XII. Jaden. (XIV)
Mardi 31 octobre, midi :
Il y avait des jours avec et des jours sans. Une vieille gelée rubis trônait au centre de mon assiette et remuait aussi élégamment de droite à gauche que mon séant lors d'un entrainement de natation. Appétissant. Ma fourchette piquait dedans alors que mon visage se décomposait à mesure que je comprenais que ce truc, informe et sans goût, allait être le seul apport nutritif de ce repas. Tout en un, pour le meilleur et pour le pire.
J'ouvris silencieusement la bouche et soufflai un coup tout bas, avant de remonter mon regard vers Jace, qui, un sourire aux lèvres, ne pouvait s'empêcher de rigoler en dodelinant de la tête.
— Tu sais que ça reste de la nourriture, osa-t-il prononcer.
— Tu appelles ça de la nourriture ? C'est infecte.
— C'est mangeable, accorda-t-il.
— Mangeable mais pas appréciable.
Un plateau fut lâché sur la table dans un discret fracas à mes côtés.
— Vous avez fini, le vieux couple ? demanda Raven en regardant avec dégoût mon assiette.
Elle se glissa à ma droite, prenant bien la peine de se mettre dans la parfaite diagonale visuelle de Treegof d'un côté et Fallsbeck de l'autre.
— Tu es sûr qu'il n'y a pas plus entre vous deux ? me chuchota-t-elle aussi doucement que discrètement.
Mes pommettes se mirent à rougir instantanément, me remémorant avec tant de facilité les nombreux baisers échangés depuis dix jours. J'étais mort. Raven allait se rendre compte de la vérité, c'était évident.
— Non, mentis-je en arrondissant au maximum courbure sonore du mot.
Olivia s'approcha de notre table et me permit de souffler un peu. Elle tirait gentiment Raven vers une autre occupation et lui faisait oublier nos quelques dernières secondes d'échanges, discutant avec elle des entrainements d'hier sur le mensonge. En voyant la tournure que prenait ces événements, mes yeux se replongèrent sur la texture présente, et encore intacte, dans mon assiette. Il était temps de la manger. Je pris alors une grande inspiration avant d'être bloqué au niveau alors que ma fourchette remontait vers ma bouche. Lentement, je fus attiré sur la personne juste en face de moi, prête à me sauter dessus, pour me tuer certainement.
Jace me jetait des regards toujours plus insistants. Il voulait que je lui en parle. Le moment opportun venait certainement de me passer sous le nez, supposai-je en me remettant mentalement en question. Mais Raven restait Raven. Je ne savais pas par quel chemin passer pour lui annoncer sans qu'elle ne m'en veuille de le lui avoir caché. Elle ne m'en voudrait peut-être pas longtemps mais elle me bouderait quand même jusqu'à la fin de la journée.
— Les gars ? s'imposa mon rayon de soleil. Vous pouvez arrêter de parler sans parler ? J'existe vous savez. Je suis là, présente et en pleine forme !
Je me tournai vers elle et la gratifiai d'un rire.
— On ne t'a pas oubliée, petite noisette. Mais ça, c'est pour ne pas m'avoir entrainé ce matin. C'était bien avec Monseigneur Clayton Treegof ?
Sa seule réponse fut un bref 'gnagnagna' à peine prononcé du bout de ses lèvres, en prenant suffisamment de précaution pour ne pas attirer l'attention d'Olivia. Elle changea de conversation en répondant à la dernière question que Liv lui avait posée. Elle faisait tout pour oublier notre existence, le temps que nous arrêtions nos jeux de regards, ma foi agréables pour ma part. Jace lança sa jambe sous la table la faisant délibérément atterrir sur mon tibia.
— Aie ! m'exclamai-je avant tout pour moi même. Eh ! Non.
Raven et Olivia tournèrent en même temps leur tête ne comprenant pas la raison exacte de ma protection étouffée, mais ne s'attardèrent pas sur cet incident. À la différence de mon cher et tendre camarade de chambre qui insista davantage sur les foudres qu'il me lançait déjà depuis quelques minutes. Ses ambres étaient devenues de parfait yeux de tigres, prêt aussi bien à me tuer qu'à me dévorer sur place.
Je savais très bien qu'il fallait que j'en parle à Raven mais je n'étais pas prêt. J'avais besoin de temps Quelques heures supplémentaires allaient peut-être me donner plus de courage pour affronter le monstre.
Le plateau avalé tant bien que mal, je me levai de mon banc et décidai de rejoindre notre chambre. Il était hors de question que je reste quelques secondes de plus entre Jace et Raven. Je les aimais tous les deux, mais l'amour avait des limites. Des limites que Jace savait parfaitement dépasser pour qu'il puisse faire ce qu'il voulait de moi. Sans Raven, je ne pouvais tenir, mais face à elle, je trouvais une force qui me permettait de ne pas craquer facilement. Or là, on y était. On était à ce point de non-retour.
Jace me rejoignit rapidement et ferma délicatement la porte derrière lui. Ce jour de repos me faisait un bien fou et depuis que j'étais dans ses bras, rien ne me comblait plus. À peine fut il dans notre chambre que son corps se déplaça jusqu'au mien pour profiter de ce moment intime. Tout se déroulait à merveille et il ne restait plus que quelques minutes avant que nous rejoignions le reste de la formation pour un après-midi spécial.
Il se pencha alors vers moi et m'embrassa chastement, prenant le temps d'approfondir avec tendresse le baiser. La douceur de ses lèvres me transportait au-delà des barrières de ce monde, là où je me sentais libre et indépendant de faire tout ce qui me semblait juste et bien pour moi. Notre bulle se reformait encore et toujours entre nous, même si elle était percée, jamais elle ne cédait.
Un bruit métallique attira lointainement mon attention jusqu'à ce que le frottement du porte contre son battant me tire définitivement hors de ses lèvres encore rosées et humides. Mon regard remonta le long de la silhouette aux divines courbes pour y trouver les beaux yeux noisettes de Raven, parfaitement écarquillés. Je suis mort... Sa bouche légèrement entrouverte formait un rond presque parfait avant de s'aplatir pour qu'elle s'élargisse en un sourire.
Je me dégageai doucement de Jace, souhaitant toujours autant profiter de la chaleur qui se dégageait de sa peau et de son être et finit par m'asseoir sur le bord du lit. Mon doigt rencontra par hasard ma joue et commença à la frotter, un peu par mécanisme, embarrassé. Mes yeux fixèrent un point de la pièce, proche du plafond pour m'empêcher de regarder ceux de Raven et n'esquissaient que de légers aller-retours en sa direction. Elle pouvait être impressionnante quand elle le voulait et c'était le parfait moment pour l'être.
— Je... Non, non, non. Ayden ?
Mes lèvres ses pincement en même temps que Raven fronçait ses adorable petits sourcils en une moue déconcertée. Je regardai Jace, son tendre regard doré me berçant de toute part, et laissai mon petit soleil exploser.
— Depuis quand ? Je veux tout savoir.
Jace s'approcha par-derrière et m'encercla suavement de ses bras musclés et moelleux à la fois. J'avais l'impression d'être transporté au cœur des nuages, dans un confort moelleux absolu. Il était parfait et loin d'être à remplacer de sitôt.
— Quelques semaines, chuchota mon beau brun.
— Je le savais ! Je le sentais. C'est mon flair ! Infaillible !
— Tu savais rien du tout, oui.
Raven tendit sa main et pointa de son doigt mon nez. Elle rigola à me faire loucher et m'entraîna rapidement à faire de même.
— Bien sûr que je savais, sinon je ne serais pas venue ici. J'avais besoin d'en avoir le cœur net puisque Môsieur ne sait pas me parler...
— Moi, je sais pas ? m'amusai-je. Parce que toi, tu me dis ce qui se passe entre Treegof et toi peut-être ?
Immédiatement ses pommettes se mirent à rougir et elle fronça du nez. Treegof était son point sensible depuis quelques semaines et une chose était sûre, tout allait évoluer. Je le sentais. Elle balança ses belles boucles brunes derrière ses oreilles et reprit d'un ton sérieux la conversation. Si je croyais qu'elle arrêterait de parler à Treegof, je m'étais bien fourré le doigt dans l'oeil. Raven restait Raven après tout.
— Aujourd'hui on a pas le temps mais avant demain minuit, je veux tout savoir, passé, présent ou futur ou sinon je fais toutes les recherches moi-même et tu sais que j'en suis capable.
Oh oui... Et je n'avais pas envie qu'elle aille trifouiller dans mes affaires privées. Celles des autres peut-être mais les miennes non. Elle appuya sur l'écran d'accueil de la chambre et ouvrit la porte qui coulissa lentement dans le mur. Alors qu'elle avait disparu, sa voix se fit de nouveau entendre, brisant le silence olympien du couloir.
— N'oubliez pas la soirée d'Halloween ce soir ! s'empressa de prononcer Raven. On sort les plus beaux costumes et on boit les meilleurs cocktails !
Je me tournai vers Jace, à la fois déconcerté de l'état de Raven et heureux de savoir qu'elle n'avait pas eu trop de mal à accepter ma situation.
— Elle l'a plutôt bien pris, non ? demandai-je à mon irrésistible brun.
Il ne répondit pas directement, préférant m'embrasser longuement, comme pour me faire comprendre que désormais, c'était lui et moi, ensemble, en public et en privé.
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Hello hello ^^
Comment allez-vous ?
En me voyant écrire le (XIV), je me suis fait la réflexion que ce chapitre était extrêmement long. Est-ce que ça vous dérange ? Ou bien le fait de l'avoir coupé vous plait ? Plus que 2 chapitres avant d'arriver à la fin de cette partie, on retrouvera ensuite de nouveau le point de vue de Raven, pour plus de folie encore !
Ici pour les avis sur le chapitre et vos théories :
Dites moi ce que vous en pensez et n'oubliez pas que les petites étoiles valent tout l'or du monde dans l'esprit d'un auteur, quelque soit son genre.
Xoxo <3
Ptitgibilin ✧
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