ⅤⅠ
TESS AMBER
- château suprême, territoire neutre -
Si ma semaine venait de passer à une vitesse phénoménale, je ne pouvais pas en dire autant de ce moment qui se déroula avec une tranquillité impressionnante. Du moment où j'entrai à celui où je m'arrêtai devant Olympe, je souriais avec sureté.
- Tout va bien ? me murmura-t-il tout bas en bougeant à peine les lèvres quand je fus face à lui
- Oui ça va, et toi ?
Il hocha la tête avant de prendre le bouquet que je tenais encore pour le poser par terre pour prendre mes mains. Nous nous sourîmes et je ne pu m'empêcher de dramatiquement écarquiller les yeux pour détendre l'atmosphère que je sentais autour de nous assez tendue. Cela eu don de lui décocher un petit rire qui s'arrêta vite quand nous fûmes interrompus par le discours traditionnel du roi.
- Mes chers amis, commença-t-il avant d'adresser un sourire à la foule, Aujourd'hui est un jour de joie ! Je suis plus qu'enchanté de célébrer l'union de mon fils et de la femme qu'il a choisit. Bien que ces temps soient quelques peu compliqués compte tenu des attaques voisines je vous demanderais de faire l'impasse dessus, ce soir au moins, pour que nous puissions tous passer dans les meilleures conditions la plus belle des soirées possible. Je vous rappelle que la Royauté Suprême a tout sous contrôle et que bientôt, un nouveau roi fera son ascension. Vous n'avez rien à craindre.
C'est vrai, les attaques, pensais-je. Avec tout ce qui s'était enchaîné j'avais complètement oublié les attaques qui étaient survenues non loin du château. Bien sûr la garde royale était prête alors je ne m'inquiétais pas trop pour ça - du moins j'essayais - mais j'avais été trop préoccupée par ma propre vie pour penser à ce que les habitants pouvaient ressentir.
Le Roi, acclamé suite à son discours, se tourna vers nous et nous sourit respectivement d'un air chaleureux et sincère. Il prit dans ses mains les nôtres avant de reprendre;
- Jurez vous tous deux d'être fidèle à l'autre et lorsque cela viendra, au peuple ?
Nous acquiesçâmes du même mouvement de la tête.
- Jurez vous tous deux de vous aimer à compter de ce jour et jusqu'à votre dernier ?
Le regard d'Olympe passa de son père à moi. Je sentis mes joues rougirent en voyant son sourire.
- Jusqu'à ce que la lumière quitte mon regard, répéta-t-il et mon coeur s'accéléra
Qu'il se souvienne de ces mots me surpris, j'avais dû être plus marquante que je ne le pensais en les prononçant.
- Jusqu'à ce que la lumière quitte mon regard, renchéris-je et une pointe de fierté mêlée à l'émotion fit se dresser la tête de mon amant
- Dans ce cas c'est avec un honnête plaisir que je vous déclare mari et femme.
Le silence qui régnait jusque là fut briser par les applaudissements et cris de la foule qui se leva à l'unisson tandis que le roi descendait l'estrade. A cet instant, Olympe se retourna vers moi et se pencha de manière à couvrir mon visage des yeux du public. Il n'était qu'à quelques centimètres de moi, pourtant je ne reculai pas.
- Je sais que je suis censé vous embrasser, murmura-t-il pour que seul moi l'entende, Mais positionné comme ça nous pouvons les duper. Je ne vous forcerai à rien et encore moins pour satisfaire la Cour, rappelez vous en.
Je n'eus même pas le temps de paniquer quand je réalisais que tout comme mon coeur, mes yeux explosèrent d'un millier d'éclats.
- Mais vous ne me forcez pas...
Sans vraiment comprendre ce que je faisais, ma main se posa sur l'épaule d'Olympe pour l'approcher un peu plus et doucement poser mes lèvres sur les siennes. J'attendis une seconde pour m'assurer que lui aussi consentait mais je fus vite rassurée quand il posa sa main sur ma joue, faisant s'exclamer encore plus fort l'audience qui pourtant ne devait voir que le dos du prince actuellement. Son sourire étincelait quand nous nous écartâmes, et je ne pu m'empêcher de rire nerveusement. Je réalisais à peine ce que je venais de faire, mais à ses côtés je ressentais une confiance en moi immense. J'avais le sentiment de pouvoir tout accomplir.
- Est-ce qu'on peut arrêter de se vouvoyer maintenant ? demandai-je, Officiellement, nous nous connaissons depuis quoi...trois mois ?
- Quatre, me corrigea-t-il avant d'hocher la tête, Et je ne me ferai pas prier !
Sur cette joyeuse note, le banquet commença tranquillement. En un rien de temps les lumières extérieures été allumées et toute la Cour attablée. Je n'avais jamais vu autant de tables réunies dans une même salle, surtout que j'étais placée avec la famille royale - dont je faisais techniquement partie - sur une table à part légèrement en hauteur. Je voyais parfaitement tout le monde.
- Ici, m'indiqua Olympe en me pointant du doigt une table et je le suivi du regard, La famille Marmant. Cela fait six générations qu'ils siègent à la Cour, je crois qu'ils étaient même là avant mon arrière-grand-père ! Là-bas tu as les Beleglhaw, pas aussi fidèles que les Marmant - non pas parce qu'ils ne sont pas là depuis autant de temps mais parce qu'ils ont déjà eu plusieurs procès - mais ils viennent de Topaze et mon père tient à leur force. Ceux que ma mère préfèrent ce sont les Galathilion. C'est eux qui lui ont offert ses plus précieux livres, leur fils aîné ne sait pas lire d'ailleurs mais il a pu prendre des cours particuliers et maintenant il serait presque capable d'en tenir un lui-même !
Avec excitation, Olympe continua de me présenter plusieurs familles qu'il connaissait. Il semblait très fier d'avoir tout retenu et de pouvoir faire des liens entre les unes et les autres. Pour être tout à fait honnête, sur la fin je ne l'écoutais plus. C'était au delà de mon contrôle, même si son discours m'intéressait j'étais hypnotisée dès que j'avais le malheur de poser les yeux sur lui. Etait-ce le baiser qui provoquait soudainement ça ?
- Est-ce que je peux te poser une question ? intervins-je quand il s'arrêta de parler pour boire
Dans toute l'euphorie qui l'animait, il hocha la tête, me faisant esquisser un rire.
- Est-ce que tu sais ce qui va se passer maintenant ? Je veux dire, si j'ai bien compris tu ne dois pas encore être couronné mais nous sommes mariés, qu'elle est la suite ?
J'avais toujours peur qu'il me trouve stupide mais à chaque fois que je lui posais une question, rien dans son expression de changeait, il réfléchissait seulement à comment répondre sans jamais vouloir se moquer.
- Déjà laisse moi te rappeler que nous serons couronnés mais qu'en attendant cela je dois terminer ma phase d'apprentissage, je sais qu'il me reste encore à apprendre. Je dois notamment aller avec mon père à l'Académie Jolibois mais si tu souhaites nous accompagner je suis certain qu'il n'y verra aucun inconvénient (son sourire s'élargit). Pour ce qui nous concerne directement...il y a toujours la question de l'héritage, mais le temps ne presse pas.
Je fis de mon mieux pour ne pas réagir sans relever ses mots. A la place je souris en coin ce qui le fit froncer les sourcils.
- Je suis sûre que tu me proposes de venir à l'Académie parce que tu voudrais que je vienne, avoues le.
Il dû cligner plusieurs fois des yeux de surprise.
- Qu'est-ce qui te fait penser cela ?
- Juste une intuition...
- Très juste, je te félicite.
Je m'attendais autant à cette réponse qu'à sa première réaction.
- Alors tu veux que je vienne ?
Il détourna le regard un instant sur la salle où chacun échangeait sans soucis, l'une des infimes rares fois où les Pierres se mélangeaient sans aucun accident - et soyons honnêtes ce mariage était la seule raison.
- Pour être sincère avec toi, l'Académie m'angoisse sans trop que je sache pourquoi. C'est sûrement parce que tout se concrétise soudainement et que je réalise que le statut de prince ne sera pas éternellement le mien. Mais je réalise aussi que d'être entouré, même par une seule personne, me donne confiance en moi. Je pensais alors que si tu venais...ce serait plus simple.
- Je crois que c'est la première fois que tu t'ouvres vraiment à moi..., soufflai-je en toute réponse avant de prendre sa main
Il ne sursauta pas mais cela le fit rediriger son regard sur moi. En me voyant sourire il sourit à son tour et serra ma paume.
- Tu avais déjà insinué ce qui te troublais dans tes lettres mais jamais tu ne l'avais développé, continuais-je
- J'aurais pu te faire fuir, ironisa-t-il
Du moins j'espérais qu'il ironisait, mais cela me fit me rendre compte que lui et moi étions mentalement dans la même situation et que nos angoisses - y compris vis-à-vis de l'autres - étaient très similaires voire identiques. C'était rassurant pour moi aussi, d'être comprise.
- Bien sûr que je viendrai, n'hésite jamais à venir vers moi si tu en ressens le besoin.
Il hocha la tête et même lorsque nous reprîmes des conversations moins sérieuses dans une ambiance d'autant plus apaisée, il ne lâcha pas ma main.
Cette soirée fut finalement superbe, j'étais à la fois soulagée que le mariage soit passé et soulagée qu'il ce soit aussi bien passé. Les festivités durèrent si longtemps que je compris vite que la semaine complète en serait égayée. Maatl pleura dans la soirée lorsqu'elle vint nous féliciter avec Olympe et lui semblait aussi surpris que moi de la voir dans cet état. Elle nous prit à tour de rôle dans ses bras et m'exprima aussi à quel point elle était heureuse de m'accueillir dans la famille. Je sentais malgré tout qu'il y avait un grand soulagement en elle, sans vraiment comprendre à quoi il était dû. Mais je ne voulais pas me prendre la tête avec quoique ce soit ce soir c'est pourquoi je pris partit d'ignorer mes pensées.
Au bout d'un certain temps Olympe me proposa que l'on se retire; nous n'avions rien de plus à apporter à la fête, il y avait de plus en plus d'agitation et surtout la Cour toute entière n'attendait que ce moment. Je le compris vite lorsque le brouhaha s'arrêta soudainement pour nous regarder marcher entre les tables et sortir, de nouveaux mains dans la mains, escortés par deux gardes. Dès que nous fûmes dehors il y eut des chuchotements et peu à peu le bruit revint.
- Normalement, tes affaires sont censées être rangées et prêtes au changement de chambre, m'informa Olympe pendant que nous marchions
- C'est vrai, j'avais oublié ce détail... Mais maintenant que j'y pense je n'ai jamais eu l'occasion de voir la tienne.
Il me regarda un instant et haussa les épaules.
- Je serais ravi de te la montrer mais à vrai dire tes affaires sont toujours dans ta chambre... Je ne les ai pas fait enlever car je souhaitais être certain que tu étais d'accord pour que nos appartements soient à présent mes anciens et non les tiens.
- Mais je n'ai pas le choix, si ? remarquai-je en fronçant les sourcils
- Tu as entièrement le choix. Dans les faits, la mariée a toujours déménagée chez son mari, mais rien ne nous oblige à faire de même. Pour moi ce n'est qu'une chambre, où de plus je ne suis presque pas alors ce choix n'a aucune importance. Mais je t'ai vue lorsque tu as découvert la tienne et j'ai cru comprendre - de ce que tu me dis depuis ce jour - que tu apprécies particulièrement tes appartements. De ce fait je peux être celui qui déménage, si tu préfères que ce soit ainsi.
Il me sourit, m'invitant réellement à faire un choix. Mais j'étais trop surprise par ce qu'il venait de dire.
- Je peux te demander quels sont tes défauts ?
Cette remarque le fit rire, malgré mon visage très sérieux.
- J'en ai bien plus que tu ne le penses, répondit-il mais je n'en croyais pas un mot
- Ça reste à prouver... En attendant si je dois prendre une décision...c'est vrai que je commençais à m'attacher à mes appartements...
- Alors c'est décidé ! Je sais qu'Aneth nous y attend déjà, elle m'aurait tué si je n'avais pas accepté... Tu sais c'est elle qui a trouvé tes draps et ta décoration, elle a écouté tout ce que j'avais à proposer avec beaucoup de patience et tu as obtenu la chambre que tu - ou devrais-je dire nous - avons aujourd'hui.
- Qui est Aneth exactement ? Que je puisse la remercier comme il se doit.
Je vis son sourire s'étirer d'autant plus.
- D'un oeil extérieur, une servante. A mes yeux, une amie.
Et en effet quand nous arrivâmes il y avait un petit groupe de servantes parlant, dont une qui se distinguait des autres bien qu'elle n'ai aucun attribut particulier, juste une sorte d'aura différente. Je me rendis compte que c'était un peu la même chose à la Cour; personne ne se distingue mais certaines personnes dégagent quelque chose de particulier.
En nous voyant arriver, les cinq filles s'inclinèrent et nous firent de même en souriant.
- Enchantée de vous rencontrer, leur dis-je sincèrement et l'une d'entre elle rougit en baissant les yeux, Je crois bien ne jamais avoir vu l'une d'entre vous avant, je m'appelle Tess et...
Mes yeux se posèrent sur la quatrième, m'enlevant les mots de la bouche.
- Non, j'y pense...vous je vous ai déjà vue, non ? Est-ce que c'est vous Aneth ?
Elle ne répondit pas immédiatement, surprise sûrement mais un sourire finit par étirer ses lèvres et elle effectua à nouveau une petite révérance.
- C'est bien moi, Princesse. Je suis honorée d'enfin vous rencontrer officiellement, il est vrai que nous nous sommes déjà croisées mais il n'y a jamais rien eu de plus.
A mes côtés, Olympe souriait grandement, les bras croisés dans le dos. J'étais prête à parler avec Aneth toute la soirée durant, soudainement avide d'en apprendre le plus possible sur elle, mais elle me retint en me disant que nous devrions remettre cela à plus tard car ce soir était un soir important. En cet instant toutes mes angoisses refirent surface, comme si dans l'euphorie du mariage j'en avais oublié ce qui suivait, et je me sentis divaguer.
- Est-ce que tout va bien Princesse...?
- Je ne suis juste pas encore habituée à ce nouveau titre...
Ce qui était vrai, mais pas la source de mes troubles.
- Je vous souhaite à toutes les cinq une très bonne soirée, finis-je par leur dire en me forçant à sourire le plus sincèrement possible, Merci pour votre travail, sincèrement.
Sur une dernière révérence elles s'éclipsèrent, nous laissant seuls Olympe et moi accompagnés des gardes dans le couloir.
- Es-tu certaine que tout va bien ? me redemanda-t-il
J'hochai machinalement la tête en ouvrant la porte et m'engouffrant à l'intérieur de la chambre qui avait soudainement prit un côté très repoussant. Mon cerveau fonctionnant à toute vitesse; j'essayais de trouver comment aborder le sujet, comment lui expliquer que j'avais peur, que je n'étais pas prête, qu'en réalisant que cela se concrétiser je voulais m'évanouir,... Mais plongée dans mes pensées destructrices je ne l'entendis même pas fermer la porte et s'approcher de moi. Quand il posa sa main sur mon épaule, je sursautai.
- Qu'il y a-t-il ? demanda-t-il doucement
Oh, ce que j'aurais voulu être capable de détourner le regard du sien...
- Je suis désolée, soufflais-je, Je savais que mes émotions pouvaient changer assez radicalement, surtout sous angoisse mais là... Cette soirée était superbe et je n'en changerais rien même si je le pouvais seulement voilà nous y sommes et...
Les mots restaient bloqués dans ma gorge, tout comme l'eau au coin de mes yeux.
- Et tu as peur...? essaya-t-il
Je mis un petit instant avant d'acquiescer, instant assez long pour baisser les yeux et voir Olympe me tendre sa main.
- Je ne te forcerai jamais à rien, encore moins pour la Cour, tu te souviens ? Je le pensais Tess et quelques heures plus tard je le pense encore. Surtout n'aies pas peur, si nous devenons Reine et Roi nous avons encore bien du temps pour la question de l'héritage. Rien ne ce décide ce soir, rien.
Je me résolus à prendre sa main, un geste beaucoup plus rassurant que ce que je n'aurais pu penser.
- Merci, je ne savais pas comment en parler...
- Ne me remercie pas, c'est au-delà du normal. Tu m'as rassurée pour mes propres angoisses plus tôt, c'est mon tour maintenant.
Et d'un coup je me sentais mieux, en sécurité aussi, surtout quand il m'invita à monter sur le lit en caressant le dos de ma main avec son pouce. Il s'allongea sans prendre la peine de défaire les couettes et je le suivis. Ma fatigue me frappa dès que ma tête se posa sur mon oreiller, je n'avais pas réalisé à quel point j'étais en fait épuisée. Mais allongée sur le côté avec Olympe dans la même position, me regardant et souriant, il n'y avait plus aucune émotion pour gâcher ma sérénité.
Rien d'autre que l'amour, très certainement.
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