S06 - EP 27 ✤ part III
Partie 3/4
Tandis que les filles choisissaient leurs sapes pour la soirée, un service de déco d'intérieur-scénographe métamorphosait une aile de la propriété en dancing club. Un grand fracas s'éleva de l'extérieur. Le matériel se cassait sans doute la figure. Ça s'agitait comme des abeilles dans une ruche. Rey espérait que la Fée Teuf honore son rendez-vous ce soir. Parce qu'elle leur avait posé un lapin à la pyjama party, et Red avait dû jouer les suppléants. Notant la patience rachitique de Dean, il ne l'apaisa pourtant pas d'une réponse à sa question.
— Tu es de mauvaise humeur. Gueule de bois ?
Dean ravala un grognement. Quand il avait demandé à Rey de trouver un créneau pour un tête-à-tête, il se voyait beaucoup plus alerte, et surtout moins à cran. Sa prise de bec avec Red le travaillait. Sans son mal de crâne, il aurait réagi avec calme. Non qu'il se cherche une excuse. Red n'avait pas facilité les choses non plus.
« Ça n'empêche que tu t'es conduit en imbécile. »
S'il avait surpris son amant à remonter son pantalon devant un homme, au moment où le pied du bellâtre décidait de lui caresser les parties... Dean ne l'aurait pas pris avec philosophie. Il aurait aussi exigé des explications. Après avoir étêté le bellâtre. Moralité : rabrouer Red n'avait pas été classe. Mais...
« Il n'y a pas de « mais », tu es bon pour lui chanter la sérénade. »
Dean soupira. Red traversait une zone de turbulence émotionnelle en ce moment. Cette escarmouche tombait mal. Il devait arrêter de boire.
— Je te proposerais bien un ibuprofène, mais c'est déconseillé le ventre vide.
Dean se massa la nuque.
— J'attends toujours ta réponse, Rey.
— Je n'y suis pour rien.
La platitude de sa réponse agaça Dean.
— Tu crois que Rudy est du genre à exiger les coordonnées du patron de l'IANS sans motif ?
Rey haussa les épaules.
— Rudy peut faire montre d'une irrationalité qui me dépasse parfois.
Dean le lui concéda.
— Pourquoi dois-je toujours t'arracher les vers du nez ? Pourquoi te méfies-tu de moi, Rey ?
— Peut-être parce que t'es un Leblanc ?
— Tu sors avec un Leblanc, triple buse !
— Bon OK, va pour un réflexe conditionné, ironisa Rey. J'ai appris à connaître Rudy. Toi, tu as trop de zones d'ombre. Je ne sais pas sur quel pied danser avec toi.
— Je ne te demande pas de danser avec moi mais de me dire ce qu'il se passe.
— Si tu ne saisis plus les figures de rhétorique, je me demande si tu es apte à tenir cette conversation.
— Continue donc à gagner du temps. Pourquoi l'IANS t'imputerait la tentative de meurtre de Lucas ? Y es-tu pour quelque chose ?
— Tu ferais quoi si c'était le cas ? le défia Rey.
Dean s'inquiéta davantage.
— Je trouverai un arrangement...
— Tu me défendrais ? osa Rey, un brin sceptique.
— J'ai promis à tes parents de t'aider. Je tiendrai cette promesse.
— Je vois, maugréa Rey.
Dean s'acquittait simplement d'un engagement. Celui-ci le toisa de façon oblique.
— On croirait que tu me mets à l'épreuve... Au-delà de la promesse faite à Marshall et à Uma, tu es mon beau-fils et je t'apprécie. Heureusement, sinon j'aurais été obligé de composer avec toi. Quand ton fils te sort des déclarations du genre « je ne me vois pas vivre avec quelqu'un d'autre que Rey dans dix ans », tu te fais une raison.
Rey haussa les sourcils, comme des papillons voletaient dans son ventre. Rudy avait dit ça ? Dean poursuivit, fataliste :
— Toi et moi, c'est du long contrat. Le bonheur de Rudy est lié à ta tête de mule. Et si nous voulons tous les deux ce bonheur, un rapport conflictuel entre nous est exclu. J'ai eu ma dose de conflits avec l'autorité parentale.
Rey contint une émotion qu'il n'aurait pas dû ressentir. Dean attendit. Soudain préoccupé, le jeune homme s'assit en face de lui, dans l'un des fauteuils du bureau où ils s'étaient retranchés.
— Je n'ai pas envie de vous embarquer dans ce problème. Après ce qu'a vécu Rudy, tu as mieux à faire que de réparer mes bourdes. Je vais m'en sortir comme un grand, fit-il avec un semblant de désinvolture.
— Commençons par savoir la nature de ces bourdes, insista Dean.
Rey glissa une main nerveuse dans ses cheveux.
— Je suis passé voir Lucas. J'avais besoin de m'assurer qu'en sortant de l'hosto, il sortirait aussi définitivement de la vie de Rudy. Tu comprends ? Je...
D'une forte expiration, il tenta de dissiper son malaise. Dean vit à quel point cela l'affectait.
— Tu t'en veux d'avoir connu ce type, analysa-t-il.
— J'aurais pu faire en sorte que sa route ne croise jamais celle de Rudy ! gronda Rey. Au lieu de quoi, je l'ai abandonné entre les mains de cet enfoiré qui n'a pas cessé de manigancer depuis le début. Tout ça à cause de mes erreurs. Pourtant je savais... Je savais que s'il s'en était pris une fois à Rudy, il récidiverait !
— Calme-toi. Tu te disperses. Et baisse d'un ton, supplia Dean en faisant pression de ses paumes sur ses tempes. Un satané génie prend un malin plaisir à marteler contre ma boîte crânienne au son de ta voix.
— Désolé, compatit Rey.
— Donc, tu es passé t'assurer que le message avait bien imprimé chez ce fils d'inceste, et tu découvres qu'on a injecté du curare dans sa pompe à morphine.
Cette histoire était terrible. L'atmosphère de criminalité dans laquelle baignaient les siens devait se dissiper, sinon tout cela se finirait très mal. Red et son assassinat raté, Rudy et son enlèvement, sa prise d'otage, Rey et une tentative d'homicide par empoisonnement.
« Tu oublies Dean et la défenestration de Levy. »
Il rappela à sa putain de conscience que dans ce cas, la victime ne cochait pas la case « mien ». Néanmoins, en devenant l'oiseau de mauvais augure de Lucas, avait-il apporté sur le corniaud le malheur d'un empoisonnement au curare ? C'est violent tout de même, pensa-t-il, ironique.
— Fils d'inceste, répéta Rey. Je la ressortirai à l'occasion. De ce que j'ai appris, on l'a mis sous assistance respiratoire, le temps de déceler la cause de son arrêt ventilatoire. Il n'était pas d'origine cardiaque. J'ai surpris une conversation entre deux internes, les vrais jumeaux les plus identiques que j'ai vu de ma vie ! J'ai raté une occasion de me taire et je leur ai demandé s'ils avaient cherché du côté des paralysants musculaires du type curarisant. Ce commentaire m'a valu un double regard étrange, très suspicieux. Je m'attendais à ce qu'on me dise que je suis trop la télé. Avant que je ne comprenne ce qu'il m'arrive, je devenais un suspect. Parce qu'ils avaient bel et bien trouvé du curare.
L'incrimination de Rey suivait un raisonnement logique de la police. Il n'était ni de la famille, ni un ami, mais un ex-amant ayant une dent contre la victime impliquée dans l'enlèvement de son petit-copain. L'équipe de la STPD n'ignorait pas qu'il sortait avec Rudy. Et comme l'avait supposé ce dernier, elle avait pu transmettre ces infos à la Criminelle de Balmer avant de rentrer à domicile.
— Cette histoire est dingue, marmonna Dean.
— M'en parle pas. Je commençais à me demander comment m'en sortir avec la police, seulement, ce n'est pas d'elle qu'est venu le mandat.
Dean redressa la tête.
— Comment l'as-tu su ?
— Déjà, la convocation est arrivée beaucoup trop vite. Excepté ma parole, ils n'avaient pas de preuve à faire remonter au procureur. Ensuite, j'ai effectué un test, fit Rey en se tapotant le menton de l'index. J'ai dit que j'en savais suffisamment sur les coulisses de l'enlèvement de Rudy. Que Chayton avait été réduit au silence, et que ça ne m'étonnait pas que Lucas subisse le même sort pour avoir manigancé avec Chayton. Qui sait ce que ce dernier a bien pu lui révéler pour l'avoir à sa botte ! Ce serait dégueulasse de m'accuser d'un crime qu'ils savent que je n'ai pas commis. La seconde d'après, leur discours a changé. Lucas passait aux oubliettes et ils voulaient savoir ce que je savais.
— C'était risqué et très imprudent de ta part, désapprouva Dean.
Que savait exactement Rey des circonstances de l'enlèvement de son fils ? La fuite de telles infos les exposait. Rey, Rudy, lui... Red. Dean dansait dans le collimateur d'Edwards Meister. Cela n'augurerait rien de bon que Rey l'y rejoigne. Celui-ci s'agaça :
— Que voulais-tu que je fasse ? Ils m'ont acculé. J'étais bon pour subir leur rouleau compresseur mental. Je passais pour le parfait suspect et ils attendaient que je signe des aveux sur mesure ! Je n'allais pas la jouer « safe ».
Il se plongea dans ses réflexions. Dean ne le pressa pas, heureux d'un moment d'accalmie accordé par son génie de la gueule de bois.
— À bien y penser, reprit Rey, c'est comme si j'ai été involontairement piégé. On n'aurait pas sauvé Lucas de son asphyxie, il serait mort... des suites de sa chute. Telle aurait été la version officielle, jusqu'à ce qu'on demande une autopsie.
Mort par défenestration. Ce qui ferait de Dean le coupable. Celui-ci se raidit. Rey essayait-il de dire que ce « piège » lui était destiné ?
— Imagine cette version dans les journaux, poursuivit Rey, lugubre. Rudy n'aurait pas eu les ressources de l'encaisser. Alors j'ai avisé.
Dean quitta brusquement son fauteuil et entama les cent pas. Il donnait peut-être dans l'égocentrisme outrancier mais la situation était plus sournoise qu'il ne l'avait crue.
— Tu as probablement raison de croire que tu es tombé dans un piège qui m'était destiné. Mais quelque chose cloche.
Rey fut soulagé que Dean parvienne à la même conclusion que lui. Il ne virait donc pas parano.
— C'est ce que je n'arrête pas de me dire. La question qu'on devrait se poser est : pourquoi a-t-on voulu te piéger, toi ? T'aurais pas contrarié les mauvaises personnes par hasard ?
— Ha ha ha, hilarant, grommela Dean. C'est l'une des explications possibles. Néanmoins, les dernières « personnes » que j'ai contrariées sont le chef de l'IANS et ma famille.
Le problème résidait là. Les deux entités pouvaient être coupables de cette tentative de meurtre, pour des motifs bien différents. Edwards Meister aurait pu lui facturer son impertinence en éliminant Lucas et en lui laissant le blâme. Seulement, cette hypothèse se basait sur une très grosse dose d'égocentrisme. Meister avait mieux à faire que d'occire un énergumène, juste pour apprendre la politesse au rejeton de Vince. Encore moins après avoir déployé une armada d'élite pour étouffer sa défenestration. En outre, la mention des internes jumeaux sous-entendait que l'IANS préférait que Lucas Levy vive. Dean devinait que les deux agents connaissaient bien des méthodes médicales pour s'assurer d'une mort. Ils n'auraient pas raté leur coup.
Dans ce cas, pourquoi l'imputer à Rey ? Parce qu'il s'était trouvé là au mauvais moment ? C'était absurde. À moins de vouloir couvrir quelqu'un, les services de renseignements ne sautaient pas sur ce genre de conclusions hâtives... Mais qu'en savait Dean ? Quant à sa famille, Vince choisirait-il une méthode qui fasse retomber le blâme sur lui, après l'avoir couvert auprès de la BCPD ? Son père pouvait-il le faire accuser d'un crime ? Pour récupérer Rudy, son héritier ?
« L'en crois-tu capable, après qu'il ait lancé le programme White Healthcare© pour couvrir tes exactions sur Ludovic Felden ? »
Mais à l'époque, Dean appartenait encore au clan. En attendant, il avait besoin d'entendre Logique, pas Aigreur. Réfléchis. Qu'aurait pensé Nil Kruger de cette affaire ? Le faire accuser de meurtre n'irait pas dans les intérêts de Vince. Rudy en souffrirait et il récupérerait un héritier déséquilibré, qui lui servirait peu. En écartant Vince, Dean se retrouvait avec quelques suspects, susceptibles d'auditionner pour le casting du commanditaire de l'enlèvement de son fils.
*o*o*
TBC ● EPISODE 27 - part 04
*MEDIA*
Intro vidéo : COEXIST - Coldrain. Rey aimerait bien dire ces lyrics. Pourquoi ne peuvent-ils pas simplement coexister dans ce monde de requins ?
Aren't you afraid of the consequences
Aren't you afraid of the casualties
I'm terrified that we think it's normal
Tearing apart who we think we know
Like animals we all attack
It's sudden death with no way back
This love for hate, hate for love
Is killing every chance we have to rise above
If we never endeavor
We'll always be a mess
Getting colder and colder
Forever distressed
Can't we all just learn to love and coexist
We're all the same when it comes to conflict
We're all to blame for the aftermath
So petrified of an equilibrium
When will we learn that enough's enough
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