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\Chapitre 11/


Isabelle décolle lentement ses lèvres de celles de son amante, les yeux pétillants. À chaque fois, elle doit se retenir d'aller plus loin, même si un simple baiser la satisfait amplement. Perdue dans ses pensées, des chuchotements discrets captent néanmoins son attention :

- Tu n'aurais pas dû faire ça... Maintenant, tout le monde va savoir que tu sors avec... une fille. Moi, en plus, c'est encore....

La blonde relève les yeux vers Roxanne, qui commence à paniquer au fur et à mesure qu'elle parle.

- Attend, t'es sérieuse ? l'arrête Isabelle. Si je viens de t'embrasser, c'est justement pour te montrer que je t'aime quoi qu'en disent les autres !

- Tu te fiches vraiment de leurs insultes ? Les connaissant, ils ne se retiendront pas de se moquer de toi tous les jours après ça...

- Non, je ne m'en fiche pas ; au contraire, j'aimerais leur prouver que c'est normal. Que nous sommes normales, toutes les deux.

- Comme si c'était aussi simple...

- Vu mon "influence", je devrais pouvoir en convaincre certains. Je ne veux pas être la seule heureuse à tes cotés, ils méritent tous d'aimer qui ils veulent sans avoir à supporter les remarques des autres !

Elle est incroyable
Elle est courageuse
Elle est intelligente
Elle est parfaite
Si mon cœur n'était pas déjà occupé, j'aurais été séduite
J'aimerais être comme elle
Avouer mes sentiments sans aucune honte, au moins à cette personne qui s'accapare mes pensées
Alors... Qu'est-ce qui m'en m'empêche ? Qu'est-ce qui m'empêche de faire comme elle ? D'être incroyable, d'être courageuse ! Si je veux lui offrir mon amour, je le ferai !
En suis-je au moins capable ?...
Pour elle, oui.

Isabelle est impressionnante, mais j'ai un problème plus important à régler : Ray ne répond pas au téléphone. Je devrais sûrement retrouver Clarisse, peut-être que si elle l'appelle il lui répondra. J'ai laissée mon amie dans les toilettes, mais j'imagine qu'elle est partie autre part. La question reste la même : où ?

Je scrute les environs jusqu'à complètement me retourner, apercevant une fraction de seconde les yeux de Lana posés sur moi, avant qu'elle ne détourne le regard, les joues roses. M'observait-elle ?... L'intéressée prend alors la parole :

- Neila, je peux te parler ?

J'hésite un instant, mais décide finalement de me concentrer sur Ray, m'excusant et regrettant de perdre cette occasion de passer un petit moment avec elle. À vrai dire, le seul endroit où nous nous sommes retrouvées seules est...

- Les cuisines du Nuage ! Ça te dirait de s'y voir ce soir pour discuter ?

- Oui, j'imagine. J'ai cru entrevoir Clarisse derrière toi lorsque tu es sortie des toilettes, que... que faisiez vous ?

- Oh, on essayait d'appeler Ray...

- C'est vrai qu'il est allé au Nuage hier !... réalise Lana. Il a réussi à sortir ?

- Normalement, la plupart des adolescents attrapés par les policiers ont été libérés, ce qui signifie que Ray est ailleurs. C'est lui qui a fait sonner mon téléphone en classe, mais maintenant il ne répond plus. Je pensais à prévenir Clarisse pour qu'elle l'appelle... Oh, mais suis-je bête ? Il y a beaucoup plus simple ! 

Je me précipite vers les bancs à l'autre bout de la cour, une Lana dubitative me suivant. J'y trouve comme attendu la bande des "populaires", et m'approche rapidement pour les scruter. Étrangement, ni Hidji ni Paolo ne semble être là, alors qu'ils sont un peu comme les dirigeants du groupe. Je prends mon courage à deux mains et interroge une fille dont je ne connais pas le nom :

- Euh, excuse moi ? Où sont Paolo et Hidji ?

- J'en sais rien, euh... Tu es qui, au juste ?

"Rien, rien", je réponds en m'éloignant, Lana toujours sur mes pas. Je remarque deux silhouettes au fond de la cour, adossées au mur à discuter, et reconnais mon frère et son meilleur ami. Nous arrivons discrètement vers eux, et je pose une main sur l'épaule de mon frère pour lui signaler ma présence. Il sursaute et s'écarte brusquement de Hidji, avant de sembler désolé. Son ami paraît vexé, et je me fais la réflexion que son geste était étrange, il est pourtant souvent collé à Hidji, ce n'est pas une nouveauté. Intriguée, je pose tout de même la question :

- De quoi parliez-vous ? 

- En quoi ça te concerne ? prononce sèchement Paolo.

- J'ai entendu les derniers mots.

- Ah bon ? Répète alors ! 

- Vous parliez de vos mères ou...

- Faux, on parlait de sexualité !

Hidji et Lana détournent le regard avant que mon jumeau ne réalise sa bêtise. Sa main tremble comme s'il voulait se donner une claque, mais il reprend vite contenance :

- Pourquoi êtes-vous venues nous voir ?

- C'est par rapport à Ray... j'hésite, gênée de l'avoir exposé ainsi. Est-ce que tu pourrais l'appeler ? 

- Pourquoi moi ? C'est toi, sa meilleure amie.

- Parce qu'il est... Peut-être qu'il fera plus confiance à un garçon, je n'en sais rien.

- Ne ments pas, ce n'est pas son genre. Il y a quelque chose entre vous deux, vous vous êtes disputés ?

- Pas du tout ! C'est juste que...

- Que ?

- Qu'on n'a pas le temps ! nous interromp soudainement Lana. Enfin... Ça va bientôt sonner, il faut se dépêcher.

Paolo acquiesce et fonce vers les toilettes, son téléphone dans la poche. Lana le suit pour l'attendre à l'extérieur et avoir des nouvelles rapides, mais je préfère rester avec Hidji qui n'a pas l'air de vouloir se déplacer. Je m'adosse contre le mur à un mètre de lui, et engage la conversation :

- Alors, qu'est-ce qu'il te racontait ?

- Il s'excusait, marmonne Hidji.

Lui qui parle toujours fort, je me demande ce qu'il s'est passé pour qu'il devienne aussi morose.

- Paolo, s'excuser ? C'est une blague, c'est ça ?

- Non, il s'est excusé sincèrement. Même si j'aurais préféré qu'il le fasse dans un autre contexte...

- Quel était le sujet de la discussion ? 

- Je... je ne veux pas te répondre. Peut-être dans quelques temps. Laisse moi y réfléchir, tu n'auras qu'à demander à Paolo entre-temps.

- Mais il ne voudra jamais me le dire !

- Bon... soupire Hidji après un long moment. Paolo s'est excusé de m'avoir fait espérer bêtement.

- Comment ça ? je demande.

- T'abuses pas un peu là ?! s'exclame le garçon d'un coup.

- Oh, je...

- J'ai voulu lui faire avouer qu'il m'aime, mais il aime un autre mec, voilà ! 

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