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Chapitre 40: Cold.


Baekhyun était sous la douche lorsque Chanyeol se décida à quitter son lit. Après avoir dévoré le brunch qu'avait préparé sa mère, ils s'étaient réfugiés dans sa chambre, à l'abri des regards. Baekhyun l'avait embrassé pendant de longues minutes sans interruption. Il avait été doux et passionné. Son baiser avait un goût de sucre et d'audace. Chanyeol ne l'avait jamais senti aussi insistant, aussi pressé. C'était comme s'il l'embrassait pour la dernière fois. Comme si leurs peaux ne se rencontreraient plus jamais, comme si leurs lèvres se découvraient pour la première fois. Son corps en émoi tremblait d'impatience. Ses mains étaient agitées d'une fièvre folle et se promenaient partout : dans ses cheveux, sur ses joues, ses hanches, ses cuisses. Chanyeol peinait à suivre le rythme endiablé qu'elles lui imposaient. Sa respiration lui faisait défaut. Il se sentait faible et avait besoin de dormir, mais pour rien au monde il n'aurait gâché ce moment avec Baekhyun. Alors il avait continué de suivre sa danse en s'approchant de lui, un peu plus. Lorsque ses mains s'étaient arrêtées sur ses hanches et qu'elles s'étaient faufilées sous son pull, pour caresser sa peau délicate, Chanyeol avait cru pendant une seconde que Baekhyun voulait aller plus loin, que son discours de la veille avait été emporté par la ferveur du moment. Mais alors que son cœur s'emballait à l'idée de voir plus, de vivre plus, Baekhyun avait quitté sa peau frémissante et s'était levé de son lit.

« Il faut que j'aille prendre une douche. Je me sens collant » avait-il dit en s'étirant.

Chanyeol l'avait regardé se diriger vers la salle de bain avec assurance, comme s'il avait toujours vécu ici. Ses yeux, irrémédiablement attiré par sa silhouette, n'avaient pas su contenir leur désir avide. Malgré ses efforts pour les détourner, Chanyeol avait continué de détailler ses cuisses musclées, ses bras définis et son dos sculpté avant de s'arrêter sur son visage. Baekhyun s'était tourné vers lui sans qu'il ne s'en aperçoive. Il portait un sourire narquois, et plissait les yeux avec suffisance. Sous son regard brûlant, Chanyeol s'était senti rougir et avait baissé les yeux sur ses genoux. Il s'était fait prendre la main dans le sac, la honte le consumait. Seulement, Baekhyun ne l'avait pas laissé se morfondre dans sa gêne. Il était revenu sur ses pas et avait embrassé son front, puis son nez avant de trottiner jusqu'au couloir.

« Tu peux venir mater, ça me dérange pas » avait-il lancé depuis la salle de bain. Mortifié, Chanyeol s'était roulé en boule dans sa couette et avait grogné d'embarras. Baekhyun était parti dans un grand éclat de rire et avait claqué la porte dans son dos.

Cela faisait quelques minutes que la douche coulait. Chanyeol passa les premières secondes à laisser ses pensées le consumer en écoutant le bruit lointain de l'eau. Puis, lassé des questions qui tournaient en boucle dans sa tête, il se décida à quitter sa chambre. Au moins, lorsque Baekhyun était là, son esprit était trop stimulé pour qu'il s'abandonne à ses interrogations. Il n'avait fallu que quelques minutes de solitude pour que ses inquiétudes le démangent et maintenant, il était incapable de les ignorer. Elles étaient là, intarissables.

Depuis qu'il avait salué ses parents, un mauvais pressentiment l'agitait. Il essaya de s'en débarrasser, mais en vain. Une petite voix au fond de lui, le dissuada plusieurs fois de faire ce qu'il s'apprêtait à faire. Sa raison savait que ça ne lui apporterait rien de bon, qu'il finirait par souffrir de sa curiosité. Pourtant, lorsqu'il fut face au tiroir où les papiers étaient rangés, il n'hésita pas une seule seconde. D'une grande inspiration, il mit en sourdine sa conscience et ouvrit le tiroir. A l'intérieur, une boîte d'allumettes, des boutons de chemises et le dossier. Ses mains le saisirent en tremblant. Il attendit d'être sur le canapé pour l'ouvrir. Les élastiques se rabattirent contre la pochette dans un bruit assourdissant. Après ça, Chanyeol n'entendit plus que le bruit de sa respiration anxieuse. Il ne lui fallut pas longtemps avant de comprendre de quoi il s'agissait. En haut les caractères gras ressortaient sur le papier blanc comme de vilains moucherons.

« Convention de divorce par consentement mutuel. »

En lisant les quelques lignes où étaient inscrits le nom de ses deux parents, Chanyeol se sentit soudain pris de vertige. La main devant la bouche, il ferma les yeux alors que la nausée lui saisissait les tripes. Pendant une seconde, l'image de ses parents séparés, vivant chacun de leur côté, traversa son esprit et alors un sentiment de répulsion profond le saisit. Il avait envie de vomir. La colère, la tristesse, la trahison, le submergèrent. Comment avaient-ils pu lui faire une chose pareille ? Comment avaient-ils pu prévoir de rompre leur union dans le secret, sans le tenir au courant lui, le fruit de leur amour ? C'était un acte impardonnable. Chanyeol ne les aurait jamais crus capables d'une chose pareille. Pourtant, la preuve était là : ses parents allaient divorcer. Une simple analyse de leur comportement plus tôt, lui confirma qu'ils n'avaient pas l'attention de le lui annoncer. En les surprenant, il avait ouvert la brèche, le moment était opportun pour lui annoncer leur décision, ils n'avaient qu'à saisir la perche qu'il leur tendait, mais ils ne l'avaient pas faits. Au lieu de ça, ils s'étaient réfugiés dans le mensonge et avaient dissimulé leur trahison par des rires hypocrites.

Sur le canapé, Chanyeol se mit à trembler de rage. Ses yeux étaient toujours rivés sur le document qu'il froissait petit à petit. Plus les secondes égrenaient plus sa mâchoire se contractait et ses poings se serraient. Il leur en voulait. Dire que s'il n'avait pas fouillé, il n'aurait jamais su... Il serait mort en pensant que sa mère avait l'épaule de son père pour pleurer, qu'ils vivraient sans lui mais qu'au moins ils seraient ensemble jusqu'au bout. Ce n'était pas le cas. Une fois qu'il serait parti, sa mère souffrirait seule et cèderait à la tentation de la mort. Son père continuerait de vivre dans la monotonie jusqu'à lui aussi, accrocher une corde au plafond et sauter. Le scénario n'était pas écrit autrement. La vie où ses parents se remariaient et refondaient une famille, n'était pas celle-ci. Ils ne pouvaient pas vivre l'un sans l'autre. Sa mère n'avait jamais connu personne d'autre que son père. Elle était son premier amour. Comment pouvaient-ils se déchirer alors qu'ils s'aimaient tant ? Ce qui devait être une fin heureuse se terminerait en tragédie. Chanyeol ne supportait pas d'imaginer sa mère, succomber au chagrin et son père à la solitude. Un cri d'angoisse monta dans sa gorge. Il ne fit rien pour le retenir.

Tout à coup, la faiblesse qui l'épuisait s'évapora et une nouvelle force se dispersa dans son corps. D'un geste rageur, il attrapa le premier objet qui lui passait sous la main et l'envoya valdinguer contre un des murs. Le vase se brisa dans un bruit atroce, mais Chanyeol n'était pas encore satisfait, alors il se déchaîna sur la collection de vinyles de son père, sur les sculptures en terre cuite de sa mère, sur leurs photos de mariage, sur tout ce qu'il pouvait briser et détruire. Sa colère était si puissante qu'il ne remarqua même pas la présence de Baekhyun dans son dos.

« Chanyeol ? Que se passe-t-il ?! »

Sa voix était inquiète pourtant, face à tant de fureur, il n'osa pas s'approcher. Effaré et impuissant, il regarda l'adolescent ravager le salon en poussant des cris et en se tirant les cheveux. Ses yeux étaient rouges et remplis de larmes mais aucune ne coula sur ses joues. Chanyeol était en transe, enfermé dans sa bulle et complètement inconscient de ce qui l'entourait. Baekhyun eut beau crier son nom, rien ne l'arrêta. Il avait suffisamment de force pour le ceinturer ou l'immobiliser au sol mais il ne le fit pas. Quelque chose, au fond de lui, le persuada que Chanyeol avait besoin de ça. Il avait besoin de surmonter sa colère et si détruire le mobilier était la seule façon pour lui d'y arriver, alors Baekhyun n'interviendrait pas. La scène sembla durer une éternité. Chanyeol était essoufflé pourtant, il continua de renverser le contenu des étagères, de piétiner les livres, de déchirer les feuilles volantes. Ce n'est que lorsque la porte d'entrée claqua qu'il s'arrêta. Baekhyun tourna la tête juste à temps pour apercevoir ses deux parents, pénétrer la pièce, le visage déconfit. Sa mère fut la première à briser le silence. Elle posa les sacs de courses par terre et, sans oser s'approcher de son fils, demanda :

« Pourquoi as-tu fait ça ? »

Chanyeol se tourna vers elle et la dévisagea. Elle ne l'avait jamais vu dans un tel état. Dans ses yeux, une émotion indescriptible luisait. Son regard était tellement effrayant qu'elle fit un pas à l'arrière.

« Ce serait plutôt à moi de vous poser la question » cracha Chanyeol.

Il ne lui laissa pas le temps de répondre quoique ce soit et brandit les papiers du divorce devant ses parents. En voyant de quoi il s'agissait, son père devint pâle et sa mère se décomposa. De son côté, Baekhyun plissa les yeux pour essayer de lire l'inscription.

« Vous comptiez m'en parler quand ?! » hurla-t-il, entre ses larmes.

Sa mère sursauta et son père devint rigide. A la façon dont Chanyeol l'ignorait, Baekhyun comprit qu'il n'avait rien à faire ici et que, lorsqu'il aurait besoin de son réconfort, Chanyeol saurait le trouver. Pour l'instant, cette histoire ne le concernait pas. Même si ça lui faisait mal de l'abandonner dans un moment pareil, il jugea plus prudent de s'éloigner et de retourner à l'étage. Chanyeol ne détourna pas les yeux de ses parents. Il vit Baekhyun disparaître dans les escaliers, et même s'il avait besoin de son soutien, besoin de le sentir prêt de lui, de l'avoir à ses côtés et de lui tenir la main, il ne chercha pas à le retenir. Baekhyun lui avait laissé de l'intimité parce qu'il avait conscience que le moment était grave.

Ses parents restèrent silencieux pendant un long moment. Puis, sans crier garde, sa mère fondit en larmes. Mais cette fois, Chanyeol ne ressentit aucune compassion pour elle. C'était bien trop facile de céder à la faiblesse, de paraître fragile, quand on était fautif. Aujourd'hui, cette stratégie ne marchait plus sur lui. Chanyeol avait tellement mal au cœur, que la voir dans cet état ne fit qu'attiser sa colère. C'était à lui de pleurer, pas à elle.

- Chanyeol, soupira son père.

Il était tendu et cherchait ses mots. Sa main passa nerveusement sur son visage avant de s'arrêter sur l'arête de son nez.

- Assieds-toi et parlons.

- Non ! Je ne veux pas m'asseoir ! Vous allez tout de suite me dire pourquoi vous avez fait ça dans mon dos !

- Je vais t'expliquer mais par pitié, arrête de crier et calme-toi, implora son père.

Cette simple remarque eut pour effet d'embraser Chanyeol qui saisit un nouvel objet et le jeta de toutes ses forces contre la vitre. L'impact du verre fit sursauter sa mère qui se couvrit le visage.

- Je ne me calmerai pas ! Ne me demande pas de rester calme quand vous avez osé me faire une chose pareille. Vous m'avez menti !

- On a fait ça pour te protéger ! hurla son père.

Il était désemparé. Comment la situation avait-elle pu tourner ainsi ? Chanyeol n'aurait jamais dû apprendre l'existence de ses papiers. C'était une véritable catastrophe.

- Me protéger de quoi ?! Tout ce que vous êtes parvenus à faire, c'est me causer de la souffrance et du chagrin. Vous n'auriez pas pu faire comme tous les autres parents hein ?! Il fallait que je fouille dans vos affaires pour connaître la vérité ! Si je ne l'avais pas fait, je ne serais même pas au courant !

- Chanyeol, nous ne voulions pas te faire de mal, ce n'était pas notre intention, chuchota sa mère.

- Pourtant c'est ce que vous avez fait, persifla-t-il d'une voix froide.

Il n'avait aucun remord à attaquer ses parents. Ils l'avaient blessé si profondément qu'il ne savait pas s'il pourrait leur pardonner un jour. Un soupire douloureux quitta ses lèvres. Il aurait aimé que cette histoire ne soit qu'un malentendu, mais ses parents n'essayaient même plus de nier. Ce n'était pas un cauchemar, c'était la réalité.

- Vous avez fixé la date du divorce dans un an, pourquoi ? demanda-t-il d'une voix fragile.

Au fond de lui, il connaissait déjà la réponse. Mais il voulait avoir la confirmation. Savoir si ses parents auraient l'audace de lui mentir une fois de plus, ou s'ils seraient honnêtes et l'achèveraient une bonne fois pour toute. A ce moment-là, sa mère regarda son père avec un mélange de crainte et de tristesse et alors il sut.

- Pour être certains que tu ne le saches pas. Les médecins ont été catégoriques. La maladie affaiblirait ton corps en quelques mois, alors avec un délai d'un an, on n'avait largement le temps, avoua son père.

Son estomac se tordit et un sanglot quitta ses lèvres.

- Vous vous êtes assurés que je sois déjà mort avant de divorcer ? gémit-il en faisant un pas à l'arrière.

- Ce n'est pas ça, intervint sa mère. Nous voulions te protéger ! Pourquoi te causer de la peine alors que tu aurais pu terminer ta vie sans le savoir, sans souffrir ? Tu mérites d'être heureux pour tes derniers jours.

Les mots de sa mère eurent l'impact d'une bombe. En l'écoutant, Chanyeol se rendit compte qu'il n'était pas prêt à mourir. Que toutes ces fois où il avait cru être prêt n'étaient qu'une illusion pour se rassurer. Car au fond, personne n'est jamais prêt à attendre la mort. Sa mère avait alimenté ses espoirs. A travers sa folie démentielle et ses promesses de le sauver, elle lui avait fait croire qu'il survivrait. Mais avec ce qu'elle venait de dire, Chanyeol comprenait qu'elle aussi, avait baissé les bras.

- Alors même toi tu abandonnes ? murmura-t-il incrédule. Même toi tu crois que...

Il fut incapable de finir sa phrase. Le désespoir lui nouait la gorge. Il était chamboulé, complètement désorienté. Il ne reconnaissait plus ses propres parents. Ses émotions vacillaient entre la colère, la peur, la tristesse et la déception. Tout ce qu'il voulait, c'était s'éloigner. Partir loin d'ici. Loin de ses gens qui lui mentaient, qui cessaient désespérer, loin de cette maison remplie de trahison et de douleur. Loin des deux visages qui le fixaient comme s'il était déjà mort. Sans hésiter, Chanyeol sprinta jusqu'à la porte d'entrée, en enjambant les débris, et l'ouvrit en fracas. Il ne portait qu'un pyjama et des chaussons que la neige ensevelit en quelque secondes, mais rien ne pouvait l'arrêter. Pas même le froid mordant, la faiblesse de son corps, le feu ardent qui brûlait ses poumons, ni les cris de son père. Il devait s'enfuir, c'était une question de survie. A cet instant-là, il avait besoin d'être en lieu sûr, en sécurité. Et il ne voyait qu'un seul endroit capable de l'accueillir. Sur cette terre maudite qui ne voulait que son malheur, Chanyeol n'avait qu'une cachette. Un passage secret où la nature ne se dresserait pas contre lui et l'accepterait comme s'il faisait partie du décor. Alors il courut, toujours plus vite. Ses pieds s'enfoncèrent dans la neige, ses traces de pas se multiplièrent, ses foulées s'allongèrent comme si le temps lui était compté. Il ignora les larmes qui cascadaient son visage et gravit la colline qui le séparait de la forêt. Derrière lui, son père s'était lancé à sa poursuite. Il scandait son nom d'une voix brisée. Mais Chanyeol ne s'arrêta pas. Les mains dans la neige, il trébucha, glissa, puis se releva et continua de courir. En quelques secondes, il avait déjà disparu de son champ de vision. Son père fit encore quelques pas puis, réalisant que tout ça était inutile, s'autorisa à reprendre son souffle. Les mains sur les genoux, il pantela, les yeux fermer. Il fallait qu'il retourne à l'intérieur chercher sa femme et Baekhyun. Seul, il n'arriverait jamais à rattraper son fils avant que la forêt ne l'engloutisse complètement. A trois, ils avaient une chance.

***

Cela faisait une heure que Chanyeol était parti. Une heure qu'il avait perdu la trace de sa maison. Il ne savait plus où il était, ni quelle distance il avait parcourue. Tout se ressemblait. Les arbres étaient tous aussi grands les uns que les autres, les ombres de leur branchage toujours plus effrayantes. Mais rien ne pouvait l'arrêter. Tant que ses jambes le portaient, il courrait. Le souvenir lointain de sa cheville cassée au milieu des montagnes lui revint subitement. Cela faisait tellement longtemps qu'il n'avait pas couru comme ça, librement, sans se soucier de rien. Jusqu'ici, la maladie l'avait retenu prisonnier. Même s'il se libérait de ses chaînes pour quelques minutes, les séquelles de son traitement étaient inévitables. Ses foulées étaient plus lentes, plus lourdes. La chimio avait rendu son corps faible, mais ça ne l'empêcha pas de continuer. Il voulait courir pour oublier.

Le froid lui brûlait les doigts et le vent glacial giflait ses joues. Il ne se rappelait plus du moment où il avait commencé à claquer des dents, ni de celui où ses pieds étaient devenus indolores, givrés par la neige. Il ne ressentait plus qu'un vague fourmillement au niveau des chevilles. Ses larmes avaient séché mais il continuait de gémir sa peine. Pendant une seconde, il regretta presque de s'être enfui. Baekhyun devait être inquiet. Il avait envie de le voir, de se blottir contre lui. Il se dit qu'il aurait sans doute mieux fait de se réfugier à l'étage. Il lui aurait parlé et Baekhyun l'aurait écouté en essuyant ses larmes. Au lieu de ça, il était seul. Perdu au milieu des bois. Le froid était en train de gagner. Pour la première fois, Chanyeol ralentit et se mit à marcher. Ses pieds avaient de plus en plus de mal à progresser. A chaque pas, il s'enfonçait dans la neige et mouillait son pantalon jusqu'au genou. Ses lèvres étaient devenues bleues et ses joues roses. Il ne pouvait plus ignorer les frissons sur ses bras. Tout en repoussant les branches de son passage, il frictionna sa peau par-dessus son pyjama. Si la maladie ne le tuait pas maintenant, l'hypothermie s'en chargerait. Au bout de quelques mètres, Chanyeol réalisa qu'il n'avait plus la force suffisante pour avancer. Arrêter de courir était sans doute la pire erreur qu'il avait faite. Son corps s'était refroidi et son sang circulait difficilement dans ses articulations. Il aurait dû rebrousser chemin et faire demi-tour, mais la neige avait déjà englouti ses empreintes. Il ne savait plus d'où il venait ou dans quelle direction il allait. Le brouillard s'était épaissi et la tempête commençait à se lever. Les arbres devenaient de moins en moins distincts. En constatant qu'il était très probable que personne ne le retrouve avant la tombée de la nuit, Chanyeol sentit la panique hérisser ses poils. Il avait été tellement absorbé par sa colère, qu'il ne s'était même pas rendu compte des risques inconsidérés qu'il avait pris en s'enfuyant. Sa mère avait raison. Même si Baekhyun lui donnait l'impression d'être plus, il n'était qu'un adolescent irresponsable. Les larmes d'angoisse lui montèrent aux yeux et alors, il fut incapable de les retenir. Complètement perdu et désemparé, il s'accroupit dans la neige et pleura dans ses paumes. Il avait peur, il était terrifié par cette forêt qu'il croyait connaître par cœur. Sous la neige, tous ses repères avaient disparu. Il ne voulait pas mourir de cette façon. La neige s'empilait dans ses cheveux et coulait dans sa nuque. Il était complètement glacé. Ses pensées dérivèrent vers tous les films catastrophes qu'il avait vus. Ceux où le héros se perdait en Antarctique et finissait dévoré par un ours ou congelé par la glace. Il ne voulait pas finir comme ce héros car pour commencer, il n'était pas un héros. Il n'était pas non plus perdu en Antarctique. Simplement paumé dans une forêt parce qu'il avait cédé à ses impulsions d'adolescents. Si seulement il avait réfléchi... C'était un exploit qu'il ait réussir à tenir une heure. Mais maintenant que l'adrénaline de la colère était retombée, Chanyeol réalisait que sans ça, il n'aurait jamais survécu aussi longtemps dans la neige.

Ses dernières forces le quittaient, il le sentait. Sa respiration était laborieuse et son crâne douloureux. La maladie attaquait doucement son corps. S'il avait réussi à la tenir à distance pendant un moment, il savait que ce n'était plus le cas. Elle était en train de gagner du terrain. En se réveillant, il s'était senti faible comme il ne l'avait pas été depuis longtemps. Comme s'il venait de subir une chimio. L'époque où ses médicaments lui provoquaient des convulsions, où rester éveillé plus de deux heures, lui était impossible, n'était plus qu'un souvenir lointain. Pourtant, sous cette neige épaisse, Chanyeol eut l'impression d'être en plein dedans. Il avait mal mais cette fois, Layla n'était pas là pour lui donner de la morphine. Cette fois, il n'avait pas de plafond blanc ni de rideaux hideux auxquels se raccrocher pour ne pas délirer. Tout ce qui lui restait était le tapis blanc qui se formait sur ses genoux. Il était seul et il allait disparaître. Un coureur finirait par retrouver son corps au printemps, à moitié dévoré par les insectes. Jamais il n'aurait cru que le mort choisirait un moment pareil pour frapper. Il pensait mourir dans son lit, entouré de ses parents. Pas ici.

« Au-secours ! Aidez-moi ! » hurla-t-il au comble du désespoir. Sa voix se brisa alors que l'écho de ses appels résonnait. Il ouvrit la bouche pour crier mais aucun son ne sortit. Il n'avait plus la force de parler. Alors il attendit. Encore et encore, avec l'espoir qu'on vienne le chercher. Avec la conviction que quelqu'un l'avait entendu. Mais pendant tout ce temps, seul le vent lui répondit.

***

Il était dix-huit heures lorsque Layla remballa ses affaires. Elle retira sa blouse blanche, la fourra dans son sac et revêtit son manteau en fourrure. Son service touchait à sa fin et elle n'était pas mécontente de rentrer chez elle. Les petits vieux de la dialyse lui avaient tenu la jambe toute l'après-midi. A cet âge-là, ils ne savent que se plaindre et radoter. Elle avait suffisamment d'expérience pour savoir que leurs sujets de conversation préférés étaient : la météo, le passé, et la mort. Trop polie pour oser leur fausser compagnie, elle avait supporté leur bavardage pendant deux heures, et, en échange, avait récolté des analyses de leur sang. « J'accepte, mais c'est bien parce que c'est vous ! » avait ronchonné Monsieur White alors qu'elle lui plantait la seringue dans le bras. Après avoir envoyé ses analyses au laboratoire, elle avait fait un saut à la cafétéria et s'était rendue aux vestiaires en sirotant son café. Elle n'avait désormais plus qu'une envie, rentrer chez elle et se blottir contre Ben en espérant qu'il lui ait concocté un festin. Ces derniers temps, elle mangeait de moins en moins. Par manque de temps mais aussi par manque d'envie. Depuis quelques jours, une petite fille avait été intégrée au service d'oncologie. Elle était à peine plus jeune que Chanyeol lorsqu'il était venu la première fois. Chaque fois que Layla passait devant sa chambre, elle avait un pincement au cœur. Elle se sentait en permanence morose et n'avait plus d'appétit. Chanyeol lui manquait, c'était un fait. Il faisait partie des patients sur qui elle ne pouvait pas tirer un trait. Ils avaient passé tellement de temps ensemble, qu'elle en était même venue à oublier le jour où il quitterait l'hôpital. C'était comme perdre son petit frère. Au fond d'elle, elle avait espéré qu'il partirait guéri et qu'il viendrait lui rendre visite en pleine santé. Non seulement il n'était pas guéri, mais en plus il ne lui rendait pas visite. Seule Lisa avait tenu sa parole et passait une fois par semaine pour lui apporter des cookies. Elles prenaient un café ensemble, parlaient du lycée, de la vie et, inévitablement revenait au sujet de Chanyeol. Chaque jour qui s'écoulait, le rapprochait de sa date butoir. Layla ne voulait pas le perdre. Mais face au destin, elle était impuissante.

- Tu t'en vas déjà ? lui demanda Rose, sa collègue.

Perdue dans ses pensées, Layla ne l'avait même pas remarquée.

- Ma journée est terminée.

- Ne dors que d'une oreille, je sens qu'on va avoir besoin de renfort ce soir.

- Comme toujours...

- Ils finiront par nous tuer, j'te jure !

Layla jeta un coup d'œil circulaire aux urgences. Un petit garçon le bras dans le plâtre, un immigré pied nu qui jurait dans une langue inconnue, deux personnes âgées aux visages inquiets, une jeune fille en tenue de sport avec la cheville bandée et un homme, allongé sur le côté, les bras autour de son ventre, qui gémissait. Tous les boxes n'étaient pas encore pleins. C'était une bonne chose.

- Pas d'accident, releva-t-elle.

- Je croise les doigts pour ne pas avoir à passer la serpillère.

Layla adressa un signe de tête à Rose et porta son gobelet à ses lèvres mais, alors qu'elle s'apprêtait à franchir la sortie, une commotion attira son attention. Sur le parking, un camion s'était garé et des urgentistes déchargeaient un brancard, surmonté d'une épaisse couverture. Les portes automatiques s'ouvrirent sur leur passage alors qu'ils poussaient le lit en courant. Le bruit des roulettes sur le carrelage alerta tous les patients. Les têtes se relevèrent, les visages se froncèrent, la curiosité se dispersa. « Jeune homme âgé de dix-sept ans, en hypothermie sévère, température du corps à vingt-six degrés, plus de pouls depuis vingt minutes, pas de lésions apparentes ! » hurla un des urgentistes. Aussitôt un médecin et deux infirmières se précipitèrent vers le brancard. « Boxe deux ! » indiqua un interne en vérifiant les réflexes pupillaires du patient. Hissée sur la pointe des pieds, Layla tenta d'apercevoir son visage mais n'y parvint pas. Elle se sentait coupable de partir dans un moment pareil. Dans quelques minutes, elle serait blottie sur son canapé alors qu'un pauvre gamin était coincé entre la vie et la mort. Une des infirmières ferma les rideaux du box, pour indiquer que le spectacle était fini et, la tension dans la pièce chuta. C'était comme un soupire général après avoir retenu de l'air trop longtemps. Les patients se remirent à parler, les urgentistes retournèrent à leur camion et les standardistes reprirent leurs dossiers. Layla,elle, resta immobile, les yeux rivés sur le carrelage.

- Ils ne le sauveront pas, soupira Rose, défaitiste.

Elle jeta un coup d'œil au rideau et haussa les épaules.

 - Ne dis pas ça ! s'emporta Layla sans vraiment comprendre d'où cette fougue lui venait. Ils vont réussir je le sais ! Il n'a que dix-sept ans, il ne peut pas mourir maintenant.

Rose la dévisagea d'un air ahuri. Layla n'en avait pas l'intention, mais sa remarque l'avait tellement agacée, qu'elle s'était mise à crier. Maintenant, tout le monde la fixait comme si elle était folle.

- Je ne disais pas ça pour t'offenser, chuchota Rose

- Laisse tomber.

Au loin la voix du médecin retentit. « Chargez... on dégage ! » Layla ferma les yeux et serra les dents. Physiquement, elle n'était pas dans le box, mais mentalement, son esprit était relié à celui de ses collègues. Elle voulait que ce gamin survive. Elle ne le connaissait pas, elle n'avait même pas vu son visage pourtant, l'idée qu'il ferme les yeux à tout jamais, lui était insupportable. Ce gamin était peut-être un futur criminel, ou bien un délinquant qui volait régulièrement de l'argent à ses parents, elle n'en savait absolument rien. Mais s'il y a avait une chose dont elle était certaine, c'était qu'elle voulait qu'il survive, peu importe les méfaits qu'il avait commis. Elle voulait s'occuper de lui comme lui comme elle s'était occupée de Chanyeol. Depuis le couloir, elle pria de toutes ses forces pour que son cœur se remette à battre, mais la voix catégorique d'une infirmière réduit à néant ses espoirs. « Toujours aucun pouls. On fait quoi ? » « On continue ! Augmentez la charge, on dégage ! »

- Mais où sont ses parents bon sang ? murmura Layla en regardant autour d'elle.

Le gamin était venu seul. Personne ne connaissait son nom ou ses antécédents. Peut-être que sa mère était encore au travail et qu'elle n'entendait pas le téléphone sonner. Peut-être que son père n'habitait même pas le même pays. Une chose était certaine, Layla ne pouvait pas partir en sachant que personne ne serait là lorsqu'il ouvrirait les yeux. Elle se promit de prendre soin de lui, en attendant que quelqu'un vienne. 

- Quelle question! Ils sont juste ici. 

Layla avait été tellement absorbée par ce qui se passait dans le box qu'elle n'avait même pas remarqué leur présence. Elle n'avait pas non plus entendu leurs voix apeurées et leurs pleurs déchirants. Doucement, elle se tourna vers l'endroit que Rose pointait et posa ses yeux sur les trois silhouettes, pressées les unes contre les autres. 

« C'est pas vrai... »

Lorsqu'elle les reconnut, l'attachement qu'elle ressentait pour ce patient se transforma en véritable chagrin. Ses yeux se remplirent de larmes et à cet instant-là, elle comprit que ce jeune homme sans nom, n'était pas un inconnu. Ce n'était pas non plus un délinquant qui méritait ce qui lui arrivait. Loin de là. Son cœur se tordit douloureusement et elle ravala son cri. 

Devant elle, une des silhouettes avait relevé la tête. Layla le reconnut immédiatement. Son visage était ravagé par les larmes et l'angoisse, bien différent des fois où elle l'avait vu. Pourtant, c'était bien lui. Leurs regards se croisèrent et aucun d'eux ne fut capable de détourner les yeux. Ils se fixèrent sans un mot, partageant leur désespoir commun, d'une larme silencieuse. Puis, Baekhyun rompit leur échange et articula d'une voix sourde:  « Sauvez-le... Je vous en supplie»

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