PDV d'Aaron :

J'entendis la porte d'entrée de l'immeuble claquer.

Je n'étais pas encore arrivé dans l'appartement où nous avions trouvé refuge, mais je me stoppai.

Elle était partie, pour de vrai.

Elle me détestait, quand elle m'avait crié dessus, j'avais reçu trop de haine, des bribes de mon passé tentaient de se frayer un chemin dans mon esprit.

Sa voix faisait écho avec une autre que j'avais dû fuir, j'essayais de repousser son image.

La boule dans ma gorge m'empêchait de respirer, je ne voulais pas voir les images de mon passé.

Je serrai la rambarde de l'escalier de plus en plus fort.

J'inspirai une grande goulée d'air, ils n'allaient pas gagner, pas cette fois.

Une larme avait coulé le long de ma joue sans que je m'en rende compte.

Je repensais à la journée que nous venions de vivre, tout avait si bien commencé pourtant.

Les remords formaient une boule dans mon ventre.

J'avais essayé de parler à Elia, mais je redoutais tellement sa réaction, les mots restaient bloqués dans ma gorge.

Et voilà le résultat.

Je me sentais tellement coupable, mais dire la vérité à Elia revenait à trahir Siley. En tentant d'aider tout le monde, j'avais gâché notre amitié.

Mes jambes ne me portaient plus, je m'assis sur une des marches.

Le visage d'Elia revenait sans cesse dans mon esprit, j'avais l'impression qu'elle n'était plus la même quand elle m'avait parlé.

Son visage était déformé par la colère.

Mais j'avais cru voir des remords lui serrer la gorge à elle aussi.

Est-ce que j'avais rêvé ?

Je n'en avais aucune idée, mais une pointe de colère commençait à se faire une place dans mon cœur. J'en avais marre de toujours subir les états d'âme des autres, j'en avais marre d'être leur souffre-douleur.

La colère d'Elia était-elle dirigée vers moi ou Siley ?

J'essayai de m'affirmer, mais ma timidité me forçait à rester en retrait.

J'aurais dû tenir tête à Elia, lui expliquer pourquoi je n'arrivais pas à lui parler.

Mais ça, même Siley n'était pas au courant.

Parler de mon passé, c'était comme planter un couteau dans une plaie béante.

À chaque fois que j'essayais, je fondais en larmes avant même d'avoir prononcé un mot.

Je luttai pour empêcher mes souvenirs de refaire surface, mais je n'y arrivais pas.

Comme à chaque fois, mon passé m'empêchait d'avancer.

Trois ans plus tôt :

- Comme toujours, tu ne sers à rien, prends exemple sur ton frère ! Lui au moins savait faire une chose aussi banale que ça !

Je n'ose pas regarder ma mère dans les yeux, je l'ai déçue, encore une fois.

Je respire une grande goulée d'air, elle va encore m'expliquer pourquoi mon frère était si parfait et que moi je ne suis qu'une tache à côté.

Un verre est brisé en mille morceaux sur le sol, je l'ai fait tomber par mégarde.

- Aaron !

Ma mère crie, j'étais tellement perdu dans mes pensées que je ne l'avais pas entendue.

- Tu n'es qu'un incapable, je ne vais pas nettoyer à ta place !

Tremblant, je me tourne pour aller chercher un balai situé dans le placard, mais ma mère me stoppe.

- Tu ne penses tout de même pas que tu vas utiliser le balai ?

- Je... je non mère.

Ma voix n'est qu'un souffle recouvert par ces cris.

- Incapable, tu n'es qu'un incapable !

Je me baisse, je tente de ramasser les bouts de verre sans m'écorcher.

Je retiens mes larmes, je ne veux pas attiser encore plus sa colère.

J'ai presque fini de les ramasser lorsque ma mère s'approche de moi, je suis pétrifié.

J'ai peur qu'elle me fasse comprendre sa colère d'une autre façon.

Je tente de vite me relever et partir en direction de la poubelle, mais ma mère attrape mes mains avant que je n'aie pu faire quoi que ce soit.

Mon cœur s'emballe, je redoute ce qu'elle va faire avec mes mains remplies des bouts de verre.

J'essaie de me dégager, mais elle les serre de plus en plus fort.

Je sens les morceaux de verre rentrer dans la peau, je lance un cri de douleur dans l'espoir qu'elle arrête, mais c'est peine perdue.

Du sang commence à s'échapper de mes mains pour couler le long des siennes.

La douleur m'arrache une larme.

J'ai beau essayer de me dégager, elle tient bon, la douleur est si intense que je tombe à genoux.

Ma mère me jette un regard rempli de haine, ses traits sont déformés par la colère.

- Ne t'avise plus jamais de faire ça !

Je continue à gémir de douleur, elle me libère enfin de sa prise, mais les morceaux de verre sont toujours incrustés dans ma chair.

- Pourquoi est-ce que j'ai perdu ton frère et pas toi ?

Des larmes coulent le long de ses joues.

- Pourquoi a-t-il fallu qu'on m'enlève mon fils? Et pour finir de m'achever, on m'a laissé un faible comme toi !

- Je... je

Les larmes coulent toujours le long de mes joues, mais la douleur à mes mains semble secondaire face à celle qui me perce le cœur.

Ma mère a toujours préféré Xander, mais quand il est mort, elle a décidé que tout était ma faute.

J'aurais dû le sauver, j'aurais dû partir à sa place.

Et je commençai à croire ces paroles, mon père lui s'était effondré et passait ses journées à travailler au point d'eau.

Ma mère sort de la pièce, ses yeux sont toujours remplis de haine, malgré tout, j'arrive à voir une larme rouler le long de sa joue.

Je n'ose pas bouger, j'ai l'impression qu'elle peut revenir à tout moment.

- Et tu t'occupera de tes mains !

Elle me crie ça de sa chambre.

La douleur me foudroie d'un coup, avec les cris de ma mère, j'en avais oublié mes mains.

Je dois retirer les bouts de verre incrustés dans ma peau, j'essaye de me lever, mais je suis encore tremblant.

Je n'arrive pas à accepter ce que ma mère est devenue, si on peut dire qu'elle est encore une mère.

Est-ce que c'est horrible de trouver que sa génitrice est un monstre ?

À peine cette pensée a-t-elle traversé mon esprit que je m'en veux immédiatement.

Ce qu'elle vit n'est pas simple, elle a perdu son fils, mais est-ce une raison pour me faire subir ça ?

Je n'en n'ai aucune idée, je n'ai jamais connu d'autres personnes à part ma famille.

J'inspire longuement, les prochaines minutes vont être terriblement douloureuses.

Je pars en direction de ma chambre, je jette un regard en direction de celle de ma mère, elle se tient la tête entre les mains.

Je me sens coupable, tout est de ma faute !

Mais les blessures à ma main m'empêchent de totalement avoir pitié pour elle.

Une fois arrivé dans la chambre, je sors la pince à épiler que je garde pour ce genre de situation.

Un jour je m'enfuirai, un jour je serai heureux !

Retour au présent :

Je regarde l'intérieur de ma main, des cicatrices sont réparties un peu partout, comme pour me rappeler ce moment a jamais.

J'ai beau tenter de retenir mes larmes, elles coulent abondamment.

À chaque fois que je me replonge dans mes souvenirs, j'ai l'impression d'être à nouveau enfermé dans cette maison avec ma mère.

Je me demande souvent ce que sont devenus mes parents, parfois je me sens coupable de leur avoir fait ça.

Un regard en direction de mes mains me ramène à la réalité.

Ils ne m'ont jamais aimé.

Malgré moi, j'en veux à Xander, ce qui est totalement débile puisqu'il n'a pas choisi de partir et encore moins de mourir au combat.

Mais s'il n'était pas parti, tout aurait été différent, ma mère ne serait pas devenue... j'ai encore du mal à la définir.

Bref, je serais sûrement resté là-bas, j'aurais sans doute trouvé un travail au point d'eau.

J'aurais passé ma vie au village, peut-être que je me serais marié, j'aurais eu une famille.

J'aurais même pu être heureux.

Plus je me disais ça, moins j'en étais sûr, j'ai toujours vécu dans l'ombre de mon frère, même quand il était encore en vie.

Et puis je n'aurais jamais rencontré Siley, même si je lui en voulais pour ses mensonges, il restait mon ami le plus cher.

On avait traversé tellement d'épreuves ensemble que parfois j'oubliais ma vie d'avant.

Même si elle me rattrapait toujours.

Et puis il y avait Elia, j'avais du mal à l'admettre, je l'aimais beaucoup.

Malgré tout, je doutais que nos chemins se recroisent à nouveau un jour.

La dernière phrase qu'elle m'avait lancée tournait en boucle dans ma tête :

« Si tu voulais vraiment, tu aurais pu, arrête de me mentir ! »

Pourtant, je ne lui avais dit que la vérité, les mots se bloquaient avant même d'avoir franchi la barrière de mes lèvres.

J'essayai de respirer, mais une boule dans ma gorge m'en empêchait.

Je me levai, ce n'était pas en ressassant mon passé que j'avancerai. J'essuyai quelques larmes qui avaient coulé le long de mes joues.

Je montai les dernières marches qui me séparaient de l'entrée de l'appartement.

Je poussai la porte, Siley n'était nulle part en vue, il avait dû rester dans la chambre.

Il regardait le vide, j'aurais dû aller lui parler, mais ce n'était pas à moi de faire le premier pas. Au fond, c'était de sa faute si elle était partie !

Enfin, c'était le mensonge que je me racontais.

Il ne me jeta même pas un regard quand je passai devant lui.

Son regard était toujours posé sur la porte d'entrée d'où Elia était partie, j'avais l'impression d'encore sentir sa présence, je n'arrivais pas à accepter le déroulement des événements.

Je détournai mon regard, je devais aller de l'avant maintenant, ou du moins essayer...

Cet appartement m'oppressait, j'avais presque l'impression que les murs se rapprochaient pour m'enfermer.

Je ne l'avais pas remarqué, mais ces murs ressemblaient étrangement à une maison que j'avais bien trop connue.

Mon cœur battait beaucoup trop fort dans ma poitrine, des vertiges m'empêchaient d'avancer à présent. Mes pieds butaient contre le parquet, une boule s'était formée dans ma gorge, je n'arrivais plus à respirer.

J'arrivai à peine à me tenir au bord de la porte de ma chambre. À l'intérieur, aucun signe de la venue d'Elia ne restait.

J'attrapai mon sac, j'étais à bout de souffle, c'était à peine si j'arrivais encore à marcher.

Une fois mon sac en main, je me mis à courir, j'avais besoin de quitter cette maison avant de ne plus pouvoir.

- Aaron...

La voix de Siley était lointaine, je n'avais plus qu'une obsession :

M'enfuir!

Je descendis les marches avec une vitesse que je ne connaissais pas, j'avais l'impression qu'elle me suivait.

Même si je ne l'avais pas revue depuis toutes ces années, elle me hanterait jusqu'à la fin de ma vie.

Je l'entendais presque crier « Ton frère lui...» cette phrase qui avait gâché mon enfance.

Je faillis tomber à plusieurs reprises, mais mon envie folle de quitter l'immeuble m'en empêcha.

Dès que j'eus passé la porte d'entrée, j'inspirai.

J'étais resté en apnée sans même m'en rendre compte, j'entendis des pas se rapprocher.

Siley m'avait suivi, il avait lui aussi son sac.

Sans même un regard en arrière, nous nous mîmes en marche.

Destination ?

L'inconnu (et l'eau) !

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Hello ✨
Alors ce chapitre du PDV d'Aaron ?
Elia et Aaron séparés 😭
Mais peut-être pas pour longtemps 😏😂
Prochain chapitre, retour au PDV d'Elia !!
Et n'hésitez pas à commenter ou voter 😉
Allez bonne semaine 😘
                                       Gab ♡