Aux abris
La rumeur de l'aventure d'Ereyne et Zeus fit le tour du château aussi vite que le vent dans les passages secrets. Ereyne était montée se calmer et se rassurer en récupérant son silex dans leur chambre, Zeus essaya lui aussi de s'esquiver mais il n'en eut pas la chance. Zelyan lui ordonna de s'asseoir puisqu'il tenait tant à connaître le contenu de leur conversation. Le vampire obéit non sans appréhension. Il jeta sa chevelure synthétique bouclée en arrière et s'assit avec la délicatesse d'un roi précieux. La soie de sa veste était très fine et il ne souhaitait pas la froisser. Que soient maudits les faux-plis !
Zelyan secoua la tête de dépit en l'observant faire, les millénaires ne l'avaient pas arrangés. A l'époque où il l'avait transformé Zeus était déjà très extravagant mais c'était dans des domaines plus... appropriés. Il avait une créativité sans faille lorsqu'il s'agissait de piller et tuer les autres clans d'humains durant la préhistoire. Il menait alors son petit clan d'humains à travers les montagnes de Grèce et avait eu l'audace d'attaquer frontalement Zelyan et Ereyne qui traversaient alors la contrée. Il s'était bien ramolli depuis qu'il avait établi ses quartiers au sommet de l'Olympe, depuis la Renaissance très exactement. Tout n'était devenu que fête éternelle.
L'immortel fit face à ses fils, tous deux le décevaient beaucoup. Peut-être pas autant que John qui avait pris une raclée par des humains mais presque. A croire qu'au moment où il avait le plus besoin d'eux, enfin tout était relatif, ses fils faisaient le concours du pire immortel.
— J'ai face à moi deux parfaits incompétents, Svarog pas fichu de se rendre compte que ses descendants l'utilisent et Zeus qui n'a plus d'autorité sur l'Olympe depuis des siècles, constata Zelyan outré.
— Pour ma défense aucun n'a essayé de tuer Erey-
— Silence !
Il devrait les tuer, tous les deux. Il devrait broyer leurs cervicales et les envoyer travailler en enfer.
— Je devrais vous écarteler, vous démembrer et vous donner à manger au chien des enfers !
Si je n'étais pas si occupé je vous relèverais de vos fonctions sur le champ !
Et il aimerait bien avoir le temps. Ces-deux-là ne perdaient rien pour attendre. Encore quelques mois et ils auraient une vraie punition. Encore quelques mois à attendre. Mais pour le moment ses cités sanctuaires devaient fonctionner parfaitement. Pour cela elles avaient besoin de leurs chefs respectifs. Furieux il les envoya dehors. Zelyan allait perdre le contrôle de lui-même sous peu alors mieux valait qu'il soit seul, de toute manière il tuerait quiconque se trouverait dans cette pièce. Les deux vampires obéirent sans poser de questions et se précipitèrent dans le couloir qu'ils traversèrent au pas de course alors qu'un hurlement terrifiant se faisait entendre. Il résonna dans une bonne partie et dressa l'échine de tous ceux qui l'entendirent. Ereyne qui redescendait en trembla d'effroi. Elle agrippa un peu plus son arme et se rendit dans le grand salon où, comme à l'accoutumée, les fils s'étaient rassemblés. Le grand et majestueux sapin décoré ne suffit pas à réchauffer l'ambiance devenue plus que froide. Personne n'était rassuré, certains entendaient ces cris pour la première fois, comme Izanagi ou Izanami, et ne savaient pas à quoi ils devaient s'attendre mais c'était pire pour les autres. Ereyne en pleurait et se mordait les lèvres pour vainement empêcher ce flot de larmes. Elle essayait de faire bonne figure mais avec ces hurlements revenaient d'atroces souvenirs ce qui n'arrangeait pas son état. Zeus s'était recroquevillé dans un recoin de la pièce et murmurait la tête entre les genoux qu'il ne voulait pas aller en enfer.
— Je ne veux pas mourir, je ne veux pas mourir. Jamais, jamais.
Seth s'assit à côté de sa sœur et la berça tendrement, autant pour elle que pour lui. Il dissimula les tremblements de sa main en la posant sur celle d'Ereyne et lui murmura quelques questions à l'oreille. Elle secoua la tête et le repoussa.
— Fuir ? Tu n'y penses pas ! C'est le meilleur moyen de te faire traquer !
Izanagi s'avança vers elle et lui demanda des explications à toute cette panique. Le vampire avait toujours vécu sur l'île du Japon et il était relativement jeune. Il n'avait jamais connu cette colère, pour son plus grand bien.
— Il n'y a rien à faire, à part rester discret et attendre, déclara Ereyne dont la respiration était saccadée, avec un peu de chance personne ne mourra aujourd'hui.
Pourvu qu'il reste dans son bureau, songea-t-elle, ou alors qu'il descende en bas. Elle avait une fois réussi à le calmer et pour rien au monde elle ne souhaitait avoir à recommencer. Il y avait des limites à ce qu'elle pouvait endurer.
La cloche de l'entrée surprit tout le monde. Zeus sursauta, Ysun laissa échapper un petit gémissement et Ereyne pria tous les saints du paradis que Zelyan ne l'ait pas entendu. Un bruit sourd répétitif, un galop lui prouva le contraire. Zelyan l'avait entendu et se précipitait vers le futur mort. Ereyne accourut vers le grand hall, le salon était plus proche que le bureau mais Zelyan courait vite. Ils arrivèrent ensemble dans la pièce alors que Fitz ouvrait les grandes portes derrière Caius. Le vampire vit un monstre de haine se précipiter vers lui et ne survécu que grâce à Ereyne qui se jeta dans les pattes arrières de Zelyan. Il avait une forme plus horrible que sa forme sauvage. Il ressemblait toujours vaguement à un loup mais la fourrure était partiellement remplacée par des écailles. De ses naseaux sortaient une épaisse fumée noire entremêlée de cendres ardentes. Son corps était littéralement envahi par l'enfer. De tous les fils de Zelyan il fallait que la colère de ce-dernier se focalise sur Caius. Ereyne s'accrocha à une patte du monstre et hurla de douleur lorsque son avant-bras toucha une partie écailleuse brûlante. L'immortel n'eut aucun mal à la faire lâcher prise et l'envoya au loin hors du bâtiment principal. Ce geste n'avait eu aucun impact sur lui mais avait tout de même détourné son attention vers elle si bien qu'il se précipita à sa poursuite.
Ereyne avait placé son bras dans la neige pour apaiser la douleur mais se releva bien vite et courut le plus vite possible loin de son compagnon qui était totalement hors de contrôle et inconscient. Elle maudit Natalya en passant sous la herse, tout était de sa faute et entreprit de traverser le pont de pierre mais Zelyan la rattrapa sans souci à mi-chemin. Il la fit tomber à terre mais elle se défendit et lui offrit une nouvelle estafilade le long d'une épaule. Ce silex était toujours aussi efficace.
— Zelyan ! C'est moi ! Ecoute-moi !
Elle dit tout ce qui lui passait par la tête, elle devait lui faire entendre sa voix pour le faire revenir à la raison. La bestialité la plus primale s'exprimait mais il semblait revenir à lui car il fonça sur elle et la colla contre lui. Ereyne le repoussa mais il revint à la charge et ils tombèrent tous les deux dans le lac. La jeune femme voulut se dégager et remonter à la surface mais Zelyan la maintenait fermement.
Les eaux devenaient de plus en plus sombres au fur et à mesure qu'ils coulaient et l'air venait à manquer. La différence de température entre l'eau et le corps de Zelyan était telle que des bulles se formaient. Ereyne lutta encore et encore mais ses forces s'amenuisèrent et elle finit par fermer les yeux. Elle cessa de lutter et glissa dans l'inconscience.
Lorsqu'elle revint à elle tout n'était que noirceur et obscurité. Ereyne sentit la fourrure de Zelyan contre son dos et se tourna pour mieux le voir. Le bain l'avait apparemment calmé car il avait repris sa forme sauvage habituelle. Elle se redressa et il fit de même avant de se transformer en humain.
— Où sommes-nous ? demanda la jeune femme en cherchant une quelconque source de lumière pour l'aider à se repérer.
— Dans les cachots ma douce, tu n'as jamais pris le temps de les visiter entièrement.
— J'ai horreur des cachots.
Il eut la gentillesse de craquer une torche pour les éclairer et Ereyne put voir qu'ils étaient dans une grotte communiquant avec le lac. Il ouvrit ensuite une porte et ils passèrent dans une autre pièce qu'Ereyne ne connaissait toujours pas. C'était une prison, il y avait des cellules partout, toutes occupées. L'immortelle vit avec horreur qu'il y avait une cinquantaine d'hommes et de femmes.
— Zelyan... murmura-t-elle au bord de la syncope.
— Je n'aime pas la viande congelée, répondit-il sans émotion, ça gâche le goût et elle perd des nutriments.
— Mais ce sont...
— C'est le garde-manger ma douce, je t'emmène visiter le poulailler si tu veux.
Ereyne avait vu des massacres, des génocides, des tortures de toutes sortes mais voir des gens parqués comme des bêtes dans les sous-sols alors qu'elle vivait tranquillement dans les étages supérieurs fut choquant. Elle menaçait de défaillir et Zelyan dut la soutenir. Le pire fut lorsqu'ils passèrent devant une cellule dont elle reconnut les occupantes : deux adolescentes qu'elle pensait mortes noyées. Elle ne réprima même pas sa peine en voyant l'air vide, résigné, sur le visage des deux filles. Ereyne voulut supplier Zelyan mais les mots ne sortaient pas, et puis pourquoi elles et non les autres ?
— Si tu veux cajoler la bouffe ma douce nous allons te chercher un lapin, au moins ce sera toi le monstre qui le mangera.
Elle ne trouva rien à redire et se laissa emmener jusqu'à leur chambre. Elle était restée évanouie quelques heures, c'était déjà le 24 décembre. L'ambiance joyeuse et heureuse qu'amenait cette fête était brutalement assombrie. Le château ne lui avait jamais paru si froid. Ereyne ne se détacha de Zelyan qu'une fois en haut et s'en fut prendre une douche bien chaude. Son compagnon la rejoignit en quête d'un peu de tendresse mais il lui suffit de croiser son regard terrifié pour comprendre qu'il lui avait réellement fait peur.
— Tu sais que je t'aime ma douce, je ne te ferai jamais de mal.
— C'est ce que disent tous les hommes violents, rétorqua la jeune femme.
— Quand je te dis que les humains ne sont pas à la hauteur de l'estime que tu leur portes. Je suis le Diable, quelle est leur excuse ?
Elle lui répondit qu'elle ne voulait pas en parler, pas maintenant. Zelyan la prit contre elle et ils restèrent ensemble sous l'eau silencieusement pendant quelques minutes.
— Ces abrutis manquent de tout faire capoter, je ne peux pas laisser cela arriver, murmura-t-il en écartant une mèche de cheveux trempés de sa compagne.
— Et moi qui pensais que tu t'étais énervé car ils avaient essayé de me tuer.
— Aussi.
— Tu parles, répliqua-t-elle en riant nerveusement, t'es juste inquiet pour ton apocalypse.
Il l'était, tout s'était accéléré avec la découverte de leur monde par les humains. Cet imprévu avait freiné leurs voyages et augmenté la méfiance des humains. Il avait fallu accroître la sécurité et limiter les déplacements. Le déluge en lui-même n'était pas perturbé mais la préparation des cités sanctuaires si.
— C'est la dernière fois que l'un de mes fils me déçoit, je te le promets.
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Merci d'avoir lu ce chapitre !
Pour le prochain je changerai la couverture d'Immortels le temps des fêtes de fin d'année. Je ne la mets pas pour ce chapitre (alors que c'était prévu) car un personnage sur la couverture (faite par SamanthaPryde, ne t'inquiète pas Sam je n'ai pas oublié ta couverture, j'ai juste pris du retard au niveau de l'histoire, mp si tu veux) qui devait apparaître aujourd'hui n'est pas apparu. Pas de spoiler donc mais une couverture que j'adore en réserve. Alors RDV la semaine prochaine pour un chapitre qui, si je ne prends pas autant de retard que celui-ci au niveau de l'histoire, devrait vous surprendre.
Axel.
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