes bras, j'étais parvenue à me hisser et à y engouffrer la quasi-totalité de mon buste. Mais le plus difficile avait été de faire basculer le reste de mon corps à l'intérieur du passage pour qu'il ne représente plus un poids qui me tirait vers l'arrière.
Quoiqu'il en avait été, en utilisant mes coudes, mes genoux et la pointe de mes pieds, je m'étais mise à avancer dans l'obscurité qui petit à petit s'était accentuée à mesure que je m'étais éloigné des éclairages de la pièce.
Quand en rattrapant Fleur, j'avais finie par toucher d'une main l'une des semelles de ses chaussures , je lui avais alors murmuré.
- Je suis là, ce à quoi elle avait répondu d'une voix tout aussi basse par un, OK avant d'ajouter pour encore une fois s'assurer de mon consentement, tu es sûre de vouloir continuer ? Parce que si tu préfères, on peut revenir en arrière et attendre qu'ils viennent nous chercher.
- Oui, je veux continuer, lui avais-je dit tout en pensant qu'en quelques heures à peine, le comportement parfois vindicatif qu'avait pu avoir mon amie à mon égard avait totalement disparu, ce qui m'avait fait bizarre.
À ce stade-là de notre tentative d'évasion, notre objectif avait été très simple : rallier un couloir, une autre pièce ou n'importe qu'elle endroit de ce sous-sol qui dans le meilleur des cas, ne serait pas un cul-de-sac. Fleur et moi avions donc repris notre progression à bon rythme dans le conduit d'aération lorsque je m'étais soudain rendu compte qu'il n'y avait eu aucun moyen de nous repérer ou de savoir où nous allions.
Par effet boule de neige, une peur primale s'était mise à monter en moi et de suite après, j'avais repensé à tous ces jeux vidéo dans lesquels le personnage principal avait toujours avec lui une carte ou une lampe torche pour qu'il puisse s'orienter et trouver la sortie d'un labyrinthe. Au pire, de la lumière qui filtrait au travers d'ouvertures ou encore, des sons suffisamment présents. Des éléments dits de gameplay qui se révélaient bien utiles, mais qui ici nous avaient fait cruellement défaut.
Même après plus d'une minute de passée à ramper dans ce qui était devenu pour moi un véritable goulot d'étranglement, tout n'était resté qu'obscurité et malgré le bruit qu'avaient pu faire mon corps et celui de Fleur en venant se frotter contre les parois de métal, le silence m'avait paru comme se renforcer à tel point que la crainte que j'éprouvais s'était mue en une véritable angoisse de me retrouver prise au piège d'un dédale.
Puis, un souvenir aussi ancien que désagréable avait refait surface. Un événement de mon existence que j'avais pourtant été capable jusque là d'enfouir si profondément en moi qu'au départ il ne m'était apparu que comme le fruit de mon imagination. Sauf que je l'avais bel et bien vécu.
Tout s'était passé un été en colonie de vacances. Lors d'une expédition de spéléologie, notre moniteur nous avait forcés à entrer dans une cavité à peine assez large pour que nous puissions y tenir et après quelques mètres de parcourus, je m'étais retrouvée incapable de continuer à avancer davantage. J'avais été tétanisé été par la peur.
Ce jour-là, le seul moyen qui avait été trouvé pour m'extirper de ce trou avait été de m'attacher une corde autour de la taille et de me tirer vers la sortie.
Alors que l'évocation dans ma tête de ce souvenir d'un autre temps m'avait soudain fait stopper net mon avancée dans le conduit d'aération, en me mettant à regarder devant moi, à intervalles réguliers, j'avais finalement pu voir que de la lumière s'était mise à filtrer au travers d'interstices.
La seconde d'avant, j'avais été prête à renoncer et à en faire part à Fleur, mais à elles seules, les faibles clartés qui étaient venues par endroits éclairer les parois de métal du conduit m'avaient permise de ne sombrer ni dans la folie ni dans le désespoir de la paralysie que j'avais pu connaître étant enfant.
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