Chapitre 7
L'ambiance était assez étrange dans la voiture, et Yuta ne savait pas ce qu'il pouvait dire ou faire pour la changer. Son aîné n'était pas encore monté dans la voiture qu'il commençait déjà à paniquer. Lui qui était habituellement si sûr de lui perdait tous ses moyens quand SiCheng était aux alentours. Il boucla sa ceinture en silence et inspecta l'intérieur du véhicule. Il n'avait plus eu de contact avec le châtain pendant longtemps alors il s'agissait de la première fois qu'il montait dans sa voiture. Elle n'était pas dernier cri mais ça se voyait que le Chinois en prenait le plus grand soin. Pas un papier ou un mouchoir ne trainait pas terre, les CD étaient parfaitement rangés dans les renfoncements et la poussière avait été faite récemment.
Yuta tourna la tête pour voir si la maniaquerie de son aîné s'appliquait vraiment partout et ses lèvres s'arrondirent. Sur les sièges arrières était soigneusement allongé un étui à guitare, les coins abîmés par l'usure et le temps. Le rouge allait tendre la main pour le frôler du bout des doigts, des souvenirs lointains affleurant dans sa mémoire, mais l'arrivée de SiCheng le fit se remettre correctement. Son mouvement dut être un peu trop brusque car le châtain le regarda comme une bête curieuse et le plus jeune détourna les yeux.
- Un problème ?
Le jeune homme secoua négativement la tête. Il se mordilla légèrement la lèvre, hésitant, puis il finit par se tourner vers SiCheng en pointant l'arrière du doigt.
- Tu joues toujours de la guitare ?
- Oui, de temps en temps.
- Je pourrais t'écouter ?
Yuta ferma les yeux en s'insultant mentalement. SiCheng venait à peine d'accepter de le voir pour qu'ils s'expliquent, il n'arrivait toujours pas à croire qu'il ait proposé de le raccompagner, et lui il agissait comme si tout allait parfaitement bien entre eux. Sa propre stupidité le sidérait parfois. Le regard du châtain sur lui était insondable et il se détourna sans que Yuta n'ait pu y lire quoique ce soit.
- J'ai des cordes qui ont lâchées, ça faisait longtemps que je n'en avais pas fait. Je dois aller en racheter mais je n'en ai pas encore eu le temps.
Il mit le contact avant que le plus jeune n'ait le temps de dire quelque chose, l'air vaguement distrait. Yuta comprit le refus implicite mais ne s'en offusqua pas bien qu'il lui fit mal, c'était logique que les choses se passent ainsi. Il avait été un peu trop ambitieux avec sa demande, il avait encore du travail avant qu'ils n'en arrivent à ce stade. Le jeune homme tenta une nouvelle approche alors qu'ils se retrouvaient coincés dans les embouteillages de la capitale, la neige recommençant à tomber et déposer ses flocons immaculés sur le parebrise.
- Tu ne travailles pas aujourd'hui ?
- Comme tu peux le voir.
Le rouge baissa les yeux sur ses genoux, embarrassé. Certes sa question était un peu bête, SiCheng se trouvant à côté de lui, mais il aurait aimé être recalé avec un peu plus de douceur. Le châtain vit à son expression qu'il avait été sec et soupira longuement.
- J'ai fait pas mal d'heures supplémentaires alors mon patron m'a dit que je pouvais les rattraper pour mon déménagement. Je reprends dans deux jours.
- Oh c'est cool, commenta le plus jeune. Tu as prévu des trucs ?
- Pas vraiment, je suis pas mal occupé. Je dois retourner à l'hôpital pour faire vérifier l'état de ma main demain et j'ai promis à TaeIl de passer à la maison pour parler avec Shotaro. Je ne voulais pas lui faire peur mais je crois que j'ai bien merdé sur ce coup-là.
Yuta tourna la tête et en se penchant légèrement il remarqua qu'un bandage entourait la main gauche de SiCheng. Il n'y avait pas prêté attention plus tôt, occupé à se confesser et à ne pas se débiner, mais à présent les souvenirs des morceaux de verre ensanglantés qu'il avait nettoyés avec Chittaphon lui revint en mémoire. Il se doutait que la blessure de son aîné venait de là, de sa crise de colère lorsqu'il avait découvert les notes dans le carnet de son petit frère.
- Tu as mal ? s'enquit timidement le jeune homme.
SiCheng lui jeta un regard blasé avant de le reporter sur la file devant lui qui n'avait pas avancé d'un mètre depuis plusieurs minutes.
- Huit points de suture tu les sens passer, mais je n'avais qu'à mieux me contrôler. Je ne peux m'en prendre qu'à moi-même pour m'être blessé aussi stupidement.
- Et maintenant ?
- Quelques picotements, c'est désagréable mais pas handicapant puisque ce n'est pas ma main principale, répondit succinctement le Chinois. Le problème ça va plutôt être Shotaro, il est sensible et je ne sais pas encore comment je vais faire.
Yuta se renfonça dans son siège en se sentant coupable, il savait que sans sa participation au défi de son ami rien de tout cela n'aurait eu lieu. SiCheng n'était pas agressif dans ses propos et ne lui rejetait pas la faute dessus alors il cessa d'en parler avant que cela ne change. Il s'accouda à la portière, de la buée venant se former sur la vitre à cause du contraste entre la chaleur de sa peau et la fraîcheur du verre et il se redressa, surpris. Il ne s'était pas rendu compte qu'ils étaient presque arrivés devant chez lui durant le temps où ils avaient cessé de parler. Le jeune homme se tourna vers son aîné, perplexe.
- Comment tu as su où j'habitais ? Je ne te l'ai même pas dit.
- Rentre donc chez toi, j'ai d'autres choses à faire, soupira SiCheng.
Le rouge fronça les sourcils. Il n'aimait pas être ignoré, surtout de manière aussi évidente, mais il prit sur lui pour ne pas insister. SiCheng l'avait écouté et l'avait même raccompagné, il n'allait pas ruiner ses chances de pouvoir se rapprocher une nouvelle fois de lui juste pour satisfaire sa curiosité. Il allait cependant garder sa question dans un coin de son esprit pour la ressortir plus tard, lorsqu'elle ne risquerait plus de le desservir.
Il referma la portière derrière lui et le châtain s'en alla sans plus attendre. Yuta sortit son téléphone de sa poche en le sentant vibrer avec insistance et il découvrit sans réelle surprise plusieurs messages de Chittaphon. Son ami le harcelait pour savoir ce qu'il fabriquait et si tout s'était bien passé, aussi Yuta lui répondit qu'il rentrait présentement chez lui et que la discussion avait été moins catastrophique que prévu. Il marcha ensuite jusqu'au bas de son immeuble et se stoppa, la main sur la poignée et ses dents mordillant sa lèvre inférieure.
Il hésita quelques secondes, puis finit par ressortir son portable et faire une rapide recherche. Il trouva ce qu'il cherchait en peu de temps et sourit en constatant que l'adresse était proche de son domicile. Il mémorisa rapidement le chemin pour y aller, mais laissa tout de même le GPS activé par sécurité. Il était loin d'avoir une confiance absolue en son sens de l'orientation.
Ses pas rendus pressés par le froid ambiant le conduisirent à destination et il pénétra dans la petite boutique en faisant tinter la clochette au dessus de l'entrée. L'intérieur était chaleureux, tout de bois du sol au plafond, et une multitude d'instruments étaient disposés contre les murs et sur différentes étagères. Yuta se glissa précautionneusement entre les rayons et veilla à ne rien toucher par mégarde tout en se dirigeant vers le bureau qu'il apercevait dans le fond. Un petit homme d'une cinquantaine d'années travaillait sur un violoncelle et il leva les yeux en remarquant le rouge.
- Bonjour, je peux vous aider ?
- Hum oui je pense, hésita Yuta qui se sentit soudainement un peu bête, j'aurais aimé acheter des cordes pour guitare pour remplacer celles qui sont rompues.
- Je vois, de quel type de guitare d'agit-il ?
Yuta se décomposa. Il n'en avait aucune idée. Si SiCheng avait toujours la même depuis le temps, ce dont il se doutait connaissant la minutie dont le Chinois faisait preuve pour entretenir ses affaires, il serait capable de la reconnaitre entre plusieurs, mais de là à connaitre le nom ou la marque... Il ne savait pas.
- Vous en avez en exposition ? tenta le jeune homme. Je peux reconnaitre le modèle s'il a le même.
Le propriétaire de la boutique le regarda curieusement, mais se leva de sa chaise et accéda à sa demande en lui permettant exceptionnellement d'accéder à l'arrière-boutique. Yuta s'avança dans la salle sombre en observant attentivement chaque proposition du vendeur. Son regard étincela lorsqu'il repéra la jumelle de l'instrument de SiCheng et il la pointa du doigt. L'homme s'en approcha pour vérifier les cordes, puis ils regagnèrent la pièce principale. Le rouge récupéra le jeu de six cordes qui lui était tendu et régla le montant demandé en souriant. Il avait de quoi faire une première tentative pour se racheter auprès de SiCheng et lui montrer qu'il était sincère le concernant.
Il fit le chemin inverse, la musique à fond dans ses écouteurs pour célébrer sa trouvaille, et manqua de s'étouffer quand une boule de neige s'écrasa en plein milieu de son visage. Il en perdit un écouteur qui se retrouva à pendre mollement sur sa poitrine en ne devant sa survie qu'au fil qui le reliait au téléphone. Il crachota un peu de poudreuse et s'essuya la face à l'aide de sa manche. La vision retrouvée, il découvrit Chittaphon sur son perron en train de fabriquer une nouvelle munition. Yuta leva les bras en signe de paix et le Thaïlandais se stoppa, l'air en colère.
- C'est à cette heure-ci que tu rentres ? grogna l'argenté.
- Mec il est même pas seize heures, pis depuis quand t'es devenu ma mère ?
- Depuis que je me gèle les fesses pour rien devant ton appart parce que monsieur m'a dit qu'il venait de rentrer chez lui alors que non, râla Chittaphon. Regarde, j'ai les lèvres bleues maintenant !
Yuta leva les yeux au ciel, un sourire ourlant sa bouche.
- Allez drama queen, viens donc réchauffer ton pauvre petit corps transi de froid dans mon humble demeure.
- Le petit est en trop je trouve.
- Tu veux rester dehors ? le titilla Yuta.
Ce dernier marqua un temps d'arrêt et se tourna vers le plus petit.
- D'ailleurs pourquoi tu attendais là au fait ? Tu as un double des clés.
- Je l'ai oublié chez moi.
- T'habite à dix minutes à pieds.
- Flemme.
Face à cette explication imparable Yuta s'avoua vaincu et s'effaça pour laisser entrer son ami qui fila s'écraser dans son canapé après avoir retiré ses chaussures. Il alla ranger son achat pour le sécuriser un minimum avant de rejoindre l'argenté et celui-ci s'installa confortablement sur ses cuisses, ses propres jambes dépassant de l'accoudoir du sofa.
- Bon, qu'est-ce que tu fais ici ? Je m'attendais presque à devoir aller te chercher chez les flics ou à la morgue après notre dernière conversation, se moqua le Japonais.
- Très drôle, gnagnagna. On va mettre au point un plan pour sauver bébé Do ! Et faut que tu me racontes comment ça s'est passé avec mon frère.
- Tes plans tournent toujours mal, y a qu'à voir celui du nouvel an, grimaça Yuta. En plus rien ne nous dit qu'il faille le sauver, il est chez lui et tu n'as juste pas eu le droit d'entrer. Tu devrais avoir l'habitude depuis le temps.
- On ne refoule pas ma personne, peu importe l'endroit, renifla le jeune homme vexé.
- Au moins tout ça.
Le rouge étouffa à peine son ricanement et Chittaphon le frappa à l'aide d'un coussin. Yuta se défendit à peine, trop occupé à rire et à se moquer de son ami, si bien que celui-ci abandonna en voyant que sa vengeance ne menait à rien. Il changea de position pour se mettre en tailleurs et bouder correctement, même si la lueur amusée qui brillait dans son regard sombre prouvait qu'il n'était pas sérieux.
Yuta lui fit alors un rapide résumé de sa conversation avec SiCheng, et lui raconta son petit passage à la boutique de musique. L'argenté grommela mais accepta l'explication, trouvant même que l'idée était bonne. Le locataire des lieux alla leur chercher à boire, et manqua de percuter une furie noire en voulant traverser la petite entrée qui menait autant au salon qu'à la cuisine. Il se stoppa net et le bruit d'une porte qui claquait, puis une autre, le fit sursauter.
- Ah. Au moins y en a un qui a pas oublié son double, commenta simplement Chittaphon en le rejoignant.
Yuta lui asséna une rapide claque derrière la tête qui lui fut rendue immédiatement, il posa les verres sur la table basse et partit en direction de sa chambre, là où avait disparu son invité surprise. Il y trouva DoYoung en train de déplacer certaines de ses affaires pour s'installer à la place, sortant une pile de vêtements et de jeux de son gros sac à dos.
- Heu bébé Do ? Tu m'expliques peut-être ?
Le jeune homme releva sa tête vers eux, leur exposant son air d'enfant gâté qui annonçait une nouvelle bêtise.
- Je squatte chez toi.
- On voit bien que c'est ton intention mais tu peux être plus précis ? demanda Chittaphon.
- Et me demander mon avis aussi ? râla Yuta.
- Ma famille me soûle, j'en ai marre alors je me suis tiré, bougonna DoYoung.
Yuta se pinça l'arête du nez et ferma les yeux. Il entendit l'argenté rire sans aucune discrétion avant d'aller rejoindre le plus jeune de leur trio sur le sol. Le Japonais s'avoua vaincu et soupira.
- Très bien, j'espère juste que les flics vont pas débarquer après que tes parents aient signalé ton enlèvement...
- Et moi je veux savoir pourquoi tu réponds pas depuis une semaine, enchaina Chittaphon, j'ai failli me retrouver au poste pour ton adorable bouille.
Nda :
Voici un nouveau chapitre de cette fiction, j'espère qu'elle vous plait toujours autant, moi je m'amuse beaucoup à l'écrire même si je ne peux pas publier autant que je le souhaiterais x( N'hésitez pas à me laisser vos ressentis !
Dalion~ Kiss :3
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