Mixtape : OH.
L'exposition arriva plus rapidement qu'il l'avait imaginé et Hyunjin en fut tout électrisé. Depuis la matinée, les garçons l'observaient courir de partout et Minho se dit qu'il n'avait pas vu Hyunjin aussi investie par et dans quelque chose depuis longtemps. À vrai dire, il se demandait même s'il l'avait déjà vu ainsi, dans un autre contexte. Jamais. Jamais car Hyunjin était aujourd'hui heureux.
Et rien qu'y penser le faisait sourire plus que de raison, Minho était fier. Tellement fier qu'il ne pouvait le décrire.
- Je ne t'avais jamais vu aussi stressé Hyunjin !
Chan le sollicita du regard pour tenter de le calmer et ainsi éviter un ulcère à ce dernier alors qu'Hyunjin le regardait à peine, happé par la foule et sa quête de perfection.
- Regardes autour de toi Hyunjin, c'est un succès. Tu peux respirer et prendre une coupe de champagne. Tout ça, c'est grâce à toi, c'est toi.
Hyunjin prit un instant pour observer la grande pièce en brique rouge maintenant baignée par le soleil. Elle était bondée de monde, de collègues, d'amis, d'inconnus... Jamais il n'aurait pensé un jour susciter autant d'intérêt et quelque part, en y réfléchissant profondément, c'était triste. C'était triste parce qu'Hyunjin faisait définitivement partie de ces personnes qui pensent toujours leur succès dû au hasard des choses, dû à la prospérité ou encore à la chance.
Mais finalement, peut-être que cette fois-ci Chan avait raison, peut-être que finalement, tout ça, c'était lui. C'était grâce à lui.
Ses yeux s'humidifièrent de bonheur face à cette constatation et pour refouler tout ce qu'il ne savait dire, Hyunjin avala sa coupe d'une traite, espérant que l'engouement continuerait jusqu'à la fermeture.
- Tiens, c'est pour toi.
Minho lui tendit une enveloppe longue et caractéristique d'une mauvaise nouvelle en entreprise. Pourtant, souriant dans son costume ajusté, il ne semblait pas faire d'erreur.
- J'ai pas démissionné, c'est quoi ça Minho ?
- Tu démissionnes pas Hyunjin, je te licencie avec de grosses indemnités de départ, c'est différent.
- Mais...
- Hyunjin, s'il te plait...
Minho attrapa doucement l'épaule de son ami pour capter son attention et c'est avec une intensité nouvelle qu'il le regarda, prêt à craquer à tout instant. Chan pouvait le sentir.
- Je ne te le dirais pas une autre fois alors écoute moi bien s'il te plait... Je t'aime et je veux que tu sois heureux, je veux le meilleur pour toi... Je veux tout ce qu'il y a de plus beau pour toi, et uniquement.
Ému, Minho fit une légère pause pour avaler sa salive avant de reprendre calmement.
- Tu as été un ami et un secrétaire d'exception et ce dès le début de notre rencontre. Mais je t'ai offert cette place parce qu'à l'époque j'avais, et je ne sais toujours pas pourquoi, le désir impérieux de t'aider.
Hyunjin fut ému à son tour et c'est avec beaucoup de mal qu'il tenta de garder le visage impassible qu'il tentait toujours de garder. Qu'il était beau Minho lorsqu'il était vulnérable... Qu'il en avait fait du chemin...
- Tu n'as plus besoin de moi maintenant et ce depuis bien plus longtemps que je ne veux me l'avouer. Aujourd'hui, je me rends définitivement compte que tu es exactement là où tu devais être.
Un silence apaisant se fit et Chan dû se faire violence à son tour pour ne pas craquer. Minho avait raison, il avait terriblement raison.
- Tu es un artiste et ce serait de la pure folie autant que de la bêtise que de continuer à jouer au secrétaire... Cette dernière année j'ai dû me rendre à la douloureuse évidence que j'avais davantage besoin de toi que tu as besoin de moi et je serais vraiment un ami de merde si je te retenais prisonnier avec moi juste pour cette raison...
Minho avala bruyamment sa salive de nouveau alors qu'il sentait malgré lui ses yeux s'embuer.
- Tu as trouvé et tu t'es construit ta place Hyunjin. Tout seul. Elle est ici... Au milieu des toiles, du champagne et de la gloire et je suis sincèrement heureux pour toi. Je suis tellement fier aussi, tellement fort que ça m'empêche de respirer à l'instant même.
Les trois amis rirent légèrement alors que tous comprenaient parfaitement ce que Minho voulaient dire. Un étau de bonheur leur enserrait la gorge et pour cela ils se sentaient reconnaissant à la ville de les avoir mis sur le même chemin.
- Nous devrions tous te regarder dans les moments de doute et de douleur pour comprendre que rien n'est impossible si nous le souhaitons réellement... Je crois parler pour tous en disant que tu es un modèle de force et de résilience.
Minho avait fini son laïus alors que pour la première fois, devant tous, Hyunjin pleurait. L'artiste laissa quelques larmes chaudes et salées couler sur ses joues immaculées et dans un mouvement presque brusque, il attira Minho à lui, humant le parfum rassurant et enveloppant d'un ami qui n'avait jamais failli. D'un frère qui avait toujours été à ses côtés.
Émotif à son tour, Hyunjin lui glissa quelques confidences dans le creux de l'oreille et finalement, de leur intimité.
- Je ne sais pas comment, je ne sais pas pourquoi ou encore par quel miracle tu es entré dans ma vie Lee Minho, mais merci. Je ne peux pas dire ce que je serais devenu sans toi, tout simplement car je ne veux et ne peux pas l'imaginer. Tu fais partie de moi.
Les deux hommes se tenaient droits l'un contre l'autre, fiers et émus alors que Chan souriait sincèrement devant pareil spectacle. Sans trop vouloir se le dire, ses yeux se mirent à le piquer étrangement alors qu'il fut obligé de les essuyer un court instant, heureux.
Vu de loin, on aurait pu croire qu'ils se disaient adieu, mais la vérité c'est qu'ils disaient tous bonjour à l'un d'entre eux car pour la toute première fois,
Hwang Hyunjin se montrait à eux.
—
Jeongin marchait dans la galerie tard le soir, il avait demandé à l'organisateur et au responsable s'il pouvait avoir droit à une balade privée juste après la fermeture, faisant croire à une quelconque phobie sociale. Le vieillard avait gentiment accepté, aillant pas le cœur à refuser pareille demande.
Jeongin se baladait avec lenteur dans la vaste pièce blanche judicieusement éclairée ou quelques murs étaient recouverts d'une brique rouge caractéristique qu'il n'avait jamais vu ailleurs et qui lui donnait tout son cachet. Il était habillé d'un ensemble de jogging gris avec son éternel casque noir sur les oreilles. Il n'avait pas eu le cœur à l'effort ce soir et il s'en remercia en observant les tableaux. Ils n'avaient plus rien à voir avec ce qu'il avait connu. De la couleur, partout et irrémédiablement. Quelques mains, évidemment ; des corps, toujours ; mais surtout, de la vie, de l'espoir, une évolution, un changement. C'était aussi beau que difficile à constater pour le jeune homme et il sentait son cœur se tasser dans sa poitrine à chaque pas supplémentaire.
Une légère odeur d'huile lui rappelait l'odeur du studio et c'est le souffle plus court qu'il l'imaginait qu'il tomba sur une toile intitulée « Saudade ».
Cette légende le frappa de plein fouet notamment car il savait très bien quand est-ce qu'il avait découvert et entendu ce mot, c'était il y a des années et c'était Hyunjin qui le lui avait appris...
Flash-back :
- « Tu lis encore de la poésie ? Va tu devenir un poète un jour ? Et serais-je enfin ta muse ? ».
Jeongin ria en sautant sur le corps élancé du plus âgé, installé de tout son long sur leur lit conjugal.
L'ignorant encore, ce dernier s'attaqua à ses côtes pour tenter de capter l'attention du plus âgé, sans succès, il souleva alors son t-shirt et lui mordit les flancs, imitant des bruits de lions pour le faire rire.
Leurs rires éclatèrent dans l'appartement et Hyunjin posa son livre sur leur table de chevet tout en s'intéressant enfin à son vis à vis. Il le renversa sur le dos, attrapa les mains du plus jeune et les enfonça dans le matelas, au-dessus de sa tête, l'empêchant de s'attaquer de nouveau à ses côtes. Hyunjin prit appuie sur le corps de son homologue, captant son regard, leurs lèvres à seulement quelques centimètres.
- « Tu sais ce que Saudade signifie ? ».
Les mots d'Hyunjin n'étaient qu'un murmure, comme un secret délivré à l'arrière d'une église après l'office et la ville elle-même se mit à ralentir son rythme afin d'en capter les bribes ;
- « Dis-moi ».
- « C'est un mot portugais pour définir l'état de manque.
Ce terme vient tenter d'exprimer l'état mélancolique mêlé à l'espoir d'un bonheur connu et parfois même inconnu ou encore à venir ! Il vient définir cette sensation d'incomplétude que l'on ressent dans le manque. Ça peut être tout et rien en même temps ! Un silence, une odeur, un bruit, un être. Il ne peut pas vraiment être traduit en tant que tel car il vient décrire une sensation, une émotion qui est normalement de l'ordre de l'inabordable, de l'intraduisible, quelque chose que le langage ne peut pas saisir, qui lui échappe. Est-ce que c'est pas absolument magnifique ? ».
Jeongin lia ses doigts à ceux d'Hyunjin et observa un instant son visage passionné, couvert par la fureur du romantique qui veut tout découvrir, tout éprouver. Il se dit en lui même qu'Hyunjin avait raison, c'était magnifique, rien ne lui apparaissait plus magnifique à cet instant. Ce grain de beauté qui venait éprouver son regard, ce grain de peau, presque lisse, ses lèvres pleines qui n'étaient faites que pour la délicatesse de ce monde. Hyunjin était divin et Jeongin l'aimait plus qu'aucune poésie n'aurait pu le décrire.
- « Comment pourrais-tu toi le définir alors ? ».
- « Je dirais que c'est plus que l'absence ou le manque, c'est le supplice de la présence », Hyunjin regarda son amant avec plus de sérieux avant d'ajouter, « c'est ce que je ressentirais un jour si je venais à te perdre ».
—
Jeongin s'agenouilla face au tableau et explosa dans un sanglot sonore qu'il tenta maladroitement de contenir de sa main tremblante. Le tableau, le plus grand de toute la galerie, représentait un homme de dos au fusain, des cheveux longs tombaient négligemment sur sa nuque. Il avait le buste nu et son bras droit était relevé, presque perpendiculaire à son corps. Sa main semblait vouloir se saisir de quelque chose, sans y parvenir et Jeongin ne pouvait s'empêcher de se demander ce qu'il tentait si désespérément d'attraper...
Prit d'un moment de lucidité, Jeongin releva son téléphone devant ses yeux embués, dévoilant son fond d'écran qui n'était nulle autre que l'œuvre présente au-dessus de son canapé. Mise côte à côte, les œuvres n'en donnaient plus qu'une seule.
Il se releva fébrilement après une dizaine de minutes à même le sol à éponger sa peine. Son doigt était pendu au-dessus du numéro de son amant et il était tiraillé entre toutes les décisions qu'il pouvait ou ne devait pas prendre. Il se résolu à trouver d'abord le responsable de la galerie qui devait probablement trainer dans les étages, attendant qu'il termine son tour pour fermer.
- « Monsieur, je voudrais acheter une toile s'il vous plait, je... ».
- « Il m'a dit que vous viendriez. Enfin pas vous précisément bien sûr... mais l'artiste m'a dit qu'un homme viendrait, probablement après tout le monde et qu'il demanderait à obtenir une œuvre en particulier, et quelque chose me dit que c'est probablement « Saudade » que vous allez me demander d'acheter ... ».
- « L'artiste vous a dit ça ? ».
- « Il m'a aussi dit que la pièce n'était pas à vendre ».
- « Je ne comprends pas ».
- « Il m'a dit que celle-ci lui appartenait et que c'était à lui d'en faire ce qu'il voulait et que vous comprendriez. Ne m'en demandez pas plus mon garçon, ce sont les seules informations dont je dispose et qu'il a bien voulu me transmettre, je suis tout aussi perdu que vous ».
- « Je... mais... Merci beaucoup monsieur, bonne nuit et merci pour l'ouverture tardive ».
Jeongin se pencha respectueusement et quitta le bâtiment non sans prendre une dernière fois la toile en photo. Il était perdu, il ne savait pas quoi faire. Devait-il appeler Hyunjin, devait-il laisser tomber une bonne fois pour toute ? Quelle était le message, si tenté que ça en soit un ? Il attrapa son téléphone, quelques notifications sans importances, deux mails... un message de Chan, « Vas-tu encore fuir ? ».
- « Connard ».
Jeongin rangea rageusement son téléphone dans sa poche quand il vibra à nouveau ; « On a tous vu la toile, la seule qui n'est pas à vendre par ailleurs..., il faudrait être débile pour ne pas comprendre de quoi il s'agit, je suis sûr que même toi, t'as dû comprendre. Si tu l'as pas encore vu, tu devrais, ou peut-être pas finalement si t'as même pas pris la peine de te déplacer... et si tu l'as vu mais que tu as encore rien fait alors je lui dirais de rappeler le gars qui l'a accosté à la galerie, si il est pas déjà avec lui vu l'heure qu'il est ».
- « Il veut vraiment mon poing dans sa gueule ce mec c'est pas possible autrement ».
Jeongin appela rageusement de la main un taxi attendant avec nervosité d'un croiser un.
Un homme qui aurait accosté Hyunjin ? Il pourrait être ensemble..., maintenant ? Il était bientôt une heure du matin, Hyunjin était un oiseau de nuit, il le savait, c'était aussi quelqu'un d'impulsif... cette pensée le révulsa.
- « Il essaie juste de me faire péter un câble, comme la dernière fois ».
Jeongin donna au chauffeur l'adresse de son appartement. Le trajet se fit dans un silence de plombs. Jeongin ne pouvait s'empêcher de repenser à la toile, aux informations que lui avait donner le responsable, et malheureusement, à celles de Chan. Tout se mélangeait dans sa tête, dans un capharnaüm épouvantablement douloureux. Jeongin commençait à arracher méticuleusement les peaux autours de ses ongles sans même en avoir conscience et quand le chauffeur s'arrêta devant sa bâtisse, Jeongin ne réagit pas, les yeux pourtant rivés sur le porche.
- « Monsieur ? On est arrivé ».
Jeongin se retourna vers le chauffeur, anxieux, le regard impulsif.
- « Amenez-moi à cette adresse s'il vous plait ».
Surpris, le chauffeur fit demi-tour sans rajouter quoi que ce soit, comprenant qu'une urgence se tramait pour le jeune homme, et sans même qu'on le lui demande, le chauffeur se mit subitement à accélérer comme pour soulager de quelques secondes les tourments de son client nocturne.
Tout à coup, la ville se gonfla de son manteau de ténèbres, prête à accueillir la ferveur de son dernier, le soutenant par sa tiédeur et par la clarté de sa lune, espérant lui insuffler le courage qui lui manquait.
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J'espère que ce chapitre vous a plu ! J'aime tellement la libération dont Hyunjin est porteur.
D'ailleurs si vous ne l'avez pas vu je vous conseil vivement la série "ma liberation notes".
Une onde lente et profonde à la libération et à soi-même !
La fin approche malheureusement.. j'espère que l'histoire vous plait toujours autant.
Quel est votre personnage préféré maintenant que ce tome est bien fini ?
Oui, j'ai bien dis tome..
Des baisers mes fées,
M.
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