Chapitre 20.
Il n'eut fallu que quelques secondes d'attente avant que la grande porte du bâtiment ne s'ouvre sur un blondinet. La mine étonnée, Hizashi dévisagea la jeune fille qu'il connaissait tant avant de prendre un air gêné.
« Oh, c'est toi. »
Haruka se sentit soudainement mal, cette simple phrase dite par son parrain de cœur lui semblait glaciale. Attristée, et surtout mal à l'aise, elle étreignit un peu plus le chat contre elle tandis que ses yeux se baissèrent au sol dans une expression fautive.
« Je sais, j'ai été nulle. Je vous ai tous déçus. »
Devant cet air de chien battu, le cœur du grand blond se serra. Se rendant alors compte de son erreur, il enlaça la jeune fille puis tenta de se rattraper avec une extrême douceur :
« Non, ma puce, ce n'est pas ça du tout... C'est... C'est ton père.
-Mon père ? demanda Haruka ayant déjà un mauvais pressentiment.
-Oui... Il... Il était très énervé quand vous êtes rentrés. »
Comme elle l'avait pensé, son père était très déçu d'elle, au point de se mettre en colère. Le sentiment de gêne grossit dans sa poitrine, forma une boule dans sa gorge, balayant tout l'apaisement que sa discussion avec Hitoshi avait pu engendrer.
Voir son père en colère n'avait jamais été une bonne chose, les souvenirs de son retour de Kamino étaient encore douloureux dans son esprit. Mais, malgré cela, la jeune fille ne tourna pas les talons pour aller se réfugier dans son lit chaleureux. Elle était venue pour parler à son père, pour avoir son avis, et c'était ce qu'elle aura.
« En parlant de mon père, continua-t-elle à Hizashi, je viens lui ramener Neko. »
Sa belle excuse, fatiguée d'être trimballée depuis le bout des internats, semblait presque morte dans ses bras. Etalé comme une carpette sale, le chat ne bougeait pas d'une moustache, se contentant d'afficher une mine blasée incomparable.
Le grand blond dévisagea le truc gris, visiblement surpris de ne pas l'avoir vu partir du bâtiment. Faisant signe à Haruka d'entrer, il tourna les talons pour retourner dans le salon.
La scène qui se déroulait dans cette pièce aurait paru incroyable aux yeux des élèves de Yuei, mais pas pour la jeune fille. Voir les professeurs du lycée ainsi, affalés sur les canapés, quelques-uns en pyjama, d'autres sirotant des thés devant une émission culinaire, lui était familier et cela ne la surprit pas de voir Sekijiro Kan, aka Vlad King le héros de sang, porter de magnifiques chaussons en forme de têtes d'ours.
En la voyant débarquer devant eux, tous les professeurs et héros regardèrent l'adolescente avec une mine désolée, la même qui figurait encore sur le visage d'Hizashi.
Nemuri fut celle qui se leva de son siège et qui se précipita vers elle, d'inhabituelles lunettes rectangulaires sur le nez et un pyjama tendancieux recouvert d'une robe de chambre rose foncé sur les épaules. Elle serra la jeune fille dans ses bras avec une véritable tête d'enterrement, comme si quelqu'un venait de mourir.
« Ma chérie, je suis désolée pour toi. Ton père est vraiment en colère, ça se comprend. »
Cette dernière réplique fit mal au cœur d'Haruka, en plus d'avoir déçu son père, elle avait déçu Nemuri, et sûrement les autres professeurs avec. Sa présence dans le grand salon se fit lourde, elle voulait vite aller se faire disputer par son père pour quitter tous ces airs de tristesse et de déception.
« On ira faire les magasins pour te rem...
-Il faut que je rende Neko à mon père. »
S'extirpant des bras de la brune, la jeune fille fila d'un pas rapide vers les ascenseurs du bâtiment. Hizashi la suivit prestement, surpris par sa réaction.
« Je t'emmène, lui expliqua-t-il, Par précaution, et parce que tu ne sais pas où c'est. »
Les portes se fermèrent, isolant les deux personnes pour une courte ascension. Pendant ces quelques secondes, Haruka, renfermée sur elle-même, ne décocha pas un mot. Elle se contentait de caresser son chat avec tendresse, tentant ainsi de calmer sa peur d'affronter son paternel.
Hizashi regardait cette enfant du coin de l'œil. Elle semblait si mal que cela lui brisait le cœur. La voir ainsi ne lui plaisait pas, mais pas du tout.
Enfin arrivés à un certain étage, les portes se rouvrirent. Le grand blond précéda la jeune fille pour la mener jusqu'au bout du couloir. Il tendit l'oreille, à l'écoute d'un indice sur l'état émotionnel de son vieil ami, mais n'entendit rien et se décida à frapper trois coups. Sans réponse.
Habitué, mais pas sans appréhension, le surnommé Present Mic ouvrit la porte sans plus attendre.
La chambre était simple, comme dans celle de l'appartement du onzième étage, plutôt sombre et clairement mal aérée. Sur le lit trainait un sac de couchage à la couleur douteuse et une montagne de compotes devaient sûrement loger dans le mini-frigo fourni par l'internat.
Assis sur une chaise de bureau aux allures confortables, Shota, les cheveux attachés en arrière, consultait quelques dossiers sur son ordinateur tout en tapant de l'autre main sur sa tablette électronique.
Contrairement à ce que lui avait dit Hizashi, il ne semblait pas plus énervé que cela.
« Qu'est-ce que tu veux ? demanda-t-il d'un ton railleur. »
Finalement, il n'était pas aussi calme qu'il n'y paraissait.
Le grand blond, peu à l'aise, se décida à répondre :
« Shota... C'est Haruka. »
A l'entente de ses mots, ledit Shota daigna lever les yeux sur la porte d'entrée de sa chambre, portant son regard sur sa fille unique. Il la dévisagea quelques secondes, de son éternel air blasé, et retourna vers ses écrans.
« Tu peux rentrer. »
La jeune fille obéit et fit quelques pas dans l'antre sombre. Quelques secondes s'écoulèrent, en silence, pendant lesquels Hizashi ferma la porte derrière lui, pensant être de trop entre les deux Aizawa.
Haruka resta plantée là, au centre de la chambre, tandis que son père continuait de travailler sur son ordinateur, sans se soucier de sa présence. Coincée comme une barre de fer, elle ne savait comment réagir à la situation, s'étant attendue à une première remarque cinglante de sa part.
Mais son père n'en faisait rien, continuant de cliquer un peu partout sur son écran comme si elle n'existait pas.
Ne supportant pas l'attente, la jeune fille finit par lâcher :
« Je te ramène Neko. »
Interrompu dans son tapage de clavier, Shota se tourna sur sa chaise pour jeter un coup d'œil au chat qui stagnait mollement dans les bras de sa jeune maîtresse. Poussant un léger soupir de désintérêt, il répondit :
« Tu n'es pas obligée de me le ramener dès qu'il sort. C'est un chat, il se balade un peu partout. »
Mécontente de cette réaction, l'adolescente laissa quand même la bestiole toucher terre, son excuse n'ayant pas eu l'effet escompté. Libéré de ces bras, Neko fit le tour de la pièce comme pour se dégourdir les pattes, tout en faisant bien attention d'éviter la jeune fille, au cas où elle l'attraperait de nouveau.
Haruka, sentant la colère de l'attente lui monter aux joues, prit son courage à deux mains et déclara :
« Je venais aussi te parler de l'examen du permis provisoire ! »
Le souffle en suspens, plantée comme un piquet au milieu de la chambre, la jeune fille attendit sa sentence.
« C'est inadmissible. »
Les paroles graves de son père lui transpercèrent le cœur, comme elle l'avait prédit. S'armant d'un bouclier mental, elle se prépara à la suite qui s'annonçait douloureuse. Mais rien ne se produisit.
Son père continuait de taper sur son ordinateur comme si de rien était.
Haruka se sentit perdue. La réaction de son père, quasi inexistante, n'était pas, absolument pas habituelle. En temps normal, il aurait été dans une froideur noire, à lui énoncer chacune de ses erreurs, ou en colère, comme le lui avait expliqué Hizashi. Mais là, il n'y avait rien, pas le moindre intérêt.
Un étrange sentiment s'empara du cœur de la jeune fille, mêlant crainte et tristesse. Son père n'en avait plus rien à faire d'elle.
Ses peurs étaient devenues réalité. Depuis leur dispute de Kamino, les deux Aizawa ne s'étaient plus vraiment parlé, et depuis le déménagement à l'internat, la distance entre eux n'avait cessé d'augmenter.
Était-ce là la preuve de leur séparation ? Son père avait-il décide de se désintéresser d'elle depuis cette dispute ?
Le cœur d'Haruka se mit à battre la chamade. Comme elle le craignait, son père avait décidé de se détacher d'elle pour de bon, de ne plus s'occuper d'elle. Le fossé qui s'était créé entre eux deux n'était plus une prévision cauchemardesque mais une véritable réalité.
C'en était fini, son père ne voulait plus d'elle.
La jeune fille s'en voulait, elle s'en voulait de l'avoir laissé faire son choix sans qu'elle n'ait réagi plus tôt. Innocemment, elle s'était dit que cette distance lui permettrait d'aller mieux, qu'il puisse respirer un peu après sa rechute, mais jamais elle n'aurait imaginé qu'il puisse réellement décider de se détourner d'elle. Idiote qu'elle était, elle n'avait même pas essayé de réduire cette distance pour éviter cette situation. Haruka s'en voulait.
Sentant la colère et la tristesse venir ensemble, l'adolescente tenta désespérément de retenir ses larmes. Un éclat de rage lui brûla le ventre, si bien qu'elle ne supporta plus le lourd silence qui régnait entre eux, le lourd silence de ce fossé qui rendait son père si désintéressé envers elle.
Le soudain sentiment de vide qui envahissait son corps semblait la brûler de l'intérieur. Sa réaction de douleur prit des proportions extrêmes si bien qu'elle lui débordait même par les paroles :
« C'est tout ? C'est tout ce que tu as à me dire ? Pas plus ? Dis-moi au moins ce qui est inadmissible ! Hurle-moi dessus, je suis venue pour ça ! Je te tends le bâton pour me battre, pourquoi tu te défoules pas comme d'habitude ? Dis-moi que je sais pas contrôler mes pouvoir, que je suis trop irréfléchie et que je fonce dans le tas comme une idiote ! Dis-moi que mes choix ont été mauvais, que mes stratégies étaient nulles, que j'ai rien fais de bien ! Pourquoi tu ne me dis rien ? Tu t'en fous c'est ça ? Tu t'en fous ?
-Calme-toi ! »
Alors que les cris de tristesse de la jeune fille menaçaient de faire monter tous les professeurs du salons, Shota s'était levé de son siège, lâchant son ordinateur pour venir se planter devant Haruka. Ses paroles le surprenaient, réagir ainsi n'était pas dans ses habitudes, elle qui avait un comportement plus calme et plus silencieux.
« Calme-toi ! »
Comme frappée de plein fouet, Haruka se figea sur ces paroles. Le soudain retour d'intérêt de son père la rendit complètement muette, calmée d'un coup.
Sa colère redescendue, la jeune fille remarqua alors que son père était juste devant elle, à seulement quelques centimètres. La dernière fois qu'il avait été aussi proche, cela avait été pour lui hurler qu'elle ressemblait à sa mère. Mais l'autre fois encore, c'était pour la serrer dans ses bras. Ne pouvait-il pas la serrer de nouveau dans ses bras ?
« Ça ne sert à rien de se mettre dans cet état là pour un simple examen. Tu as entendu Monsieur Mera, toi et les garçons pourront obtenir votre permis dans quelques mois, il vous faudra juste travailler un peu plus. »
Sur ces mots, il retourna s'asseoir à son bureau. Laissant un espoir vide dans le cœur de l'adolescente.
Calmée, mais encore fébrile, Haruka se décida à demander, d'une voix plus douce remplaçant ses cris :
« Alors, dis-moi qu'elles étaient mes erreurs ? »
Shota ne comprenait toujours pas la situation. Pourquoi lui demandait-elle cela ? Ça n'avait aucun sens.
« Tes erreurs, tu les connais, répondit-il avec lucidité, Elles t'ont été notées sur le bout de papier qu'on vous a donné à la fin de l'examen. »
Elle continuait de le fixer comme si elle attendait quelque chose. Il n'arrivait pas à comprendre quoi mais continua :
« Alors, oui, pendant la première épreuve tu t'ais fait avoir bêtement par deux personnes... »
Elle ne le lâchait pas du regard, Shota restait dans l'incompréhension. Que voulait-elle ?
« Tu as lu ta feuille, non ? Te mêler de la dispute entre Inasa Yoarashi et Shoto Todoroki n'était pas une bonne décision, et encore moins d'utiliser ta dernière expansion comme tu l'as fait sans prévoir que l'épreuve allait se terminer quelques secondes après...
-Et, alors ?
-Mais alors quoi ?
-Pourquoi tu as dit que c'était inadmissible ? »
Les yeux noisette de sa fille le fixant avec cette hébétude ne l'aidaient pas à comprendre pourquoi elle posait autant de question. Cependant, un brin de lucidité vint dans son esprit et il continua de répondre, plus calmement :
« Ce qui est inadmissible, c'est ton erreur, enfin, peut-on vraiment appeler ça une erreur...
-Quelle erreur ?
-Celle d'avoir sauvé Inasa Yoarashi. »
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