Dayan contemplait le calendrier aux pages jaunies qui affichait la même date depuis des années déjà : le 14 juilar 3041. Ce jour maudit où sa mère fut arrêtée pour soi-disant rébellion. Dayan, encore enfant, menait alors une existence paisible, grâce, il s'en était rendu compte en vieillissant, à sa mère qui l'avait protégé des horreurs de la réalité. Cet état de grâce changea pour toujours alors qu'un matin, les Inquisiteurs vinrent la chercher. Ses derniers mots à son fils avaient été « Courage Dayan, le futur sera radieux, je t'aime ». Elle qui avait été si douce, fut forcée de participer aux Jeux.

Ceux-ci opposaient les gens normaux aux Majs, et le but étaient de leur survivre le plus longtemps possible. Une chasse à l'homme retransmise en direct sur tous les écrans de la ville et au-delà. Le dernier survivant obtenait le droit de vivre et obtenait une place importante dans la société. Un sur cent.

Les Majs étaient des personnes dotées d'implants cybernétiques, inventés par la société Majistri. Cette multinationale avait fait fortune dans la haute technologie au moment où les sociétés s'effondraient, à la suite de décennie de déréglemente de la nature et d'inégalités sociales. Les plus riches avait vu dans les implants la possibilité de survivre au chaos, et les gouvernements devinrent des institutions fantoches contrôlées par les puissants et les plus fortunés. Les jeux et des divertissements de toutes sortes, couplés à une propagande efficace, plongeaient la population dans une torpeur. Si cela ne suffisait pas, les Inquisiteurs, forces spéciales des États Européens Unis, faisait régner l'ordre par la force et la peur. Les premières rébellions avait fini dans le sang bien avant sa naissance.

Contre toute attente, sa mère avait remporté la victoire cette année là, et Dayan avait gardé espoir de la revoir. Le jeune garçon avait été envoyé dans un orphelinat d'État pendant treize ans. Jusqu'au jour où il avait été mis à la porte. Treize longues années d'endoctrinement et de mauvais sévices.

« Les Majs », répéta Dayan entre ses dents.

L'appareil posé sur sa table de chevet émit un bip, qui le sortit de ses pensées. Le signal qu'il attendait. Il admira une dernière fois son appartement minable, mit son manteau de cuir, enfila ses bottines aux plaques de métal et sortit. Son quartier ressemblait au reste de la ville : devant la hausse de la population, les gouvernements avait fait raser les habitations privées dans bon nombre d'endroits, et d'immenses grattes-ciels bourdonnants, agrémentés d'écrans géants et de néons, avaient poussé à leurs places. Des annonces et des publicités n'avaient qu'un seul sujet en ce moment : les Jeux. Leur date approchait à grands pas, en ce mois de juilar 3073. Les passants vaquaient à leurs occupations quotidiennes, et personne ne faisait attention à lui, un anonyme de plus dans la mégalopole tentaculaire de Neo-Arkanïa. La chaleur l'écrasait, et elle aurait été invivable sans les drones réflecteurs d'UV. Les passants arboraient des faces enjouées, mais les yeux eux, ne mentaient pas : au travers de ces vitrines de l'âme, Dayan devinait, pouvait presque voir, une tristesse non feinte. La plupart des gens ne savaient même pas d'où venait ce mal-être, mais Dayan lui le savait : ils avaient dû baisser la tête il y a plusieurs générations déjà.