Chapitre 11: Les insécurités de Morgane Clay
- Non, mais c'est pas possible.
Morgane s'assit sur le canapé comme une masse, en bloc. Elle hocha frénétiquement la tête de gauche à droite nerveusement. Elle posa ses mains sur ses genoux, ses pensées frétillant en tout sens. Son regard se tourna vers sa petite amie, debout devant elle, grave.
- Tout ça devient beaucoup trop compliqué à gérer.
Elle prit son front entre ses mains, se prostrant en avant. Les sourcils froncés, elle réfléchissait. Trop d'informations en même temps. Déjà que l'alcool et la fatigue entrainaient dans son esprit une sensation de rêve éveillé désagréable, elle devait maintenant gérer plusieurs autres informations choquantes.
- La famille des Price est visiblement plus étendue que je ne le croyais... marmonna la brune, dans ses pensées.
- Pardon ?
Morgane se redressa, et s'adressa à Pandora d'une voix réfléchie:
- On ne savait pas que Cassiopée avait de la famille autre que son père.
- Surtout qu'elle m'avait dit que sa mère et sa soeur étaient mortes des suites de la maladie de Chwartz. Tu crois que... Ce serait sa mère ?
Le ton incrédule de la blonde, ses grands yeux posés sur Morgane la dissuadèrent.
- Non. Impossible, regarde. Elle ressemble trop à André Price pour être sa femme. À mon avis c'est sa soeur, ou sa cousine.
Elles échangèrent un regard. Morgane n'avait pas tord, c'était l'option la plus probable. L'hébétement les avait prises lorsque la femme leur avait fait sa proposition, et elles n'avaient su quoi répondre. Encore à ce moment, ni l'une ni l'autre n'avaient donné son avis, ayant peur que l'autre ne soit en désaccord. Un court moment passa, dans l'hésitation totale de ce qui pourrait se dire.
- C'est une doyenne, en plus.
- Elle doit avoir de l'influence, grimaça Pandora.
- Et de l'argent. J'imagine qu'elle est prête à nous céder beaucoup de choses pour qu'on soit Mentores.
- Tu t'imagines vraiment aller demander de l'argent à cette femme ? dit Pandora en frissonnant. Valentin n'était pas Mentor contre de l'argent je crois... Je ne deviendrais pas Mentore en faisant du chantage.
- Attend, tu penses vraiment à...
- Mais non ! coupa Pandora, vexée. Seulement, je me projette. Et je dis qu'on ne va pas aller lui demander de l'ar-
- Pourquoi tu te projettes ? C'est hors de question, coupa Morgane un peu durement.
Morgane tira Pandora, qui s'assit près d'elle, l'écoutant en soupirant.
- Déjà, on ne connait pas cette femme. Ça se trouve, c'est une amie de Servilus-le-crapeau. En plus, elle est doyenne, donc elle est fidèle à Snow. Deux personnes qu'il vaut mieux pas avoir chez soi, si tu veux mon avis. Avec ça, je ne me vois vraiment pas être Mentore. Quoi, la vingtaine, c'est beaucoup trop tôt. On aurait quoi à lui dire, au gamin ? Va pas au milieu, te bat pas avec les autres districts et attend qu'ils meurent ? C'est... Je ne suis pas prête.
Pandora regarda Morgane, enroulant son bras autour de sa nuque lorsqu'elle parlait, et regarda le mur blanc avec un poster de Kaloss sur le mur d'en face. Elle fronça finalement les sourcils, tournant la tête vers sa brune:
- Tu sais quoi ? Quand je t'entend parler, on dirait que tu parles de cette histoire de mariage entre toi et moi. "C'est trop tôt", "je ne suis pas prête". Pourquoi tu te prends la tête comme ça pour cette histoire ?
- Parce que tu ne te prends pas la tête, toi ?
- Si, bien sûr ! Mais... Prenons notre temps. Tu vois, ton problème, Morgane, c'est que tu es trop pressée.
Elle s'assit en tailleur sur le canapé et mit un coussin entre ses jambes croisées, posant ses coudes ainsi. Elle toucha le nez de sa compagne à chaque mot:
- Tu ne cherches pas à faire bien, tu ne réfléchis pas. Tu fonces et tu te cognes partout.
Morgane sourit, amusée, louchant sur son doigt. La surprise et la tension que le couple ressentait à l'annonce d'une telle révélation, d'une telle proposition, retombait grâce à Pandora.
- Donc oui, évidemment que je penses à être Mentore. J'y avais d'ailleurs déjà pensé en étant dans l'arène. Et si... Le fait d'y avoir réchappé peut aider d'autres enfants à le faire ? Si on pouvait contrôler enfin les vies qui s'y jouent, en sauvant l'un deux ?
- Mais on laisserait mourir les autres, Pandy. On laissera toujours mourir les autres.
Le regard de Morgane était si expressif... Pandora stoppa immédiatement son doigt qui appuyait bêtement sur son nez. Elle s'y plongea sans peur, connaissant par coeur sa délicieuse compagne. Elle y voyait encore la mort de Gadjeel, celle de Gabriel, Franck, et tout ceux qui avaient dû subir les poignard acérés de la brune pour sauver leurs vies à toutes les deux. Le coeur de la blonde se serra en pensant à tout les sacrifices que son aimée avait fait pour la protéger, elle était tâchée de sang en son honneur...
Mais elle ne se sentait pas coupable. Ce sentiment prenant était parti de son esprit. De toute façon, il y avait un vainqueur. Et des nombreux perdants, de trop nombreux perdants.
- C'est plus facile pour toi parce que tu n'as tué personne, princesse, murmura Morgane du bout de ses lèvres pâles.
- Je sais, répondit dans un chuchotis la jolie jeune femme.
Elle prit le visage de Morgane en coupe, ses doigts froids sur ses joues bouillonnantes. Ce regard de braise, éteint, le minuscule feu lointain qui y brillait s'éloignait... Pandora caressa son visage, la regardant en laissant leurs pensées communes se rejoindre autour de ce brasier.
- Je sais ce que tu as fait pour moi. Tout ce que tu as fait. Et je ne serais jamais assez reconnaissante. Mais il faut que tu saches que tu mets tes insécurités sur ça et que je le vois.
Morgane caressa la main de Pandora sur sa joue du bout du doigt, ne la lâchant pas du regard. Elles ne cillèrent pas.
- Je pense que tu ferais une excellente Mentore, Morgane.
✺
- Bordel de chiasse de merde de cul.
Cassiopée râla dans son lit, complètement engourdie. Elle n'avait presque aucun souvenir de la veille. Lorsqu'elle s'était réveillée, elle n'avait pas reconnu l'endroit. Elle était d'ailleurs habillée différemment.
Mais elle n'avait pas le loisir et l'envie de se demander comment elle s'était retrouvée en pyjama, alors qu'hier elle se rappelait s'être couchée avec une robe couverte de bière.
Elle toucha son front brûlant, un chapelet de plomb semblait tomber sur ses sourcils et ses yeux, un marteau frappait directement sur son crâne. Elle se sentait grognon, et avait une soudaine envie de manger des fraises en tuant des poulets.
- C'est complètement débile un poulet, vociféra-t-elle en marmonnant.
Gueule de bois. Le mot était juste pour décrire la sensation. Elle avait été complètement bourrée, et en payait les conséquences. De plus, elle avait mal au menton. Rouge et irrité, il était gage du siège qu'elle s'était prise dans le jet en ayant perdu l'équilibre.
- Fais chier...
Son beau visage. Personne ne devait toucher à son beau visage. Malgré, le fait qu'elle était sûre de ressembler à Servilus tant ce matin-là elle se sentait abjecte.
Elle regarda le lit à côté d'elle, la moitié de lit parfaitement faite du Valet de coeur. De la bile lui remonta à la gorge lorsqu'elle pensa au fait qu'elle s'était endormie contre lui. Dégueu. Cependant, elle n'avait pas fait un seul cauchemar cette nuit-là, ce qui était inhabituel.
Elle secoua la tête en se levant. C'était juste parce qu'elle avait dormi avec quelqu'un. C'est tout. Elle haussa les épaules, chassant de force cela de ses pensées.
- Tu es réveillée.
Elle sursauta et faillit tomber, posant une main sur sa poitrine en écarquillant les yeux. Le Valet de Coeur, toujours drapé de ses grands vêtements amples et de son masque, semblait la regarder. Il avait dans la main un bol fumant de café.
- Dieux, tu m'as fait peur ! dit elle avec haine. Refais jamais ça.
Elle le dévisagea. Il était élégant, mutique, con. Con, surtout. Elle s'obligea à ressentir toute la haine du monde envers lui. Stupide aristocrate, stupide voyageur qui ne s'occupait pas d'elle. Dont elle ne voulait pas qu'il s'occupe d'elle, plutôt.
Elle regarda le bol. Puisqu'il ne parlait pas, elle s'imagina la façon dont il allait avaler cela. Y avait-il un trou pour laisser une paille, ou le liquide descendre directement dans sa gorge ? Ou allait-il enlever son masque ?
- Tu aimes le café ?
Cassiopée le regarda avec des grands yeux surpris s'approcher, et lui tendre le bol.
- Euh... Oui...
Il n'était pas gentil. C'était un acte de méchanceté pure, se dit Cassiopée en prenant avec méfiance le récipient brûlant.
- C'est chaud.
La blonde grimaça en posant le bol, les doigts meurtris par la morsure de la température. Elle leva les yeux vers le Valet et répondit d'une voix qu'elle souhaitait dure et froide.
- Merci, j'ai senti.
Elle porta ses lèvres au bol, en regardant le Valet. Dommage, elle aurait bien voulu voir la façon dont il se nourrissait et buvait. Quel imbécile.
Elle sentit la chaleur du café se répandre dans son corps... Pareille à la chaleur d'Ange Coeur. Non, c'était une sensation commune aux autres, finalement. Elle détourna les yeux et dit, les dents serrées:
- Il est empoisonné, ton café ?
- Non.
- Pourquoi tu me le donnes, alors ? T'en as bu et t'en voulais plus ?
- Je n'aime pas le café.
- Et t'en as fait... pour moi ?
Elle ricana méchamment mais paraissait surprise.
- Oui.
Il détourna son visage de marbre, inexpressif derrière ce lourd masque technologique où ne pouvaient se poser les regards.
- C'est ce que les gens mariés font, non ?
- Ils s'aiment, les gens mariés. Ils ne s'achètent pas. Ils sont courageux, les gens mariés.
Elle le dévisagea avec mépris.
- Du café. Et puis quoi encore !
Elle reposa le café. Le Valet baissa la tête, et Cassiopée le dévisagea. Elle n'arrivait pas. C'était difficile de le détester.
- Tu dois pas te casser ?
- Si, dit la voix déformée par le masque d'Ange. Je t'ai laissé un mot avec ce que tu dois faire ici en attendant mon retour.
- Mmh, dit elle en faisant semblant de ne pas l'écouter, juste pour attirer sa colère.
Mais celle-ci ne vint pas. Il avait fini de parler, et il préparait déjà ses affaires pour partir. La jolie blonde arriva dans la salle de bain en soupirant, passant un peigne dans ses cheveux emmêlés. Elle se maquilla dans l'heure qui venait et profita du calme de l'appartement pour laisser son mal de crâne et sa mauvaise humeur se dissiper.
"Pour Cassiopée Coeur.
Je veux que tu te fournisses d'une tenue de soirée. Nous sortons bientôt et devons imiter un couple aimant devant la reine de Coeur.
L'appartement doit être rangé lorsque je reviens. Arrête de casser des assiettes avant mon arrivée. J'ai dû tout ranger.
Ne monte pas à l'étage. Si tu souhaites, il y a des livres sur l'étagère du salon. La télécommande de la télévision est sur la commode. J'ai mis tes cosmétiques dans la salle de bain. N'ouvre pas les placards du bas.
J'ai déposé une montre pour me joindre sur le bar. Porte la si tu as envie. Prend en soin. Ne la casse pas comme les assiettes.
Brûle ce mot. Passe une bonne journée."
Il y avait une petite étoile stickers collée sur la lettre. Cassiopée la prit et la colla sur le mur au-dessus de leurs tête près du lit.
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