- Hé, mais tu vas où ?

Angelina se leva à l'instant où Cassiopée tourna la tête vers le couple qui parlait ensemble. Elle avait lâché si brusquement son verre qu'il avait tinté et s'était renversé sur le comptoir. L'étrange barman ne fit pas de remarque et passa simplement son torchon sur la tâche qui menaçait de s'étendre. 

Pandora s'était approchée de Kaloss et parlait avec lui, visiblement calmée. Morgane se tenait en retrait, comme à son habitude, dans les lieux publics. Mais cette fois-ci, son langage corporel en disait plus que cela. Cassiopée plissa des yeux. La brune fuyait les gens des yeux, semblait avachie, ou soudain tendue, marmonnait parfois dans le vide...

Elle cachait quelque chose. Et Cassiopée savait que les secrets de Morgane Clay n'étaient jamais de bon augure. Une main se posait sur son épaule alors qu'elle prévoyait de franchir les quelques mètres qui la séparait de Pandora.

- Quoi ? dit elle d'un ton sec à la rousse.

- Ne va pas les embêter ! Tout de même, elles ont perdu deux proches...

- Qu'est ce que tu as dit au téléphone, Ange' ?

Elle se retourna pour plonger ses yeux perçants dans le regard timide de sa petite amie qui ouvrit la bouche d'un air plein de détresse, avant de la refermer et de dire d'un ton pleutre:

- Rien.

- Tu mens. 

Elle s'apprêta à reprendre sa course effrénée, lorsqu'Angelina enroula ses bras autour de sa taille. Agacée, Cassiopée décréta:

- Tu n'as rien à me dire. Lâche moi. 

- Cassy, ce n'est pas que ce ne sont pas tes affaires mais... Tu comprends que parfois, j'ai peut-être envie de-

- Baratinages, coupa Cassiopée, redoutable. Tu veux me faire perdre du temps. Tu sais, j'ai été élevée par un père manipulateur. Crois moi que toutes les techniques que tu essaies sur moi sont vues et revues.

- Mmh...

Malheureusement, Angelina savait que Cassiopée avait raison. Il n'y avait qu'une seule solution...

Faire diversion avec quelque chose d'encore plus gros. Elle se pencha sur l'oreille de Cassiopée et murmura quelque chose. Celle-ci écarquilla les yeux, se tenant la bouche, avant de faire un grand sourire et de sauter au cou de la rousse:

- C'est pas vrai !

- Si. Viens, on va danser.

Le sourire d'excitation et de joie que Cassiopée maintenait sur son visage convainquit le Valet et fit fondre son coeur. Elle était si extraordinaire, si perspicace et intelligente... Angelina se plongea dans des pensées amoureuses en dansant avec elle, une main sur son épaule, une main sur sa croupe.

- Tu es la femme de ma vie.

Cassiopée rougit, surprise, avant de la regarder, rouge comme une pivoine. Elle bafouilla:

- Ne dis pas de bêtises.

- Si. Je veux passer ma vie avec toi. 

- Moi aussi, évidemment, dit plus tendrement Cassiopée, d'un ton naïf.

- Je veux que tu vives avec moi... Qu'on aie plus jamais peur. De se cacher.

La blonde sourit, sereine, en l'écoutant. La rousse s'écarta légèrement d'elle pour poser un genou sur le sol ciré de la salle de bal. Cassiopée fronça les sourcils, la regardant faire, presque figée. 

Son coeur se mit à palpiter et elle dit du bout des lèvres, d'un air incrédule:

- Ne me dit pas que c'est ce que je pense...

Angelina, les yeux humides d'émotions, sortit de sa poche un petit boitier rouge.

- Pas d'union forcées, de mariage mystérieux, de contrainte. Juste toi et moi... Je crois que je t'aime, Cassiopée.

- J-j-je...

- Je veux que tu te sentes en sécurité, loin de ton père. Que plus jamais notre union ne soit à justifier. Tu mérites tellement d'être heureuse... Le moment est mal choisi mais j'y pensais depuis quelques temps.

Les larmes embuèrent la vue de Cassiopée.

- Veux-tu être mon épouse ?

- Espèce de... Sale folle !

Cassiopée fondit en sanglots, tombant à genoux aussi. Angelina sentit son coeur se serrer, d'angoisse, d'appréhension, mais surtout parce qu'elle sentait toute la tendresse émaner d'elles, et un groupe de gens se former autour d'elles.

- Je t'aime je t'aime je t'aime... Oui ! Oui, je veux me marier avec toi.

Angelina eut un moment de pur bonheur qui dura plus de deux cent ans dans sa tête, et attrapa en tremblant la main de sa promise avant d'enfiler la bague sur son doigt. Oh mon dieu, exactement comme je l'avais toujours imaginé, pensa Cassiopée en se laissant choyer par celle qui était désormais officiellement ET officieusement sa fiancée.

Tout le monde applaudit autour d'elles, alors que Cassiopée se laissait entrainer dans une pièce plus calme, où elle put sécher ses larmes dans la chemise ouverte de la rousse. Souriant comme des bienheureuses, elles passèrent la soirée ensemble à parler pour ne rien dire, se câliner et se peloter paisiblement.

Le plan d'Angelina avait particulièrement bien marché, qu'elle-même avait complètement oublié ce qu'elle était sensé lui cacher. L'odeur de son parfum, ses poignets délicats, son visage serein et heureux... Elle se promit de ne jamais regretter ses actes, le coeur débordant de joie.

Trop occupées à vivre à deux une nouvelle réalité qui les enchantaient, elles ne virent pas passer dans le petit salon assez passant la silhouette râblée du président Snow qui les regarda en souriant.

Lissant sa barbe du plat de la paume, il passa ses yeux noirs sur les deux silhouettes enlacées, tel un rapace sur sa proie.

- C'est très bien. Très bien, murmura-t-il en rejoignant la salle de bal.

La salle de bal du Capitole se dressait dans toute sa splendeur, un espace où l'extravagance et l'opulence atteignaient leur paroxysme. Le plafond, si haut qu'il semblait se perdre dans les nuages, était orné de lustres en cristal qui pendaient majestueusement, diffusant une lumière scintillante. Celle-ci se reflétait sur les murs recouverts de miroirs et de panneaux d'or finement ciselés. Les murs portaient des fresques représentant des scènes mythologiques, entrelacées avec des motifs futuristes, créant ainsi un contraste saisissant entre l'ancien et le moderne. 
Le sol en marbre, incrusté de pierres précieuses, formait des motifs complexes, tandis que des fontaines de champagne jaillissaient de sculptures surréalistes qui semblaient presque prendre vie. Les invités étaient habillés de manière extravagante, leurs tenues défiant l'imagination. Les tissus changeaient de couleur, les coiffures défiaient la gravité, et les bijoux flamboyaient, captant chaque rayon de lumière. 

La musique résonnait, envoûtante et inquiétante, jouée par un orchestre qui se tenait sur une scène surélevée, chaque musicien arborant un masque élégant. Des serveurs, vêtus d'uniformes sophistiqués, glissaient entre les invités, offrant des délices gastronomiques venus des quatre coins de Panem. Chaque plat était une véritable œuvre d'art. 

Et au milieu de la pièce, la belle silhouette de Pandora était admirée de tous presque unanimement. Ses longs cheveux dorés flottaient dans l'air, alors qu'elle semblait rejoindre la piste de danse.

Seule. Le détail était important, Snow chercha de ses yeux d'aigle la deuxième paire...

Morgane était assise sur une chaise, un verre de scotch à la main, l'air fatiguée. Elle avait sûrement dû utiliser toute son énergie pour être avec des gens, elle qui n'était pas réputée pour sa grande batterie sociale. 

L'occasion était parfaite, Snow s'en saisit. Il sourit et s'approcha, suivi des yeux par la brune. Cette dernière s'inclina lorsqu'il fut à portée de main:

- Bonjour, président Snow.

- Clay. Ravi de pouvoir vous parler seul à seule.

- Mais nous ne sommes pas seuls, répondit-elle en pinçant légèrement les lèvres, son regard laissant deviner l'état de tension dans lequel elle était.

- Cela ne fait rien. Vous semblez trainer sur la tâche que je vous ai demandé.

- C'est que... bredouilla-t-elle.

- Je vous rappelle que, coupa-t-il un peu plus sèchement, n'utilisant plus son ton habituellement affable, vous n'avez pas tout votre temps. Si vous la voulez vivante, vous feriez mieux de faire rapidement ce que nous avions convenu.

- Ange... Est-ce qu'Ange l'a fait, elle ? demanda fébrilement la brune.

- Oui.

- Oh merde... D'accord. C'est bon, j'y vais... 

J'espère que Salomé va bien !!!