𝑪𝒉𝒂𝒑𝒕𝒆𝒓 𝟒 : 𝑶𝒓 𝒂𝒓𝒆 𝒚𝒐𝒖 𝒆𝒙𝒄𝒊𝒕𝒆𝒅 ?

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Comme prévu, la pluie a commencé à tomber peu de temps après qu'ils soient partis. Ils vont vers le port de Seong-Dok, d'où ils ont rendez-vous avec une connaissance de Chan qui pourra les emmener vers leur nouvelle vie. Ils ont un peu plus d'une semaine de route prévue, car ils sont obligés de passer par les petites routes et de faire mille détours afin d'éviter toute mauvaise rencontre. Ils roulent donc toute la journée, se succédant au volant, et dormant dans des auberges ou dans des hôtels peu regardants.

Le silence reste maître entre eux. Leurs baisers sur le toit leur paraissent bien loin désormais. Ce n'est pas qu'ils sont gêné, juste qu'ils n'ont rien à se dire. Ils s'échangent des banalités lorsque c'est nécessaire, communiquent sur la route à prendre, se mettent d'accord pour la musique qu'ils veulent écouter, mais c'est à peu près tout. Pour Jisung qui a l'habitude de parler de tout et de rien, la situation est difficile à tenir, mais il ne sait vraiment pas de quoi parler avec Minho. À vrai dire, il l'impressionne un peu. Il a deux ans de plus que lui, mais en fait bien dix de plus. Jisung n'a jamais perdu ses joues d'enfant tandis que Minho a le visage taillé comme un diamant,  ce qui lui donne un air mature que Jisung n'aura jamais, il le sait. Alors ils se taisent, et le voyage continue.

Il faut attendre le soir du troisième jour pour que cela change. Il faut attendre que Jisung se réveille en sursaut, la respiration haletante et le cœur en vrac. Il ne se rappelle pas de ce qu'il a vu dans son rêve – il ne s'en rappelle jamais – mais l'impression d'avoir un poids sur les épaules ne semble pas vouloir le quitter.

Une main sur le cœur, il tente de reprendre sa respiration. Ses yeux le brûlent. Ses doigts tremblent, ses mains sont moites. Il faut qu'il sorte, il a besoin d'air.

Il se lève donc et enfile un manteau sur son pyjama et sort sur le palier de la chambre d'hôtel dans lequel ils se sont arrêtés. Les mains dans les poches, il descend les escaliers en trottinant, l'appel de l'air frais sur son visage le poussant à avancer rapidement vers la sortie.

Le vent s'engouffre dans les pans de son manteau lorsqu'il sort dans la nuit de mars. Il fait froid, mais il en a besoin. Il a besoin d'une bouffée d'air bien froid pour sécher ses larmes. Mais curieusement, elles redoublent de puissance et il se laisse tomber sur un banc avant de prendre sa tête entre ses mains et de sangloter doucement.

Hyunjin lui manque, atrocement. C'était son meilleur ami, son confident, celui qui connaissait tout de lui (hormis ses activités illégales bien évidemment). C'était celui qui le comprenait mieux que personne. Et Jisung l'a abandonné.

Il a mal, si mal. Il a un trou béant à la place du cœur. Un trou impossible à reboucher.

« Jisung ? »

Jisung sursaute. Il serre les dents. Qu'est-ce qu'il fait lever à cette heure ? Sa respiration déjà haletante se raréfie d'autant plus et les larmes ne semblent plus vouloir cesser de couler. Il déteste ça, il déteste que Minho le voit dans cet état, il déteste qu'il ait dû laisser Hyunjin derrière lui, il déteste la situation qui l'a mené à rencontrer Chan.

Il ne respire plus, il étouffe.

Ses cheveux bleus qu'il a teints sur un coup de tête avec Hyunjin lui tombent devant les yeux, il ne voit pas que Minho s'est approché de lui pour s'agenouiller et prendre ses mains dans les siennes, doucement sans le brusquer.

« Jisung, faut que tu respires.

- Fa- Facile à di- dire, articule difficilement Jisung.

- Je sais pas... J'ai jamais eu à gérer ça moi. Je sais pas comment ça marche.

- Désolé... »

Un temps.

« Tu veux une clope ? »

C'est si inattendu que le cœur de Jisung loupe un battement. Il relève la tête et fixe Minho entre ses cheveux.

« Ok, pas de clope. »

Il lui sourit, d'un sourire qu'il semble vouloir rassurant mais qui paraît plus crispé qu'autre choses, et Jisung s'en veut de l'embêter.

« Respire avec moi, finit par lui intimer Minho. Inspire... Expire... Inspire... »

Ils continuent comme ça pendant une bonne dizaine de minutes avant que Jisung n'arrive à se calmer et à retrouver un rythme cardiaque passable.

« Je suis désolé Minho, articule-t-il. Ça faisait des années que je n'avais pas fait de crise de panique.

- C'était une crise de panique ça ?

- Mmh...

- C'est super violent... Et tu vas me dire que tu as déjà vécu ça ?

- J'en faisais souvent au lycée. Ça s'est calmé quand j'ai rencontré Hyunjin et Chan. »

Minho hoche la tête. Il lâche ses mains et Jisung se rend compte du froid qu'il fait et de la chaleur qu'il lui procurait.

« Je suis désolé, murmure encore Jisung, son regard fixé sur ses paumes encore tremblantes.

- De quoi ?

- De tout. Je suis empli de regret. Ma vie est composée de mauvaises décisions. »

Il ne fait même plus attention aux larmes qui coulent le long de ses joues, ni au vent qui souffle sur son visage et lui glace la peau. Il ne fait pas attention au fait que Minho ait reculé de quelques pas pour allumer une cigarette ni au fait qu'il vient ensuite s'asseoir à côté. Il ne fait même pas attention au bras qui vient s'enrouler autour de ses épaules pour venir le plaquer contre un corps bien au chaud dans sa doudoune.

Il ne fait attention à rien.

Il est perdu.

« T'es sûr que tu veux pas fumer ? »

La question de Minho résonne dans le silence de la nuit et flotte quelques instants autour d'eux.

« Je ne fume pas, articule Jisung difficilement.

- Tu deal mais tu fumes pas ?

- Je deal pas du tabac, et j'ai pas très envie de fumer les conneries que je refile aux gosses de riches en manque d'affection. Et puis même si je voulais, j'ai pas l'argent nécessaire pour fumer.

- C'est moi qui te l'offre. »

Jisung relève la tête. Ses yeux se posent sur ceux de Minho, sur ses yeux noirs qui le regardent fixement avec une note de défi qui se mélange à l'inquiétude. Il tient le cylindre de papier entre son pouce et son index et le tend vers lui.

« Je sais pas pourquoi je fais ça, marmonne Jisung en lui prenant et en le menant à ses lèvres.

- "Parce que" est une réponse suffisante parfois. »

Alors Jisung porte la cigarette à ses lèvres et inspire légèrement avant de s'étouffer copieusement sous les rires de Minho.

« T'as vraiment jamais fumé ?

- Pas du tabac, marmonne Jisung en continuant de tousser copieusement.

- Mince alors, je me sens un peu mal du coup.

- Pas autant que moi.

- Non.... Ça c'est clair. »

La voix de Minho est descendue sur cette dernière phrase. Il l'a chuchoté tellement bas que Jisung croit un instant l'avoir halluciné. Il lui reprend sa cigarette et la coince entre ses lèvres machinalement avant d'enfouir ses mains dans les poches de sa grosse veste, un air songeur sur le visage.

« On voit bien les étoiles ici, dit Jisung en levant le nez vers le ciel noir. J'aimerais bien habiter dans un endroit où on voit les étoiles.

- Plus de grandes villes ? demande Minho en soufflant la fumée de sa cigarette vers le ciel et en laissant sa main reposer contre l'accoudoir du banc, le cylindre de papier pendant au bout de ses doigts.

- Les grandes villes détruisent tout.

- Alors on ira là où on peut voir les étoiles. »

Un temps. Deux respirations.

« On ?

- Parce que tu crois que je vais te lâcher maintenant ? »

Deux temps. Quatre respirations.

« Je ne comprends pas.

- Moi non plus. Tu dégages quelque chose qui me donne envie de rester près de toi. »

Trois temps. Six respirations.

« Je sais pas si tu as conscience du charisme que tu dégages, Minho.

- J'ai passé des années à le forger. C'est le reflet de la personne que j'aurais aimé être.

- Que tu aurais aimé être ? »

Quatre temps. Huit respirations.

« Tu n'es pas fatigué, Jisung ?

- Si.

- On pourra continuer de parler dans la voiture demain si tu veux.

- J'ai pas envie de dormir.

- Pourquoi ?

- Parce que je ne maîtrise plus rien quand je dors. »

La main de Minho sort de sa poche pour venir prendre celle de Jisung dans la sienne. De l'autre il porte la cigarette à ses lèvres avant de souffler la fumée vers les étoiles.

« J'aurais aimé être astronaute, souffle Jisung.

- Pourquoi ?

- La Terre ne m'offrait rien de bien.

- Pourquoi tu l'as pas fait ? »

Jisung ne répond pas, il prend la cigarette des doigts de Minho et l'examine sous toutes les coutures.

« C'est fou qu'un si petit truc puisse détruire autant de vie, » dit-il à mi-voix.

Il la fait tourner entre ses doigts. Il sent le regard de Minho suivre ce ballet incessant du regard, leurs mains toujours liées et son pouce faisant des allers-retours sur sa paume. Jisung s'accroche à ça : cette sensation d'avoir quelqu'un, même si ça ne dure jamais longtemps.

Il souffle, lâche la cigarette qui tombe par terre dans un petit bruit et l'écrase du bout du pied. Minho lui lâche la main.

« Pourquoi t'as fait ça ?

- Trouve toi une autre addiction, plus saine.

- Pourquoi ?

- Parce que j'ai pas envie que tu meurs. »

Silence.

« Jisung ?

- Moi aussi j'ai envie de rester près de toi. »

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NDA :

Je sais que ça va extrêmement vite et que ce n'est absolument pas réaliste, encore une fois ce n'est pas le but ici :')

D'habitude je n'aime pas trop les trucs d'âmes sœurs parce que je n'y crois pas, mais là ça me paraissait sensé et logique (me demandez pas pourquoi je ne saurais pas quoi vous répondre)

J'espère que ça vous plaît tout de même !

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