S07 - EP 01 ✧ part II
Partie 2/3
— Elles ont eu l'accord des Devon Brothers, ou est-ce que les Devon Brothers ont acheté des droits sur leur jeu ? interrogea Sacha.
— On en saura peut-être plus, les frères Devon sont aussi invités, dit Jay.
« Troisièmement, elles ont de l'audace et sont brouillées avec le politiquement correct. Leur jeu est une agence matrimoniale dont le but est de marier la rockstar sulfureuse et toujours célibataire : Red Kellin, chanteur iconique des Beat'ONE. Le secret de cette success-story ? Le nom Holy Suckers Matchmakers®, HSM® pour la faire courte.
Le visual novel est axé boy's love, c'est-à-dire que les scénarios mettent en scène de la romance entre hommes. S'il s'inspire d'un modèle ludique prisé au Japon, il se révèle quasiment pionnier de ce côté-ci du pacifique. L'attrait de la nouveauté expliquerait en partie sa popularité. Le reste repose sur la réalisation virtuelle d'un fantasme : épouser sa star préférée. Lyria apparait dans le jeu, dans la peau d'une marieuse professionnelle, et donne sa chance à tout Holy Sucker – nom officiel des fans des Beat'ONE –, de réaliser son rêve.
Une question demeure : le concerné est-il consentant ? Ce serait ballot qu'il dise non, quand plus de huit millions d'entités non virales aspirent à l'entendre dire : « oui, je le veux ». »
Le rire de Shelly accueillit la fin du reportage. Yuri embraya :
— D'où ma première question : Red Kellin joue le jeu ?
— La question à huit millions de dollars, ironisa Red.
— Red Kellin joue le jeu, répéta Ria, blasée. Le jeu de mots pourri. Donc vous nous avez reçues ici sans vous assurer au préalable qu'on n'est pas des usurpatrices...
— Belle entourloupe, admit Jay.
— C'est du vice, renifla Inna. Shelly est encore pire, à un point qui inspire l'admiration.
— À mon avis, il a pris le risque de se brouiller avec la justice juste pour le buzz, dit Shelly. Pas vrai, Ariel ? demanda-t-elle en battant des cils.
Le chroniqueur sourcilla.
— Autrement dit, vous soutenez le contraire ? Red Kellin est d'accord avec votre démarche ?
— Nos rapports avec le chanteur des Beat'ONE vont bien, mais il me semble que ce n'est pas le sujet de notre présence, rétorqua Shelly d'un ton posé.
— On n'a pas envie de faire de la récupe médiatique, avança Ria. Cette icône a pour seul péché d'être méga-sexy, en plus d'avoir une voix en or. C'est pas sa faute s'il nourrit des fantasmes, même chez les hétéros ! Fichons-lui la paix. On est là pour notre jeu. Je suis certaine que les Holy Suckers dans le public partagent mon avis.
Avec un sourire éblouissant adressé au reste du plateau, Shelly conclut :
— Laissons Red Kellin en paix. Et il se portera comme un charme.
Le public siffla son approbation.
— Je les aime bien, déclara Red.
— Elles te manipulent ! gronda Rebecca, scandalisée. Comme elles manipulent la presse avec brio.
— Elles viennent de dire que nos rapports sont cordiaux, c'est du pipeau, souligna Korgan.
— Elles ne manquent pas de toupet de proférer ces mensonges à l'écran, et en regardant le public dans les yeux, exhala Rebecca. Je vais leur apprendre à mentir !
— Plus tard, chérie, l'apaisa Jay. Écoute d'abord la mascarade qu'elles comptent nous servir. Ça devient divertissant.
Jeff ricana.
— Elles ont acculé Yuri. C'est une grande gueule, mais il ne mentionnera pas Red de façon irréfléchie. Elles doivent le savoir, du coup ça les sort de la mouise.
— Yuri n'est pas le genre de chroniqueur qui vous laisse vous en tirer aussi facilement, dit Korgan, pensif. Il va le leur facturer.
— S'il ne le fait pas, on se chargera d'encaisser leur note, promit Jay. Quelque chose me dit qu'elle sera salée.
— Pas si elles se tapent les frères Devon, rappela Rey. Vous voulez vraiment rentrer en conflit avec ces mecs ? Ils collectionnent les procès et s'en sont toujours sortis.
— C'était avant qu'ils jouent contre les Beat'ONE, psalmodia le batteur.
Le sourire sadique de Jeff fleurit. Enfin une distraction qui respecterait ses penchants sadiques. Il avait hâte de torturer ces filles avec la bénédiction de son leadeur.
— Comment comptes-tu t'y prendre, Jay ? interrogea Dean.
Red lui lança un regard en coin. Que lui inspirait cette histoire, un dimanche matin ?
— Tu t'y pendrais comment, toi ? renvoya Jay.
— Puisqu'il est question de « jeu », en ce moment je suis partisan du « shoot them up ». Si je m'en mêle, on ne comptera aucun survivant, confessa Dean. Mon avis ne sera pas très objectif.
Son sourire d'excuse n'atteignit pas ses yeux. L'auditoire resta interdit. Teddy, Saïd et Regan se demandèrent pourquoi le problème des Beat'ONE se changeait en compte à régler avec Dean Leblanc ? Ceux qui n'ignoraient plus sa liaison avec le chanteur assimilèrent enfin la nouvelle intouchabilité de Red Kellin.
La presse people titillait un nid de frelons en fouinant dans la vie privée de la star ou en utilisant son image à tort et à travers. Quand son couple ferait son coming-out, l'environnement médiatique autour des Beat'ONE connaîtrait probablement de sacrés changements.
Rudy roula des yeux. Rey essaya de ne pas pouffer. Korgan renifla :
— Merci pour ta franchise « radicale ». Ayant désactivé notre mode « berserk », nous n'irons pas jusqu'à de telles extrémités.
— Nous réclamerons simplement les frais de location de l'image de notre chanteur, dit Jeff.
— Ce jeu en ligne a le potentiel d'avoir une version offline, sur console ou PC, enchaina Jay. Ça signifie un public encore plus large. Au même titre que notre collaboration avec la firme de Guitar Roxor®, on doit pouvoir en tirer un pécule.
Rebecca remua la tête. Cet homme ne jurait que par le fric. Notant sa réaction, Jay se sentit le besoin de se justifier.
— Tu dis toi-même que le fric peut être chic !
— C'est un jeu boy's love, ça limite le public, rappela Junior.
— Pas forcément, contra Nola. Tout le monde peut épouser Red dans le jeu. Fille comme garçon.
— Elles m'ont rendu hétéro ? hoqueta Red, sidéré.
— Ça doit te changer, tiens, se moqua Jeff.
— Andy est très bien comme il est, asséna Dean.
— Aww, you're so sweet, minauda Red en battant des cils de manière caricaturale.
La Beat'ONE Family tenta de réprimer son hilarité et échoua. Rudy se frappa le front. Que penseraient ses amis et son cousin d'un tel spectacle ?
Red voulut plus de détails au sujet du jeu.
— La version hétéro a été mise au point quand ownet© a obtenu le droit de l'héberger, expliqua Nola.
— Elles voulaient clairement agrandir leur public, devina Saïd.
— C'est histoire de pas faire de jaloux, opposa Nola, naïve. Parce que ça reste préférentiellement BL. Quand on choisit une fille, le jeu est moins intéressant. J'ai testé avec deux avatars de sexe différent. Mon avatar fille a moins d'options et de bonus à débloquer.
Elle avait vraiment du temps à perdre ! pensèrent certains. Red, lui, songea que quelques amis de Rudy s'étaient amusés à le marier sur Internet. Son caramel-vanille était-il aussi dans la combine ?
— Fixe un rendez-vous avec ces gamines, Becca, décréta Jay. Elles m'ont l'air d'avoir mûri ce projet sur notre dos.
— Considère que c'est fait. Elles ne s'en tireront pas à si bon compte.
— Je n'aimerais pas être à leur place, chuchota Inna à l'oreille de Teddy.
Cette femme à la beauté froide foutait les chocottes. Teddy haussa les épaules.
— Elles ne l'auront pas volé.
Shelly et Ria se traînaient une réputation d'audacieuses irrévérencieuses. Douées, elles agissaient avec arrogance. Mais contrairement à Teddy, Inna connaissait l'identité du partenaire de Red Kellin. Lyria aurait chaud aux fesses, quand Dean Leblanc jugerait opportun de s'en mêler.
— Peut-être que c'est dans leur intention d'envisager une collaboration avec vous, d'où le fait qu'elles s'autorisent la liberté de dire que vos rapports sont cordiaux, soumit Blain.
— Je suis aussi de cet avis, soutint Rey. Leur assurance est curieuse. Comme si elles ont tout anticipé. Elles se doutent que ces images vous parviendront. En gros, elles savent un peu à quoi s'attendre avec les Beat'ONE. Elles ont fait le pari que vous les contacterez.
Jay fronça les sourcils.
— Nous auraient-elles étudiés pour deviner notre réaction ?
— Pour les besoins de leur jeu, il me paraît logique qu'elles aient effectué des recherches sur vous, avança Inna.
— Dis-moi tout ce que tu sais, exigea Rebecca.
Inna déglutit.
— Pas besoin de sortir la tata flingueuse non plus, tu lui fais peur, Pantiz, souffla Korgan.
Rebecca ravala son envie de distribuer des torgnoles à ces sottes qui osaient se jouer d'eux. Ces inconscients le prenaient à la rigolade. À moins qu'elle ne prenne trop cela à cœur. Zen, Rebecca, zen. Elle dénicha sa tablette, comme Shelly continuait de pérorer :
— C'est une sorte de jeu flash de simulation. On peut le décrire comme un roman visuel interactif ou une bande dessinée vocale. Le joueur ou la joueuse peu admirer les illustrations, en stocker certaines, tout en s'amusant de l'animation des personnages sur un fond musical. Il y a des mini-jeux bonus, et on a ajouté des éléments typiques de jeux de rôle. Ça suit le principe des jeux basés sur un navigateur multi-joueurs et destiné aux réseaux sociaux. La principale plate-forme est devenue ownetwork©.
— C'est vous qui avez contacté les frères Devon ? s'enquit Yuri.
— Je n'étais pas très chaude, mais Ria est du genre fofolle. Quand elle a une idée en tête, elle ne connait pas d'hésitation. Rien ne l'arrête.
— Arrête de dire que t'es pas très « chaude » quand t'es vêtue comme ça, tu manques de crédibilité, soupira Ria.
Shelly lui montra les dents tandis que ça pouffait dans le public. Ria poursuivit :
— On n'avait rien à perdre. Le pire qui pouvait nous arriver était une réponse négative qui ne changeait rien à notre quotidien. Dans le meilleur des cas, ils se montraient intéressés et c'était jackpot ! Sans audace, on n'aboutit à rien. C'est ma philosophie.
— Une philosophie payante, renchérit Yuri. Vous êtes étudiantes de Darney, en année de master. Et vous gérez en parallèle un jeu devenu un média social, si on se base sur les interactions de huit millions d'internautes. Comment s'est passée la collaboration avec les frères Devon pour l'intégrer sur ownetwork© ?
— Déjà, on a été surprises, dit Shelly, ravie.
— Non, réfuta Ria. Tu t'es d'abord dit : « génial, je ne chômerai pas après mon diplôme si les frangins Devon s'intéressent à nous ! »
Elle imita si bien le ton et la gestuelle de Shelly que celle-ci piqua un fard.
— Mais ferme ta bouche, wesh !
— Elle est comme ça, la vendit son acolyte. Son apparence est trompeuse. Mais elle ne l'assume que quand elle est mise au pied du mur.
Red ricana.
— Elles sont marrantes.
— Elles ont au moins le mérite de montrer leur sale caractère en public, maugréa Lou-Ahn.
— Eh bien, Shelly n'a pas si tort, soutint Yuri. La licence de votre jeu vous assure un avenir dans un futur proche.
— C'est un peu tôt pour s'avancer, argüa Shelly. Son numéro de version actuelle n'a pas été divulgué, mais rien ne nous garantit que la version sous licence suscite le même engouement que la version libre. Sinon, la collaboration avec les frères Devon est géniale ! C'est comme vivre un rêve éveillé. Demetrian et Vonceslas Fischer sont juste trop des icônes !
Visiblement, elles étaient fans.
— Très peu savent que le « Devon » des frères Fischer, n'est pas leur nom de famille, expliqua Yuri.
Ria lui coupa presque la parole :
— Ouais, c'est la contraction du « De » de Demetrian, l'aîné, et du « Von » de Vonceslas, le cadet.
— J'aurai appris quelque chose, dit Bill, sous le regard sidéré de Blain.
Comment pouvait-il ignorer une info si basique ?! Notant les hochements de tête de certains, Blain se ravisa. Ce n'était sans doute « basique » que pour lui. Shelly, qui partageait aussi sa condition, bailla.
— C'était la minute culture gé, ironisa-t-elle.
— Je trouve qu'ils ont été inspirés de contracter leur prénom, avança Ria. Vonceslas, c'est dur à porter quand on est geek et mal dans sa peau.
— Quand on a été, Ria. Maintenant ils sont geeks et milliardaires.
— Au temps pour moi.
— C'est de leur sponsor ou probablement patron dont elles font la satire, là, remarqua Rey, sceptique.
— Je les paierai volontiers pour qu'elles enfoncent le clou, rumina Red. Ces mecs sont des trous du cul. Deux goujats dotés d'un génial cerveau.
— Tu les as déjà rencontrés ? s'étonna Rebecca.
— Au dernier Gala Meiridies.
— Eh ben, ça promet une belle collaboration, ironisa la manager.
Ce qui se ressemble, s'assemble, pensa-t-elle en toisant d'un œil mauvais les étudiantes qui faisaient leur petit numéro à l'écran.
— Dites-moi, vous versez des royalties à Red Kellin en échange des droits d'exploitation du jeu ?
— On joue avec son image, au sens propre comme au figuré. Ça va de soi, déclara Ria.
— Ouh la menteuse ! chantonna Sacha. Je ne sais pas quoi penser de leur manière de proférer ces mensonges avec aplomb.
— Je pense que Blain a raison, fit Dean. Elles comptent vous faire accepter la chose à postériori. Et elles sont persuadées d'y arriver.
— J'apprécie moyen qu'on me force la main, grommela Red.
Un euphémisme, connaissant ses antécédents.
— Elles ont probablement fait le pari que ça t'intéresserait, insista Rey. Pari gagné ou pas ? Il y a deux secondes, elles t'amusaient.
— Elles m'amusent toujours, admit-il. Elles ont une sacrée dose d'audace et de folie. C'est juste que...
Red ne trouva pas comment formuler son malaise. Jeff vola à son secours :
— Elles veulent la jouer plus malignes, et ton amour-propre n'apprécie pas.
— Disons que je n'apprécie pas de ne pas être invité à une fête pourtant en mon honneur.
— As-tu besoin d'un carton d'invitation, Andy ? demanda Dean.
En effet, nul besoin d'inviter Red Kellin pour qu'il débarque à une fête et en devienne le maître de cérémonie. Il apprendrait à ces jeunes femmes l'identité du véritable game master.
*o*o*
TBC ● EPISODE 01 – part 3
*MEDIA*
Intro vidéo : Nathan Wagner - Deception (The Darkness pt. IV of V). Lyrics dédiés à Lyria.
[Verse 1]
Well she had me out 'til four in the morning
Playing games with my heart, told me have no worries
Get lost in the night
And let yourself be free
She was about five three, taking all of my money
Bright blue eyes and a smile so cunning
And i tried to fight it
But it all just came to be
[Pre-Chorus]
And the taste of her lips were so so sweet
But her lipstick seemed to poison me
And i knew i really had to leave
But those devil eyes got the best of me
And my gut was on fire trying to get out
But the touch of her hand kept me around
And i knew that this was all so wrong
But her dark spirit, it held so strong
[Chorus]
Welcome to our town of deceptive things
Say goodbye to yesterday
'Cause now we got you on a leash
Was the pleasure so worth it
Now can't you see
We are controlling you
You had your chance to leave
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