Chapitre 27: Un meurtre mystérieux
- Restez avec moi. Madame, s'il vous plait. Concentrez vous sur ma voix.
Une femme étendue par terre. De la terre battue autour de son corps, des traces de combat et de coups. Iris la tenait dans ses bras mais sa tête et ses bras pendaient lamentablement. Comme morte, ses yeux étaient figés, mais elle respirait faiblement. Ses cheveux entouraient sa tête, entraient dans sa bouche comme du sang.
- Fait lui du bouche à bouche ! dit Iris, qui s'emparait de sa sacoche pour chercher une seringue.
Ils avaient accouru en entendant un cri de femme puis un vrombissement d'une moto ou d'un véhicule. Agenouillés autour d'elle, on aurait dit une scène de meurtre.
- Du bouche à... dit Valentin, un peu intrigué.
- Dépêche toi, dit la brune en le fusillant du regard.
- C'est bon, c'est bon, j'ai compris !
Valentin s'agenouilla pour s'atteler à la tache, alors que Iris prenait le bras verdâtre de la femme pour y plonger en hâte une aiguille.
- J'ai pas désinfecté... grimaça-t-elle avec angoisse.
- Tant pis ! lui répondit son petit ami, dans la panique.
Le liquide bleuté passa de l'objet aux veines de la femme inanimée. Valentin se releva et essuya ses lèvres, concentré sur son état. Il releva le buste pantelant de la femme, alors qu'Iris rangeait la seringue dans un sachet, et sortit une compresse.
- Elle a des bleus dans le cou. On l'a sûrement attaquée.
- Iris, ne restons pas là. Ses agresseurs sont peut-être dans le coin.
- Prend la par la taille.
Iris prit les deux pieds de la femme et couvrit son corps de son propre manteau. Sa peau était froide et bleutée, couvertes de plaques aux tons très inquiétants. Elle paraissait elle-même figée, comme dans un étrange coma éveillé qui glaçait Iris. Ils se déplacèrent en vitesse, voyant au loin la fumée de petites chaumières, celles du district 10. On entendait le meuglement de bovins pas très loin, signe qu'il y avait de la vie à quelques centaines de mètres.
Avançant un peu en crabe, ils firent du mieux qu'ils purent pour atteindre la première ferme venue. Le couple qui la tenait paraissait pauvre et méfiant à l'égard des étrangers. Valentin, de sa voix chaleureuse et surtout de l'argent qu'il leur donna, arriva à poser la victime sur une table propre dans l'étable.
Il rassura les gérants avec de beaux mots:
- Ne vous inquiétez pas, nous sommes des médecins. Cette femme vient d'avoir un arrêt cardiaque, vous avez fait le bon choix en nous accueillant, je vous l'assure !
- Vous n'êtes pas du Capitole ?
Valentin plissa les yeux, n'arrivant pas bien à comprendre les mots marmonnés par la femme à l'allure bourrue et trapue.
- Non, des médecins du 5ème district, annonça t il pour les convaincre entièrement.
Il revint bien vite auprès de son aimée, qui prenait le pouls de la femme.
- C'est étrange... Son coeur bat régulièrement mais... Pas comme un coeur normal. Trois battements, puis une pause inquiétante, et ainsi de suite... J'ai essayé de la réchauffer mais son corps est vraiment gelé.
- Merde merde merde, dit Valentin en sentant son propre pouls s'accélérer.
- Ce n'est pas une simple agression... Elle n'est que légèrement blessée. On dirait plutôt qu'elle est tombée.
- Ne me dit pas qu'elle a fait un arrêt cardiaque...
- Impossible, son coeur bat très rapidement !
- Vous voulez qu'la p'tite prenne un bain ? 'lé toute pleine de terre votre patiente.
L'intervention d'un des fermiers fut plutôt bien accueillie par le couple, qui se regarda avant d'hocher la tête à l'unisson. Une bassine pleine d'eau à peu près propre fut amenée et Iris enleva son grand manteau pour regarder plus précisément le corps de la victime.
Elle avait une jupe bleu clair qui laissait voir ses cuisses couvertes de bleus et de plaques rouges étranges, ses tibias étaient dans le même état. Iris reconnaissait une lingerie sous ce tissus et son coeur se serra. Cette femme avait été agressée alors qu'elle était dans la pire position pour se défendre. Son haut était de la même couleur, décolleté sur sa poitrine qui ne se soulevait plus, aucun souffle dans ce corps amorphe.
- Elle tient quequ'chose dans sa paluche !
A cause des multiples bagues sur ses doigts, et de ses bracelets, le couple n'avait pas remarqué un papier bruni par la terre et la boue dans ses doigts crispés. Valentin lui fit desserrer sa poigne, pour ramasser le papier et le mettre dans sa poche.
- Elle a beaucoup de bijoux... constata Iris en les prenant, mettant dans sa sacoche ses boucles d'oreilles, colliers, bagues et bracelets pour éviter que les fermiers envieux ne volent la femme.
Le temps de la déplacer dans l'eau, encore habillée, Iris se rendit compte qu'elle ne respirait plus. Elle venait de mourir.
- Elle n'a plus de pouls. Son coeur ne bat plus, dit Valentin en relevant son regard rempli d'effroi vers Iris.
Un grand silence envahit la pièce. Le bruit des sabots des vaches qui broutaient tranquillement devenait le roulis incessant d'un train mortuaire, chaque regard dans la pièce venait de s'alourdir, on n'entendait plus que les coeurs battre, et les ânes braire.
- Laisse la là, déclara la brune en réprimant un frisson. Va parler à nos hôtes, on s'en occupera quand... Il y aura moins d'oreilles indiscrètes.
Un garçon de ferme, certainement, les regardait avec un air timide, puis la morte.
- Et bien ? Que regardes-tu, toi ? le questionna Valentin en levant un sourcil.
Il bégaya, rougit et recula avant de secouer ses mains devant eux, faisant signe qu'il ne voulait pas de problèmes. Il rentra sa tête dans ses épaules, l'air très gêné et embêté qu'ils les aient vus. Valentin le questionna à nouveau, intrigué:
- Hé bien ? Répond à la question ? Tu es le fils des fermiers ?
Le garçon bougea les lèvres mais aucun son n'en sortit, il semblait dérangé par leur présence, et tapotait en rythme un petit boîtier attaché à sa ceinture faite de corde. Iris plissa les yeux, et s'avança en chuchotant à Valentin:
- Veille sur la femme. Je m'en occupe.
Elle qui était particulièrement introvertie, elle comprenait ce petit bonhomme. Valentin était un homme en apparence charmant, extraverti et charismatique, mais il pouvait effrayer ceux qui étaient plus timides. Comme si elle s'approchait d'un petit chat, elle fit quelques pas lents.
- Bonjour. Je m'appelle Iris.
Elle articula et parla distinctement. Elle n'arrivait pas bien à déceler l'âge du jeune garçon qui semblait avoir entre 11 et 17 ans -il fallait avouer que ce n'était pas le même âge- au vu de sa silhouette très fine, de son corps très nerveux et enfantin. Seulement sa voix semblait plus grave, il marmonnait doucement.
- Il s'appelle Valentin. Comment tu t'appelles ?
Elle jeta un coup d'oeil à son chéri, qui tripotait sa montre au fond de l'étable.
- Clay. Félix Clay, put entendre Iris à travers les petites onomatopées qui sortaient de sa bouche d'une façon incongrue.
Ce nom lui rappelait quelque chose. Morgane, bien sûr. Il était possible que le nom "Clay" soit assez répandu pour qu'il y en ait pas mal de toutes les familles. De plus, il était roux, avait un visage rond très pâle et des tâches de rousseurs, ce qui ne semblait pas désigner Morgane qui était brune, avait un visage taillé et une peau couleur pêche.
- Tu as une soeur qui s'appelle Morgane ?
Il lui semblait qu'il hochait la tête, mais impossible de savoir précisément car, à cause de la nervosité, il se tordait en tout les sens comme un petit élastique.
- Morgane Clay, appuya Iris avec bienveillance.
- Mon père... Il veut vous voir.
Il se retourna et s'échappa en courant, furtivement. La brune voulut le retenir mais il fut trop rapide, et la surprit en partant si rapidement. Elle se retourna pour regarder Valentin passer un appel à Pandora.
✺
Morgane était allongée sur un canapé rouge, somnolente. Elle avait la tête contre l'un des accoudoirs, et une main dans les cheveux de Pandora qui avait la tête posée sur sa poitrine. La blonde s'était blottie contre elle, maussade et déprimée. La grande brune savait la raison de cet effondrement: la mort de ses chiens, ses deux amis fidèles qu'elle avait depuis sa naissance.
Morgane ne savait pas trop quoi dire pour la rassurer ou lui rendre le sourire. Elle se contentait de la câliner et de déposer des baisers dans ses cheveux. Cette dernière ne semblait pas lui reprocher cette incompétence et était calme, au chaud contre elle.
La montre de Pandora se mit à vibrer contre la jambe de Morgane, ce qui la tira de sa torpeur.
- Ça sonne, marmonna-t-elle en caressant le lobe d'oreille de son amour.
- Allô ? Valentin s'étonna Pandora en décrochant l'appel.
"Pandora ! C'est extrêmement important !"
- O-oui ?
Pandora se redressa, s'asseyant sur Morgane en fronçant les sourcils. La brune grimaça, le souffle coupé par le poids de celle-ci.
"Est-ce que tu connaitrais une certaine Rose Downers du district 10 ?!"
Elles se regardèrent un moment, se demandant l'une à l'autre si elles la connaissaient.
- Non, pourquoi ?
"Cette femme est morte devant nos yeux. On a pas pu la sauver... Elle était en phase terminale de la maladie de Chwartz."
- Oh... C'est vraiment tragique, Valentin ! Est-ce que Iris va bien ?
"Secouée, mais tout va bien. On va voir bien pire, je le crains. Cette femme reste un mystère. Est-ce que vous pouvez essayer de trouver l'identité de cette femme ?"
- On va demander autour de nous. Kaloss connait tellement de gens...
"Elle avait une lettre à la main. C'est comme ça que j'ai eu son nom. C'est inquiétant, Pandora. Cette lettre stipulait qu'elle déshéritait son enfant de tout ses biens et qu'elle réfutait l'existence du père."
- Ce n'est pas une banale histoire d'amour qui a mal fini ? dit Morgane en se grattant le menton d'un air affairé. Je veux dire, elle se suicide et repousse ses êtres chers...
" C'était un meurtre, coupa Valentin. Elle est morte en étant piquée au cou par une seringue, ou quelque chose du genre."
- Je suis désolée, dit tristement Pandora. On ne voit pas du tout qui ça pourrait être. Promis, on se renseignera. Faites attention à vous, ne prenez pas de risques inutiles !
"Ne vous inquiétez pas pour nous. Faites bien en sorte que vos disciples soient prêts."
- Ça, ils le seront bien avant que nous soyons prêts.
"Prenez soin de vous. Bonne journée, on se tient au courant."
Valentin raccrocha, laissant les deux femmes seules et légèrement intriguées de cet appel qui semblait tourmenter leur interlocuteur.
- Tu penses que...
- Vous parlez d'quoi ? déclara Salomé en entrant dans la pièce, avec des lunettes de soleil couvertes de feuille d'or, aux côtés de Azur.
- Rien, marmonna Morgane en regardant le petit blond avec insistance.
- Nous étions au téléphone avec Valentin et Iris. Ils ont trouvé une femme morte sur leur chemin.
- Sûrement une Capitolienne, vu comment ça s'agite dans les districts, présuma Azur.
- Non, dit Morgane en ayant un air soucieux. Sûrement une femme du 10.
- Son nom était Rose, Rose Downers.
Les deux Mentores se regardèrent avant de pousser un soupir. Mais dans le coin de l'oeil, Pandora vit Salomé s'effondrer contre son compagnon:
- Att- Q-quoi ...? Vous pouvez répéter ?
Morgane se releva, le regard alerte, comprenant assez rapidement ce qu'il se passait:
- Rose Downers est morte dans le district 10 aujourd'hui, Salomé.
- Q-quoi ?
Salomé se figea si rapidement que Azur se sentit obligé de lui venir en aide. Il s'avança d'un pas avant de dire courageusement:
- C'est la maman de Salomé.
- Maman !
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