✥ V - Incandescence ✥ 5/5
🎵 Opening : Phil Rey ~ Aerion
Edit du 21/12/2024
◢Chapitre V : Incandescence (partie 5)◣
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Aram – Palais de rubis
Dévalant les marches en silence, Dean lui jetait un à un ses vêtements. Rudy arriva en sautillant sur un pied dans la pièce où se trouvaient Chayton, Elan et Ilona, alors qu'il mettait sa dernière botte. Il devina la fonction de garde-manger face aux conserves en pot de verre, aux boîtes en métal et caissons en bois savamment rangés sur des étagères.
Entre elles se tenait Ilona, adossée au mur, vêtue sa cape de dissimulation. Comme tous les autres d'ailleurs, nota Rudy. Mir s'était sciemment ruiné en rapportant ces capes de sa dernière expédition en Askheron, sachant que le Gouverneur le rembourserait à la découverte de l'artefact. Le vêtement accentuait la dissimulation, rendant le Dissimulateur deux fois plus furtif. Plus on était doué, plus l'on devenait indétectable pour ne pas dire invisible.
Rudy les dévisagea comme Chayton lui tendait sa propre cape en plus d'une longue veste sans manche de Passeur et son sabre. De toute évidence, il abandonnait ses autres affaires au palais. Les regards sombres, les traits fermés et les expressions graves ne lui disaient rien qui vaille.
— Que se passe-t-il ? demanda-t-il, gagné par la tension comme il attachait sa ceinture porte-sabre.
— On part, répondit Chayton.
Rudy s'agaça de l'évidence de sa réponse
— Je ne suis pas stupide.
— On serait déjà loin des murs de ce traquenard s'il n'avait pas fallu te chercher, gronda Dean.
Rudy remit ses remords à plus tard.
— Les sarricks, Père ! dit-il, alarmé.
— On s'en occupe, rétorqua Dean, la mine toujours fermée.
— Nous devons les rejoindre avant les premières lueurs de l'aube, sinon nous ne quitterons pas ce palais à dos de sarricks mais à pied.
Jetant un œil à la fenêtre, Rudy se força à se calmer afin d'activer sa dissimulation. Il s'aida de l'état de dissimulation de ses acolytes pour faciliter la transition. Son cœur s'agitait encore des suites de son réveil en sursaut. Il ne saurait dire si c'était à cause de son songe ou à cause de ce qui l'avait réveillé. D'ailleurs qu'est-ce qui l'avait réveillé ? La main de Père ou ce cauchemar prémonitoire qui n'en était pas un ? En évaluant la hauteur de la fenêtre, il réalisa que la pièce se situait à mi-hauteur de la tour d'Ivoire.
— On ne part pas sans Yakim, dit Ilona.
— Où est-il ? la pressa Rudy, fébrile. Il faut rassembler tout le monde, la fête est finie.
— On ne t'a pas attendu pour le comprendre, persifla Dean. Yakim et Mir sont chargés d'une mission. Nous partirons à leur retour.
Rudy protesta. Il savait la situation urgente mais ne parvenait pas à leur transmettre la nature réelle de l'urgence.
— On doit éloigner les sarricks du palais sans attendre. Le rituel pour les dissimuler est chronophage et nous sommes déjà à court de temps.
Il se massa les paupières. Sa nervosité grimpa. « Prends garde ! », avait dit la voix désincarnée imitant celle de sa mère. Ils auraient déjà dû quitter le palais depuis la veille. Cet avertissement datait d'hier et, tel un abruti, Rudy s'était arrangé pour tout oublier. Le moment n'était pas à se morigéner, il disposait encore d'une petite marge de manœuvre.
— Qu'est-ce que tu racontes ? fit Elan.
Aux sourcils froncés d'Ilona, Rudy reconnut son rictus d'irritation. Le voyant s'impatienter, Dean intervint.
— Que devons-nous savoir, fils ?
— Les sarricks seront tués tôt ce matin. Ordre du roi.
— Comment... D'où tu sors ça ? hoqueta Chayton.
— Si on s'activait ? insista Rudy. Mir et Yakim se débrouilleront pour quitter le palais sans sarrick et nous rejoindre à un point de ralliement. On dépêchera quelqu'un pour les retrouver.
— En route, ordonna Dean.
Ilona s'exécuta non sans pester :
— Mais ce n'était pas ce qui...
— Plus tard, Ilona, la coupa Dean. Elan, rejoins Mir et Yakim et retrouvez-nous à une lieue, direction porte du Vent Céleste. Les tours de guet y sont moindres, vu qu'il s'agit d'une zone étudiante.
L'homme prit la tangente. La porte du Vent Céleste se situait à l'ouest. Sachant Mir et Yakim au sud et les autres à l'opposé, un point de ralliement à l'ouest serait équidistant.
— Père, Orsei et toi courrez un danger.
— Sa nature ?
— Imminent... probablement.
Dean exhala sa colère sous les regards interrogateurs de Chayton et Ilona. Il accéléra le pas et déboula sur une terrasse haute. Décrétant que le chemin le plus rapide serait de passer par les toits du palais, il rabattit la capuche de sa cape et se laissa choir sans cérémonie. Quelques mètres plus bas, il atterrit avec souplesse et sans bruit sur les tuiles. Sa suite l'imita. S'aidant des gouttières et évitant les tuiles vicieuses, ils quittèrent la tour d'Ivoire sans se faire remarquer des serviteurs toujours actifs à cette heure-là. Ils filèrent vers le nord. Les enclos des sarricks se trouvaient au Village Royal.
Une question turlupinait Rudy. Il passa outre la colère paternelle et la posa. Tant pis s'il réveillait les foudres plus tôt que prévu.
— Comment m'as-tu retrouvé, Père ?
— On n'en parlera plus tard, gronda celui-ci.
— On n'en aura peut-être pas le loisir.
— Parfait, tu me facilites la tâche ! siffla Dean tout bas, les vannes de sa colère enfin ouvertes. Depuis quand as-tu ce genre d'inclinaison, Rudy ?
Le fils jeta la première trouvaille qui obligerait son père à se montrer moins cassant et à tenter vraiment de communiquer.
— Depuis que je pense avoir rencontré une âme-sœur ?
S'il baissait la tête et se laissait réprimander, Père prendrait de l'ascendant. Le moment était venu de couper le cordon. Dean reçut l'information avec l'impact d'une masse d'armes en plein dans l'abdomen. « Âme-sœur » avait une connotation particulière, car il était persuadé d'avoir perdu la sienne voilà quelques années. Son garçon n'avait pas le droit de dire ces choses à la légère.
— Ne me sors pas d'ineptie. Cela ne change rien au fait que cette foutue capitale de mes deux t'a perverti ! Il aurait suffi de m'expliquer tes raisons si tu étais opposé à l'idée de te marier. Pas besoin de t'adonner à ce genre de chose !
Leur course rapide n'affectait pas sa verve. Rudy sourcilla – perverti ? –, et refusa de se démonter.
— Je ne vois pas le rapport. L'aura de Rey m'apaise comme aucune aura ne l'a fait jusqu'ici. Je ne compte pas y renoncer.
Il se fit méchamment toiser par son père qui lui demandait du regard de ne pas se moquer de lui.
— J'arrive en plus à la goûter. (La grimace de Dean énerva Rudy.) Retire toute connotation licencieuse de mon propos ! Je te parle du sens du goût, je ressens sa saveur sur ma langue comme celle d'un fruit. Le reste des auras m'apparait uniquement sous forme d'odeur ou de couleur. Il... enfin, on pense que mes dons relèvent de l'archimagie.
Il prenait un gros risque, mais c'était assez de se cacher. Afin d'expliquer la suite des évènements, ou plutôt la série d'évènements ayant conduit à leur présente situation, il n'aurait pas d'autre choix que de révéler ses dons au grand jour. Dean bégaya, outré :
— Q-quoi ? Parce qu'en plus, tu lui en as parlé ?!
Rudy retint un soupir d'exaspération. De toute ses révélations, son père n'avait retenu que ce point ? Le mot « archimagie » aurait dû l'interpeller. Cet homme buté et bouché le fatiguait.
— C'est quoi ce charabia d'archimagie ? De quoi vous causez à la fin ? intervint Chayton.
Lui au moins avait été tiqué sur le bon mot.
— Plus tard, éluda Dean.
Il voulait sermonner son fils en paix, sans interventions intempestives. Il ordonna à Chayton et Ilona de prendre de l'avance, puis ralentit son allure, forçant Rudy à l'imiter. Cette discussion Père-Fils n'attendrait pas. Le Village Royal, endormi, était en vue.
— Qu'est-ce qui t'a traversé l'esprit pour en arriver là, Rudy ? Comment as-tu pu agir de façon aussi... aussi inconsidérée ? Surtout dans un moment pareil !
— Rey l'a découvert de façon fortuite. Mais tu noies le poisson, Père !
Dean se montrerait bien hypocrite s'il en faisait un drame. Il reprochait à son fils ce qu'il aurait pu faire dans sa jeunesse, simplement pour coller au théorème « fais ce que je dis, pas ce que je fais ». Rudy en avait appris de bonnes et des tonnes sur son paternel grâce aux anecdotes d'Oncle Danny, même si son précepteur ne rentrait jamais dans les détails sur les frasques de son frère cadet. De plus, les hommes de Père parlaient beaucoup. Une fois imbibées d'alcool, ces commères adoraient relater au jeune héritier les exploits peu glorieux de leur chef au même titre que ses prouesses.
Rudy avait pris du plaisir avec un homme, soit. Si Dean craignait pour sa lignée, il disposait encore de toute sa virilité et les femmes ne s'étaient jamais montrées difficiles avec le Gouverneur d'Orsei. Dean avait encore la vie devant lui. Limite si Rudy ne soupçonnait pas son père d'avoir semé du bâtard dans les contrées étrangères qu'il avait visitées, vu avec quelle générosité on l'y accueillait et chauffait sa couche. Enfin, Rudy avait vu Dean tenter de courtiser la prima Nior en sachant pertinemment qu'un homme se dissimulait derrière la danseuse. L'indignation paternelle était déplacée ! Il recadra la discussion.
— Comment as-tu su que j'étais là-haut, Père ?
Dean grommela. Sa colère s'étiolait et masquait mal son trouble. Rudy comprit alors que l'ire exprimait en réalité d'autres émotions : crainte, inquiétude, incertitude.
— Tu m'as appelé et j'ai suivi le son de ta voix. Mais... c'était étrange. Tu m'as appelé dans ma tête, fils.
Rudy cilla, tout aussi troublé.
— Vraiment ?
— Vas-tu me dire ce qu'il se passe, fiston ? demanda Dean, soucieux. Et cet endroit, sous le toit..., fit-il, préoccupé. Je suppose que vous avez dû vous réchauffer mutuellement, renifla-t-il. Ce froid glacial était invivable. Le fait de vous y avoir trouvés dans le plus simple appareil m'est encore difficile à concevoir. Tu essayais de tomber malade ?!
C'était curieux. Rey avait parlé d'une oppression respiratoire ou d'un picotement sur la peau qui le faisait se sentir plus vivant. Dean ressentait un froid glacial ? Pour Rudy, il y faisait bon. À moins qu'il soit le seul à éprouver cette sensation agréable. Phénomène sans doute corrélé au fait que le toit le reconnaissait comme l'un des siens. Finalement, Rudy ressentit du soulagement face à la colère de façade de son père.
— Avant que je ne t'en dise plus, explique-moi les raisons de cette fuite.
Il contraignait ses pensées à ne pas se disperser face à la situation surréaliste. À moins qu'il ait forcé sur le vin de sa Majesté. Sa Majesté... Red n'avait tout de même pas ordonné ces atrocités, si ? Son refus d'y croire expliquait-il son amnésie temporaire ? Venant de Red, ces décisions relevaient tant de l'horreur, que Rudy les avait inconsciemment occultées la veille. Comme si son subconscient avait nié la réalité au point de provoquer un trou de mémoire, à cause d'une dissonance cognitive... parce qu'il avait idéalisé Red ? Ou est-ce que son amnésie résultait de la violence du plongeon dans le passé de Rey ? Rey...
Rudy partait comme un voleur. L'Intendant ne comprendrait pas son absence à son réveil. Encore moins sa disparition soudaine, s'ils quittaient le palais sans se faire prendre. Rey en serait peiné, ou pas... Rey connaissait les décisions du roi concernant son père et ne l'avait pas mis en garde. Il ne lui avait même pas glissé un pauvre indice. Dur à encaisser. Rudy ne pensait pas que cela le blesserait autant. Rey s'était-il servi de lui ?
Le jeune homme était-il simplement intéressé par son corps ? Rudy avait cru vivre un moment intense, lourd de sens. Il avait ressenti quelque chose de plus profond et pensait cela réciproque. Pourquoi Rey lui avait-il tu ces vérités ?
Par loyauté envers le roi. Rudy ne pouvait que s'en prendre à sa naïveté. Le danger était l'ignorance. Ce n'était pas faute d'avoir été mis en garde par la voix aux intonations multiples. Son inconscient avait, à maintes reprise, essayé de mettre le doigt dessus. Le roi qui se montrait si distant... Bon sang !
Inutile de se lamenter. En la jouant fine, ils disposaient d'une chance d'éviter le pugilat. Priorité : s'éloigner du palais. On décortiquerait plus tard les raisons et motivations des uns et des autres. Le roi n'avait sans doute pas trop renforcé la garde, comptant sur le bal des Demoiselles pour émousser la vigilance des Orseians. Red espérait que le vin et la nuit de débauche réduiraient leur efficacité. En un sens, le plan était crédible, cela avait presque fonctionné.
Parce qu'elles avaient été prises dans le secret, les décisions du Grand Red ne devaient pas modifier l'attitude des figures clés de son plan vis-à-vis des Whites, afin de ne pas éveiller les soupçons. La garde s'était comportée comme à son accoutumé. Là se trouvait la faille, et Rudy l'exploiterait. En y réfléchissant, si le Grand Red avait pris des mesures, il concentrerait son action au Village Royal. Les sarricks s'y trouvaient. C'était un passage obligé en cas de fuite de la délégation orseiane.
La séance de sermon levée, Rudy rattrapa Ilona et Chayton. La voix de Père l'arracha des bras de son introspection.
— Tu dois m'en dire plus à quel sujet ?
Rudy soupira, las. Évidemment, Dean ne tiendrait pas compte de son propos.
— Essaye de me faire confiance pour une fois, grommela-t-il. Je manque de temps pour tout expliquer, c'est une longue histoire.
— Si je ne te faisais pas confiance, je n'aurais pas modifié mes plans à ta demande, argüa Dean. À toi de me rendre la pareille, et de grâce, ne tourne pas autour du pot. Épargne-moi de poser des questions, Rudy. Donne-moi les réponses.
Rudy roula des yeux face au ton intransigeant qui ne souffrait pas de désobéissance.
— J'ai des raisons de penser que notre départ précipité est tardif. Nous aurions dû quitter le palais la veille. Mais je manque de certitude car ces raisons relèvent de l'irrationnel. J'ai besoin de preuves concrètes, que tu m'apporteras sans doute en m'expliquant les raisons de notre fuite. Pourquoi partons-nous ? Comment as-tu découvert les desseins de Red ?
— Red...
Dean grinça des dents. Rudy frissonna. Quand Père adoptait ce tic, cela ne présageait jamais rien de bon.
— J'ai fait la connaissance d'Ava, cette nuit. Un petit bout de femme qui danse particulièrement bien, commença Dean, ironique.
— Elle s'est attiré les jalousies de tout le palais, dit Ilona. Avais-tu besoin de la porter de façon aussi obscène pour te retirer ?
— Je ne devais laisser planer aucun doute sur mes futures « activités » avec elle. Ne me sers pas ce regard réservé aux barbares ayant précédé la civilisation. C'était ma seule façon de faire diversion. Je lui en suis reconnaissant d'avoir joué le jeu.
— À mon avis, elle ne s'est pas forcée, ricana Chayton.
— Ouais, elle m'a semblé un peu trop contente de son aubaine. J'imagine sa déception, se moqua Ilona.
— Je suis le déçu dans cette affaire ! maugréa Dean. Je n'aspirais qu'à danser avec le roi et il m'a posé un lapin. Maintenant je comprends pourquoi, marmonna-t-il, sombre.
— Le roi n'était pas au bal ? s'étonna Rudy, un peu perdu. Et puis, « posé un lapin »... ce n'est pas comme si vous vous étiez donné rendez-vous.
— Tu t'es absenté avec ce reître depuis quelle heure ?
— Rey, Père, Rey. On ne va pas remettre cela sur le tapis, si ?
Rudy comprit qu'il était en sursis car ce n'était que partie remise. Que ne fallait-il pas entendre ?! À bien d'égards, son père était plus reître que Rey. Rey n'avait rien d'une brute, d'abord. Il était érudit, séduisant...
— Là n'est pas la question. Qui est cette Ava ? recentra-t-il la conversation, plus pour lui-même vu la teneur de ses pensées vagabondes.
— J'opte pour une mercenaire payée par une personne qui me veut du bien en ce bas monde, ironisa Dean. Elle m'a prévenu du danger qui nous guettait. Son employeur m'informait de quitter le palais à l'aube. Ses informations semblent fiables, elle nous a révéler où est-ce qu'ils détenaient Kohana et dans quel état on la trouverait.
— Où ça ?
— En pleine lumière, parmi les malades et blessés de l'hospice royal, sédatée jusqu'à l'inconscience, grommela Ilona, écœurée. Il ne nous est jamais venu à l'idée de la chercher à la tour Tulipe, nous nous sommes concentrées sur les geôles, la tour de Feu et la ville.
— Depuis combien de temps Kohana est ici, quand l'as-tu envoyée en mission, Père ?
— Juste après l'arrivée du prince David. Il est certain qu'il l'ont torturée, grinça Dean.
— Yakim et Mir nous la ramènent, dit Chayton.
L'estomac de Rudy se souleva.
— Par les Quatre ! Je considère comme une bonne nouvelle le fait qu'elle se trouve aux hospices et non à la morgue.
Il pria que la femme soit retrouvée entière, si possible. Mir était doué pour les missions furtives et, d'après la rumeur, Yakim excellait dans l'assassinat expéditif. Cela ne l'empêcha pas de s'inquiéter pour eux. La garde du palais était surentrainée depuis que le Grand Red avait adopté certaines méthodes de formation des guerriers Mô'Lar. Rudy comprit mieux la colère que contenait Dean tant bien que mal. S'en prendre à une guerrière White, c'était s'en prendre au chef White. Torturer Kohana, c'était torturer Dean. D'autant plus que la jeune femme lui était particulièrement attachée.
— À toi, fils. Tes raisons irrationnelles.
Rudy les enjoignit à accélérer la cadence.
— Nous aurons un comité d'accueil au village. Il est fort possible que ceux que tu as chargés de récupérer nos montures l'aient déjà rencontré.
Son ton empressé poussa ses comparses à accélérer la cadence. Il modula sa respiration et son débit de parole en fonction de sa nouvelle foulée.
— Je ne saurais comment t'expliquer, mais je sais... que le roi a ordonné ta destitution du titre de Gouverneur... Il a donné l'ordre de te...
Rudy retint sa langue. Devait-il le dire ? Il pouvait avoir mal saisi. Hors contexte, les mots se paraient parfois d'un sens complètement différent. S'il révélait à Père que Red avait ordonné son exécution, les choses se gâteraient. Salement. Dean serait capable de rebrousser chemin et d'aller défier le roi en combat singulier, séance tenante.
— L'ordre de me ? relança Dean.
— De te tenir cloisonné au palais de Rubis. D'où l'élimination des sarricks... aujourd'hui. En attendant, Grand-oncle James... sera promu Gouverneur d'Orsei... par décret royal. Le Général de la Légion Rouge... se trouve à Nacir pour assurer la passation de service.
— « Passation »... en mon absence ?! gronda Dean, furieux. Passation de mes couilles ! Pourquoi Dan ne m'en a pas informé ? Je n'aime pas ça du tout.
— Comment tu le sais, Rudy ? souffla Ilona, tombant des nues.
Chayton en avait perdu ses mots. Si les révélations du jeune maître s'avéraient, ils étaient dans de beaux draps. Ils avaient méjugé de la situation. Le roi se montrait plus fourbe qu'anticipé.
— Rey, commença Rudy, avant de se mordre la langue, sentant qu'il commettait une bourde par cet aveu.
— C'est lui qui te l'a dit ? releva Dean.
— D'une certaine façon.
— Il te l'a dit ou tu le lui as soutiré ? réitéra Dean.
Rudy se braqua.
— Qu'est-ce que ça change ?
Cela changeait tout, il le savait. Selon que Rey l'ait prévenu ou qu'il lui ait tiré les vers du nez, ces paramètres détermineraient sa position par rapport à Dean Leblanc. Allié ou ennemi. Cependant, Rudy protégerait Rey de la colère de Père, en dépit de sa potentielle trahison. Encore un sentiment qu'il ne s'expliquait pas, comme tant de choses irrationnelles dans sa vie. Là encore, sa naissance même relevait de l'irrationnalité. En parlant de position, qu'en était-il de celle de Red désormais ?
— Rey est neutre, Père.
En se fiant à ses sensations dans le corps de Rey, il pouvait déduire sans trop de risque que l'Intendant Royal ne nourrissait pas de sentiment néfaste à leur encontre. Et puis, Rudy n'aurait jamais rien su de ce complot si Rey ne l'avait pas emmené dans cet endroit insolite. La providence avait mis Rey sur sa route. Rey n'était pas un ennemi, simplement un instrument du destin.
— Je vois, tu as déjà commencé à prendre position, déduisit Chayton, sombre.
— Rey est neutre, Père, insista Rudy sans faire cas du commentaire. C'est le seul qui...
— Qui quoi ? le coupa Dean, acerbe. Le seul qui a fait battre ton cœur au point de lui écarter tes jambes ?
Ilona fit des yeux ronds, comme elle reliait les points. Elle dévisagea Rudy, incrédule. Dean n'en avait pas fini et se montrait d'une acidité inhabituelle envers son héritier.
— Dissocie ton cœur de ta raison, fils ! Ces gens ne mériteront point ma clémence.
— Rey est le seul pour qui je ne tolèrerai pas un mot déplacé de plus, gronda Rudy, rattrapé par sa propre colère.
Une bourrasque de vent s'éleva et cingla le dos des trois autres. Ilona se retrouva projetée à terre, victime de son poids léger. Elle rouspéta en se relevant et cracha les gravillons dans sa bouche.
— C'est quoi ce temps de merde !
— Ru...dy ? souffla Dean, interdit.
Son fils le toisait bizarrement. Le vent ballotait les arbrisseaux çà et là, charriait les feuilles mortes, soulevait le sable et la rocaille aux alentours, ébouriffait leur tignasse et faisait claquer leurs capes. Leurs capes, excepté celle de Rudy. Aucun pan de vêtement, aucun poil ni cheveu n'étaient soumis à la force du vent. L'irréalité de la scène fut frappante. Le regard effaré, les yeux écarquillés des trois autres interpellèrent le garçon. Pourquoi le dévisageaient-ils ainsi ? Il cligna des yeux. La bourrasque mourut. Puis il se prit la tête entre les mains et gémit sans retenue. La migraine était atroce !
— Mais qu'est-ce qu'il se passe ? lâcha Chayton.
Il n'avait jamais expérimenté un tel degré d'incrédulité. Il dévisagea Dean, espérant trouver chez son chef une réponse. Contrairement à Ilona qui se précipita vers Rudy par réflexe de médicure, Dean s'était figé. Il se ranima lorsqu'Ilona s'accroupit devant le garçon, tentant de comprendre son mal-être.
En proie à de violents maux de crâne, Rudy serrait les dents. Il refusait de ruiner la discrétion de leur petit groupe en gueulant comme un goret mené à l'abattoir. Il avait conscience d'affaiblir le charme de dissimulation les dérobant aux yeux d'éventuels insomniaques curieux. Ses larmes de souffrance alarmèrent une Ilona impuissante. Dans un calme qu'elle jugea très étrange, Dean se mit au niveau de son fils et le serra dans ses bras. Une étreinte presque douloureuse accompagnée de mots apaisants, à l'instar d'une berceuse, qui détourna peu à peu le garçon de son calvaire. Les gémissements ne tarirent pas mais leur fréquence baissa.
La voix médusée de Chayton détourna leur attention de Rudy.
— Par les foudres d'Hayden ! C'est quoi ce bordel ? Les toits du palais...
— Nom d'une putain vierge de Nior ! jura Ilona. Il se passe des choses très bizarres, ici !
C'était l'euphémisme du siècle. Dean leva les yeux sur un spectacle insolite. Tous les toits de rubis s'étaient illuminés telles des torches incandescentes dans l'obscurité. Ils projetaient leur lumière écarlate sur les murs et dans un proche périmètre, donnant au palais l'aspect d'un curieux joyau phosphorescent.
— Je n'ai aucune idée de ce que ça peut être, marmonna-t-il. Soit cela nous octroiera du temps en servant de diversion, soit cela réveillera la vigilance de toute la garde.
Il se faisait violence pour garder un esprit analytique afin d'agir avec efficacité. Seule une tête froide l'aiderait à gérer leur situation et cet imprévu très malvenu chez son fils. Dean tenta d'alléger l'ambiance.
— Ou alors sa majesté s'adonne à on ne sait quelle manigance occulte. À moins que ce ne soit aussi lié à ce bal douteux. Ça va aller, fils ? demanda-t-il d'une voix calme.
— C'est bon, je n'ai plus mal..., souffla Rudy. Je crois que j'ai puisé sans le savoir dans la réserve énergétique des toits, dit-il en regardant par-dessus l'épaule de Dean. Je ne pensais pas être capable de le faire à distance, marmonna-t-il dans sa barbe.
Les toits venaient de « s'éteindre ». Dean le tint à bout de bras, l'incrédulité étant peu de chose à côté de ce qu'il ressentait.
— C'est toi le responsable ?
— Puisque je te dis que c'est une longue histoire, dit Rudy, penaud.
— Ne restons pas là. Il y a du mouvement des deux côtés, lança Chayton, indiquant le palais et le Village Royal.
— J'aimerais qu'on m'explique. Je dis ça, je ne dis rien, balança Ilona comme ils se mettaient à couvert dans les fourrées et reprenaient leur avancée de façon mesurée.
— Nous aurons le trajet du retour pour cela, rétorqua Dean. En attendant, fiston, tu étais en pleine explication avant qu'il ne te prenne l'envie de batifoler avec le surnaturel.
— La faute à qui ? bougonna Rudy, néanmoins scié par le sarcasme paternel.
À ce stade, ce n'était plus du sarcasme mais une forme incongrue de stoïcisme. Il en était admiratif mais surtout l'en remerciait. Le calme de Père lui était bénéfique. Dean ne se montrait pas plus ébranlé, bien que son aura très agitée dise le contraire. Son attitude aidait à contenir Ilona et Chayton qui calquaient leur réaction sur leur chef de tribu, afin d'éviter de lever leur dissimulation. Pourtant, dans leurs yeux, Rudy lisait l'effroi et la méfiance suscités par la notion taboue de sorcellerie. Ils avaient compris que quelque chose clochait chez lui.
Sa colère avait déchaîné l'élément de la divinité Hayden. Rudy en ignorait le processus car ce n'était pas volontaire, mais il se savait bel et bien fautif. L'attestait sa précédente migraine dont le degré de violence se rapportait à l'ampleur du phénomène surnaturel. Mais Père avait raison. Son don de plus en plus bizarre avait interrompu leur conversation. Ou plutôt, son don n'avait pas supporté de se faire crier dessus de manière irrespectueuse en plus d'entendre les critiques jetées à Rey. Il devait vraiment s'être attaché au jeune intendant au point de prendre cela à cœur. Leur relation avait été courte mais intense. Riche en émotions magnifiées par le côté surnaturel de ce qu'ils avaient vécu ensemble.
Son cœur se serra à nouveau à l'idée de quitter Rey dans des conditions si désolantes. Rudy essaya de l'endurcir. Rey ne se trouvait pas dans le bon camp. Et Rey était loyal. Il avait beau dire Rey neutre, ce dernier n'en restait pas moins un élément lige du Grand Red, l'homme qui avait ordonné sans ciller la mise à mort de Père. Pourquoi fallait-il que les choses prennent cette tournure ? Il se sentit idiot face à son envie de pleurer. Tout se passait pourtant si bien ! Son tourment n'avait cependant rien de prioritaire. Un mauvais pressentiment gagnait en intensité.
Oncle Danny aussi est en danger !
Père l'avait souligné : ce n'était pas normal qu'Oncle Dan ne l'ait pas contacté via épervier, vu les manigances de Red avec Grand-oncle James. Le connaissant, le maitre d'armes Leblanc se rebifferait face au décret royal mettant son oncle sans poigne à la tête d'Orsei. Et l'homme à qui le roi avait donné l'ordre d'abattre Dean, le Général Timothy Medley, n'hésiterait pas à sévir. Évincer Dan reviendrait à amputer Dean de son bras droit. Son bras d'arme. En pensant de façon retorse, l'ordre de Red de ne tuer que Dean, et uniquement Dean, ne serait point désobéi si l'on touchait aussi à Dan.
— Tu es accusé de félonie pour tes pensées et tes agissements, Père. Red a sans doute eu vent de tes projets concernant le prince aîné, Damien, dit Rudy, pensif. Si oui, comment ? Par qui ?
— Pourquoi agit-il de façon si détournée ? exhala Dean, un brin affecté. Je ne comprends pas. Pourquoi ne pas me confronter directement ? Je ne lui ai jamais caché mes positions ! Certes, j'ai parfois parlé à demi-mots, mais c'est le langage qu'emploient ces foutus nobles reds ! J'ai toujours fait en sorte de rester honnête dans la mesure du possible. Alors pourquoi me jouer cette mascarade de l'hôte accueillant qui me donne le gîte et le couvert, mais ourdit le projet de m'étrangler dans mon sommeil une fois que je me serais assoupi, repu ? J'exècre ce genre de méthodes. Va savoir pourquoi je l'en avais cru incapable, marmonna-t-il, déçu.
— Je crains que tu l'aies trop idéalisé, dit Chayton. Et le Grand Red te jalouse, Dean, c'est aussi simple que ça.
Il masquait sa surprise, loin d'imaginer que les actes du roi auraient un tel impact sur Dean. Cette obsession qui virait au malsain devait être plus profonde. Dean ne s'était tout de même pas épris du roi, enfin ! Il n'était pas sérieux, là ! C'était un défi à la base, une quête du frisson comme à l'accoutumé. Les sentiments n'entraient pas en compte. Ils n'étaient pas censés entrer en compte. Ressaisis-toi, Dean. En attendant le Grand Red a un temps d'avance sur toi, et il se pourrait bien qu'il se joue de ton obsession... et peut-être même de tes sentiments. Cette histoire se finirait de façon tragique s'il ne remettait pas un peu de bon sens dans la cervelle de son chef, se dit Chayton.
— Que tu le veuilles ou non, tu es une menace pour Red quel que soit l'angle sous lequel on prend les choses. Tu étais peut-être trop occupé à jouer ce rôle que tu t'es donné durant ton séjour ici, Dean. Sinon tu aurais remarqué de quelle façon tous te traitaient au bal.
— C'est-à-dire ?
La réponse vint d'Ilona.
— Quelqu'un de non averti aurait pu penser que ton arrivée faisait office de celle de l'hôte. Le roi a été absent toute la nuit mais aucun convive n'a semblé le remarquer. Ils étaient plutôt occupés à élire une reine à ta mesure. Tu étais le roi du bal, ils t'ont quasiment tous considéré comme leur monarque. Tu éclipses le Grand Red.
Dean soupira, presque impuissant face à l'ironie du sort.
— Je ne m'excuserai pas d'avoir une aura royale. Et j'ai mis ma toilette au diapason de l'autre espèce de monarque mystérieux qui m'a fait faux bond. Ce n'était pas dans le but de l'évincer !
— Il n'y a pas que ça, intervint Rudy, réalisant qu'il avait raté quelque chose d'assez épique en quittant la tour Écarlate. J'ai le pressentiment que le royaume entier court un danger. Je n'ai pas tout compris à mes visions, mais...
— Parce que tu as des visions, maintenant ? glapit Dean qui n'en pouvait plus d'encaisser. Bon sang de bois ! Est-ce moi ou cela a atteint des proportions faramineuses depuis que nous sommes ici ?
— On aimerait bien être à la page, s'agaça Chayton. Vous ne vous en rendez pas compte, mais c'est extrêmement difficile de vous suivre en ce moment.
— C'est lié, dit Rudy à son père. Promis, je vous en parle plus tard. Tel que c'est parti, il me sera impossible de le cacher plus longtemps.
— Cacher quoi ?
Rudy ne put répondre à Ilona, coupé dans son élan par des picotements dans les doigts et la moiteur de ses mains. Cette réaction subite lui indiquait que quelque chose se préparait dans l'ombre et son don y réagissait. Il en avait ras-le-bol ! Sa particularité ne lui avait jamais autant pourri la vie ! En touchant les toits de rubis, il avait dû déclencher une cascade ou, qui sait, désactivé ou activé un sceau, ou peu importe, pour ce qu'il en savait ! Une fois de plus, il pesterait plus tard contre son sort.
— J'ai appris de Rey que Lucas, le bellâtre que tu as épinglé dans la loggia de la tour du Dragon, servait les intérêts des royaumes Lima et Baylor.
— Je vois, fit Dean. Kohana n'a pas eu le temps de me révéler l'identité des patrons de la taupe. Mais elle était sur une bonne piste. Son rapport stipulait que quelqu'un en interne introduisait en Maar des espions des royaumes nordiques. Autant nous savons les intentions de Lima, autant le cas Baylor reste nébuleux. Ce dernier n'a jamais assumé sa convoitise de Maar auparavant. Qu'est-ce qui a changé ?
— Y a-t-il un rapport avec notre situation de fugitif ? s'enquit Ilona, peinant à se raccrocher aux branches de sa compréhension.
— Oui, confirma Rudy. Rey a aussi mentionné une histoire de dettes. Ce qui implique que les créanciers de Maar sont limans ou baylorians. Enfin, je crois que Red essaye de se débarrasser de ce qui le gêne en ce moment, afin de pouvoir pleinement se consacrer aux cas Lima et Baylor. Malheureusement, tu représentes une gêne, Père. Une gêne qui a le toupet de disposer de larges richesses. Outre cela, Red a un autre sujet de préoccupation avec un individu qui l'aurait menacé de scinder Maar en deux, s'il ne se donnait pas à lui, ajouta-il, peu certain.
Dean trébucha et manqua de s'étaler au sol. Il dévisagea son fils, le cœur battant la chamade. Comment Rudy avait-il su cela ? Red lui en avait-il parlé, sans toutefois entrer dans les détails ? Arf, cette histoire allait définitivement lui faire marquer des points négatifs chez son fils !
Ilona arborait le masque de l'incompréhension totale. Chayton, perplexe, interrogeait son chef du regard. Dean avait-il touché un mot de ses viles intentions à son fils ? Ce que Rudy ignorait, c'était que Dean avait fait part de ses élans de convoitise envers Red à certains de ses hommes. Une convoitise qui l'avait poussé à tenir des propos osés face au souverain, et qu'il regrettait un peu, depuis. Jusque-là, ç'avait amusé Chayton qui se faisait une joie de voir comment son chef allait courtiser un roi vexé et remonter dans son estime. Ce n'était plus drôle quand le fameux roi prenait la menace très au sérieux...
— Je n'ai pas saisi cette vision, reprit Rudy, sourcils froncés. Enfin, ce n'était pas une vision mais des souvenirs. Comme si j'avais plongé dans ceux de quelqu'un, avoua-t-il tout en restant vague. Ce que j'y ai vu reste flou mais cela s'est bel et bien produit. Il n'y a aucune incertitude contrairement au caractère indéfini d'une vision. C'est de là que je tiens l'information concernant le sort des sarricks et la décision du roi de mettre Grand-oncle à la tête d'Orsei.
Et tu penses me berner avec cette piètre formulation, soupira Dean pour lui-même, affligé de voir que son fils ne savait pas mentir. Un mensonge pouvait vous sauver une vie. Certes, par définition cela n'avait rien de vertueux, mais parfois un acte de noblesse naissait d'un boniment. Une pensée bien scandaleuse pour un homme dont le rejeton était un détecteur de tromperie ambulant ! Bref, Rudy était un piètre menteur. Même par omission, il n'y arrivait pas. C'était inquiétant de voir son fils échouer dans ce domaine où il excellait !
Rudy avait donc, par on ne sait quel truchement, accédé aux souvenirs de Rey. Probablement à l'insu de ce dernier. Dean peinait à le concevoir mais il avait depuis longtemps pris la décision ne de pas questionner les bizarreries de son fils. Rudy s'était déjà trahi en avançant la neutralité du bougre dans cette histoire. Il fallait qu'ils aient une sérieuse discussion, son fils et lui. Dean espérait au moins que son garçon n'avait pas couché avec ce jeune homme simplement pour lui soutirer ces souvenirs... Cette ville de débauche faisait filer un mauvais coton à son ange ! Il était plus que temps de rentrer. Tant pis pour ses plans avortés.
— Dis-moi, Dean, nous aurais-tu à tout hasard caché que ton fils était oracle ? demanda Ilona avec un sérieux douteux.
— Non, archimage, grommela Dean sur le même ton. (Preuve qu'il avait bien imprimé ce que lui avait révélé Rudy de façon éparse et décousue.) Et inutile de te figer, tu nous ralentis.
Si quelqu'un devait se figer, c'était lui, bordel ! Mais Red et ses plans foireux ne lui laissait pas le temps de s'adonner à un tel loisir. Quant au roi liman Ethan Bosco et à l'Impérateur Mathiew Arrow de Baylor, ils ne perdaient rien pour attendre...
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