20 ~ Criminals
Bien que l'air que je peinais à reprendre semble être de nouveau chassé de mes poumons, j'ai le réflexe de basculer violemment ma tête en arrière. Je cogne de plein fouet le menton de mon agresseur qui pousse un grognement de douleur et tombe à la renverse, m'attirant avec lui dans sa chute, ou plutôt avec elle. Après ce coup mon crâne me brûle et ma tête se met à tourner, cependant il me semble bien discerner des grognements féminins.
Son bras est toujours contre ma gorge, mais sa poigne n'est plus la même, alors je profite de son état d'étourdissement lié à la chute pour m'écarter d'elle, ne laissant que ses ongles raper la peau de mon cou en voulant me rattraper. Je fais quelques mètres à quatre pattes, écarte mes cheveux humides de mon visage et me redresse tant bien que mal, glissant dans les flaques que je venais de faire. Je dois traverser le pont.
Je ne me retourne même pas pour voir si la fille me suit ou non et le traverse à vive allure, prenant la direction du dortoir des professeur lorsque je reçois quelque chose au visage.
Je vois blanc l'espace d'une seconde et m'écroule au sol, un goût de sang venant se répandre dans ma bouche pâteuse. Je ne sais plus où ni comment je suis, tout tourne autour de moi et la noirceur alentour n'aide en rien.
Une douleur écrasante se répercute le long de mon visage, mon pouls tambourinant dans chaque veine, dans chaque parcelle de ma peau, comme si tout mon corps était prêt à exploser. D'où cela venait ? Mes oreilles sifflent et rien que redresser la tête semble être devenu l'effort le plus intense que j'aie jamais fait.
Sauf que ce n'est pas moi qui redresse ma tête. Je suis soulevée, traînée lourdement contre la glace et la seule chose dont je sois certaine, c'est qu'on m'approche dangereusement du pont. La lumière du champ devient plus intense et un déclic m'électrifie.
Je me débats automatiquement, sachant très bien pourquoi je suis trainée de ce côté.
La peur ne paralyse pas mon cerveau, au contraire, tout semble clair sur l'instant.
Je remonte mes bras vers le haut, trouve la veste à ma portée et exerce une pression si forte que mes épaules entreprennent un mouvement inconnu mais pas inespéré. La deuxième personne, qui est également une fille, bien plus lourde, pousse un cri et avec ma force, passe au dessus de ma tête, son visage heurtant la glace de plein fouet alors que ses genoux se logent dans le haut de mon dos. Une douleur aiguë me traverse et chaque poil, jusqu'à mes cheveux, se dresse dans un frisson. Ne pouvant bouger, je cherche à découvrir qui est cette seconde fille, mais je ne vois pas son visage.
Non pas parce que ma tête tourne encore, mais parce que son visage est caché derrière un tissu noir. Seuls ses yeux, hagards, sont visibles. Ils papillonnent, elle est dans le même état que moi, sauf que je suis encore suffisamment en alerte pour entendre des bruits de pas de course sur le pont. Je pousse les jambes inertes de mon dos et m'extirpe en rampant, essuyant l'eau et le sang de mon visage et trouvant au sol une barre en fer, couverte de sang.
Mon sang.
C'est ce que j'ai reçu en pleine tête.
Je l'attrape au bon moment, car je suis tirée par les pieds, la glace ne permettant pas, ni à mes doigts, ni à mes ongles de s'y accrocher. Je tente de me mettre sur le dos alors que je suis tirée sur le ventre, contorsionnant mon corps trempé et glacé pour réussir à atteindre les doigts qui maintiennent mes chevilles, arrachant un cri hystérique à la fille.
Mes jambes retombent d'un coup au sol, mais je sais que ça ne sera pas pour longtemps, alors je donne un coup de pied en plein dans son visage qui s'est abaissé devant moi.
Ses cervicales craquent et son corps bascule en arrière.
Je me redresse, faisant face à une masse noire. C'est la costaude.
Les deux portent des combinaisons noires, ainsi qu'une cagoule, mais celle face à moi est de travers et des cheveux blonds en bataille s'en échappent. Elle m'empêche de passer. Derrière moi se trouve le pont, avec l'autre fille qui se redresse malgré une vive douleur au cou qui est, je sais, la raison pour laquelle elle ne cesse de geindre. Je n'ai pas d'autre choix que de me battre.
Elles sont épuisées, blessées, et heureusement pour moi elles ne sont pas réellement redoutables, car je frappe aisément la blonde au visage, son nez se brisant sous mon poing. Pourtant, bien qu'elle souhaiterait s'arrêter pour éponger le sang qui s'en écoule, elle se rue à nouveau sur moi dans un cri désespéré. Je ne peux pas reculer, il y a l'autre fille, la barre en fer se dressant dans sa main tremblante. J'évite de justesse un coup sur le crâne, que je prends en plein sur mon épaule droite tandis que la blonde face à moi tente de m'étrangler, me poussant malgré moi en arrière.
Bien que je sois de nouveau à terre, les coups de l'autre fille sont décousus, incohérents. Tantôt elle tape dans le vide, tantôt elle réussi à me toucher à l'estomac et je ne peux l'éloigner que d'un coup de pied dans ses chevilles tremblantes. La blonde elle, elle sait ce qu'elle fait, en appuie ses pieds à la hâte sur mes mains et mes poignets, écrasant mes doigts au passage alors que je pousse un grognement de douleur. Le cuir de ses semelles s'enfonçant dans ma peau.
Si je criais à l'aide est-ce qu'on viendrait m'aider ?
Au dessus de moi elle gigote, cherchant quelque chose dans sa veste et extirpant un objet au vif reflet d'argent.
Quand je vois la lame briller au dessus de mes yeux je comprends que le pire est devant moi, sentant mes pieds être à nouveau tirés. La blonde place le couteau entre ses dents rougies par le sang de son nez cassé et me soulève par mes poignets endoloris. Je me contorsionne dans tous les sens, sentant mon cœur battre de plus en plus fort alors que les deux filles s'apprêtent à me jeter du pont, l'une me donnant un coup robuste dans l'abdomen, déjà fragilisé pas le coup de la barre.
Je n'ai plus mon masque, si je tombe et que je traverse le champ...
Un cri retenti, un cri aigu et sauvage, qui fait tout autant sursauter les deux filles que moi. Le cri se rapproche en quelque secondes, couvrant des pas de course et d'un coup la blonde me lâche, occupée ailleurs. Celle qui tenait mes pieds me lâche aussi et en me tournant je trouve Moly, grimpée sur le dos massif de la blonde, tel un petit singe, son bras fluet cherchant à entourer la gorge à sa portée et y plantant ses ongles.
L'autre fille va pour aider sa camarade, mais je parviens à me jeter sur elle, ses bottes venant heurter ma mâchoire et ma bouche déjà ensanglantée alors que je tire à présent sur sa combinaison pour passer au dessus d'elle. Elle est bien plus frêle que la blonde et heureusement, car elle perd facilement l'équilibre et s'effondre au sol à chaque tentative, à limite de tomber du pont.
Complètement surpassée et à bout de force, elle essaye à présent de me faire tomber du pont en me donnant des coups de pieds, comme une enfant.
Et je n'en suis plus loin, car lorsque je recule et que je pose ma main dans mon dos, celle-ci s'enfonce dans le vide, me faisant perdre l'équilibre.
« PANDORE ! »
Hurle Moly.
Je tâtonne le sol, cherchant un appui alors que la fille devant moi se redresse, sortant à son tour un couteau d'une main tremblante. Elle n'est pas sûre d'elle. Ses jambes sont tordues par l'appréhension, elle halète sous son masque à présent de travers et son couteau est pointé vers moi. Mais elle n'ose pas avancer sur le pont, sa tête est penchée, sûrement à cause du coup que je lui ai porté aux cervicales et je sais que j'ai donc l'avantage.
Je reste à genoux un instant pour réfléchir à une fuite, levant de temps à autre la tête mais c'est à cet instant que je le vois, cet autre couteau, posé sur la gorge de Moly.
Il ne m'en faut pas plus pour fouetter brutalement mon sang. L'équilibre et le vertige ne sont plus rien pour moi lorsque je cours et plonge ma tête dans le ventre de la première fille face à moi. Elle me donne un coup avec son couteau mais ne réussit qu'à entailler mon dos avant de le laisser tomber au sol. Il rebondit sur la glace dans un bruit sec, avant de tomber du pont.
Je dois aller aider Moly. Je donne un coup de tête radical à la fille et m'extirpe de sa poigne, mes épaules finissant de relever sa cagoule d'où s'échappent de longs cheveux noirs et découvrant une partie de visage.
Je la connais.
J'hoquète et finalement recule sous la stupeur tout en arrachant le reste du tissu. Tuméfié, le visage de Minna apparait à la lumière, cette dernière pignant de douleur après un mouvement de tête. Ses yeux méconnaissables et troublés par les larmes se posent sur moi alors que je reste en recul; le choc m'immobilisant dans ce moment qui me parait hors du temps.
« O...On n'a pas eu le choix ! –Pleurniche Minna, ne sachant plus si elle doit rester au sol ou se redresser pour me faire face-
-Bande de traîtres ! –Hurle Moly avant de pousser un hoquet de peur lorsque la lame s'appuie un peu plus contre sa peau-
-Lâche-la ! –Je cris, à bout de souffle- Ce n'est pas elle que tu veux mais moi non, Vénus ? »
Elle ne dit rien et d'un geste, retire sa cagoule. C'est bien Vénus derrière Minna, l'arcade et le nez cassés, son sang s'écoulant à présent sur Moly qui me regarde terrifiée. Bien que je m'y attendais, mon cœur se serre. Pourquoi mes amies ont-elles essayé de me tuer ?
« V...Vous saviez que j'étais là ? –Je balbutie- Que je serais là ?
-O...on a reçu un message et... Et des instructions –Dit Vénus qui tente de contrôler sa voix mais sans retirer le couteau de la gorge de Moly- O...On n'avait pas le choix Pandore, c'était toi ou nous... Joe et Tray, ils...
-Joe ? C'est Joe qui vous a dit que je me trouverais ici ?! »
Ma voix est méconnaissable. Serait-il possible qu'il m'ait tendu un piège ? Qu'il ait demandé aux filles de m'attendre après que je sois allée voir ce qu'il voulait que je vois ? J'essaye d'avancer en titubant, mais à chaque pas, Vénus se crispe sur son couteau et Minna se met sur mon chemin.
Le goût de sang dans ma bouche n'est rien comparé à l'amertume qui me submerge en cet instant. Amadalia, Joe, le Noyau et maintenant ceci.
Et Moly qui pousse un gémissement, essayant de s'extirper de la poigne de Vénus.
« Pourquoi tu es là toi ?! –Lance-t'elle d'une voix perçante à la petite-
-Je vous ai suivies, j'ai entendu que vous aviez toutes deux reçu un message au moment où Pandore est partie, je savais que ce n'était pas une coïncidence.
-Tu n'aurais pas dû faire ça, tu seras la prochaine sur sa liste -Elle déglutit- Qu....Qu'est-ce qu'on fait d'elle Minna ? Est-ce qu'on le laisse s'en occuper ?
-Elle va nous dénoncer aux autres professeurs ! Si elle nous dénonce c'est fini pour nous !
-Je te jure Vénus que si tu la touches tu me le paieras ! –Crié-je à la blonde qui semble perdre ses moyens, visiblement tiraillée entre une peur que je ne connais pas et celle de devoir m'affronter-
-N'avance pas Pandore! -Me prévient Vénus, les yeux exorbités par la peur- Sinon je... je la tue!
-Mais tue-la ! –Beugle Minna- C'est elles ou nous !
-Comment tu peux dire ça alors que nous sommes tes amies ? –Je lâche, écœurée-
-Je... Je m'en fiche! Je... Il... Il va me tuer si on ne le fait pas, il va nous tuer !
-Qui ça il ? Joe ? -Je demande en m'approchant doucement de Vénus- Vénus, Minna on se connait depuis qu'on est enfants, ne... ne faites pas ça, ce n'est pas vous!
- Tu ne sais pas qui on est ! -Hurle Vénus d'une voix stridente- I..Il n'y en a toujours eu que pour toi! Même ici!
-Arrêtez on va s'en sortir -Dis-je d'une voix maladroite, espérant gagner du temps- Vous... vous allez partir sur Terre, v...
- ARRÊTE ! -Hurlent-elles en même temps-
-Moly n'a rien a voir là-dedans! -Dis-je en pitié-
-Elle nous a vues!
- Je ne veux pas mourrir ici Vénus -Marmonne Minna les yeux noirs- JE NE VEUX PAS MOURIR ICI ! TUES-LA VENUS, TUES-LES TOUTES LES DEUX !! »
Aussitôt que je vois la lame s'enfoncer je me jette dans leur direction telle une furie, me heurtant à Minna de plein fouet. Je pourrais la dégager d'un geste, mais si je fais ça, elle tombera du pont. Et je ne peux pas la tuer.
Pas même si elle, elle tente de le faire.
Je refuse de faire ça. Je veux juste protéger Moly.
Je la repousse vers Vénus et la fin du pont, sentant le bout de ma semelle glisser contre le rebord alors qu'elle appuie ses deux bras contre les miens pour essayer de me pousser, donnant des coups de coude dans mon visage pour prendre l'avantage.
Le fait d'être debout est un handicap. Le poids de nos corps en mouvements pourrait être le facteur déclencheur d'une chute. Aussi mon corps tremble d'épuisement, entre la nage, la lourdeur de ma combinaison encore trempée et mes précédentes tentatives pour m'enfuir ; Mes jambes flageolent et si elle le voulait, Minna pourrait aisément m'avoir. Mais elle ne se focalise que sur la partie haute de mon corps, elle ne me donne que des coups de pieds contrôlés, elle aussi consciente que son équilibre est tout aussi menacé sur le pont. Elle sait parfaitement qu'elle ne fait pas le poids face à moi et qu'elle n'arrivera pas à me tuer, à moins qu'elle ne tombe avec moi.
Elle hurle, se débat et alors que sa veste de combinaison glisse, je remarque les veines de son poignet droit devant mes yeux. Elles n'ont rien de normal, elles sont noires et épaisses, seulement cette anomalie est localisée au poignet et semblent disparaitre le long de son avant bras.
« Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ?! »
Mais elle ne me répond pas. D'épaisses larmes ruissèlent sur ses joues rougies par l'effort et je sais qu'elle met toute son énergie restante à essayer de me faire tomber. Je n'ai plus le choix, si je veux passer je dois la pousser et elle tombera.
Tout s'accélère.
D'un coup les lumières de l'Iceberg s'allument, des cris de Gardiens montent à nos oreilles. Moly saisit cette occasion pour s'emparer du couteau de Vénus, le prenant par la lame ce qui entaille ses mains en un rien de temps, puis elle accourt jusqu'à Minna et moi.
« Non Moly va-t'en ! –Je cris- Va te cacher, sauve-toi ! »
Mais elle ne m'écoute pas et s'apprête à planter le couteau dans le dos de Minna, Vénus hurlant sur ses talons lorsque toutes deux se figent, fixant quelque chose au niveau de mon visage.
Ou plutôt derrière moi, car même Minna devient livide, ses yeux s'écarquillant de peur.
« PANDORE BAISSE-TOI ! »
Je n'ai pas le temps ni de tourner la tête, ni de faire ce que me crie Moly qu'un bruit fait frissonner mon échine puis mon corps tout entier. Je connais ce bruit, ce sifflement aigu qui fend l'air, suivi d'un bruit sourd.
Et devant moi, le visage de Minna se change en une grimace terrifiante. Ses lèvres s'ouvrent en grand, chassant l'air, alors que ses yeux papillonnent, la peur gravée sur ses iris noirs. Elle titube, s'écartant suffisamment de moi pour me laisser voir le couteau en argent planté directement au niveau de son flanc. Elle se met à haleter alors que du sang s'écoule de l'arme et de sa bouche puis finalement, elle croise mon regard. Je suis tétanisée, mes bras encore tendus, comme cloués dans le vide.
Il me semble qu'elle tente de se tenir à moi dans un dernier geste, ses doigts agrippent mes mains tendues, mais de façon si fantomatique que je ne ressens qu'une désagréable sensation de froid, avant que son corps ne bascule en arrière et ne tombe du pont.
Traversant le champ en quelques secondes et disparaissant de notre vue.
Je ne peux plus bouger.
C'est Moly qui tire sur ma manche, voulant m'éloigner de quelque chose dans mon dos.
« Décidément, il semblerait que malgré votre échec, mon plan ait finalement réussi »
Mon sang se glace et je me jetterais bien du pont moi-même si Moly ne me tirait pas.
Vénus met quelques secondes de plus à réagir, ses yeux presque sortis de ses orbites, avant de tenter de s'en aller d'un pas maladroit, mais bientôt des Gardiens arrivent de tous les côtés, ainsi que des professeurs. J'entends Mélawi leur demander de ne pas faire de mal aux élèves et je prends conscience de la situation dangereuse dans laquelle nous nous trouvons toutes les trois lorsque Moly se met à pleurer, me tirant vers elle pour se protéger.
Je la serre contre moi, du moins c'est ce que je souhaite ordonner à mon corps, avant d'inspirer un bon coup et de me tourner vers Tray. Un sourire machiavélique étire ses lèvres, comme souvent, mais cette fois-ci j'ai réellement peur. Il traverse le pont à la hâte, ses yeux remplis d'hystérie ne lâchant pas les miens.
Mon seul réflexe est de reculer, gardant fermement Moly derrière moi, lui écrasant les pieds et manquant de lui tomber dessus alors qu'elle continue à me serrer le plus fort possible. Je suis tout aussi effrayée, décontenancée et je sais que rien ne me fera lui tenir tête cette fois-ci. Tray a gagné.
« Je ne remercierai jamais assez Joe pour cette occasion –Son sourire se fait plus large, le rendant presque inhumain- Tu es à moi maintenant Pandore. Quant à toi Vénus, tu es pitoyable. Comment avez-vous pu échouer ? Vous étiez pourtant deux, je me suis dit que ce serait au moins à votre portée, bêtes comme vous étiez, mais je vous ai surestimées.
-N...Nous n'avions pas prévu Moly !
-Ah oui c'est vrai, j'oubliais ce petit détail inattendu. Peu importe, tu n'auras pas servi à rien petite. Quel est ton matricule déjà ? »
Il s'avance vers elle, mon corps interposé n'étant en rien un problème pour lui alors qu'il cherche à lire le matricule tatoué sur son poignet en la tirant de côté. Moly n'arrive plus à lutter, je la tiens de peur qu'il ne la pousse, mais il est collé à moi, littéralement. Je sens son souffle rythmé par l'excitation agresser mon visage meurtri.
Au même moment les Gardiens arrivent, nous hurlant de ne plus bouger.
Mais mon instinct me dit de bouger.
Seulement je ne suis pas assez rapide.
Car à peine ai-je agrippé les épaules de Moly pour l'envoyer en arrière que Tray a déjà sorti un autre couteau de sa manche, l'enfonçant sans hésiter dans son ventre et lui arrachant un hoquet fluet, suivi d'un râle rauque.
« MOLLY! »
Puis il lance le couteau pars dessus le pont, se reculant à la hâte tout en s'adressant aux Gardiens de manière théâtrale.
« Amenez Amadalia ici, nous avons une Illégale coupable de meurtres. »
Je me laisse tomber aux côtés de Moly qui se vide de son sang, ses poings se fermant désespérément sur ma veste alors que je cherche à éponger sa plaie à l'aide ma combinaison. Je lui dit que tout va bien, que tout ira bien, mais déjà ses yeux se mettent à rouler.
Vénus ne fait rien, comme si elle était morte elle aussi, mais de l'intérieur.
« AIDE-MOI ! –J'hurle enfin- BORDEL VÉNUS AIDE MOI ! »
Mais son regard jongle entre le mien et celui de Tray.
« Que diras-tu à Amadalia quand elle t'interrogera Vénus ? Qui a tué Minna Bert et la Native ? –Demande Tray d'une voix joueuse alors que la blonde ne répond pas- Réponds, ou tu es la prochaine. Vous m'avez déjà énormément déçu, tu devrais t'estimer heureuse d'être encore en vie. Je répète donc ma question, qui a poussé ton amie Minna du pont ? Et qui a poignardé cette petite ?
-P...Pandore –Dit-elle d'une voix dénuée d'émotion alors que je lâche un cri de rage, restant malgré tout auprès de Moly-
-Parfait. Et pourquoi ?
-J...Je ne sais pas –Balbutie-t'elle, au bord d'une crise de folie-
-Non c'est vrai, tu ne peux pas savoir, tu es bien trop bête. Tu diras seulement que Joe vous aura demandé de la suivre, car il se méfiait d'elle en tant que nouveau membre de l'AGFA et surtout qu'il vous aura donné l'ordre de l'éliminer si elle s'avérait dangereuse. Après tout, la première partie est vraie, sans lui je n'aurais pas su moi-même que tu projetais de faire une petite sortie illégale Pandore. »
Tout ce que j'entends semble entrer par une oreille et ressortir, sans pour autant totalement disparaitre. Le prénom Joe martèle mon crâne, ainsi que des bribes de notre dernière conversation au salon... Mais je me focalise sur Moly, elle commence à perdre connaissance et je n'arrive pas à me concentrer suffisamment pour savoir quoi faire. La panique me gagne et je la secoue maladroitement, refoulant le pire dans ma tête jusqu'à ce que mon corps soit tiré en arrière.
Je pousse un hurlement sauvage, désespéré et parviens à m'extirper de la poigne du Gardien pour retourner auprès de Moly, mais il ne m'en laisse pas vraiment le temps, car il revient à la charge et cette fois-ci glisse son arme devant moi, l'appuyant d'un coup sec contre ma gorge. Je capitule immédiatement, à la limite de l'étouffement alors que le coup résonne encore contre mes cordes vocales. Mais rien n'est plus douloureux que la vision qui s'offre à moi. Le corps de Moly s'est affaissé et la marre de sang qui l'entourait est à présent bien plus sombre et opaque à cause du froid. Tray passe au dessus d'elle, réfléchissant et murmurant quelques mots à Vénus avant de pousser le petit corps du pied pour la faire tomber du pont.
Mais quelqu'un crie et brusquement Tray braque son regard plus loin derrière.
Mélawi arrive à une vitesse fulgurante, poussant les Gardiens et Tray, sans même faire attention à Vénus. Elle soulève Moly du sol devenu une plaque de sang gelé et comme moi, elle regarde en tous sens, ne sachant quoi faire. Quand ses yeux croisent les miens, elle comprend qu'elle ne peut pas compter sur moi, ni moi sur elle.
« LUCIE VIENS M'AIDER ! »
L'infirmière arrive à la même allure, vêtue de son pyjama et visiblement tout juste tirée de son lit, avant de conduire Mélawi et Moly à l'infirmerie, traversant le pont duquel venait de tomber Minna. Mélawi se tourne une dernière fois pour me regarder, hésitante. Mais je sais ce qu'elle veut me dire, son regard veut tout dire. Elle est désolée, désolée pour ce qu'il risque de m'arriver car en effet, on ne peut plus rien pour moi.
Puis elle disparait et mon seul soulagement à présent est de croire que Moly s'en sortira.
Je suis de nouveau seule, coincée derrière l'arme du Gardien alors que Tray baisse son visage à ma hauteur, m'obligeant à le regarder. Son regard est terrifiant, terrifiant de par son manque total d'émotion. Il vient de tuer une élève et d'en blesser une grièvement, une enfant.
Et pourtant ses yeux ne traduisent rien d'autre qu'un sentiment de banalité, croisé avec une once de fierté pour avoir réussi à me piéger comme il le souhaitait tant.
Je crois que ce regard vide est bien pire qu'un de ses regards hystériques.
«La Gouvernante est en route pour ses quartiers monsieur Tray –Annonce un Gardien, essoufflé-
-Parfait et surtout faites bien attention à ce que cette Criminelle ne s'enfuie pas.
-Vous ne l'amenez pas à la Gouvernante ?
-Oh non, tout le mérite ne me revient pas totalement, il y a quelqu'un d'autre qu'il faut remercier alors la moindre des chose, c'est qu'il soit là, lui aussi.»
Criminelle. C'est ce qu'il voulait.
Je reçois un autre coup contre ma gorge endolori, totalement gratuit cette fois et je m'apprête à avancer lorsqu'un grondement s'élève parmi les autres Gardiens regroupés plus loin.
D'un coup ils sont tous écartés, poussés brutalement par Joe qui n'a que Tray pour cible.
Une fraction de seconde il me regarde pourtant, le souffle court, avant de foncer droit sur le Criminel, méconnaissable. Deux Gardiens qui tentaient de le retenir sont littéralement balayés et en une fraction de seconde, Joe a déjà empoigné Tray. Il attrape son visage d'une main, refermant aussitôt ses doigts dessus avant de balancer son crâne rasé contre la glace en arrière.
« POURQUOI IL A FALLUT QUE TU AILLES PLUS LOIN ?! JE VAIS TE TUER ! »
Sonné, Tray se laisse tomber à genoux, donnant le champs libre à Joe qui le roue de coups pendant quelques secondes, tâchant la glace de sang, jusqu'à ce que le Criminel ne retrouve des réflexes primitifs, se cachant derrière ses bras et laissant échapper des plaintes depuis ses lèvres fendues.
Je souris inconsciemment devant cette vision, peut-être est-ce mon dernier sourire mais quoi qu'il arrive je prends plaisir à regarder Tray se faire battre.
Mais un Gardien arrive dans le dos de Joe. Je n'ai même pas la force de le prévenir, ou bien l'envie. Je ne vois pas ce qu'il se passe, j'entends seulement un grésillement semblable à de l'électricité, puis Joe pousse un cri rauque. Son corps, pourtant robuste, passe de l'état rigide à celui d'un pantin totalement désarticulé alors qu'il s'effondre au sol, secoué par quelques spasmes inconscients. Ses yeux sont grands ouverts, pourtant ils ne fixent rien.
Je reste hébétée un moment avant de comprendre qu'il s'agissait d'une électrocution. Je reconnais ces filaments qui s'échappent de l'arme du Gardien et qui sont reliés à des électrodes. Les dites électrodes se trouvant en fait à même la peau de Joe, y créant des auréoles violettes ou noircies et expliquant sa soudaine désarticulation. Il est mort, du moins il devrait l'être après un tel contact direct entre la peau et l'électrode, pourtant son cœur bat toujours, mais bien trop vite.
« Que fait-on de lui ? »
Tray, dont le visage semble être muré derrière un rideau de sang, titube et s'écarte non sans frayeur, hurlant aux Gardiens de l'emporter lui aussi.
Et c'est ainsi que nous partons, lui, Vénus, Tray et moi en direction de la pièce secrète, celle destinée aux scientifiques, où Amadalia nous attend.
Et où je vais sûrement recevoir la pire des sanctions.
*
Je suis poussée sur une chaise, mes genoux craquant sous la violence du geste, mais ce n'est rien comparé à Joe qui, lui, est jeté au sol par les deux Gardiens qui le maintenaient. Il pousse un grognement et tente de reprendre ses esprits tandis que Vénus entre à son tour, livide et au bord de la nausée. Elle regarde Joe au sol, puis moi. Je ne détournerai pas la tête, je la fixe comme elle l'avait fait avec moi le jour où les Gardiens étaient venu l'enlever à l'Ecole.
Va-t'elle réellement m'accuser ?
Je suis encore bouleversée par la succession des évènements, je n'ai pas eu le temps de comprendre ce qu'il m'arrivait, mais tout ce que je sais, c'est ce que je n'aurais pas dû faire ce que Joe m'avait demandé. Sans ça, Minna serait en vie et Moly serait prête à partir avec Amadalia et moi.
La vision de Minna traversant le champ me revient, comme un coup de jus. Aussitôt je cesse de regarder Vénus et fixe mes pieds. Il n'y a aucun visage rassurant ici, personne en qui je puisse avoir suffisamment confiance pour me calmer.
Minna est morte, Tray l'a tuée car elle n'arrivait pas à me tuer.
Mais ça il n'y a que moi qui le sait, ce sera ma parole contre la sienne et celle de Vénus.
Mon dernier espoir de m'enfuir d'ici semble être bien trop mince et lorsqu'Amadalia entre à la volée dans la pièce, le souffle brûlant de colère et les yeux troublés, je sais que je n'ai plus à espérer.
Je reste clouée sur ma chaise, n'ouvrant pas la bouche en sachant pertinemment que rien de ce que je pourrais dire ne me sauvera et bizarrement Amadalia ne dit rien non plus. Elle fait les cent pas dans la pièce, me regardant de temps à autre avant de s'arrêter devant le corps recroquevillé de Joe.
Son visage se tord sous la colère, on dirait presque qu'elle s'apprête à lui cracher dessus, mais elle évite son corps et vient enfin s'asseoir face à moi, ses yeux passant des miens à ceux de Tray qui semble frustré de n'avoir aucun remerciement de sa part.
« Les Gardiens ont dû vous expliquer la rais...
-Oui je sais très bien pourquoi nous sommes ici –Dit-elle en appuyant sur le nous, ses yeux perçants toujours sur moi-
-Pandore a tué deux de ses camarades ce soir !
-Oui je suis au courant.
-Alors qu'attendez-vous pour agir ?! –S'impatiente Tray alors qu'Amadalia regarde à présent Vénus-
-J'attends de savoir ce qu'il s'est réellement passé ! Cette histoire semble absurde connaissant Pandore. Toi, dis-moi ce qu'il s'est passé.
-Eh bien je... Elle... Pandore était partie nager et...
-Nager ? –S'étouffe Amadalia alors qu'un Gardien dépose mon masque en évidence, m'accablant un peu plus-
-Oui on... On nous a dit qu'elle avait un masque, qu'elle le cachait et qu'il lui était déjà arrivé de nager au Terrier... Alors a...avec Minna on a voulu l'en dissuader, mais elle n'a pas voulu nous écouter. Elle... Elle a dit qu'elle faisait partie de l'AGFA désormais et qu'elle pouvait se le permettre, que vous.... Que vous ne lui en tiendriez pas rigueur.
-Si j'avais su que tu étais une putain de comédienne –Je marmonne, vite coupée par les mains d'Amadalia qui s'écrasent sur le bureau, les veines gonflées à bloc-
-Silence !
-Je.. Je dis la vérité –Balbutie Vénus en me regardant un court instant- M...Même Moly voulait l'en empêcher, elle ne voulait pas que sa meilleure amie aie des problèmes m...Mais Pandore n'en a fait qu'à sa tête et au final, rien ne s'est passé comme prévu.
-Que s'est-il passé ?
-Finalement on l'a laissé y aller, on l'a attendue en faisant le guai...M...Mais quand elle est revenue elle... Elle était bizarre, je crois.... Oui je crois qu'elle voulait se rendre au dortoir des professeurs, mais je n'en suis pas certaine. On a voulu l'en empêcher encore une fois mais elle... Elle voulait s'en prendre à Tray... ou à Joe. On lui a dit que ce n'était pas une bonne idée mais elle n'a pas voulu nous écouter, elle était supérieure à nous, elle...Elle a dit qu'elle avait un meilleur Hunternumb que nous, qu'elle était plus forte... Elle a commencé à nous pousser alors qu'on essayait de la maintenir le temps que Moly aille prévenir les Gardiens. M...Minna était trop près du bord et quand elle l'a poussée, elle... Elle est tombée du pont.
-C'était un accident alors ? –Demande Amadalia d'une voix oppressante, n'ayant que faire de Vénus qui se met à pleurer-
-C'était un meurtre ! –Scandé-je à sa place, surprenant tout le monde- Mais ce n'est pas moi qui l'ai commis et encore moins celui de Moly ! Vous devez me croire. »
Amadalia semble hésiter. Elle regarde Tray longuement, comme si elle se doutait de quelque chose venant de lui, ce qui d'ailleurs le rend furieux, avant de me regarder moi. Elle ne cherche pas à déceler le vrai du faux, elle sait que je dis vrai mais que ma parole n'est rien face à celle d'un professeur et d'une élève et sans Moly ou même Joe pour aller dans mon sens, je suis perdue.
Elle enfoui son visage perturbé derrière ses mains, y soufflant sa rage avant de se lever.
« Si ce n'est pas toi qui a tué Minna et la jeune Native, alors qui est-ce ? –Me demande Amadalia, le ton grave-
-A votre avis ! L'AGFA est bien irresponsable de nommer professeur un individu qui passe son temps à tuer ses élèves sous prétexte de faire le tri parmi les forts et les faibles –Dis-je avec amertume- Il a tuée Minna, il l'a poignardée comme Moly et c'est pour ça qu'elle est tombée du Pont ! Moi je la maintenais !
-Tu la maintenais ? Vous vous bagarriez donc ?
-Demandez-donc à Tray la raison !
-Accuser un professeur est une faute grave Pandore, tu sais ce que je t'ai dit, qu'au-delà d'un certain stade je ne pouvais rien pour toi –Semble-t'elle me murmurer-
-Ce stade elle l'a dépassé ! –Bouillonne Tray- Laissez-moi m'occuper d'elle, c'est une Criminelle désormais.
-C'est encore à moi de prendre cette décision –Répond Amadalia d'une voix ferme avant de regarder Joe au sol- Je suis sûre que c'est toi.
-Vous déclarez Criminels des enfants qui n'ont fait que voler de la nourriture mais vous laissez tranquille une tueuse ? –Rage Tray alors qu'Amadalia fronce les sourcils, se tournant vers Vénus-
-Dis-moi, comment saviez-vous qu'elle partait nager ?
-Nous... Nous l'avons suivi.
-Mais pour ça il fallait bien que vous vous doutiez de quelque chose non ? Qui vous a dit qu'elle irait nager ?
-J...je ne –Vénus balbutie, ses talents de comédienne s'arrêtant ici alors que, malgré elle, elle regarde vers Tray en quête de soutiens, ce qui n'échappe pas à Amadalia-
-Qui ?! –Lance-t'elle à Tray, pris au dépourvu-
-P...Pourquoi poses-tu la question, alors que tu connais la r...réponse. »
Cette voix semble sortir de nulle part et pour cause, elle ne provient d'aucune personne à hauteur d'homme. Elle vient du sol où Joe a ouvert les yeux, difficilement. Il ne peut se redresser, son corps ankylosé le retient prisonnier alors qu'Amadalia s'écarte de Tray.
« Quand cesseras-tu de t'immiscer dans mes affaires ?! »
Joe semble sur le point de répondre lorsqu'Amadalia lui donne un coup de pied dans le ventre, puis un second.
« Jamais –Ricane le rougeâtre entre deux plaintes de douleur alors que Tray écarte Amadalia, non pas par sympathie envers Joe mais pour la fixer-
- Tu vas laisser cette Criminelle partir avec toi ? -Dit-il sur un ton plus intime- Que vont penser les habitants quand ils le sauront ? Que vont penser les Hunters de ce privilège injustifié ?
-Tu as tué ces gamines –Souffle-t'elle-
-Peut-être que oui, pourtant personne ne m'a vu, les Gardiens sont persuadés de m'avoir vu arriver du dortoir des professeurs. N'est-ce pas Joe ?
-Tray était avec moi, il n'a pas pu tuer ces filles –Dit Joe au sol- Accident ou meurtre, tu n'as plus qu'à prononcer ton verdict.
-Espèce de...
-Salaud. »
Je n'ai pas laissé Amadalia finir sa phrase, à vrai dire ma colère est bien plus immense que la sienne et je suis submergée par une réelle envie de meurtre. Vénus et Joe sont contre moi, au grand bonheur de Tray qui continue de faire pression sur la Gouvernante.
« Tu m'as envoyée nager pour que je me fasse chopper ! –Dis-je en me jetant de ma chaise pour aller étrangler Joe- Tu as prévenu Tray ! Minna est morte par ta faute, PAR TA FAUTE ! Je te jure que si Moly m.. »
Vénus se retire dans un coin, effrayée, tandis que Tray m'arrache de sur Joe, me balançant dans les bras d'un Gardien.
« SI MOLY MEURT JE TE TUERAI JOE ! »
Je reçois un coup dans le ventre, m'empêchant de m'égosiller plus encore. Pourtant je sens en moi cette fureur innommable, cette envie de tout déchirer, de tout briser autour de moi pendant que mon monde s'effondre.
« Tu vois, cette fille est cinglée, laisse-moi m'occuper d'elle. Montre l'exemple, sinon bien d'autres voudront faire la même chose en se demandant pourquoi eux n'auraient pas le droit à ton pardon. C'est ce que tu veux ? Des rebellions ouvertes ? Une armée de Hunters morts avant même d'être montés sur Terre, à cause d'une gamine Illégale ?
-J'ai besoin de cette fille, elle ne doit pas aller sur Terre.
-Elle n'ira pas, ne t'en fait pas.
-Son Hunternumb est parmi les plus élevés ! –Dit-elle alors que je sens ma colère se rediriger vers elle, pourquoi dit-elle cela à Tray ?-
-Je peux m'arranger pour qu'il devienne le plus bas.
-Laissez-moi partir avec vous ! –Dis-je d'une voix suppliante-
-Que faisons-nous d'elle Madame ? –Demande un Gardien alors qu'Amadalia tourne la tête d'un mouvement circulaire-
-Il y a trop de témoins, tu as gagné –Dit-elle en attrapant Joe par les cheveux- Je te promets que tu seras le prochain, je t'ai gardé en vie jusque-là, mais maintenant c'est terminé, je n'ai plus besoin de toi.
-Tu ne peux rien contre moi –Dit-il avec un sourire proche de la grimace-
-Tu n'as pas tenu ta promesse.
-Je l'ai tenu, tu n'avais seulement pas précisé tous les aspects de cette dite promesse. A toi de tenir la tienne.
-Vraiment ? Tu ne me fais plus peur. Tray ? Ils sont à toi.
-Ils ?
-Tray est un Criminel, je suis un Illégal, il n'a pas le dessus sur moi ! -S'indigne Joe, enfin pris de court-
-Mais tu es un Criminel Joe –Dit Amadalia avec un petit rire- Si cette fille paye pour son crime, pourquoi pas toi ? Et ne me demande pas de quel crime je parle, estime-toi simplement heureux que je ne te fasse pas directement exécuter. »
Elle murmure quelque chose à un Gardien, lequel quitte la pièce quelques minutes, revenant de la même façon, seulement il semble tenir quelque chose à la main.
Et c'est avec horreur que je découvre deux bracelets rouges.
« Non ! Je n'ai rien fait, vous aviez promis que vous m'amèneriez avec vous !
-Je suis désolée Pandore, mais les règles s'appliquent à tout le monde. Ça t'apprendra à donner ta confiance au premier traitre venu. »
Je regarde Joe qui est redressé par des Gardiens, son poignet solidement attrapé et tendu dans les airs alors qu'on lui enfile son bracelet de Criminel. Quant à moi, c'est Tray qui vient à ma hauteur. Il redresse mon visage de son pouce et me montre le bracelet.
« Je t'avais dit que je me vengerais. »
Je lui crache au visage, recevant en retour une gifle à laquelle Amadalia ne répond rien. Elle se contente de fusiller Joe du regard et de tourner le dos, quittant la pièce.
« Tu pourras remercier Vénus et Joe, et Minna aussi dans un sens, sans eux je n'y serais pas arrivé –Il ricane avant de regarder Joe en coin- C'est bête, tu n'aurais vraiment pas dû me faire confiance. »
Puis il glisse le bracelet autour de mon poignet, sans lâcher Joe des yeux.
La sensation est désagréable, le bracelet est magnétique.
Et qui dit magnétique dit que je ne pourrais plus entrer dans le dortoir des Illégales, je n'en fais plus partie, je suis sous les ordres de Tray dorénavant...
Je déglutis, me laissant trainer par ce dernier qui jubile.
Mais au lieu de prendre le chemin du dortoir des Criminelles, Tray m'entraîne dans un autre couloir que je ne connaissais pas. Un couloir sombre et, inutile de le préciser, glacial.
« Où est-ce que tu l'emmènes ?! –Gronde Joe-
-Ça te pose un problème ? Après tout, tu l'as voulu.
-Elle doit aller dans le dortoir des Criminelles.
-Je ne suis pas Amadalia, je ne privilégie pas les petites pétasses prétentieuses, alors non, ce soir elle dormira ailleurs. »
Joe pousse un juron tandis que Tray ouvre une porte sur un espace noir et béant. On dirait une chambre, ou plutôt une sorte de cellule de prison, taillée à même la glace et sans attendre, il me pousse à l'intérieur, s'éloignant quelques minutes.
Minutes pendant lesquelles Joe réussi à se libérer de son Gardien.
« Ca n'aurait jamais dû se terminer comme ça ! –Dit-il alors que je me recule le plus loin possible, ne le laissant pas me toucher- Je voulais seulement éviter que tu ne partes avec elle.
-Eh bien tu as gagné, je ne partirai nulle-part et toi non plus.
-Je trouverai un moyen de nous f...
-Nous ? –Je lâche un rire ironique- Non il n'y a pas de nous, chacun paye pour ses crimes, toi tu en as bien trop, moi mon seul crime, si je puis dire, c'est de t'avoir fait confiance.
-Arrête de faire l'enfant bordel! Tray va tout faire pour baisser ton Hunternumb.
-Je m'en moque.
-Tu dois venir sur Terre !
-Pourquoi ?
-Car c'est le seul endroit où Amadalia ne pourra pas venir te chercher.
-Donc c'est tout ce que tu veux, m'enlever à elle pour l'embêter. Tu n'es qu'un gros con.
-T'ai-je menti concernant la vérité dont je te parlais ?
-Non, mais ça ne rachète en rien ce que tu avais prévu de plus dans mon dos !
-Tu dois me faire confiance, si je t'ai éloigné d'elle c'est pour ton bien. Elle n'a pas besoin de toi au sens où tu l'entendais.
-Et toi, dans quel sens as-tu besoin de moi ? Pourquoi m'utilises-tu contre elle ?
-Promets-moi que tu resteras Hunter.
-Quoi ? »
Puis, sans un mot, il se retire de la cellule. A la place c'est Tray qui entre, me jetant un couverture au visage.
« Demain nous commencerons tes punitions, on verra si tu resteras longtemps une des meilleurs Hunters »
Puis il claque la porte.
Et c'est le noir complet.
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