-"Qu'as-tu fait, Becca?" dis-je à moi même devant le miroir appliquant mon rouge à lèvres, mon coeur battant sourdement contre ma poitrine.

Avais-je fait le bon choix?

Le plus irrationnel je crois, ça s'était sûre!

Qu'est-ce qui m'avait pris à tout d'abord l'embrasser, lui rendre son baiser, lui donner libre accès à ma bouche et le comble, l'inviter à me rejoindre en boîte?

Était-ce même un rancart?

Désespérée, me maudissant d'avoir été aussi vulnérable devant lui et lui offrir ma brèche sur un plateau d'argent, je soufflais devant mon reflet, incapable de mettre un mot sur mes sentiments. Ses émotions contradictoires qui m'assaillirent inlassablement en la simple présence de Connors qui tel un ouragan ravageait tout sur son passage comme il l'avait fait au bureau. J'étais partagée entre deux sentiments et au lieu de mettre un point final à cette relation, j'en avais mis un point d'interrogation! Et ce soir, je serais confrontée à lui. À Connors qui réveillait certes cette partie féminine qui voulait se sentir désirée par un homme mais par dessus tout, réveillait des sentiments qui n'auraient jamais dû exister et qui prenait de l'ampleur!

Ce que j'éprouvais à son égard ne pouvait être ni décrit ni contrôlé. En somme, j'étais tout simplement dans le pire dilemme qui soit! Mon coeur ou la raison ou la morale!

Qui devrais-je choisir quand je savais qu'un de nous deux souffrirait à la fin? Néanmoins, quand j'étais dans le bureau, ce fut mon coeur qui prit de l'avance et m'avait conduit à aller au delà de mes limites.

-"Becca? T'es prête?" s'écria cette voix familière par derrière la porte me sortant de mes pensées.

-"J'arrive, Aurora!" lui répondis-je enfilant mes talons noirs.

Un dernier regard vers mon reflet, lui souriant pour me redonner un minimum de courage pour affronter le problème dans lequel je m'étais moi même fourrée, je sortis de la salle de bain, toujours mon coeur prêt à me lâcher. Ce dernier ne faisait que tambouriner atrocement contre ma poitrine, rendant mes mains moites à chaque seconde qui me rapprochait vers Connors!

-"Cesse de te sentir coupable pour rien," renchérit Aurora me tendant ma pochette, un sourire en coin. -"Tu es célibataire. Tu ne trompes personne."

-"Et Conrad?"

Son haussement de cils et ses bras remontant vers sa poitrine me firent regretter immédiatement ma question.

-"D'accord!" répliquais-je mettant mes mains en l'air ne voulant plus parler de l'homme qui avait essayé de me frapper et qui avait détruit mon appartement. -"Allons-nous en," l'intimais-je rattrapant ce début de soirée en évitant de prononcer ce nom que haïssait tant Aurora; Conrad, mon ex qui malgré ses défauts devaient certainement renfermer un homme bien car après tout, il avait toujours agi de la sorte avec moi, n'est-ce pas?

-"Allez, dépêches toi! On est déjà en retard!" me réprimanda ma meilleure amie, en refermant la porte pour prendre un taxi.

-"Becca! Tu as pu venir," s'exclama Dimitri en me serrant dans ses bras.

-"Oui avec Aurora, c'est dur de dire non!" répliquais-je un sourire en coin en regardant ma meilleure amie qui se déhanchait sur la piste de danse.

-"Tiens," me dit Dimitri en me tendant un verre d'alcool assez fort. -"À notre amitié et notre diplôme!"

-"Et à Monsieur Marshall, le tyran!" lui rappelai-je en avalant cul sec ma boisson. -"Viens! Allons rejoindre les autres!"

Prenant ma main tendue vers lui, Dimitri me suivit vers la piste malgré les autres personnes en sueur, nous pûmes danser et crier, nous défoulant comme jamais avant de sentir ce parfum boisé qui vint chatouiller mes narines. Cessant de danser, je fermais les yeux, essayant de reprendre mon souffle tandis que le sien frôlait ma nuque.

N'osant plus me retourner, je déglutis avec difficulté dès que sa large main entoura possessivement ma taille me collant contre son torse saillant. Son parfum m'enivra et me donna le tournis que je m'accrochais à sa main pour ne point perdre pied. Sa bouche, comme à son habitude, aventurière, vint parsemait mon cou de doux baisers alors que la piste était pleine à craquer.

-"Connors," murmurais-je me mordant ma lèvre inférieure, mon corps en feu.

Pourtant, au lieu d'avoir ce sourire en coin comme à chaque fois que nos regards se croisaient, Connors sembla différent lorsque je me retournais pour contempler son visage empreint d'une virilité sans faille qui faisait toujours monter le rouge à mes joues. Sa prise se  resserra davantage me faisant grimacer de douleur.

Mes yeux s'écarquillèrent sous le choc comprenant enfin qui se tenait devant moi mais ce ne fut pas Connors. C'était Conrad qui me fit face me dévisageant longuement, ses yeux bleus comme des saphirs, noircis à l'entente du prénom de son frère qui s'échappa inconsciemment de mes lèvres.

Mais comment pouvait-il être ici?

Comment savait-il que je serais ici avec mes amis?

-"On dirait que tu n'es pas contente de me voir, Becca," s'aperçut Conrad son regard s'attardant trop longtemps sur mon bustier, avec ce sourire cynique dont j'ignorais l'existence.

-"Relâche moi!" lui criais-je dessus en me détachant de lui.

Cependant, il attrapa ma main sa prise se faisant plus forte. Mon souffle se bloqua au niveau de ma gorge alors que des larmes me vinrent du coin des yeux lorsqu'il me broya la main. Malheureusement, personne ne se soucia de mon cri, la musique la recouvrant.

-"Nous sommes toujours ensemble! Tu m'entends!"

-"Tu es vraiment fou, Conrad! Relâche moi!" m'écriai-je cette fois-ci plus forte mais ma tentative fut un lamentable échec car il tenta de me plaquer contre son torse alors que je me débattais comme une furie, les larmes brouillant ma vue.

-"Tu te tais!" chuchota Conrad d'une voix trop douce tandis que sa menace se lisait dans ses yeux semblables à celui de son frère qui présageaient rien de bon pour moi. -"Maintenant, tu me suis ou sinon, tu risqueras de ne pas aimer la suite, ma toute belle. Viens," m'ordonna-t-il en me trainant.

Me poussant devant, tenant fermement ma main, il me poussa vers la sortie qui me conduirait bientôt aux portes de l'enfer. Mais que fut mon soulagement en entendant cette voix familière criait mon nom.

-"Becca! Tu pars déjà?" s'écria Aurora qui vint nous rejoindre déstabilisant Conrad qui desserra sa prise sur mon bras alors que je m'éloignais de lui.

Lançant un regard avertisseur à ma meilleure amie qui s'arrêta, je poussais Conrad qui perdit pour quelques secondes son emprise sur mon bras mais qui me donna largement le temps de disparaitre parmi la foule. Les bousculant, voulant à tout prix sortir d'ici, je tombais nez à nez sur cette même paire d'aigues-marines.

-"Becca? Que t'arrive-t-il?" me demanda le portrait craché de Conrad inquiet.

-"Connors?" lui demandais-je pour en être vraiment sûre.

-"Mon ange? Tout va bien?"

-"Emmène moi loin d'ici, je t'en supplie, Connors! Il est ici," lui dis-je, la respiration bruyante, d'une voix désespérée. -"Je dois partir."

-"Suis moi," me dit-il, le regard assombri me prenant la main dès qu'il comprit que son frère était ici. -"Gary, à mon appartement," ordonna Connors à son chauffeur qui démarra la voiture.

M'appuyant contre la vitre, reprenant mon souffle, j'envoyai un message à Aurora d'être sur ses gardes avant de croiser le regard de mon assaillant qui venait de sortir de la boîte de nuit me cherchant sûrement. Certes, même si les vitres étaient teintées et s'il ne pouvait point me voir, un frisson glacial me parcourut dès que je vis ses yeux fixant la voiture de son frère, se doutant que j'étais dedans.

-"N'ai plus peur, mon ange," me rassura cette voix rauque dont la main rugueuse se posa sur la mienne.

Mes yeux remontèrent vers les siens qui semblaient tristes de cette situation.

-"Mer... merci," bredouillais-je d'une toute petite voix, un nœud au fond de ma gorge incapable d'oublier le regard de fou que m'avait lancé Conrad.

-"J'aurais dû arriver plus tôt, mon ange. Conrad t'a-t-il fait du mal?"

-"L'importance est que tu es arrivé," lui répondis-je, un sourire en coin évitant judicieusement de répondre à la seconde question.

-"Il t'a fait du mal, n'est-ce pas?" conclut-il, les traits assombris en se rapprochant de moi sur la banquette arrière de sa voiture en prenant ma main qui me fit grimacer de douleur. -"Le salaud! Il ne t'a pas loupé," murmura Connors d'une voix sombre en caressant tendrement mon poignet

-"La marque s'en ira, ne t'inquiète plus."

-"J'y appliquerais une pommade quand nous serons chez moi. Tu seras en sécurité là-bas, mon petit ange," m'avoua Connors en déposant un doux baiser sur la marque que m'avait infligé son frère tandis qu'un frisson d'appréhension me parcourut quand je compris que nous serions seuls.

-"Merci Connors mais pourquoi faire tout ceci? Tu peux très bien me reconduire chez moi."

-"Hors de question!" déclara l'aîné des frères Hades d'une voix ferme. -"C'est la première place où Conrad viendra te chercher. Et cesse de me remercier, mon ange,"

J'hochais la tête en guise de réponse, ne sachant plus quoi dire.

-"Becca?" m'appela Connors, sa tête se nichant que creux de mon cou.

La tension qui régnait dans la voiture était à son comble. Mes yeux se fermèrent lorsque son souffle chaud s'écrasa sur ma nuque que mon coeur fit des siennes composant ce morceau d'opéra.

Mais pourquoi!

Pourquoi vouais-je une telle attirance envers Connors?

-"Qui es-tu vraiment, Connors?" lui demandai-je troublée par mes sentiments qui grandissaient à mesure que je m'engouffrais sur ce terrain miné de nos désirs, les yeux fermés pour les rouvrir afin de me plonger dans cet océan qui me fixa larmoyants. -"Connors?" l'appelais-je mais il se détacha brusquement de moi.

Son regard se dévia vers les nombreux immeubles au lieu de me faire face. Un triste sourire en coin, il  murmura une phrase dont je ne compris pas la signification.

-"Qui veux-tu que je sois pour toi, mon ange?"

Sceptique, sourcils froncés, je le fixais avant que ma bouche s'ouvrit en grand. Cette phrase, on me l'avait dit que deux fois.

Oui, il me l'avait dit deux fois.

Tout d'abord au Jeffersons où il m'avait dit son nom puis à son bureau.

Ma main se posa automatiquement sur ma bouche, les larmes dévalant mes joues.

Impossible!

Non, ce n'était pas lui!

Ça ne pouvait pas être lui!

Et pourtant...

-"C'était toi? Au restaurant? Depuis le début, c'était toi, Aigues-marines?"

Néanmoins, il ne me répondit guère! Non, ce qui se produit me coupa le souffle, meurtrissant mon coeur. Son silence me fit douter avant que ses aigues-marines se retournèrent vers moi et qu'une larme s'écoula de son œil, cette larme d'amour, cette larme de tristesse celle de n'avoir pu le reconnaitre depuis le début alors qu'il avait toujours été là...