Chapitre VII : Perdus
Siley n'avait toujours pas ouvert les yeux.
Pendant la nuit, il avait eu des spasmes de plus en plus violents. Mais ils s'étaient arrêtés aussi soudainement qu'ils étaient venus.
Il était toujours en vie, même s'il semblait vouloir la quitter à ce moment-là, à notre plus grand désespoir, à Aaron et à moi. Il ne croyait plus à la guérison de Siley, et je crois que moi non plus.
Je n'avais pas eu la chance d'être longtemps à ses côtés, mais je ne voyais pas l'avenir sans lui. Il y a quelques semaines, j'étais encore chez moi, dans une paix illusoire.
Mais aujourd'hui, j'étais aux côtés de deux presque inconnus en qui j'avais maintenant une confiance presque aveugle.
Malgré tout, les paroles de Siley tournaient en boucle dans ma tête.
« De toute façon on se séparera après le point d'eau. »
Cette simple phrase avait suffi à semer le doute en moi.
Et si tout ce que je pensais était à sens unique?
Je chassai tant bien que mal mes pensées sombres en me concentrant sur l'essentiel :
Comme nos stocks de nourriture qui étaient dangereusement vides.
Nous n'avions qu'une seule solution pour notre survie à tous, mais comment l'expliquer à Aaron?
Saurait-il l'entendre?
De toute façon je n'avais pas le choix, alors je me rapprochais de lui. Il était toujours aux côtés de son ami.
Je lui touchais l'épaule et lançais :
- Aaron, nos stocks de nourriture commencent...
- Je sais!
Il a dit cela sur un ton tellement dur que j'ai eu un sursaut. Je savais que ces derniers jours avaient été durs pour lui, mais ce n'était pas une raison de me parler ainsi.
De plus, je pense que j'avais autant souffert que lui! Malgré tout, je comprenais son attitude, il cachait sa tristesse derrière sa colère.
J'ai repris sur un ton légèrement irrité :
- Je sais que l'état de Siley t'inquiète, mais...
Il voulut me couper, mais j'ai chassé sa remarque d'un revers de main.
- Il faut que nous allions chercher de la nourriture, ce n'est pas que j'en ai envie, loin de là, mais, ça n'aidera pas Siley de mourir de faim!
Je crus qu'Aaron refusait de me répondre car il ne réagit pas immédiatement.
- Tu as raison.
J'ai d'abord cru que mon audition me faisait défaut, il avait répondu ça dans un souffle, mais en voyant sa mine déconfite, je revins à la réalité.
- Je... euh... tu es d'accord?
Il a dû comprendre que son brusque changement d'attitude m'avait déconcertée.
- Désolé, c'est juste que j'ai peur qu'il...
Les mots ne voulaient pas sortir de sa bouche.
- ...qu'il, enfin tu vois, pendant notre absence. Mais de toute façon, on n'a pas le choix. Pas vrai?
Une larme a coulé le long de sa joue, et une forte envie de le serrer dans mes bras m'a saisie. Je fus retenue par la peur que la gêne ressentie il y a quelques heures revienne.
Le voir dans cet état de détresse me rendait terriblement triste, mais il a séché sa larme et s'est repris. Je ne savais pas s'il aurait assez confiance en moi un jour pour se confier à moi.
Espérons-le.
Nous avons décidé de partir le jour suivant à l'aube, sans nourriture, car nous avions donné nos maigres restes à Siley. Qui avait réussi à avaler grâce à nos longs efforts à Aaron et à moi.
Sa température ne baissait pas, je commençais à être très inquiète car il avait beaucoup pâli. Et surtout, il gardait ces paupières constamment closes.
J'essayais de me convaincre que nous avions fait le bon choix, mais en réalité, le doute formait une boule dans ma gorge.
Et s'il mourait pendant notre absence?
Je ne me le pardonnerais jamais et Aaron non plus.
Il fallait que je me ressaisisse, ces pensées me rendaient nerveuse et je ne voulais pas qu'Aaron en fasse les frais.
C'était donc avec les nerfs en pelote que j'allais me coucher.
Aaron n'a même pas pris la peine de me parler, mais après la conversation que nous venions d'avoir, je n'avais pas vraiment envie de lui adresser la parole, et lui non plus de toute évidence.
Le lendemain matin, nous nous sommes levés avant que le soleil ne montre le bout de son nez. Dans mon sac, j'avais mis une gourde et quelques vêtements, juste au cas où.
Notre petite expédition ne devait pas durer plus d'une journée. Nous allions chercher de quoi nous nourrir et repérer la route pour atteindre le prochain point d'eau, pour quand Siley se réveillera.
S'il se réveillait.
J'ai chassé immédiatement cette pensée de mon esprit. Ce n'était pas le moment de laisser mes idées noires prendre le contrôle.
J'ai lacé mes chaussures pendant qu'Aaron finissait de boucler son sac. Je n'ai pas vu ce qu'il a mis dans son bagage, mais son regard a changé pendant quelques secondes.
Un couteau.
J'espérais de tout mon cœur que nous n'en aurions pas besoin. Car je n'avais jamais appris à me battre et mes maigres expériences de combat ne m'aideraient pas beaucoup.
J'ai lancé un dernier regard vers Siley. Il avait l'air perdu dans un rêve paisible, espérons que ce ne soit pas son dernier.
Cela devait faire un peu moins d'une heure que nous marchions, Aaron et moi, mais aucun n'osait briser le silence qui pesait entre nous.
De la sueur coulait le long de ma colonne et ma bouche était pâteuse. J'avais une impression de déjà vu.
Je ne m'habituerai donc jamais à la chaleur suffocante de ce désert qui nous servait de planète.
J'avais beau plisser les yeux depuis une vingtaine de minutes, je n'avais toujours pas vu d'animaux. J'ai enfin osé jeter un coup d'œil en direction d'Aaron.
Il avait l'air aussi épuisé que moi, voire même plus, mais il ne flanchait pas pour autant. Il commençait même à accélérer, je dû l'arrêter car mes jambes refusaient d'aller à cette allure.
- Aaron, attends!
Il se tourna dans ma direction. Il parut surpris par mon état de détresse, je fus excédée qu'il n'ait rien remarqué.
- Pa... Pardon, je suis allé un peu vite.
Sans rire!
- Bon, tu n'aurais pas vu un truc qu'on pourrait manger par hasard?
- On peut déjà éliminer tout ce qui est vivant, cela limite nos chances de trouver de quoi nous nourrir.
Je ne comprenais pas, aucun animal ne vivait ici? Ni même une plante?
- Mais alors, comment on va faire? Toutes les formes de vie ne peuvent pas avoir disparu d'ici? Non?
Il me jeta un regard désolé. J'aurais pu m'en douter, mais il faut croire que je refusais de voir la réalité.
Mais où avaient-ils trouvé les petits animaux que nous avions mangés lors du premier soir?
Comme s'il avait lu dans mes pensées, il lança :
- Certains animaux vivent dans les maisons inhabitées, à l'ombre. Tu t'imagines toi vivre dans cet enfer toute l'année?
Cette question me prit au dépourvu tant la réponse me paraissait évidente.
- Euh... bah non.
Une ombre passa sur le visage d'Aaron, et il changea de sujet sans aucune transition.
- Tu penses qu'il va bien, Siley?
Il avait posé cette question dans un souffle. Presque comme une prière.
Je cherchai une bonne réponse, mais je n'en savais pas plus que lui. Une boule d'angoisse se forma dans mon ventre. Et s'il avait besoin de nous...
Et s'il était mort?
Je chassai immédiatement cette pensée de mon esprit, il ne pouvait pas nous quitter!
Pas comme ça, pas maintenant.
Je finis tout de même par lui répondre, mal à l'aise face à son regard insistant :
- Je... je pense qu'il va bien.
Nous savions tous les deux que je mentais, mais personne ne dit rien. À force de le dire, nous espérions que ça devienne réalité.
Je ne pouvais pas empêcher mon esprit de penser à Siley, j'avais tellement peur qu'il parte avant même que je le connaisse réellement.
Cette pensée était égoïste, mais je priais pour que Siley survive. Car s'il mourait, je redoutais qu'il n'y ait plus de place pour moi dans la vie d'Aaron.
Je ne pus empêcher une larme de couler le long de ma joue. J'avais beau essayer de contenir les suivantes, elles roulaient le long de mes joues pour atterrir sur le sol, sec et sans vie.
Un sanglot m'échappa, Aaron se retourna. Il paraissait décontenancé, ne sachant pas comment réagir.
Le flot discontinu que formaient mes larmes ne voulait plus s'arrêter. Je ne me souvenais même plus de la raison de ma crise de larme si soudaine.
Pour mon père, pour ma mère, pour Siley, pour mon frère... Trop de personnes que j'avais perdues.
Ou que je risquais de perdre.
À ce moment-là, Aaron me prit dans ses bras, son geste me surprit, mais je lui ai rendu son étreinte.
Je ne pouvais pas m'empêcher de me demander s'il me rendait seulement la pareille ou s'il faisait ça pour me réconforter, en toute amitié bien sûr!
Ce moment me semblait hors du temps, j'étais comme dans une bulle avec une personne que... j'appréciais?
Il se retira vite, trop vite à mon goût, mais cette étreinte m'avait aidée à me sentir mieux.
Un petit sourire se glissa sur mon visage.
Je croisai enfin son regard, mais il le détourna presque instantanément.
Je me calai à son allure, qu'il avait ralentie. Nous fîmes le reste du trajet côte à côte sans oser nous adresser la parole, ce qui ne stoppa pas les battements effrénés de mon cœur, au contraire.
Le soleil déclinait, mais nous n'avions toujours rien trouvé. Je commençais à perdre espoir, alors qu'Aaron gardait pleine confiance en la suite.
Je ne sais pas si son optimisme était désespéré, mais je m'autorisai à y croire aussi.
À mes risques et périls.
Malgré tout, nous avions décidé de faire une pause dans une grotte que nous avions repérée quelques mètres plus loin.
Elle faisait partie de la montagne où se trouvait Siley. Elle me paraissait sans fin, mais ces couleurs me sidéraient toujours autant.
Lorsque nous entrâmes, la fraîcheur de la cavité nous surprit. Dehors, régnait une chaleur étouffante, mais ici, la température était presque trop fraîche.
Mon corps peu habitué à un tel froid réagit presque immédiatement. Je me mis à trembler, avec le bruit de mes dents qui claquaient sans que je ne puisse rien y faire.
J'avais beau faire tout mon possible pour les arrêter, ce n'étaient pas mon débardeur ainsi que mon short qui allaient me tenir chaud.
Aaron ne pouvait pas m'aider car il était dans le même état que moi. Nous n'avions jamais connu une température si basse, la nuit rivalisait à peine.
Nous nous sommes malgré tout résignés à rester dormir ici cette nuit. Je commençais à installer mes affaires quand, une fois mes yeux habitués à la luminosité, j'aperçus une légère lueur. Elle émanait du fond de la grotte qui n'était pas si petite finalement.
Elle était accompagnée d'une légère brise qui me léchait l'échine. Je comprenais maintenant d'où provenait cette température anormalement basse.
J'interpellai donc Aaron pour confirmer que ma vision ne me faisait pas défaut à nouveau, j'omis cependant le souffle froid qui ne me paraissait pas important sur le moment :
- Aaron ! Tu la vois la lumière, toi?
Il plissa les yeux puis ouvrit la bouche, stupéfait :
- Je la vois aussi!
La curiosité m'avait piquée, d'où provenait la lumière de cette cavité?
- On pourrait aller voir, non?
Aaron acquiesça et nous nous levâmes dans un même mouvement.
Mon cerveau était en pleine ébullition, que cachait la grotte?
**************************************************************************************************
Hello ✨
Qu'avez vous penser du chapitre ?
Petite aventure pour nos deux héros 😋
N'hésitez pas à voter ou laisser des commentaires 😉
Bonne semaine
Gab ♡
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro