Angel regardait les images de surveillances du port. Arrivé le matin même, il restait sous adrénaline, persuadé d'atteindre bientôt le butin.

- Colonel, j'ai des images de types chargeant des palettes sur un bateau de pêche.

- Quoi un bateau de pêche ?

- Oui. Les enfoirés, ils ont chargés l'or sur un bateau.

Il regardait les images un peu plus en détail. Avec toutes ses preuves, il ne pouvait pas douter sur cette piste. Les ressources d'Interpol et les satellites à leur disposition leur conférait des droits illimités. Et en suivant ces camions, ils allaient trouver l'or. Car plus le chemin est semé d'embuche, plus on redouble d'effort pour le suivre et plus on pense que ce qui est au bout est réel. Voilà ce sur quoi le Professeur croyait. Il avait entièrement raison. Tamayo n'hésitait pas une seule seconde d'être sur la bonne voie.

- Angel. Il est passé ou ce putain de bateau ?

- On n'en sait rien, il n'est plus sur les radars.

Puis, alors que la piste commençait à se refroidir, que les indices manquaient, une prise d'otage fut signalée en mer. Angel fut aussitôt mis au courant. La coïncidence aurait pu être suspecte si ce n'était pas l'or de tout un pays qui était en jeu.

- Colonel, le bateau est réapparu dans la mer Cantabrie. Le capitaine et l'équipage étaient ligotés dans les cabines. Je me rends sur place en hélicoptère.

- Quoi ? Comment ça ils étaient ligotés ?

Il leur arrivait plein de chose en même temps. Pour qu'ils n'aient pas le temps de réfléchir comme aimait bien le rappeler le Professeur.

Le pauvre Angel ne cessait de faire des allers entre la terre et la mer, volant à la rescousse d'un trésor invisible.

- On a vidé la cale ? S'écria-t-il, lorsqu'il interrogea le chef d'équipage.

Dans sa tête, cela ne voulait dire qu'une seule chose. L'or avait été encore déplacé.

- Oui. Ils balançaient le chargement à la mer.

L'or était dans la mer. Angel se dit qu'après cette affaire, il devrait songer à prendre une retraite. Ses yeux furent involontairement attirés par la vaste étendue d'eau. 90 tonnes d'or dans la mer. Il allait devenir fou.

- Déconne pas. Ça n'a aucun sens ! Ils ont dû mettre le chargement sur un autre bateau. Pourquoi jeter l'or à l'eau ?

- j'en sais rien. Mais il doit forcément y avoir une raison.

Et en effet, en faisant écho aux dires du Professeur, quelques mois plus tôt, ce fut la police scientifique qui donna la réponse.

***

Dans la tente de la police, Tamayo faisait face à un scientifique. Celui-ci faisait partie de l'équipe missionné pour trouver des indices dans la fonderie du déversoir d'orage. Il dévoila des plans nautiques au colonel.

- Nous avons retrouvés des plans brûlés couvrant les fonds marins. Du golfe de Gascogne en particulier mais le périmètre est trop grand.

- De combien ? Demanda Tamayo.

- 30 ou 40 milles. Mais il y a autre chose.

- C'est quoi ça ?

- C'est le schéma d'une balise de profondeur. Elle marque une position à 70 mètres sous la surface. Peut-être la position d'un objet ancré dans les profondeurs marines. Répondit l'homme en lui tendant une autre feuille, intacte.

Le colonel prit la feuille entre ses doigts tremblants. Son cœur palpitait sous l'excitation. Il pensait même que ce serait trop facile et que tout ceci n'était qu'un rêve. Mais sa méfiance s'était envolée au moment où il avait capturé la bande au grand complet. Et une intuition le guida jusqu'aux photos prisent sur le port. Là ou des hommes avaient chargés plusieurs palettes sur le bateau de pêche. Mais il n'y avait pas que ça. Et Tamayo l'avait remarqué. L'un des chargements contenait une balise rouge, semblable à celle sur la photo du scientifique. Les pièces s'emboitaient les unes aux autres. Il prit la photo.

- Là voilà votre putain de balise. Votre attention tout le monde. Il faut mobiliser la Marine. Je veux des frégates, des cuirassés, des portes avions, la totale ! On va passer la mer Cantabrique au peigne fin.

La dernière chose que Tamayo avait besoin, c'était une vidéo montrant au monde ce qu'il voulait cacher. Et malheureusement, de nouveaux problèmes allaient l'empêcher d'aller au bout de son stratagème. Le Professeur avait programmé une ultime vidéo, faisant suite à celles déjà mise en ligne. Sierra avait comme prévu chargé Shakir de la diffuser. Palerme apparut l'écran, présentateur du plus grand coup du siècle. Mais surtout, chaque mot qu'il prononçait augmentait les sueurs froides du Colonel.

- Nous revoici, comme promis. Comment avons-nous fait pour sortir l'or ? Grâce à cette merveille. Cette pompe d'extraction nous a permis d'envoyer l'or à 18 kilomètres par ces tuyaux, jusqu'à l'endroit ou notre équipe externe a récupéré les pépites, l'a fondu et l'a retransformé en lingots.

- Ceci est la preuve irréfutable que nous ne détenons plus l'or souffla le Gouverneur. A la vente du Trésor aujourd'hui, nous allons perdre des milliards d'euros. Ça se poursuivra semaine après semaine jusqu'à ce qu'on ne puisse plus se financer. C'est alors que le pays sera officiellement en faillite.

Tamayo s'épongea le front. Le Professeur avait raison. Encore une fois. Tout ça ne pouvait pas être pire. Mais alors que cette idée lui traversa l'esprit, il vit qu'il était bien loin du compte. Les braqueurs ne faisaient jamais rien à moitié. Ils n'étaient pas avare de preuve, pour éviter tout loisir au mensonge de la part du gouvernement. L'économie Espagnole était bien plus discréditée. Le coup fatal fut asséné.

- Colonel. Regardez ça !

Des images de la Marine recherchant l'or de l'Etat en pleine mer certifiait au monde la vérité. Que l'Espagne n'avait plus d'argent. Détroussé par une bande hétéroclite de Robin des Bois.

- Mais enfin qui a prévenu les médias ? S'insurgea Tamayo.

- Multipliez par dix l'ampleur de la catastrophe ajouta le Gouverneur.

Le plan Petit Poucet venait de se terminer. Donnant au Professeur une large marge de manœuvre pour négocier.