13. Âme Pure.
Amanda.
Vous avez déjà essayé de convaincre une adolescente qu'elle ne devait pas se mêler de votre vie privée ?
Je peux vous dire que c'est impossible.
Cela fait dix minutes que je répète à Azalea que ce qu'il se passe entre Ayden et moi ne la regarde pas, sans succès.
— Donne moi juste un indice, se plaint-elle en s'étalant sur la table à manger, à côté de son assiette.
Je lève les yeux au ciel face à son comportement capricieux. Je sais ce qu'elle cherche à faire mais c'est au-dessus de mes forces.
— Aza, on en a déjà discuté. Je ne me remettrais pas en couple.
Elle soupire et laisse tomber en reprenant sa fourchette avant de manger sans trop de convictions.
Voir ma fille s'abattre devant mes yeux alimente ma culpabilité de ne pas lui offrir la vie de famille qu'elle mérite.
Je pousse mon assiette, n'ayant plus faim et me lève pour m'asseoir à côté de mon rayon de soleil qui n'est plus qu'un nuage pluvieux.
Je sais très bien pourquoi Azalea me pousse constamment vers les hommes. Avoir une famille composée d'un père et d'une mère est son souhait le plus cher depuis son enfance. Je me rappelle encore de ses dessins qui me fendait l'âme en deux quand elle coloriait la silhouette d'un homme à nos côtés et l'appelant "papa" en légende. Ma fille n'a pas eu de figure paternelle et même si elle essaye de le cacher, je sais que cela engendre des difficultés pour elle.
Qui ne rêve pas de raconter son été en vacances avec ses deux parents ? De citer tous les énormes cadeaux que son père lui a offerts comparé à ceux plus économiques de sa mère ? De se vanter d'avoir un père pour la venger de son ex-petit-ami parce qu'il avait rompu ? Des privilèges qu'il lui accorderait quand sa mère lui aurait interdit de sortir ?
Un père dans la vie d'une jeune fille est primordial. La douleur de l'absence d'un père est une plaie invisible qui pourtant ne cicatrise jamais. Elle reste là, au creux de votre cœur à vous souffler à l'oreille votre vie avec ce père dont vous rêvez, aux choix et au sacrifices qui aurait pu être éviter s'il avait été là. Elle vous tord le ventre, propage un sentiment de tristesse infinie qui ne se comblera jamais car vous savez pertinemment qu'il ne reviendra pas.
Sans la figure paternelle, chaque événement, chaque accomplissement, chaque chute devient un silence assourdissant auquel personne ne peut répondre car vous vous sentez seule et délaissée. Chaque fête des pères, chaque réunion familiale, chaque moment de besoin de soutien inconditionnel renforce cette douleur qui ne peut s'éteindre.
Vous devriez vivre avec toute votre vie en vous imaginant quelle femme vous auriez été si avait été là.
J'aurais beau lui donner tout mon amour en double, rien ne suffirait aux yeux d'Azalea. Elle souhaite ce que toutes jeunes filles veulent : un père qui soit là quand elle chutera, la guidera quand elle se perdra, la consolera quand elle sera amoureuse...
Mais personne ne répondait à l'appel. C'est moi, et personne d'autre. Aucun "papa" n'apparaît dans l'équation.
Je tends ma main sur la table et prends la sienne, ce qui lui fait relever la tête.
— Ma chérie...
Je sens mon cœur de maman s'effriter quand les prunelles de ma fille trouvèrent les miennes, son aura de joie de vivre a cédé pour laisser place à une douleur écrasante, un cri déchirant son âme de petite fille.
— Ton père était mon premier amour, celui pour qui j'ai tout abandonné pour vivre avec lui ; ma vie à Paris, tante Rosa, mon métier, mes parents... Je lui ai tout donné, je l'aimais tellement que cet abandon me paraissait futile à l'amour que je lui portais.
Je la vois m'écouter attentivement, elle me laisse lui donner les réponses qu'elle attend depuis toujours. Je sens qu'elle est assez mature pour comprendre mon histoire avec son père, aussi cruelle soit-elle.
— Je croyais que c'était l'homme de ma vie, chaque jour qui passait, il me rendait mon amour à sa juste valeur. Il était attentionné, à l'écoute. Je me souviendrais toujours de ses douces paroles à mon égard, de son regard amoureux et de ses gestes d'affections. Pendant plusieurs années, j'ai été la femme la plus heureuse du monde et puis tu es arrivée, comme une douceur quotidienne dans ce foyer déjà rempli d'amour. Tu étais une boule d'énergie qui prenait nos rires et renforçait notre famille. Puis, il m'a demandé ma main.
Ma gorge se serre en me souvenant de sa demande en mariage. Un jour de neige, on faisait un bonhomme de neige et j'avais voulu le prendre en photo quand j'ai vu la bague pendre au bout de la carotte. Je l'avais traité d'abruti avant de lui sauter au cou, nous faisant tomber dans la neige avant de l'embrasser.
— On vivait un rêve, jusqu'à la faillite de ton père. Il était sans emploi, je débutais comme autrice, alors on a enchaîné les petits boulots pour s'en sortir. On a passé quelques mois à se serrer les coudes, puis un soir, il est rentré avec ce sourire : il avait trouvé une solution. L'argent coulait, tu étais heureuse, je pouvais écrire à nouveau. Mais lui... il rentrait tard, partait tôt, l'air éteint.
Je serre doucement les petites mains d'Azalea et je vois qu'elle sait que je ne vais plus omettre les chapitres sombres de notre histoire. Je sens son corps se crisper et sa respiration se couper pour encaisser ce que je m'apprête à lui réléver.
Enferme-toi ma fille, crée une barrière pour affronter les démons dont j'essaye de te protéger depuis petite.
— Ses actes si débordants d'amour avaient été remplacés par un néant oppressant. Ses paroles apaisantes s'étaient transformées en cris hargneux et ses yeux ne reflétaient plus son amour éternel qu'il m'avait juré.
À partir de là, je choisis mes mots avec soin, ralentissant mon rythme d'élocution. Malgré tout ce que je vais lui révéler, je ne veux pas qu'Azalea ait une mauvaise vision de son géniteur.
Mon rêve de femme mariée et comblée n'était qu'un cauchemar éveillé et il n'a que rarement franchi la barrière de mes lèvres.
Seuls Rosalie et Marc connaissent toute mon histoire.
— En quelques semaines, j'ai basculé de femme comblée à femme rongée par l'angoisse. Il ne me regardait plus, ne me parlait plus. Toujours absent, toujours la même excuse : le travail. Notre couple s'effondrait, et je me demandais encore pourquoi cette bague était à mon doigt. Mais j'ai tenu bon, pour lui, pour toi, pour notre vie. Jusqu'à ce que je n'en puisse plus. Alors, j'ai choisi de partir avant d'être brisée pour de bon.
Je lève la tête, papillonnant des paupières pour m'empêcher de pleurer. Je desserre ma prise sur les mains d'Azalea mais celle-ci renforce la pression, comme si elle avait besoin d'une ancre pour ne pas défaillir. Les souvenirs me noient, mon cœur se retrouve soulevé par le poids de mes années de souffrance et ma gorge n'est plus qu'un feu ardent.
J'ai fait le premier pas en le quittant mais il a gardé une partie de mon cœur, l'écrasant sous le poids de son regard d'acier.
Je m'étais promis une chose, il y a des années, de ne jamais laisser une seule et unique larme passer la frontière de mes yeux devant Azalea. Et je compte bien la tenir.
Même en cet instant.
Chassant ces traîtresses de perles salées, je trouve le regard brillant de ma fille. Je la prends dans mes bras, espérant que mon étreinte suffise à lui enlever un peu de sa peine. Sa tête dans mon cou, je lui caresse les cheveux alors qu'elle s'agrippe à moi comme si sa vie en dépendait. Je sens ses larmes glisser silencieusement sur ma peau, m'anéantissant un peu plus à chaque fragments de son chagrin qu'elle me laisse apercevoir.
Je fixe le vide et la berce mécaniquement, mon âme se lacérant face à sa vulnérabilité.
Un sanglot de ma fille brise ce silence et je ferme les yeux, laissant la souffrance nous liées à jamais.
Ma petite Azalea ne sera plus la même, son aura sera toujours entourée de nuances sombres.
Et c'est ma faute.
***
Plus tard, dans l'après-midi, je me pose au P'tit Gourmand pour m'évader de la discussion de ce matin. Azalea est repartie au collège mais je sais qu'elle n'est présente que physiquement, son esprit, comme le mien est encore au milieu de cette cuisine, nous perdant dans des souvenirs qui nous hantent toujours.
J'ouvre mon ordinateur après avoir commandé mon habituel café accompagné de sa tartelette aux poires.
Depuis peu, l'inspiration est enfin revenue, dissipant le brouillard du syndrome de la page blanche.
Je tape les premières lignes, puis les suivantes, et bientôt, je suis happée par mon histoire. Le café refroidit à côté de moi, la tartelette reste intacte, oubliée. Seule l'écriture compte.
Le P'tit Gourmand est un espace charmant et apaisant où je peux travailler en paix, sans personne pour me déranger ou m'interrompre dans mon livre.
Quand j'écris, une bulle se forme autour de moi, me plongeant dans mon univers, m'imaginant à la place de mon propre protagoniste et de son vécu. Un tout autre monde s'offre à moi grâce à mon écriture et ma passion, laissant ma vie de côté, faisant une pause dans mon existence pour me glisser dans la peau d'un de mes personnages. Je ne pense plus à rien, m'exilant de la réalité pour en faire un monde où je serais pleinement heureuse.
J'ai l'art d'écrire des histoires d'amour alors que la mienne est inexistante. Ironique, non ?
Les bruits du café s'effacent à mesure que je m'immerge dans mon récit, bercée par le cliquetis régulier du clavier.
Jusqu'à ce qu'un raclement de chaise brise ma bulle.
Je sursaute, le cœur battant, alors que David s'installe à mes côtés, affichant un sourire digne d'une publicité de dentifrice.
Depuis notre rencontre au speed-dating, nous avons gardé contact et au fil du temps, il est devenu un bon ami. Il est même venu dîner l'autre soir et il a passé la soirée à rire et discuter avec Azalea.
— Alors comment tu vas depuis ? me demande David alors qu'on lui apporte un sandwich baguette au fromage bien dégoulinant et à l'odeur forte.
Je fronce le nez quand il croque dedans mais je fais abstraction et lui réponds.
— Je vais bien, j'ai enfin retrouvé ma capacité à écrire. Et toi ?
— Bien, au fait. J'ai terminé ton bouquet ce matin, il est à la boutique mais si tu as le temps tu peux venir le prendre.
Je referme mon ordinateur et hoche la tête en buvant la fin de mon café.
— Bien sûr, termine ton... Je ne sais même pas comment tu fais pour manger ça !
J'ai fait l'effort de ne rien dire mais cette odeur me retourne le ventre. Il ricane avant d'en reprendre une grosse bouchée pour me prouver que c'est bon.
— Compare-le à une pizza aux anchois, me suggère-t-il.
— Et pourquoi j'irai le comparer à une pizza ? Je demande, perdue entre la discussion dont je ne comprends que la moitié et le fromage qui me donne envie de vomir.
— Dès que tu ouvres le paquet, l'odeur te frappe comme un coup de poing, mais une fois que tu y goûtes, tu te rends compte que c'est une explosion de saveurs délicieuses, m'explique-t-il en me le tendant. Tiens, essaye.
Je secoue les mains devant moi pour me protéger de cette attaque fromagère, une grimace déformant mon visage.
— Non, merci, je crois que je préfère encore mourir de faim.
Il marmonne dans sa barbe et finit son sandwich avant de se lever pour qu'on se rende dans sa boutique.
Avez-vous déjà eu un ami ? Si, oui alors vous me comprendrez certainement quand je dis qu'avec David, je me sens comme chez moi. On ne se connait pas depuis longtemps mais j'ai l'impression de tout savoir de lui.
Selon une citation de l'écrivain et philosophe Richard Bach dans son livre "Le Messie récalcitrant", il dit : qu'une rencontre entre deux êtres n'est que la reconnexion de deux âmes qui se connaissent déjà.
La légende raconte que les amis que l'on connaît depuis seulement un jour, mais avec qui on ressent un lien fort, sont des personnes importantes dans nos vies antérieures.
Et j'aime croire que c'est exactement ce qu'il se passe avec David.
Dès que je pose le pied à l'intérieur de sa boutique, une clochette retentit et un parfum floral et apaisant m'envahit. Mes yeux sont submergés par les couleurs qui colorent chaque espèce de fleurs. Des bouquets sont soigneusement rangés sur des étagères, certains sont dans ses pots, d'autres entourés de rubans décoratifs.
Les feuillages me frôlent parfois le visage ou les jambes quand je passe entre deux tables où sont exposées des compositions florales. Je ne peux m'empêcher d'effleurer quelques fleurs pour ressentir la délicatesse de ses pétales, humant les odeurs sucrés.
— En même temps, tu l'avais bien cherché, non ? réplique David en riant quand je termine de lui expliquer le vol de ma photo.
— Ce n'est pas une raison, j'essaye de me défendre en regardant le lustre qui éclaire la pièce, entouré de lierre et de fleurs.
— Oui, c'est immature et puis il n'avait pas le droit de me la prendre sans mon consentement.
David rigole en secouant sa tête avant de reprendre son chemin vers l'arrière de sa boutique.
— Il me rappelle quelqu'un, souligne-t-il en faisant référence à mon vol de carte bleue.
Je reste muette, un faux air boudeur sur le visage. Je sais très bien que ce n'était que sa façon à lui de me rendre la pareille, une sorte de monnaie d'échange dans cette vendetta silencieuse.
— Tu devrais peut-être lui laisser le bénéfice du doute, reprend-t-il en se tournant vers moi. Tout le monde dit qu'il faut se trouver une âme sœur, que quelqu'un dans ce monde nous est destiné. Mais je pense que c'est réducteur.
— Tu ne crois plus en l'amour ? Je demande en inclinant la tête, voulant savoir sa vision de ce sentiment que je peine à ressentir de nouveau.
— L'âme sœur, c'est celle qui nous complète, qui nous fait grandir, mais une âme pure, c'est quelque chose de bien plus rare, bien plus précieux. C'est celle qui nous touche d'une manière profonde, qui réveille des parts de nous-mêmes qu'on ignorait, qui nous guide sans juger. Une âme pure transcende l'amour tel qu'on le connaît, elle nous élève bien au-delà de ce que l'on pensait être possible. Elle n'est pas juste un "nous", mais un "nous" qui devient meilleur, qui trouve sa place dans l'univers.
— Mais aucun âme n'est totalement blanche, je contredis en le suivant à travers ses fleurs.
— Ce n'est pas ce que j'ai dit, me corrige-t-il doucement. Une âme pure n'est pas dénuée d'obscurité. Elle a ses ombres, ses cicatrices, ses failles. Ce qui la rend pure, c'est sa capacité à accepter cette noirceur sans se laisser détruire par elle. Ce n'est pas l'absence de ténèbres, mais la manière dont elle les transforme, les comprend et en sort grandie.
Je m'arrête un instant, digérant ses paroles. Un frisson parcourt mon dos alors que l'idée de l'âme pure se déploie dans mon esprit. Ce qu'il dit a du sens, une part de vérité que je ne peux ignorer. Pourtant, quelque chose en moi résiste encore. Oui, je comprends ce qu'il veut dire, cette idée de se libérer des ténèbres, de les accepter et de les transformer, mais...
Je laisse mes yeux errer sur les fleurs disposées autour de nous, cherchant une forme de réconfort dans leurs couleurs vibrantes. Mais ce n'est pas le même apaisement que je ressens habituellement. Une partie de moi reste bloquée sur l'idée que, malgré tout, l'âme pure semble être un idéal trop lointain pour une personne comme moi.
Est-ce possible, vraiment ? Pouvoir accepter ses failles sans être brisé par elles ? Une partie de moi a toujours cru que certaines choses étaient irrémédiables. Certaines blessures trop profondes pour pouvoir être guéries. Peut-on réellement se reconstruire après tant de destructions ?
Je garde ces questions dans un coin de ma tête, ne sachant pas si je suis prête à y répondre. Peut-être qu'un jour, je comprendrais mieux, mais aujourd'hui, l'idée que mes propres ombres puissent un jour être transcendées me semble encore irréelle.
Il se tourne vers moi, me prends par les épaules pour que je me concentre sur lui et ses paroles.
— Et tu es comme moi, Amanda, ton âme est pure.
Je rigole en détournant les yeux.
— Mon âme n'est pas aussi blanche que tu le crois, je confie en me remémorant mon passé en enfer.
— Est-ce que j'ai dis qu'elle était blanche ? Non. Le bien et le mal ne se réduisent pas à une couleur, c'est complètement absurde. Il n'y existe que des nuances de couleurs qui peuvent définir vraiment qui tu es.
— Qu'est-ce que tu veux dire par là, David, je ne comprends pas...
Il souffle légèrement, un sourire au lèvres.
— Ce que j'essaye de t'explique ton âme pure sait reconnaître les personnes qui valent la peine d'avoir une place dans ta vie.
— Mais si elle se trompait ? je questionne, essayant de trouver une réponse dans les paroles de mon ami.
— Elle a déjà reçu la leçon, il me semble, non ? Laisse-la te guider vers le bonheur, Amanda. Déleste ce rôle dans lequel tu as séjourné depuis plus de dix ans. Tu en as besoin et Azalea aussi. Ayden pourrait refaire partie de ta vie, il a mûri. Il pourrait donner un sens à ta vie, rayer tous ces traumatismes qui sont ancrés en toi.
Ces dires me frappent en plein cœur avec tellement de force que je veux le croire. Un élan d'amour fraternel percute mon âme pour cet homme que le destin à mis sur mon chemin. David me donne un énième rayon de soleil dans ma vie.
— Tu as le don d'écrire des histoires d'amour, alors écris la tienne, Amanda.
Je hoche la tête, étant moi-même incertaine de la marche à suivre pour écrire sur moi.
Quand on écrit un livre, on sait toujours ce qu'il se passe à la fin, on a rédigé un plan, noté le premier jet avant de faire une réécriture. Mais le fil conducteur reste le même. Si les personnages doivent finir ensemble, si un ami doit mourir, si l'autre doit partir pour ses études... Ces actions vont être écrites.
Mais dans la vie réelle, personne ne sait ce que contiendra le prochain chapitre, ni quelle sera la signification de la phrase suivante. On avance, le cœur un peu plus lourd, avec la peur que les variables du destin finissent par tout briser à nouveau. Parce qu'après tout, comment se permettre de prendre un autre risque quand le cœur est déjà fracturé ?
— Et voilà ! s'exclame-t-il en me tendant un bouquet de fleurs.
Il est composé de tulipes, d'orchidées, d'hortensias, de lilas. Toutes ces couleurs me redonnent le sourire, je le prends et plonge mon nez pour sentir cette explosion d'effluves. Elles sentent divinement bon, entre l'odeur sucrée des lilas et celle douce des hortensias, je me crois au beau milieu d'un champ de fleurs. Elles m'apportent un peu de réconfort après cette discussion perturbante pour mon coeur.
Je remarque qu'il n'y a qu'une seule rose aux couleurs rosâtres, au centre du bouquet.
— Pour te rappeler notre rencontre, ricane David en me voyant sourire.
— Une chose est sûre, il est plus beau que celui qui décorait cette pauvre table.
— Je devrais peut-être leur proposer mes services, ils accueilleraient plus de monde avec de meilleurs bouquets, plaisante-t-il. Tiens, c'était un petit mot au cas où...
Il me donne une carte en carton blanc nacré où quelques mots sont écrits :
"À la plus belle des fleurs.
David."
Je pose le bouquet et le prends dans mes bras, le remerciant pour son cadeau. C'est à ce moment-là que mon téléphone vibre, me sortant de mes pensées.
Je jette un rapide coup d'œil au destinataire et fronce les sourcils face au numéro inconnu.
Impossible que ce soit Ayden, je l'ai enregistré sous le nom "d'abruti millionnaire".
J'ouvre le message et le lit :
"Amanda, comment tu vas depuis le temps ? Je sais que je ne suis pas censé être là, mais j'ai quand même hâte de te voir.
Prépare une tarte aux poires, on se reverra bientôt.
Bisou dans le cou !"
Un frisson glacial me parcourt, comme si une main invisible venait de me saisir le dos. Mon ventre se tord et une lourde boule d'angoisse m'envahit, m'empêchant de respirer normalement. Mon cœur rate plusieurs battements, puis s'emballe dans ma poitrine, martelant ma cage thoracique avec une violence étrangère. Les mots du message me sautent aux yeux, mais ils n'ont plus de sens. Je les relis une seconde fois, le corps tendu, avant que David m'appelle me demandant ce qu'il se passe.
Je recule d'un pas sous le choc en relevant les yeux vers lui en secouant la tête. Je ne veux pas revivre cela. Je ne veux plus être enfermé dans un cercle vicieux dont j'avais enfin réussi à m'échapper. Azalea ne doit pas subir toute cette cruauté, je dois la protéger de mon monstre avant qu'il ne devienne le sien.
— Matthew est revenu. Je lâche d'une voix faible en priant pour que cela ne soit pas le début d'un nouveau cauchemar.
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