Le vide paraissait bien plus attrayant à Morgane Clay que la réalité. Depuis combien de temps était elle ainsi, en train de tomber dans ces abysses ? L'obscurité l'avait engloutie. Elle ne savait plus où elle était, ce qu'elle faisait. Que s'était il passé ?

Elle avait ouvert les yeux depuis quelques dizaines de minutes. Actuellement, elle était dans un espèce d'hôpital, aux grandes baies vitrées. Son lit était impeccablement fait, et elle était couverte de bandages. Faire des mouvements était peu compliqué, mais elle sentait comme une léthargie dans ses bras.

La porte s'ouvrit à la volée, dévoilant une tête blonde furieuse.

Pandora.

Elle avait les yeux brillants d'un bleu azur, le bleu de ses yeux et de ses larmes. Sa lèvre inférieure tremblotait, sous le coup de l'émotion. Ses sourcils étaient froncés, ses joues rougies, mais Morgane s'était trompée. Elle ne semblait pas en colère.

Elle s'avança à grands pas vers la brune, avant de la regarder, indéchiffrable.

- Salut ? dit celle qui était couchée, avec un petit sourire

Pandora jeta un simple coup d'œil à ce coin de bouche relevé... Avant de s'effondrer, en larmes, sur le lit. La brune grimaça. Sa jambe semblait lui être douloureuse, car lorsque le corps affaissé de la blonde rencontra sa peau, une vive douleur se raviva dans ses entrailles. Cependant, elle ne dit rien, consciente de ce qu'il se passait.

- Pandora...

Elle avait mit toute la douceur dont elle était capable dans sa voix, alors que la concernée sanglotait, incapable de retenir ses larmes. Oui, elle se rappelait.

Elle se rappelait ce bunker souterrain, où elle était allée. Elle se souvenait de l'arrivée d'Iris, Valentin... Pandora. Pandora était celle qui était venue la secourir. Son coeur fit un bond dans sa poitrine. Fierté ? Amour ? Reconnaissance ? Il était temps de dire à Pandora Lane ce qu'elle avait à lui dire. Sa voix était éraillée mais elle réussit à dire:

- Tu m'as manqué.

Elle posa une main assurée sur l'épaule de Pandora, qui cachait son visage dans les draps. Puis, elle la releva, l'attira à elle, oubliant la douleur.

Rien ne comptait à présent. Plus qu'elle, plus que son visage strié de larmes et ces yeux pleins de remords.

- Pourquoi tu pleu-

Morgane n'eut pas le temps de finir sa phrase que Pandora fondit sur ses lèvres. Timidement, leurs souffles se mêlèrent, les doigts de Pandora s'enfoncèrent dans la peau des joues de sa petite amie. Bordel, elle avait oublié à quel point elle était chaude, rayonnante. La brune avait presque l'impression d'embrasser le soleil tout entier. Son corps entier s'était soudainement réchauffé, des papillons voletèrent dans son ventre.

Mais le baiser était bien court et la sensation trop intense. Pandora la regarda de son regard de feu avant de déclarer, ses mains tenant toujours son visage:

- Je suis une imbécile.

- Je suis contente de te l'entendre dire.

Le sourire enjoliveur de Morgane n'atteint pas la blonde, qui était assise sur elle d'un air à la fois furieux et curieusement pressé.

- Tu es aussi une imbécile.

- Ah, déclara la brune, dépitée.

Elle prit le menton de sa petite amie et plongea ses iris marrons dans la clarté du sien. Elle passa sa langue sur ses lèvres et l'embrassa à nouveau.

- Je préfè-

- Tu es une idiote, doublée d'une conne, et d'une... Oh, Morgane, si tu savais comme je t'aime...

Pandora fut à nouveau prise d'une crise de larmes, et elle finit par se blottir dans les bras de celle qu'elle aimait. D'ailleurs, la concernée ne comprenait pas grand chose. Diantre, que cette femme était compliquée.

- Moi aussi. Moi aussi, je t'aime, princesse.

Elle caressa ses cheveux or, ces cheveux qu'elle avait si souvent imaginé, cet objet de beauté enchantée. Comme un chat que l'on aurait pris en boule contre soi, elle serrait, enveloppait la plus petite. Comment avait-elle pu imaginer se passer de cette sensation ?

- Ne me fait plus jamais croire le contraire, dit Pandora en reniflant, une once de ressentiment dans la voix.

- Plus jamais.

- Je t'aime.

Et plus jamais elle ne lâcherait le corps de Pandora. Elles resteraient peut-être ainsi pour l'éternité, qui sait ? Des statues de chair, encastrées dans un amour passionné. On dit souvent que cet engouement ne dure qu'un temps... Morgane savait désormais que c'était faux.

La conversation qui suivit ne fut pas très alimentée. Morgane s'appliqua à laisser parler ses mains, dans les cheveux, sur le visage de la blonde. Laisser sa bouche prononcer tout ce que son esprit n'avait pas su dire avant. Laisser les "je t'aime" se perdre dans le silence de la chambre. Et ce n'était pas grave, parce que ces mots-là se retrouvent toujours quelque part. Elle se laissa exprimer ce qu'elle ressentait. Elle laissa quelques larmes couler de ses yeux, accepter de les laisser essuyer par Pandora.

Tout cela était fini, et tant pis. Tant pis si tout les Rebelles étaient morts, sous ces bombes. Tant pis si Morgane était blessée, tant pis si elles s'étaient disputées. Sur cette peau, sur ce corps résidait la clé de son bonheur. Et cela lui suffisait, et elle avait l'impression qu'elle ne s'en lasserait jamais.

Peut-être qu'un jour cette euphorie se finira, mais il n'était que le temps de penser à aujourd'hui. Au jour le jour, lèvres à lèvres. Morgane avait toujours rêvé de finir sur un Happy end. C'était une journée diablement féérique pour la fée qu'elle était. Drôle d'être de lumière.

✺