Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre 20

D'habitude je ne parle pas aux inconnus mais celui-ci s'est approché bien poliment de la table que j'occupe dans ce café proche du bureau où j'ai mes habitudes chaque matin, et il m'a demandé si je pouvais lui accorder quelques minutes pour un sujet de la plus haute importance. Il n'a pas l'air de l'habituel dragueur, plutôt d'un fonctionnaire zélé qui accomplirait ce pour quoi il est payé.

J'avale une gorgée de café avant de lui faire signe de s'asseoir. Quelque chose dans son allure, dans son ton, me donnent un terrible pressentiment.

Il prend place en face de moi mais ne pas fait mine de commander quoi que ce soit. Il attend juste un instant que je soutienne son regard avec plus d'attention. Et il laisse cette attention se transformer en curiosité, puis en inquiétude.

A ce moment seulement, il sort son téléphone en soupirant et le pose sur la table en le tournant vers moi.

- Ce n'est jamais un moment agréable, vous savez...

Il déverrouille l'appareil et lance une vidéo qui prend tout l'écran. C'est un plan fixe de la chambre d'Artus, à Autun. On l'y voit distinctement et on me reconnait bien aussi. Le son est coupé et heureusement, car si ce n'était pas le cas, le café tout entier se serait déjà retourné dans ma direction.

Je deviens blême.

- C'est quoi ce mauvais roman ?

Il sourit d'un air entendu.

- C'est vrai que vous êtes éditrice...

- D'où est-ce que..., je m'exclame attirant quelques regards sur notre table.

Je reprends, sur un ton plus confidentiel.

- D'où est-ce que vous sortez ces images ?

- D'une caméra opportunément placée au bon endroit, au bon moment, me répond-il sans ajouter de détail. C'est très discret vous savez... la miniaturisation !

Je jette un œil à l'écran sur le film qui défile, au moment même où l'attitude d'Artus ne laisse aucun doute sur ses intentions. J'appuie avec affolement sur tous les boutons du smartphone dans le vain espoir de faire cesser ce cauchemar.

Il se penche vers moi avec patience et presse une touche sur le côté de l'appareil.

- C'est ici pour arrêter le film...

Avant d'ajouter sur un ton toujours courtois mais qui me parait étrangement menaçant.

-... mais pour l'effacer, c'est un peu plus compliqué.

Je ne peux m'empêcher de me frotter les yeux comme si ça pouvait suffire à faire disparaitre mon interlocuteur ou à me réveiller de ce mauvais rêve. Mais on est toujours le mardi 12 juillet, à neuf heures, dans ce café proche du bureau, et ma vie vient de se transformer en cauchemar.

- Je sais exactement tout ce qui se passe dans votre tête : « qu'est-ce qui m'arrive », « on se croirait dans un film », « quelqu'un me fait une blague », « ça n'arrive pas aux gens normaux »...

Il s'interrompt un court instant avant de soupirer.

- Nous gagnerions beaucoup de temps vous et moi si vous sautiez directement à la seule conclusion.

- Quelle conclusion ?

Encore la voix onctueuse :

- Un concours de circonstance vous place dans une situation extraordinaire. Il ne tient qu'à vous de revenir à votre vie normale.

J'essaye de contre-attaquer, avec une candeur presque risible.

- Vous êtes qui, exactement ?

- Ce que je suis n'a aucune importance. Vous, en revanche, vous vous nommez Alix Deloup, 28 ans, née à Angers, profession : éditrice, vous habitez 23 rue de la Rochefoucauld dans le neuvième arrondissement, où vous vivez en concubinage avec un monsieur... qui n'est pas celui de la vidéo.

Je ne peux m'empêcher de m'exclamer nerveusement.

- Dites-moi que je rêve ! Vous êtes... vous êtes... si caricatural !

- Les gens comme moi n'existent généralement que dans la fiction. Alors quand on les rencontre dans la vraie vie, on les trouve souvent mauvais acteurs...

- Vous voulez quoi, au juste ?

Il délivre son message d'un ton uni.

- Vous éditez actuellement un récit romanesque...

Je comprends immédiatement où il veut en venir.

- Trois cent quarante-trois raisons de mourir !

- ... qui ne doit pas paraitre.

- C'est un coup du service juridique de Total ? Parce que je peux vous dire que c'est particulièrement tordu !

Il se retranche derrière un masque impénétrable.

- Je ne peux pas révéler le nom de mes clients.

Avant d'ajouter, avec une forme de bonne volonté un peu surprenante.

- Mais je peux vous dire qu'il ne s'agit pas de l'entreprise que vous avez citée.

- Mais qu'est-ce qu'il a ce bouquin, bon sang ?

- Comme vous l'avez deviné, je ne suis pas critique littéraire, donc je n'en ai aucune idée. Ma seule demande est que vous fassiez en sorte que le livre ne sorte pas.

- Sinon ?

- Cette vidéo sera vue par des personnes qui ne devraient pas la voir.

Mon cœur se serre aussitôt.

- Fred ?

- Frédéric Matteoti, bien-sûr. Alexandre Stevenson. Georges Dürer. Vos collègues. Vos parents. Les médias, si cette histoire d'éditrice qui couche avec l'auteur à peine majeur placé sous sa responsabilité est susceptible de les intéresser...

Il ajoute en laissant planer une sourde menace.

- Pour commencer.

- Je ne sais pas si ça vous a échappé, mais dans « à peine majeur », il y a le mot « majeur ».

Il hausse les épaules.

- C'est vous qui voyez. Je ne porte pas de jugement.

Avant d'ajouter.

- La morale est un luxe qu'on ne peut pas s'offrir dans mon métier.

- J'imagine qu'à soulever les draps des gens..., je persifle.

- Pas que leurs draps, malheureusement... La nature humaine est bien peu de chose, vous savez.

La philosophie des barbouzes, ou quelle que soit sa profession, est un sujet que je n'ai aucune envie d'aborder. Lui non plus d'ailleurs, car il remet le téléphone dans sa poche avec un air pressé.

- Bon ! Il ne tient qu'à vous que je sorte de votre vie, aussi vite que j'y suis rentré.

- Ce que vous me demandez est impossible !

Contre toute attente, il sourit d'un air entendu.

- Bien.

- Quoi, bien ? Je vous ai dit que je ne pouvais rien faire !

- On va dire que c'est une base de négociation. On a fait un grand pas, non ?

Il fait mine de réfléchir et d'organiser ses idées.

- Je m'attendais à cette réponse. D'après nos renseignements, le livre est déjà imprimé. Et votre position hiérarchique ne vous permet pas de décider de le mettre au pilon.

- Je vois que vous savez tout de ma position hiérarchique, je réplique ironiquement.

Il ne relève pas et poursuit son raisonnement.

- Ce que vous pourriez très bien faire, en revanche, c'est saborder le lancement. Décourager les interviews, limiter les mentions online ou brouiller les messages, refuser les séances de dédicaces... au nom de l'auteur bien sûr. Ne pas l'informer des rendez-vous où on l'attend pour lui donner une image d'adolescent pas très fiable et un peu fantasque.

- C'est un lancement très attendu...

- Vous pourriez peut-être lui attribuer une ou deux citations polémiques que vous pourrez ensuite mollement démentir, une fois que la vox populi s'en sera emparé. Les femmes, ou les droits des minorités, c'est assez porteur en ce moment. La chasse ou la corrida restent une valeur sure. Le Troisième Reich aussi, bien sûr, mais c'est un peu galvaudé. Je fais confiance à votre imagination, il y a plein de moyens pour enterrer un livre et un auteur.

- C'est ignoble.

- Je n'ai jamais prétendu que ce serait facile !

- Vous me demandez de briser la carrière d'un des écrivains les plus prometteurs de sa génération.

- Je ne fais que sauvegarder votre droit au bonheur. D'après ce que je sais, votre couple est solide. Ce serait dommage qu'une incartade passagère...

Il rallume l'écran du smartphone toujours figé sur l'image en pause d'Artus, au moment où il me porte jusqu'au lit, et fait mine d'examiner avec attention le visage rieur et les muscles bandés.

- Rassurez-vous, on aurait tous craqué !

Je ne peux m'empêcher de prendre la défense de mon petit prince.

- Artus est beaucoup plus qu'un... joli physique !

Le maitre-chanteur m'examine froidement, avec un regard qui en dit long sur son expérience de la nature humaine. Avant de laisser tomber d'un air dédaigneux.

- Oui... C'est ce que disent toutes les femmes qui trompent leur mari.

Avec une lenteur incroyable, presque comique tant je le vois qui se défait pièce par pièce juste sous mes yeux, mon monde s'effondre.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro