Chapitre 5 En avant la musique !
D'un pas décidé, nous nous dirigeâmes vers le dortoir. Cela me rappelait des souvenirs agréables. Les soirées passées en compagnie de mes amis, autour un verre d'alcool et de la bonne musique.
- Pourquoi vous semblez heureux d'un coup ? Demanda Akachi
- J'ai été étudiant et pensionnaire ici. J'ai de bon souvenir d'ici, mais c'était avant que...
Un frisson me passa dans le dos. La vision de l'abomination effaça celui des soirées endiablées de Miskatonic.
- Je comprends tout à fait, j'aurai aimé être à votre place, dit elle sur un ton de regret. Mais voyez vous... Ma couleur de peau dérange un peu.
- Je vois, répondis je gêné.
Plus nous approchâmes du dortoir, plus nous entendions des rires entremêlés de conversation d'étudiants. De la musique était jouée. Un jazz entrainant. Quand nous entrâmes dans la pièce principale, une chaleur étouffante nous percuta de plein fouet, à comparaison de la fraicheur extérieure. Ça riait dans tous les coins et conversait avec enthousiasme, une vie d'étudiant en toute somme. Des canapés moelleux étaient mis à disposition un peu partout. Un bar improvisé et illégale se tenait sur la droite, où l'on avait entreposé un tourne-disque qui jouait la musique que nous avions pu entendre à l'extérieur. Cette ambiance tranchait avec celle que nous venions de vivre. Ils étaient tous insouciants des évènements qui venaient de se passer. Au milieu de la pièce, il s'était même improvisé une piste de danse. Quelques couples dansèrent ne se souciant guère de notre arrivée.
Il y eut un relâchement dans le groupe, comme si chacun était heureux d'être entourés de vrais gens, et non pas de rats, monstres ou autres bizarreries. Ici c'était normal.
- Nous devrions nous séparer pour trouver ce Jazz...
Sauf Roland... qui semblait être au taquet. Moi je voulais me poser un peu pour... Boire un coup et écouter de la musique.
- Roland,
Akachi l'avait interpellé en roulant le R de son prénom, comme si elle roucoulait.
- Prenez le temps de souffler un peu. Vous nous avez sauvé la vie. Une pause serait amplement méritée.
- Mais !
- Pas de mais, pendant que vous vous reposiez un peu, je vais faire un tour. Je vais peut être trouver notre Jazz ?
Elle me fit un clin d'œil, puis s'éclipsa parmi les étudiants. Je ne compris pas ce clin d'œil, mais j'appréciai qu'elle nous proposait : faire une pause bien mérité et de boire quelque chose.
- Qu'est ce qu'elle a cette femme ! Elle nous ne laisse pas enquêter. Je ne vais pas me reposer alors qu'on recherche activement quelqu'un.
- Banks, allons, venez, on va boire un coup, se détendre un peu.
- Alors que nous devrions enquêter !
- Banks...
- Non mais c'est vrai, je devrais mener cette enquête, c'est dans notre manuel et ...
- Roland !
Il se statufia à son prénom et se tut enfin. L'appeler par son prénom le perturbait, et cela m'arrangeait.
- Nous devrions lui faire confiance. Venez boire un coup avec moi.
Je me frayai un chemin vers le bar avec confiance, tandis qu'il me suivait avec une démarche mal assuré. J'interpellai l'étudiant qui tenait le bar.
- Qu'avez vous à nous servir ?
- Nous avons de la bière, répondit le jeune homme tout en me faisant comprendre avec son air mutin qu'il s'agissait de vraie bière et pas ces bières sans alcool que nous avez imposé la prohibition.
- Deux alors, bien fraiches.
- Bien, Mister !
Je souriais jaune à ce "Mister". Étais je vraiment si vieux ? Il nous mit deux pintes de bière fraiche, dont la mousse coulait lentement le long du verre. Je posai un billet et lui demandai de garder la monnaie. L'étudiant était heureux d'un tel pourboire. Je pris un tabouret haut et amenai ma chope jusqu'à ma bouche. Je bus trois bonnes goulées de cette bière si bienvenue et posai de nouveau mon verre sur le bar. Roland regarda sa chope avec hésitation.
- Et bien, vous ne buvez pas ? Demandai je
- C'est que j'ai jamais bu pendant mon travail... C'est interdit, C'est écrit dans mon manuel. En faite tout ceci est interdit par la loi, je devrais même sévir !
- Ho ! Lâchez un peu ce manuel, et profitez ! C'est assez rare de tomber sur quelque chose de buvable. Elle est bonne. Et puis (je baissai d'un ton) vous êtes ici pour Rice, pas pour démanteler un pauvre groupe d'étudiant qui fait de l'alcool.
- Je suppose que je devrais la boire, puisque vous me l'avez offerte, répondit il en fronçant les sourcils.
- Je vous l'offre avec bon cœur...
Roland jeta un coup d'œil vers moi, je souriais en retour en l'incitant à boire ce verre qui n'attendait que lui. Il prit la chope et la but d'une seule traite.
- Bon sang Roland !!! Non !!!
Il s'essuya maladroitement la bouche et posa la chope d'un coup.
- C'est...C'est de la vraie bière ! Avec de l'alcool ! dis je avec effroi
- Ha...
- Ha ?
- Ho...
- Ho ? C'est tout ce que vous avez à me dire ! Mais qu'est ce qui vous a pris ! Je sais que vous êtes pressé d'enquêter mais tout de même vous auriez pu prendre votre temps pour cette bière !
Roland regardai dans le vague la chope devant lui, puis il se tourna vers moi et répondit :
- Je vous l'ai dit, je n'ai jamais bu...
- Dans votre service !
- Non... De ma vie...hips !
- Ho non... Mais vous avez quel age pour ... n'avoir jamais bu de votre vie !
Roland me regardait hagard, puis il ouvrit sa bouche pour sortir un :
- Vingt cinq ans.
Grand Dieu ! J'ai dix ans de plus que lui ! C'est presque un bébé, pensai je
Il enleva son chapeau et son grand imper qu'il posa négligemment sur le bar, laissant apparaitre sa chemise bleu ciel, son porte colt avec son flingue en place. Soudain, il se rapprocha de mon visage comme s'il avait vu quelque chose de bizarre. Sa main s'étendit et son pouce caressa ma moustache. Le geste était osé, mais le suivant le fut encore plus. Il porta le pouce plein de mousse et le lécha paresseusement. A cette vision, un long frisson parcourut tout mon corps. J'avais l'impression qu'il avait mis le feu en moi. Il me regarda dans les yeux et dit simplement mais avec toute la difficulté du monde :
- D'la mousse, vous aviez d'la mousse...sur la moustache.
vous n'étiez pas obligé de lécher votre pouce ainsi, pensai je perturbé par ce que je venais de voir.
Il se redressa comme il put, et commença à balancer sa tête à gauche et à droite au rythme d'un morceau de jazz entrainant. Il ferma les yeux, comme pour mieux entendre la musique du gramophone. Il souriait de béatitude. Je me surpris à apprécier son expression si détendu. Soudain il ouvrit les yeux et s'écria :
- J'aime cette musique ! Je veux danser ! Danser avec vous !
- Quoi ? bégayai je de cette demande soudaine.
Je sentis alors une main se glisser et m'attraper par la taille. Il m'embarqua sur la piste de danse improvisée et m'entraina sur cet air de jazz si rythmé appelé boogie woogie, une nouveauté venue des communautés noires, et commença à me faire virevolter.
- Ha ! Roland attendez ! Je ! Ouf !! Haha !!!
Je me mets à rire à notre danse si désordonné, mais bizarrement si appréciable de mon point de vue, mais aussi du sien visiblement . Son sourire était toujours collé à ses lèvres et je préférai cela à son air renfrogné que j'avais depuis le début. Nous nous détachâmes pour effectuer quelques pas indépendant l'un de l'autre pour se retrouver et danser en rythme. L'air était si entrainant, si festif, que j'en perdais la tête. Quelques personnes tapèrent dans leurs mains pour nous encourager dans notre danse endiablée. Je me demandai si le clin d'œil qu'Akachi m'avait adressé, n'était pas pour cela ? Savait elle ce qui allait se passer ? En tout cas, je ne lui en voulais plus de nous avoir laisser. Quand je rejoins Roland aux dernières notes du morceau, j'entendis murmurer le jeune homme :
- Dieu que vous dansez bien, Rex.
Je fus surpris par un tel compliment. Et surtout il m'avait appelé Rex. On avançait un peu dans notre relation de groupe. Il allait peut être avoir plus confiance en moi. Je répondis :
- Vous êtes pas mal dans votre genre, Roland.
Il fut aussi surpris autant que moi, et je vis ses joues devenir encore plus rouge qu'elles ne l'étaient par l'effort de la danse. Le morceau terminé, un autre s'enchaina. Et ce dernier n'était plus du tout un boogie endiablé.
Le tempo de la batterie changea pour être plus lancinant. Les trompettes sortaient des notes suaves qui interprétaient le désir et la perdition. Cette musique était corrompue !
- On continue ? Demanda t-il mal à l'aise.
Il dégrisait peut être, se rendant compte que la musique n'était plus trop approprié. Mais moi j'en voulais plus...
- On continue, répondis je avec conviction.
Il attrapa ma main gauche et me guida dans un déhancher beaucoup trop sexy. Je me mis à son rythme et effectuai les pas qui allaient bien avec, me collant encore plus à lui.
Il était peut être jeune, mais il guidait divinement bien. Les étudiants auraient pu être choqués de nous voir danser ainsi, mais il y avait une petite minorité de couple d'hommes sur la piste improvisé qui dansaient ensemble. Nous nous fondions parfaitement dans la foule étudiante qui se déhanchait aux rythmes lascifs de la musique.
Roland me souriait pendant tout ce temps. Il était heureux. Je lui rendis son sourire. Il serra un peu plus son emprise sur ma taille, comme s'il avait peur que je m'enfuis. Mais je n'en avait pas l'attention, bien au contraire, j'en voulais plus. Tout mon corps le réclamait encore et encore. Ma tête se reprocha de son torse et je pouvais sentir un parfum d'eau de Cologne mélangé à la poudre de son colt. Le battement de son cœur couvrait presque celui de la batterie. Était il effrayé par ce qu'il se passait ? Et que dire de moi... Mon cœur allait se décrocher par tant de coups dans ma poitrine.
Je sentis alors qu'il se penchait et m'emportait avec lui dans la descende, pour me faire revenir à lui. Il recommença une deuxième fois, et je vis son sourire disparaitre pour laisser place à un air beaucoup plus sérieux. J'avais l'impression qu'il réfléchissait. Alors qu'il me faisait descendre encore une fois, les dernières notes achevèrent le morceau de Blues. Il stoppa mon corps sur la dernière note et me laissa en suspens. Je n'avais pas peur de tomber, non. J'avais peur de bien autre chose qui risquait d'arriver. Je le vis à son tour descendre son buste pour me rejoindre. Son souffle chaud effleurait mes lèvres entrouvertes par les efforts de la danse. Il fixa ma bouche. J'avais l'impression qu'il luttait pour ne pas aller plus loin. Je glissai ma main sur son cou, sans prendre conscience du geste que j'étais en train de faire, et me rapprochai à mon tour de lui. Mais alors que nos lèvres allaient s'unir, Roland retint un spasme. Je me détachai de lui pour m'apercevoir qu'il avait le teint pale, et la sueur qui coulait le long de son cou. Ses yeux brillaient de larmes. Je me relevai avec lui et lui attrapai l'épaule en lui demandant :
- Est ce que ça va ?
Tout de suite sa tête hocha négativement et il porta à sa bouche ses deux mains. Je devinai immédiatement ce qu'il lui arrivait.
- Ho non ! Venez !
J'attrapai son bras et l'écartai de la foule,
- Les toilettes ? Demandai je à une étudiante qui était en train de fumer. Elle m'indiqua une porte un peu plus loin.
- Jolie prestation ! Me cria t-elle dans mon dos.
Je poussai la porte et trouvai un long couloir où plusieurs autres portes se présentaient.
- Merde ! lâchai je
j'avançai avec Roland et son cœur au bord des lèvres. Poussant chaque porte pour découvrir soit un cagibi, soit un bureau quelconque, ou bien un placard. Puis enfin les toilettes. Roland devina où nous étions et se précipita dans les premières venues. J'entendis alors un râle puis un vomissement.
- Je suis désolé, Roland, murmurai je à sa porte.
Encore une fois, il rendit son estomac, quand un homme entra à son tour dans les toilettes. Il entendit la même agonie que moi et soupira :
- Non !! Moi qui v'nait juste de finir de nettoyer ici...
Je levai les yeux sur l'étiquette qui était accroché à la chemise bien sale, et lut :
Mulligan
- Vous êtes Jazz ! Jazz Mulligan ! m'exclamai je
- Ha ! Heu ouais ! C'est moi pourquoi ?
Je souriais bêtement, et criai à l'attention de Roland :
- J'ai trouvé notre homme ! Nous allons pouvoir aller dans le bureau des enseignants !
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro