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Mon agenda était vide, comme à son habitude, et après une investigation rapide dans mes trieurs je n'avais retrouvé qu'un devoir de mathématiques pour la semaine suivante. Probabilités. Ça me prendrait vingt minutes, un autre jour donc. Je l'épinglai sur mon tableau en liège, avant d'entendre la voix de mon frère à travers l'embrasure de la porte.

- Diane, tu fais pas tes devoirs ?

Non, abruti, et toi ? Il me semble que je ne lui ai même pas répondu, tellement absorbée dans la contemplation de mes mains. Ça a peut-être duré des heures.

- Tu as pris ta douche ? Tu as mangé ? Pourquoi tu réponds pas ?

- Sors de ma chambre, s'il te plaît.

Je fermai ensuite lentement la porte devant lui, en affichant le sourire le plus condescendant que je connaissais. Je pouvais encore l'entendre pouffer derrière le battant, jusqu'à ce qu'il s'excuse de m'avoir fait peur et m'expliquât que "Maman arrive dans dix minutes, alors dépêche-toi, Chica !"

Maman ne remarquerait même pas que je portais encore mes vêtements du jour. Et moi je ne remarquerais même pas son entrée. J'ai dit à Rémi d'aller se faire foutre, puisque c'était la seule chose qui parvenait à le faire fuir, et ouvris mon carnet à dessins.

"Chica"
Parce que sur les photos de famille tous les autres sont blancs, alors je ressors comme une rature. Parce que par rapport à mes camarades de classe à l'école primaire j'étais "la latina", on en a même parfois oublié mon nom.
Depuis, il y avait eu beaucoup d'autres raisons pour lesquelles on avait pu oublier mon nom ; ça me rendait presque triste que seul Rémi m'appelle encore comme ça. Les autres ne m'appelaient pas.

En réalité, la seule chose que j'ai jamais entendue en écoutant les élèves qui parlaient de moi, c'était :
"Cette fille me fait peur"
Elle avait un nom, cette fille. Diane. Comme la déesse de la chasse. Ça ne te dit rien ? Mais si, une petite brune qui a une tête de Mexicaine, elle était dans ta classe l'an dernier.
Et puis tant pis, qui n'a jamais rêvé d'être invisible ? C'est l'accès au savoir, aux petits secrets de tout le monde, à l'impunité. Lorsque je m'en était rendue compte, je me suis jetée sur ce super-pouvoir providentiel, sans me poser de questions de morale puisque je ne comptais pas faire de mal à qui que ce soit, seulement satisfaire ma curiosité grandissante de collégienne. J'étais une jeune fille de douze ans honnête, douce et naïve.

Dans mon carnet j'ai dessiné un pieu dans un mur, et un homme épinglé au bout comme mon devoir sur le tableau en liège. Et le sang noir qui coule jusqu'au bord de la page, le cri de douleur silencieux jeté vers le ciel. Un jour blanc, sans soleil, avec un goût amer d'éternité. Ma colère est retombée. J'espèrais toujours que ça ne fonctionnerait pas, que je garderais la frustration en moi, pour qu'un jour tout le monde puisse la voir jaillir, dans un romanesque élan de rage.
Dans le jour blanc j'ai dessiné un feu d'artifice.

Il devait être presque vingt heures quand je suis sortie de mon antre, et suis allée dire bonjour à ma mère. Je n'ai pas échappé à ses remarques désobligeantes sur mon exil, m'excusant et baissant les yeux comme d'habitude. Mettre la table, manger en écoutant la pimbêche à la télé nous raconter la misère du monde, discuter "en famille" autour d'un café. Pendant ce temps je pensais à Théo, Cathy, et Alice en qui je n'avais plus confiance. Ce n'était la seule, je crois.

Enfin elle nous a laissés partir, dormir pour reprendre des forces et repenser à notre journée. Je me réfugiai dans ma couette, auprès de Doudou qui me rassurait sans comprendre, et laissait mes plus beaux rêves flotter par-dessus le sommeil. Grâce à lui, ce n'était que le jour que les cauchemars me rattrapaient quelques instants.
C'est alors que je me rendis compte d'une chose capitale, une chose énorme qui aurait dû me frapper bien plus tôt. Théo éloignait mes cauchemars aussi.

Dès que je pensais à lui, dès que j'entendais son nom ou que je croyais voir son visage, alors comme auréolée d'une lumière éclatante je regardais fuir mes pensées sombres, et les plis sous mes yeux qui se relevaient au rythme des battements dans mes veines. Je finissais toujours par me reprendre, ramasser mon épée et remettre mon armure, en vérifiant que personne n'en sache rien avant le jour de l'adoubement. Mais qui aurait pu savoir ? L'ennemi que je cherchais était inexistant, alors je l'avais créé. Elle s'appelait Élise, et elle venait me tourmenter souvent, pour faire revenir les cauchemars.

J'adorais Élise, mais je haïssait tant le rôle qui était le sien (bien qu'une partie de moi s'y raccrochait comme à une bouée de sauvetage dans la mer noire de ma solitude) que j'avais tenté à maintes reprises de m'en débarrasser. J'avais même parlé de l'énigme Théo à Alice, sans vraiment lui expliquer. Je n'en avais pas eu le temps : son sourire même pas faux m'insupportait, je ne voulais pas de son aide trop sincère, écrasée par le souvenir de ce que j'aurais pu lui avoir épargné.
J'avais peur qu'elle me découvre, moi et mon égoïsme honteux, alors même que c'était elle que j'avais toujours considérée ma sœur. Je n'ai jamais dit la vérité à Alice.

Son sourire vint hanter mes rêves heureux, au milieu de toutes ces autres choses qui me donnaient envie de me lever chaque jour.

Le lendemain matin, j'ouvrai les yeux dans la nuit noire, et comptai les secondes jusqu'au signal, en serrant Doudou contre moi.
Un... Est-ce que c'est normal ?
Deux... Est-ce que je suis normale ?
Trois... Est-ce que Théo est normal ?
Quatre... Est-ce que Alice sait ?
Cinq... Est-ce qu'elle m'en veut ?
Six... Est-ce que Cathy sait ?
Sept... Est-ce qu'elle m'en veut ?
Huit... Est-ce que je vais sursauter ?

Puis la sonnerie, glaçante, qui fait mouvoir mes jambes, et dans mon élan je traverse ma chambre en évitant les cicatrices dans le plancher. Des trous béants, marques du passage de nombreuses et anciennes tempêtes, auxquels je ne faisais plus attention que dans mes pires moments.

Il y avait le téléphone allumé, posé là sur mon bureau, remplissant la nuit et le silence de lumière bleue et de musique. Lorsqu'il fut éteint, je me retrouvai seule et abandonnée dans le noir, attendant assise sous le tableau de liège que le soleil se lève.
Traversée par un doute, peut-être suppliant d'un cri silencieux, et me vidant peu à peu de mon sommeil, qui coulait sur le sol.

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