S07 - EP 43 ✧ part II
Partie 2/2
Les agents de presse se changèrent en groupies à l'hystérie professionnelle. Une avalanche de « Red Kellin, Red, Mr Kellin ! » s'abattit sur les oreilles de Dean, qui grimaça son inconfort. Red s'accrocha à son épaule ; il le soutiendrait de tout cœur par sa simple présence.
— Red Kellin, les Beat'ONE signent encore une collaboration avec Dean Leblanc, parvint à glisser un homme en haussant la voix. La dernière fois c'était lors de votre live guérilla au grand show défilé de Balmer Hills, et la première fois, à l'occasion de votre live come-back Renovatio au Saunes Town Dome. Est-ce que White Enterprise© est devenu l'un des sponsors officiels de votre groupe ?
Des points d'interrogation dansèrent dans le regard de Red. De quoi parlait-il ? D'ordinaire, Rebecca se chargeait de ce genre de questions. Mais la mère avait rejoint son fils, peu sereine à l'idée de l'abandonner toute la journée au service de baby-sitting proposé par l'hôtel.
— Pour les sponsors et compagnie, prière de s'adresser à Jet Poppy-Garett. Je refuse délibérément de solliciter mes neurones.
Certains agents de com pouffèrent. D'autres, vannés, s'en voulurent d'avoir occulté avec quel casse-bonbons ils conversaient. Le journaliste du Canal 12 revint à la charge :
— Pourtant vos rapports avec White Enterprise© sont connus pour être houleux. On se souvient encore des travaux d'intérêt général que vous avez effectués au Colisée d'Oram, l'année dernière, pour avoir vandalisé la voiture de Jonathan Leblanc. Il me semble que vous n'étiez pas arrivé à échéance.
Red sentit Dean se raidir. Il lui pressa doucement l'épaule, l'incitant au calme. Il gérait.
— J'ignorais avoir affaire à mon agent de probation, rétorqua-t-il, sec.
Cette histoire avait été mise en stand-by à cause de l'enchainement des évènements. À la suite de son agression armée, le Colisée d'Oram avait été fermé au public et les travaux de rénovation avaient continué à guichet fermé.
— Mais comptez-vous poursuivre ces travaux d'intérêt général ? enchaina une femme.
— Comptez-vous piétiner ma joie de vivre en ce jour merveilleux, en ravivant des souvenirs douloureux ? J'ai failli me faire tuer lors de cet épisode, rappela-t-il insidieusement.
Dean se raidit davantage. Et merde ! pensa Red, non sans torpiller la femme d'un regard de rapace. Cette gourde allait lui foutre son ours polaire chéri en pétard ! Elle tenta de se justifier, soudain mal à l'aise :
— Ce n'était pas le but...
Le regard noir de Dean lui arracha un frisson. Elle ne gagna pas la sympathie de ses comparses. Mettre la rockstar en rogne tuerait leurs chances de poursuivre l'échange, et toute occasion de soutirer une déclaration sur son couple. La versatilité de Red Kellin était un secret de polichinelle. Et en ces lieux, la volonté des musiciens prévalait sur celle de la presse.
Red prit la femme en pitié, comme ses homologues se désolidarisaient de sa personne. Il révéla les coulisses.
— Jonathan a demandé à ce qu'on abandonne les charges contre moi, à l'approche de Noël dernier. Il fallait bien assainir nos rapports pour le bénéfice du concert donné au White Park©. Nous n'avons pas jugé utile d'en informer les médias. Après tout, c'était une question d'ordre privé.
De ce fait, le dossier juridique de Red était en révision, procédure sans doute allongée par l'accumulation de ses actes de vandalisme durant la période concernée. Son interruption musclée et traumatisante du meeting politique d'Allen Van Der Litz marquait encore les esprits. Maintenant que des abrutis ravivaient les braises, il ne s'étonnerait pas que la justice lui tombe à nouveau dessus et en rajoute une couche.
Par ambition, certains procureurs n'hésitaient pas à brandir ce genre d'affaires juteuses pour les médias. Quoique, le statut d'intouchable de son homme pèserait désormais sur la balance. La censure liée aux Leblanc et affiliés ne venait pas qu'avec des inconvénients, songea Red.
— Avez-vous des questions plus fun ?
— Quels sont réellement vos rapports à tous les deux ? demanda tout de go l'attachée d'un magazine people.
Elle avait osé la question que tout le monde se posait, bafouant les conditions de Dean. Celui-ci chercha son affiliation et ravala un grognement : Wassup'Mag®.
— Il a dit « fun », pas indiscrètes, souligna-t-il obligeamment, comme on leur lançait à présent des regards équivoques.
— Quand vous posez ce genre de questions si pertinentes, vous vous attendez à quelle réponse ? fit Red, maquillant son sarcasme de curiosité. Si je dis qu'on a un rapport « cordial », vous crierez au mensonge, vu ce qui circule dans les médias et les réseaux sociaux. Si je vous dis « plus qu'amical », réponse criant l'évidence, vous voudrez que j'approfondisse, comme si ma déclaration ne se suffirait pas à elle-même. Si je dis « sexuel », vous réclamerez des détails. Mais non. Je les garde pour moi. Contentez-vous de fantasmer.
Dean se pinça l'arête du nez, tandis que des abrutis demandaient confirmation.
— Andy..., souffla-t-il, las.
— Ils couperont au montage, pas vrai ? dit Red d'un air espiègle au troupeau avide.
Il se foutait d'eux, Dean y compris. Là résidait le secret de cette poudre de fée que Red Kellin saupoudrait sur ses interlocuteurs. Le chanteur ne donnait à voir que ce qu'il désirait.
— Tu cherches à créer le buzz, je le conçois. Ton barman latino ne t'a pas suffi, tu comptes aussi le faire sur mon dos ?
— Parce qu'il est large, viril et magnifique, pardi ! répliqua Red, y assénant une claque bien sentie. Et pour ton information, tu es seul fautif derrière le dernier buzz.
La tape visait à le punir de les avoir exposés de manière si peu classe. Un coming-out d'une telle indignité ne correspondait tellement pas à Red Kellin ! Le comble : son homme avait bafoué sa propre classe avec ce baiser soldé devant un bar d'hôtel et une poignée de journalistes ayant débauché. Puisque Dean avait encore la pilule Iris en travers de la gorge, cette bonne tape dans le dos l'aiderait à recracher, tiens !
Les journalistes oublièrent toutes mises en garde. Les questions fusèrent. Un voulut savoir de quand datait leur couple. Une demanda qui de Dean ou du barman avait offert à Red le magnifique bouquet de roses blanches et rouge, dont la photo avait fini sur sa page ownetwork©. Dean, qui se remettait à peine de la claque, se renfrogna. Les agents de presse se méprirent sur sa réaction, l'attribuant à la douleur. Ils se trouva même certains pour compatir à sa peine.
Le plus fascinant avec la réputation de butineuse de Red Kellin, c'est qu'elle pouvait décrédibiliser la vérité. Malgré le baiser entre Dean et Red, des individus sceptiques doutaient de leur relation et en exigeaient la preuve. Car Dean ne s'était ni offusqué, ni empourpré, n'avait même pas bafouillé de gêne, affichant une mine blasée.
Lorsqu'elles ne vous déstabilisaient pas, les questions des journalistes vous faisaient dire ce que vous ne vouliez pas. Une solution était de réduire leur temps de parole. L'interview n'avait que trop duré. Pourtant, Dean se surprit à apprécier le moment avec Red à ses côtés. La chaleur de son partenaire contre son flanc l'apaisait et l'empêchait de libérer les fauves de son impatience.
— Revenons à un sujet moins trivial, voulez-vous ? Ne testez pas les limites de mon indulgence, elles s'atteignent vite.
Nouvelle vague de déception. Jouant le jeu, un faux-cul réorienta la conversation sur le concept de la scène.
— L'idée me vient de l'envie de fédérer plusieurs domaines artistiques et les concentrer au même point. La pensée que l'art gagne à ne pas être compartimenté m'a toujours tenu à cœur. Prenons le Septième art par exemple. Je trouve l'appellation un peu impropre, car il résulte de la fusion des arts l'ayant précédé. Le cinéma emprunte aux arts scéniques, aux arts visuels, à l'art musical et même à l'art architectural. Il hérite de chacun de ses prédécesseurs. Quid du huitième art ? Radio, télé, jeux vidéo et j'en passe, ces concepts admettent des passerelles entre eux. La catégorisation de l'expression artistique humaine n'est qu'une façon d'y imposer des limites.
Certes, classifier les arts répondait au besoin des hommes de toujours nommer les choses. Mais chez Dean, la problématique s'avérait plus profonde. Il nourrissait un certain ressentiment envers son père qui n'avait jamais reconnu ou encouragé son talent pour l'illustration. Vince avait dénigré sa sensibilité dans ce domaine, privilégiant la noblesse des deux premiers arts : architecture et sculpture. En grandissant, Dean avait compris que son père n'était pas un cas isolé.
— Le monde a une vision biaisée des différents arts. On plébiscitera un étudiant en architecture, on enviera sa condition s'il réussit dans le métier. À contrario, on regardera d'un œil inquiet ou dédaigneux le jeune qui voit son avenir dans le dessin ou rêve de devenir chanteur, on l'incitera à faire de « vraies » études en parallèle. Si, éventuellement, ce dernier finit par vivre de sa passion, les mauvaises langues ne l'attribueront pas à son talent et ses efforts mais à sa chance. Parce qu'il a rencontré les bons interlocuteurs au bon moment. Cette connasse versatile de Dame Chance n'y est pas toujours pour quelque chose !
— Amen, valida Red, soutenu par une poignée de journalistes.
— Mon but, reprit Dean, est de prouver que les arts jugés si différemment ne sont que la manifestation d'une seule et même chose. Ils s'emboitent bien car ils constituent les nombreuses facettes d'une entité unique : l'expressivité humaine. Chaque plateforme de Rock Buster serait en théorie dédiée à un art de scène différent. En cela, le concept est un ersatz de Tekhnopolis©.
— Vu l'avancement rapide de son chantier, l'inauguration de votre white project est prévue pour bientôt ? Certains échos disent le mois d'avril, d'autres parlent de mai. Qu'en est-il ?
Dean sourit pour lui-même. Ouais, ils avaient bel et bien bachoté le dossier.
— Il n'y a pas encore de date officielle à l'heure actuelle. Néanmoins, si les délais sont respectés, ce sera en mai. Sinon plus tard, mais dans tous les cas, avant cet été.
— Ce n'est pas un peu tiré par les cheveux d'assimiler Rock Buster à Tekhnopolis© ? D'un côté, on a une scène loufoque, de l'autre, un hybride gigantesque d'institut de beaux-arts, maison de production, studio d'enregistrement ciné et radio, conservatoire et salle de spectacle !
Cette fois, Red répondit :
— L'idée derrière la démarche de Dean est un dispositif à plusieurs tableaux scéniques. Tout comme Tekhnopolis© regroupera de nombreux talents, en bonne Cité des Muses, Rock Buster aura la mission de mettre en scène plusieurs artistes de l'Entertainment.
Dean lui adressa sa fierté dans un sourire, heureux que Red ait saisi l'essence de son projet. Son partenaire vendait bien son concept.
— À cause du rush et du manque de temps, les Beat'ONE seront les uniques testeurs pour l'inauguration de Rock Buster, poursuivit le chanteur. Si ça remporte un franc succès auprès du public, lors d'un prochain show, on envisagera d'inviter des DJ, des jongleurs pyromanes, des danseurs, des acrobates, des cascadeurs, et même des artistes peintres s'ils veulent ! L'autre fois, j'ai vu le show d'une artiste qui peignait sur un écran lumineux avec du sable. J'ai pensé : « ah, ce serait cool de jouer avec le groupe, tandis qu'elle nous narre son histoire avec des grains de quartz ! ». Et puis, j'ai toujours rêvé d'un concert avec des taiko. Vous savez, ces tambours japonais géants sur lesquels ils tapent dessus avec des cris de ninjas et les muscles saillants. Rrr, ça fait envie !
Dean remua la tête, comme ça riait dans l'assemblée. Red les avait captivés et réduits au silence. Ils étaient suspendus à ses lèvres, prêts à avaler chacune de ses paroles. Le chanteur les abreuvait d'anecdotes comme il le ferait avec des copains. L'effet star, sans doute. Le secret : la jouer accessible. Plus une célébrité renvoyait une image snobe ou excluait les journalistes de son piédestal, ces derniers tendaient à se montrer incisifs, provocateurs, tatillons. Ils cherchaient la petite bête, le faux pas, ou simplement la preuve que le people n'était pas aussi iconique qu'il s'en donnait l'air.
Red gommait le mur invisible entre l'idole et les mass-médias. Efficacité garantie, car rien n'était calculé de sa part. Malgré son personnage exubérant au caractère de diva, derrière Red Kellin se cachait Andy Rell, et Andy n'avait rien de snob.
— Tiens, l'autre jour durant mon vol, j'ai fait la rencontre d'une nana qui pratique de l'afro-jazz au son des Beat'ONE. Visuellement, ce mariage ethno-rock claque.
Il le dit en claquant la paume de sa main gauche du dos de sa main droite. Il papillonnait dans ses exemples, mais sa logique ne présentait pas de faille. Le plus jouissif : Dean adorait ses idées. Ils oscillaient à la même longueur d'onde.
— Il serait même possible de greffer une rampe pour des cascades de sports extrêmes, émit-il, pensif.
— Ça, c'est de l'idée alléchante ! Imaginez un live de rock, des effets lumineux, des jeux de lasers, et des motards volant d'une plateforme à l'autre dans un décor de projections géantes, juste au-dessus de ma tête ! Ça va être un truc de malade !
Des sourcils furent haussés. Dean s'alarma. Il passa un bras autour des hanches de Red, l'attira encore plus près et murmura à son oreille :
— On va peut-être se limiter aux BMX, mon cœur. Et ils seront dans une cage.
Il se maudit d'avoir livré sans filtre son imagination. Red n'était pas le plus raisonnable du couple. Seulement, cet homme stimulait ses muses. L'idée des sportifs extrêmes était née à l'évocation des cascadeurs. Or il ne serait jamais serein face à un numéro de haute voltige de grosses cylindrées au-dessus du crâne de son chéri. Certes, cela en mettrait plein la vue. Mais Dean préférait voir ce genre de chose dangereuse et époustouflante sur son écran plat, dans une émission qui dénichait dit-on d'incroyables talents !
Hélas, Red ne fut pas de cet avis. À en juger par son air emballé, l'idée avait déjà obtenu quatre « oui » de son jury. Tous deux eurent à peine conscience d'être sous les projecteurs d'yeux gloutons, ne ratant rien à leur moindre interaction.
— On travaillera avec des pros, Dean. Ce sera des shows réglés au millimètre, avec des répétitions très cadrées. T'as déjà vu nos perfs ultracalibrées, au Dôme et au White Park©.
À leur grand dam, un journaliste y vit une perche tendue.
— C'est une drôle de coïncidence que ces shows se soient tous les deux déroulés en décembre. Ça vous fait quoi de revenir dans cette ville, dans ce genre de conditions, sachant les souvenirs que vous a laissés Nior en décembre dernier ?
Ou comment parler de l'enlèvement de Rudy Leblanc, l'air de ne pas y toucher ! Dean abdiqua. Ces sangsues avaient le mérite d'être tenaces. Autant leur donner satisfaction afin de ne plus revenir dessus.
— Nous exorcisons ce démon avec le Rock'n'Rumble, répondit Dean.
Red, assombrit par ce triste rappel, rebondit :
— On invite le public à venir nombreux à cette séance d'exorcisme. On va réveiller les morts !
Dean rit.
— Avec ses prouesses chamaniques, il en est bien capable. Qui sait si le spectre de John Cerni ne nous gratifiera pas de sa présence ?
— Vous parlez vraiment comme un couple, vous dites « nous », releva l'agent de Wassup'Mag®.
Dean grinça des dents en silence. Il voyait déjà Torcy se frotter les mains. Croyant se montrer espiègle, elle devint lourde :
— C'était quoi, ces messes basses tout à l'heure ?
Ces vautours quémandaient tellement ce scoop, qu'ils tireraient le diable par la queue s'il le fallait ! Dean eut alors une révélation. Le baiser au Triumph Hotel n'avait absolument rien précipité. Parce qu'il se découvrait dans l'incapacité totale de feindre la simple amitié avec Red. Il ne savait plus tenir ses distances à proximité de cet homme qui l'attirait comme un aimant. Leur cordialité avait, depuis longtemps, perdu en crédibilité au profit d'une complicité de couple qui transparaissait de façon naturelle dans leurs gestes. Près de Red, son langage corporel ne pouvait plus jouer la carte de la subtilité.
Au fond, les tapis rouges de galas et d'avant-premières n'attendaient plus qu'une apparition du couple ReDean, main dans la main.
— Je parlais bien entendu au nom des Beat'ONE et au mien, ironisa Dean, conscient de n'éconduire personne. Vous n'êtes pas sans savoir que mon fils et moi avons été adoptés par la Beat'ONE Family. Quant aux évènements de décembre dernier, mes proches et moi en avons souffert. Constamment revenir dessus, comme vous faites, ne nous aide pas à guérir de cette blessure qui cicatrise à peine. Je vous saurai gré de ne pas en gratter la croute, messieurs dames.
En négociant bien, il en appellerait au côté « humain » des vautours. Les plus perspicaces liraient entre les lignes et comprendraient qu'ils folâtraient avec le danger en persistant dans cette voie. Ils n'avaient pas envie de contrarier ce Leblanc-là. Cependant, évoquer l'enlèvement de Rudy restait une diversion qui les détournait de son couple. Un véritable exercice de funambule !
— On vous souhaite le meilleur, à vous et à Rudy, dit une femme, comme pour clore ce débat.
Dean l'en remercia, non sans constater qu'elle parlait de Rudy de manière familière. Les joies de la surmédiatisation. C'était le prix à payer en devenant une personnalité publique, même malgré soi.
— Gardez l'œil ouvert, on compte lancer un concept de live si tout se passe comme on veut, annonça Red. Du burlesque, cirque, conservatoire et d'autres disciplines artistiques qui se disent nobles, sur une scène trash de rock. Des shows tout en un, où chacun aura son quart d'heure de gloire de freestyle, sur du bon son Beat'ONE. (Le regard brillant, il leva un index ostentatoire et déclama avec conviction :) Des livebusters. Des concerts « signatures » qui cassent tous les codes !
— Tu viens d'inventer ce mot à l'instant, le vendit Dean, moins dupe que le reste de son auditoire.
Les Muses kelliniennes respiraient la santé. Red demanda aux agents de presse de communiquer à ce sujet.
— Il se peut qu'on ouvre les castings d'ici-là. Peut-être même qu'il y en aura durant notre concert, jeudi. Qui sait ?
Il sortit son téléphone de sa poche et publia sur son mur social une annonce délibérément vague.
@RedKellin, il y a quelques secondes
« Ouverture des auditions des Livebusters, jeudi 15 février à Rock Buster. Venez nombreux !! »
— Ça ne veut rien dire, « livebuster », souligna un journaliste.
Il attendit l'approbation de ses homologues, à sa manière de les solliciter du regard. Mais il était oiseux de pointer du doigt l'absurdité de Red Kellin. Ce trait faisait partie intégrante de son originalité, comme le rappela son voisin.
— C'est un concept intéressant. Celui de Renovatio© a marqué les esprits, quand vous avez fait votre come-back en vous lançant sur plusieurs fronts. Il vient de vous personnellement, ou après concertation avec votre groupe ?
— C'est une question un peu bête, sans vouloir vous manquer de respect, intervint Dean. Leur alchimie fait que la parole d'Andy vaut pour ses amis, sourit-il pour atténuer sa remarque. (Au fond, le journaliste n'avait pas tort.) Cette mécanique est déstabilisante au premier abord. Je me souviens avoir eu un peu de mal à m'y faire. On a l'impression que les Beat'ONE lui passent tous ses caprices. Et il en collectionne, des caprices ! Une fois que vous avez appris à les connaître tous, vous réalisez qu'ils sont aussi chtarbés les uns que les autres. À la seule différence que le comité de censure de Red a été mis au chômage de manière permanente.
— Ho, je ne te permets pas ! s'indigna Red, devenu la risée. Tu me fais passer pour quoi, là ?
— Pour ce que tu es, une diva orchidoclaste.
Une façon poétique et pédante de dire « casse-burnes ». Les rires redoublèrent. Red s'en gorgea :
— C'est classe !
Sa réaction poussa les journalistes à se demander s'il avait réellement compris. Dean pouffa, amusé par cette manie qu'avait son partenaire de s'approprier les piques lui étant destinées et d'en confectionner un diadème dont il se parait avec panache. Du Red Kellin dans toute sa splendeur ! Cet homme-là le faisait craquer.
Sans perdre le nord, Red reprit son discours. Il renvoyait presque l'image d'un candidat en campagne pour son parti politique.
— Le but des livebusters est de mettre notre art au service du divertissement durable.
Il cita les Pink Floyd, pionniers de cette « philosophie » de méga-concerts dans les années 60. L'artiste musicien ne devait pas simplement donner un concert mais offrir au public bien plus qu'un spectacle musical.
— Les Beat'ONE sont musiciens mais nous sommes aussi entertainers. C'est lors d'occasions comme celle-ci qu'on peut respecter cette partie-là de notre contrat envers nos fans. Pour moi, c'est carrément une obligation.
Dans ces moments-là, on réalisait que le fanfaron avait la tête sur les épaules. Dans son domaine d'expertise, Red était aussi acharné qu'un requin des affaires. Seulement, il suffisait de le penser pour qu'il détruise vos illusions...
— Avec les livebusters, quand on croira qu'il n'y en aura plus, eh ben y en aura encore ! Ce cher Cream-caramel, ici présent, fera en sorte que ça devienne réalité.
Il tapota gentiment la tête de son amant, puis se pencha vers les micros comme pour murmurer une confidence :
— C'est mon ange gardien, mais ce que vous ne savez pas, c'est qu'il est aussi mon génie de la lampe. Entre nous, j'ai toujours rêvé d'astiquer une lampe d'où jaillissent des « choses », termina-t-il, ses sourcils dansant d'un air coquin.
Il avait osé ! Dean roula des yeux. Les agents de presse, hilares, durent lui reconnaître un certain flegme. C'était tout ce que ça lui faisait !? Red Kellin, éternel incorrigible. Le seul moyen de gérer son cas était sans doute d'adopter l'attitude quasi-impassible du modèle.
— Si vous voulez mon avis, je suis sous-payé, maugréa ce dernier. Il m'exploite, je dois subir ses simagrées et, en prime, me coltiner un surnom stupide !
— Diva orchidoclaste, tu te souviens ? Ça vient de toi, mon Phébus. Je suis un casse-noisette sanctifié. Alors, que ma volonté soit faite !
Le rire de Dean affaiblit des rotules. Dieu qu'il aimait cet idiot ! La meute de journaleux, qui en voulaient toujours plus, fut priée de prendre congé. On devait mettre les bouchées doubles afin que tout soit au point jeudi. Vu l'ampleur du travail, ce concert-là commencerait sans doute avec du retard, au risque de perdre des fans au profit des groupes ponctuels. Mais trente minutes étaient le délai minimum syndical d'attente pour des stars de l'envergure des Beat'ONE !
*o*o*
TBC ● EPISODE 44
Dean m'a surprise à être aussi à l'aise devant les micros et les caméras. Gagnerait-il en patience ? Mom is proud. Dans tous les cas, ces deux-là viennent de révéler qu'ils étaient en couple sans le dire... Leur harmonie de couple commence à se solidifier.
*MEDIA*
Intro vidéo : City Wolf - Protector. Des lyrics que le couple ReDean pourrait se dire.
You don't have to be alone, all by yourself
Tired of doing things just to save your mental health
You made a wish and then you lost it down the wishing well
But when you're with me, there's no need to be
So tell me is there somewhere else that you wanna go?
'Cause you've been running 'round in circles stuck in slow-mo
I've got that feelin' that you really wanna hit the door
If you've lost the fight, then let's win the war
When you're tired of fightin'
And you've gotta run, hop right in
Sit shotgun, I'm driving
I'll be your protector!
Who's gonna be there when
Everything is tumblin' down?
Who's gonna be there when
You fall to keep you off of the ground?
I'll be your shelter
They'll never get ya'
So stay with me and
I'll be your protector!
No, it ain't easy to survive up in these city streets
Lookin' for someone to help you when you scrape your knees
Takin' too many punches, now it's getting hard to breathe
I'll be your reason so you can believe
Are you waitin' for someone?
Just hold on, here I come
To fix when you're undone!
Now tell me when you're tired of fightin'
And you gotta run, hop right in
Sit shotgun, I'm driving
I'll be your protector!
Who's gonna be there when
Everything is tumblin' down?
Who's gonna be there when
You fall to keep you off of the ground?
I'll be your shelter
They'll never get ya'
So stay with me and
I'll be your protector!
Life is a tightrope, and it's hard to maintain
Let me hold your umbrella, never feel the rain
You standing on the edge and I'll stay close
I'm goin' twelve rounds, ready for another dose!
Your momma said "Never run from the devil!"
Steel chin, and a fist made of metal!
I look at my face, serious as a heart attack!
I'm in your corner, shades on, dressed in black!
Who's gonna be there when
Everything is tumblin' down?
Who's gonna be there when
You fall to pick you off of the ground?
I'll be your shelter
They'll never get ya'
So stay with me and
I'll be your protector!
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