J'ai mangé, du moins j'ai essayé, et ça y'est, nous sommes une fois de plus enfermés dans notre espèce de chambre. Je fixe le condamné, il me regarde lui aussi. Avec la flamme dans ses yeux.

On est assis sur le lit du bas, et c'est silencieux. C'est le langage de la lune qui sort de nos bouches aux lèvres gercées. Il est vraiment beau, et je ne comprends pas pourquoi je ne l'ai pas admiré plus tôt.

Peut-être que c'est car sa mise à mort est prévue pour demain, que je me mets soudainement à profiter de sa magnificence. Mais il ne va pas mourir. Je lui ai fait une promesse. Et je compte bien la tenir.

Puis, le langage du soleil remplace le précédent, il prends la parole:

« -Donc toi dans la vie, t'es journaliste?

-Oui, en investigation.

-T'as de la chance, ça doit-être super intéressant. »

Je lui souris, il me sourit, et tout à coup, je veux tout savoir de lui. Dans les moindres détails. Je veux connaître chaque recoin de son être. Je lui demande donc:

« -Et toi, tu vivais où? Ici, en Corée, ailleurs?

-À la base j'étais en Corée, et je travaillais dans une boutique de vinyles. Il parut hésiter avant de poursuivre. Puis, je suis venu m'installer ici retrouver quelqu'un, pendant quelques mois avant, bah, tu sais quoi. »

Oui, je sais très bien quoi. Avant qu'il pourrisse en prison. Il ne s'attarde pas sur la raison de sa présence ici, et je n'insiste pas.

On reste là quelques minutes, le temps de digérer ce qu'on vient de se raconter. Et là, je ne sait pas ce qui me prends, mais je me retourne d'un coup vers lui.

Je lui prends les joues, et le regarde droit dans les yeux. Sa flamme. Il se rapproche. Je me rapproche. Nos lèvres se mêlent, en même temps que nos larmes.