Partie 1/3

Les automobilistes du Queen Boulevard rouspétaient face à la nouveauté d'une déviation. Le trafic dense du centre de Balmer n'étant pas connu pour sa fluidité, les panneaux indiquant « circulation barrée à raison d'une manifestation » n'étaient point accueillis avec diplomatie. Les agents de circulation œuvraient au maintien de l'ordre, sous les quolibets en sourdine et l'étonnement des curieux. De quelle manifestation s'agissait-il ?

Les badauds s'amassaient derrière les barrières protégeant un chantier étrange. Les plus informés nourrissaient les réseaux sociaux et celui plus archaïque du bouche-à-oreille. En plein cœur de Balmer Hill, se déroulerait un catwalk ouvert à tous. Une première ! Un énorme chapiteau bleu, duquel partait le podium blanc, s'élevait au milieu du boulevard et insérait ses ramifications dans trois rues adjacentes. Dans un échafaudage en acier, des ouvriers apportaient une touche finale de confort aux tribunes des partenaires officiels, invités VIP et MIP.

L'excitation de la foule grandissait à chaque annonce : présence de chaînes télés représentées par les cadreurs et reporters couvrant l'évènement, arrivée prochaine de people, stars du grand et petit écran, influenceurs et jet-setteurs. Apparemment, le maire de Balmer honorerait les festivités de sa personne. D'aucuns étaient plus intéressés par l'identité du DJ, dont la scène finissait d'être montée.

Quatre panneaux géants, fixés aux façades des immeubles commerçants, s'allumèrent. Deux affichèrent un cadran polychrome aux couleurs évoluant au gré du compte à rebours. Le troisième diffusait des images du public, tandis que des spectateurs s'agitaient en se reconnaissant à l'écran. Le dernier se focalisa sur le podium immaculé. Un effet larsen arracha des grimaces. Micro en main, deux femmes s'engagèrent sur le catwalk, rejointes au pas de course par un homme. La fausse blonde railla :

— Ah, il a retrouvé sa boussole.

— On ne se moque pas de mon sens de l'orientation.

Le commentaire éveilla les foules. Pour cause, la popularité de Laz Diesel, figure emblématique du milieu de la mode, le précédait. Il était une référence, voire une icône.

Le trio d'animateurs, parfaits ambassadeurs de l'évènement fashion, apparut sur trois écrans, comme la caméra prenait du recul.

— Bonsoir, les filles.

— Bonsoir, Laz, répondirent-elles en chœur.

Leur sourire fanatique refléta celui du public.

— Bonsoir, public ! lança Laz. (Le retour fut à la hauteur de ses attentes.) Je viens de réaliser que quand le photographe est aussi stylé que son modèle, on est soit à la fashion-week, soit sur un catwalk de Will Malroy. (Ses co-animatrices gloussèrent.) Je l'ai aperçu en coulisses en train de photographier les candidats. Il est à tomber. Hystérique et à tomber.

La brune grommela :

— Son T.O.C de la perfection lui rend la vie infernale, et il rend celle des autres infernale en compensation.

— Ma pauvre, ça ne doit pas être une sinécure de travailler toute la semaine avec, compatit Laz.

— L'expérience en vaut la peine.

— Ah oui ? Tu viens de me donner envie de collaborer avec lui.

— Tu le fais déjà en ce moment, Laz, souligna-t-elle. Si on expliquait au public ce qu'il ; se passe ?

Avec la fluidité d'un numéro répété, la blonde enchaîna :

— Bienvenus à tous et à toutes sur le Queen Boulevard. Il sera dix-huit heures dans trente minutes, heure de début du plus grand défilé jamais réalisé. J'assume mes mots parce que ce catwalk en cours de montage fera soixante-dix mètres de long.

Laz siffla, impressionné.

— C'est la première fois que j'en vois un aussi long, et je m'y connais en catwalk. Ça fait cent-quarante mètres aller-retour !

— Pas moins, valida la brune.

— Et si on se présentait au public ? suggéra Laz.

— Ont-ils vraiment besoin de ta présentation ? glissa la blonde.

— Je n'ai pas la prétention d'être connu de tout le monde.

Mais sa modestie pouvait se rhabiller. Toute fashionista et fashion-victim se respectant connaissait cet individu déluré, adepte du look masculin-féminin. Le modèle et styliste partageait sa passion à l'antenne, sur le Canal 1, en animant une émission de mode adulée : Fashion Is Yours. Stanislas Diesel, connu sous son nom d'artiste, Laz, était le chouchou de ces dames.

Vêtu d'un boléro en veau velours, dont le long col en cuir s'ouvrait sur un T-shirt résille à manches longues par-dessus un débardeur en laine, il s'était clairement servi dans la garde-robe de l'autre gent. Son pantalon en cuir habillait des gambettes de gazelle chaussées de bottes à bout pointu façon Far West moderne. Ses bracelets en argent cliquetèrent, lorsqu'il redressa son chapeau Fedora et sourit au public en liesse.

À trente-deux ans, Laz avait déjà travaillé la moitié de sa vie. Repéré à seize ans par une agence de mannequinat, il avait attiré l'œil des créateurs surfant sur la tendance androgyne. Les contrats s'étaient enchainés et il avait eu la grâce de fidéliser les marques. Voilà des années qu'il était le visage du parfum Trouble®, production olfactive du couturier d'origine française Gabriel Holan, maître à chanter de la maison Bargelony durant vingt ans.

Avec une facilité déconcertante, le jeune homme à la silhouette troublante de « toy boy » avait remplacé le top-modèle espagnol, Antonio Absalón, parangon de virilité et épitomé du « bad boy caliente ». Un virage à 180° du créateur, qui s'était épris de sa nouvelle muse au point d'apporter une touche féminine à ses collections Homme.

À vingt ans, courtisé par de nombreuses maisons, Laz avait fait défiler son mètre quatre-vingt-cinq sur un millier de podiums à travers le monde. Passé la timidité de ses débuts, le brun ténébreux se défiait des convenances, des diktats de l'expression de genre, et parfois du politiquement correct. Deux ans plus tard, le divorce était acté avec Bargelony et Laz devenait la muse favorite du créateur Gilano, puis son assistant personnel à vingt-cinq ans.

Fort de son expérience, il s'attaquait au stylisme en ciblant une clientèle privée, avant de viser un public large en produisant l'émission Hot Couture, dans le but de vulgariser la haute couture ; émission qu'il produisait toujours. L'année de ses trente balais, Laz figurait au casting de l'émission de télé-réalité Show Of Secrets, sur le Canal 6, où il révélait l'histoire touchante d'un bébé né avec deux sexes, deux chromosome X et un chromosome Y. Son histoire. Parce que le phénomène d'intersexuation restait encore tabou dans son cher pays et qu'il fallait en parler.

À la suite de la décision maternelle, on lui avait retiré par chirurgie les organes génitaux féminins. Maman voulait un garçon. Adolescent, il s'était souvent demandé s'il se serait mieux épanoui en femme. En dépit de cela, il n'avait manqué de rien. Sa mère l'avait toujours protégé, avait toujours secondé ses choix jugés excentriques par les autres, avait toujours répondu à ses questions, parfois difficiles. Elle s'était assurée qu'il reçoive beaucoup d'amour.

Il appartenait aux chanceux. De nombreux enfants, adolescents et adultes, chez qui la nature avait été indécise au moment de la différentiation sexuelle in-utero, vivaient un calvaire à travers le monde. Le débat sur l'intersexuation et les amalgames sur l'identité et l'expression de genre avait fait sensation. Profitant du buzz, Laz donnait de la visibilité à l'association qu'il parrainait – Gender ; association aidant les personnes nées avec la même particularité que lui.

Au-delà de l'aspect dramatique et émouvant, la population avait découvert un homme déjanté, extraverti, tête en l'air et dépourvu du sens de l'orientation, loin de l'image ténébreuse et sensuelle qu'il renvoyait dans les magazines. Quant à son orientation sexuelle, si la plupart l'étiquetait « gay », Laz ne se prononçait pas.

En plus de produire Hot Couture, voilà deux ans qu'il animait Fashion Is Yours, émission dans laquelle il relookait le commun des mortels, enseignait à la populace comment mettre en valeur ses atouts, et réconciliait femmes et hommes avec leur physique, leur féminité, leur masculinité, leur androgynie, voire leur sexualité. Ce bébé cathodique restait son exutoire personnel. Il y divulguait ses secrets de mode à oser et assumer, car créer la tendance exigeait de l'audace.

Les peoples et le public – majoritairement féminin – l'adulaient. Aussi l'audience attendait avec impatience sa prise de parole.

— Vous assistez à un évènement historique, affirma-t-il. Un évènement organisé par W.M., en partenariat avec Vestis®, les marques cosmétiques Col'OR© et Kanon Cosmetics©, ainsi que votre dévoué serviteur, Laz Diesel. À mes côtés, la charmante Chloé Forget, attachée de presse à W.M.

— Bonsoir, tout le monde.

Chloé sourit à la caméra, aussi radieuse et crispée qu'une professionnelle fashion animant son premier show retransmis en direct. Cheveux relâchés, elle habillait sa silhouette de vahiné dans un pantalon en cuir à dominante noire resserré aux chevilles, et un T-shirt imprimé sous un perfecto au motif camouflage. Ses escarpins rouges et léopard lui galbaient la jambe et apportaient une touche sauvage sexy à son style rock. Le cadreur s'attarda sur sa chute de reins ; de quoi se demander s'il ne la reluquait pas à travers sa caméra.

— Si vous l'ignorez, c'est elle la voix de la communication derrière le modèle Rey, qui fait parler de lui depuis ses débuts, précisa sa voisine.

— Je voulais le mâter de près, mais il n'est pas en coulisses, déplora Laz.

Chloé pouffa.

— Rey honore un rendez-vous. Les modèles professionnels ne sont pas à l'honneur ce soir, mais il défile bel et bien. Et cette fois, il sera vêtu par lui-même.

La groupie exprima sa joie à l'annonce de la prochaine présence du modèle. Laz se tourna vers la blonde.

— Tu ne t'es toujours pas présentée, ma jolie.

— Et si tu cessais de monopoliser la parole ? T'es plus bavard qu'une femme.

— La femme en moi n'aime pas que je la bâillonne, sinon elle me pourrit la vie.

Amusé, le public reconnut une de ses catch-phrases. Laz en collectionnait, pour le bonheur des téléspectateurs. « La femme en lui », nommée Lazy, fusion de Laz et « lady », personnifiait son défaut d'éternel paresseux. Un gros mensonge – il restait un bourreau de travail hyperactif. Aujourd'hui, ses révélations au sujet de son intersexuation apportaient une nouvelle lumière sur cet aspect de sa personnalité que ses détracteurs considéraient comme un délire cliché visant à attirer l'attention. Désormais, la presse s'en amusait et certains journalistes préféraient interviewer Lazy, plutôt que Laz.

La blonde s'introduisit :

— Je suis Natalie Goodman, rédactrice en chef de la section glamour du magazine Vestis®. Ce soir, nous avons l'insigne honneur de vous présenter cet audacieux évènement qui se veut le plus grand défilé du monde !

Dans son total look bleu – pantalon stretch accordéon bleu Klein, tunique satinée ton sur ton resserrée à la taille par une large ceinture bandeau bleu-ciel, chaussures en veau-velours bleu-de-nuit à talons carrés hauts –, elle aurait pu figurer en couverture du magazine qui l'employait. Sur le podium, ses cheveux disciplinés par une natte stricte, sa tenue épurée et sa taille de guêpe se trouvaient à la maison.

— Comme vous pouvez le voir, on finit d'installer les projecteurs pour ne pas être surpris par la nuit. À ceux et celles qui nous suivent derrière leur écran, je vous garantis que l'ambiance ici est électrique !

— Le cadre est magnifique et la météo ne s'annonce pas contrariante. C'est le mieux qu'on puisse espérer, renchérit Chloé.

— Alors qu'est-ce qui va se passer ce soir, Chloé ? À quoi les spectateurs et nos téléspectateurs doivent-ils s'attendre ?

— Déjà, faites-vous à la raison qu'un tronçon de deux-cents mètres du boulevard a été « réquisitionné ».

— Effectivement, une déviation a été mise en place par les forces de l'ordre pour permettre la continuité de la circulation, expliqua Laz. Tout le périmètre a été sécurisé, des patrouilles régulières de police et des pompiers sont effectuées. La mairie s'assure de la sécurité de ses citoyens, des dispositions ont été prises.

— C'est bon à savoir, ça permet de travailler sereinement, souligna Natalie. Il faut dire que le travail abattu en un jour est phénoménal. J'ai cru comprendre que c'est la même équipe qui a monté la scène du concert de rock RENOVATIO, au Saunes Town Dome, il y a deux ans. Vous y étiez ?

— Je n'ai pas eu cette chance, regretta Chloé.

— Une scène mythique, soupira Laz, rêveur. J'aurais aimé défiler sur un tel catwalk. Il n'y a que Will Malroy pour marier ce genre d'évènement rock au fashion.

— Il se définit lui-même comme un rockeur de la mode, révéla Chloé. D'ailleurs, le travail en coulisse est aussi faramineux que celui d'une tournée de rock. Les inscriptions aux castings ont dépassé les attentes de W.M. ! s'exclama-t-elle. Grâce au succès du projet, la décision a été prise de le réitérer tous les ans.

— Dans une ville différente, toutefois, précisa Natalie.

— Voilà qui ravira les modeux et modeuses de toutes ces villes, apprécia Laz. C'est ambitieux.

— Mais réalisable pour W.M., déclara Chloé avec une pointe de suffisance. Sur près de 2000 candidats, et de nombreux participants sont venus d'autres villes, 800 ont été retenus.

— C'est énorme, souffla Natalie. Faut-il envisager ces chiffres à la hausse pour les prochaines années ?

— Je pense, oui. Vu qu'une date définitive sera arrêtée pour permettre des castings plus longs, et principalement par internet, rétorqua Laz. Pour les prochaines saisons, les candidats enverront une photo ou une vidéo.

L'annonce plut au public. Chloé enfonça le clou :

— Vous assistez aux prémices d'un évènement qu'on n'oubliera pas. J'ai l'intime conviction qu'il s'agit d'un projet hors du commun qui marquera l'histoire de la mode de ce pays !

Elle dorait le costume de W.M. Les marques partenaires de l'évènement mettaient l'accent sur le message médiatique. Le trio se montrerait dithyrambique.

— À ceux et celles qui rêvent de se mettre dans la peau d'un top-modèle, Will Malroy pourrait faire de ce rêve une réalité ! annonça Laz. Comptez sur moi pour l'aider dans cette noble tâche d'exalter vos beautés.

— Vestis® fera durer ce rêve, ajouta Natalie, complice. Dix candidats poseront pour le magazine, sélectionnés sur les critères de leur inventivité, originalité et esthétisme. Cet évènement ouvre les portes de ce milieu à de nombreux profanes.

— Mais dites-moi, les filles, quel parcours conduit à ce rêve ?

— On va déjà rassurer le public, commença Chloé, ce n'est absolument pas un parcours du combattant. Le principe est simple. Toute personne qui se sent investie d'un sens de la mode est conviée à défiler sur ce podium gigantesque. Néanmoins, tout évènement nécessite une organisation. Des castings marathons ont été réalisés sur trois jours, dans le but de sélectionner ces Mr et Miss Everybody venus du pays entier. Comme je disais, huit cents des meilleurs looks auront été retenus. Les heureux élus sont pris en charge par les équipes de maquillage supervisées par W.M., qui s'y attèlent depuis ce matin.

— Qu'est-ce qui prend autant de temps ? demanda Natalie.

— Il n'y a pas que le maquillage, répondit Laz. Les candidats sont évidemment chouchoutés, mais ils sont aussi coiffés. Les mannequins en herbe sont ensuite répartis en plusieurs groupes remis au soin de différents coaches. J'en ai moi-même coachés certains.

— Pour des cours express de maintien, c'est ça ? fit Natalie.

— Exactement. Comment investir le podium, quand s'arrêter pour satisfaire les photographes, quand et comment repartir, marcher en rythme avec la musique. Faire une sortie en beauté est un art.

— Ça me donne envie d'en être, dit Natalie, envieuse. Le son est mixé par DJ Nash, invité spécial pour l'occasion.

Elle désigna un homme à sa droite. Concentré à monter son matériel, le professionnel du son ne remarqua pas l'attention des animateurs, qui le reluquèrent sans gêne, tandis que l'écran géant en arrière fond diffusait des images de capitales de la mode à travers le monde.

— Il aurait sa place sur le podium, glissa Laz.

— Je trouve aussi, valida Natalie.

— Il est déjà sur le podium, pouffa Chloé. Certes, en tant que DJ, mais il reste un des clous du spectacle. Il a prévu de nous faire le show.

Alerté, Nash les gratifia d'un sourire charmeur et s'en retourna à ses platines.

Les images étaient retransmises en direct sur le Canal 3 et la page d'accueil du site internet de W.M. Les autres chaînes télés (Fashion-TV, Lunes-TV) qui couvraient l'évènement le diffuseraient en différé. Un demi-millier de personnes étaient attendues dans les tribunes.

— Le partage est le maître mot, dit Laz. C'est « entrée gratuite ». Et on est très ravis que vous ayez répondu présents.

Soudain, il tiqua.

— On dirait qu'il y a un mouvement de foule.

— Sûrement une star. L'arrivée d'une personnalité ne laisse jamais le public indifférent, évalua Natalie.

Elle n'eut jamais aussi raison. Ses oreilles subirent la torture de la stridence du fanatisme.

— Reeeeed !

— Red Kelliiiin !

Ou comment se passer d'une entrée discrète.

*o*o*

TBC ● EPISODE 04 – part 2

Je vous l'annonce : Laz Disel fera l'objet d'une side story. Riddle Game, Volume 1.

*MEDIA*
Intro vidéo : NEONI x BESOMORPH - Origin. Parce que ces lyrics m'inspirent l'histoire de Laz.

Thousand nights I've spent
Counting all my sins
Round and round again
Till insanity sets in
1000 eyes they see
All the worst in me
Is redemption out of reach
Is this all I'll ever be

Laying down my past I scream
This is not the end of me
Fight it like an enemy
Time to bury it or me
Laying down my past I scream
This is not the end of me
Fight it like an enemy
This is not the end of me

So this is my origin
Can't take back who I've been
But It's where I start again
My origin

Memories they bleed
All reminding me
Of the roots I couldn't keep
Of the chaos I set free
I'm not innocent
But I'm more than where I've been
It's time I must ascend
Out of my prison

Laying down my past I scream
This is not the end of me
Fight it like an enemy
Time to bury it or me
Laying down my past I scream
This is not the end of me
Fight it like an enemy
This is not the end of me

So this is my origin
Can't take back who I've been
But It's where I start again
My origin

This is my origin
It's where I'll start again
Origin