Surpasser ses limites. Tel était le but du camp de vacances devenu un véritable centre d'entraînement intensif.

Le principe était simple : les alters étaient à l'image des muscles et donc, pour qu'ils se renforcent et se développent, il fallait les travailler encore et encore. Augmenter sa puissance en surpassant son seuil de confort, atteindre sa limite pour la repousser toujours plus.

A croire qu'il s'agissait plus de la torture que de simples exercices pour adolescents.

Autour du professeur Aizawa, les jeunes élèves de seconde A criaient, hurlaient leur douleur, rouges d'effort et blancs de malaises. Ils s'accrochaient malgré tout, travaillant de tout leur cœur pour progresser encore et encore plus.

Non loin de là, l'héroïne Pixie Bob, de son vrai prénom Ryuko, finissait tout juste de construire une partie du terrain d'entraînement des classes de Yuei grâce à son alter de terre. Sa tâche achevée, elle se retourna vers la fille d'Aizawa qui, timide, attendait le début de son propre exercice.

« Aujourd'hui, Mini-Eraser, c'est moi qui s'occupe de toi ! s'exclama la femme blonde avec un grand sourire aux lèvres, Active ton Shield pour commencer ! »

La jeune fille hocha la tête et obéit sans rechigner. L'enveloppe pâle l'entoura presque immédiatement, sans problème et sans porter ses mains devant elle, grâce à tous ses efforts lors de ses propres entraînements avec son paternel.

« Tu es prête ?

-Je n'ai pas vraiment le choix...

-OK ! C'est parti !! »

Aussitôt, trois masses de terre surgirent du sol pour s'élever dangereusement au-dessus des deux femmes, comme les immenses tentacules du Kraken. Sans crier garde, l'une d'elle s'abattit avec violence sur le bouclier de la jeune fille, suivie immédiatement d'une autre puis de la dernière bosse de terre. Le schéma se répéta encore et encore inlassablement.

Haruka serra les dents, encaissant chaque coup tout en maintenant une concentration de fer. Le but de son exercice du jour était de renforcer son bouclier, cela allait de soi, et surtout de ne pas le laisser exploser au bout d'un certain temps.

Les yeux fermés, dans un état proche de la méditation, elle réfléchissait et s'efforçait de ressentir la force qui animait son bouclier blanchâtre. Chaque coup de la pieuvre terreuse apportait une charge d'énergie qu'elle essayait de faire voyager dans tout son corps, s'étendre jusqu'au bout de ses orteils afin de répartir la force tout autour d'elle, tentant d'éviter la moindre faille.

Un violent mal de tête s'empara alors d'elle et lui fit lâcher un cri de rage se mêlant à ceux de ses camarades. Elle n'abandonna pas malgré la douleur et continuant de lutter alors que son bouclier, devenu presque totalement opaque, ondulait dangereusement autour d'elle.

Soudain, sans crier garde, le bouclier explosa sous un énième choc, détruisant les bras de terre et faisant s'envoler les quelques personnes aux alentours.

Pixie Bob se vit reculer de plusieurs mètres puis se releva de sa chute et revint au niveau de la jeune fille, comme si de rien était :

« Deuxième round ! »

Sans laisser le temps à Haruka de reprendre son souffle, les tentacules de terre resurgirent du sol et s'abattirent de nouveau sur son bouclier tout juste réapparut.
Et ce, encore et encore, pendant toute la matinée.

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   L'heure tant attendue du dîner arriva enfin et, avec elle, la fin de leur première journée de torture. Les adolescents de seconde A et ceux de seconde B, qui les avaient rejoints le matin même pour le début des exercices, arrivèrent dans le réfectoire du chalet après un bon bain chaud. Tous portaient des tenues de civils bien plus confortables et agréables que leurs vêtements de sport couverts de terre et de transpiration. Haruka portait des habits simples comme à son habitude, un T-shirt uni et un pantacourt en jean car, contrairement à toutes ses camarades en short, elle n'était pas très à l'aise à l'idée de montrer ses cuisses à tout le monde.

La jeune fille prit une marmite de terre et vint la poser sur l'un des postes de cuisson, prête à faire la cuisine. Depuis le midi, les jeunes gens avaient appris qu'ils allaient devoir eux-mêmes préparer leur repas, celui de la veille avait donc été une gentille exception. Entre les plaintes de certains, Tenya avait justifié cette tâche avec sa logique habituelle :

« Après une catastrophe, les secouristes doivent aussi nourrir les rescapés pour leur faire reprendre des forces et leur remonter le moral ! »

Pour lui, tout avait un sens, et il eut le mérite de motiver tout le monde, même les secondes B. Il n'y avait aucun doute, Tenya était un bon délégué.

Fumikage et Mashirao ne tardèrent pas à arriver pour aider leur amie dans sa cuisine. Ensemble, ils coupèrent la viande et préparèrent la sauce du mieux qu'ils le pouvaient. Tous les trois, comme le reste des élèves, étaient appliqués dans leur tâche, ne voulant servir quelque chose d'immangeable après cette dure journée.

Soudain, un bruit d'explosion se fit entendre juste à côté d'eux si bien qu'ils en ressentirent le souffle.

Les jeunes gens se retournèrent en sursautant pour découvrir un Katsuki énervé, comme à son habitude, essayant vainement d'allumer un feu de bois avec son alter. Non loin de là, Shoto faisait de même pour Ochaco et Mina mais avec plus de calme et surtout, avec un résultat plus concluant grâce à son pouvoir directement prévu à cet effet. Mashirao remarqua également son efficacité et appela amicalement le garçon pour qu'il puise faire de même sous la marmite de son groupe.

Alors que le bicolore arrivait à leur niveau, Haruka discutait avec Fumikage, une lueur d'inquiétude dans le regard :

« Ça va ton entraînement ? demanda-t-elle à l'adolescent-oiseau, Il n'est pas trop éprouvant ? »

Son angoisse pour lui n'était pas sans raison. En effet, entre tous les exercices de renforcement d'alter, le garçon devait bien subir le plus atroce.

Enfermé dans une grotte sombre, œuvre de Pixie Bob, il laissait son Dark Shadow, attisé par l'obscurité, s'emparer de lui pour mieux essayer de le contrôler. Les cris déchirants qui s'échappaient de sa prison de terre témoignaient de la difficulté de la tâche et de sa douleur.

« C'est normal de souffrir pour ce type d'entraînement, répondit Fumikage faisant semblant de ne pas être touché par l'inquiétude de sa camarade, Je tiens le coup. Et toi ?

-Elle saute d'une falaise pour s'écraser sur le sol. »

Les deux adolescents se tournèrent leurs regards vers Shoto qui, accroupit devant la marmite, brûlait avec délicatesse les morceaux de bois entassés.

« Ça doit être éprouvant ça aussi, continua l'oiseau à l'intention de la jeune fille.

-Faut juste s'habituer à tomber, répondit-elle en se remémorant quelques souvenirs qui la redirent un peu blême.

-Et que les autres s'habituent à te voir sauter, reprit Shoto en finissant son travail. »

Il était vrai que son exercice de l'après-midi n'avait pas été de tout repos. Son père lui avait demandé, ou plutôt ordonné, de se jeter d'une falaise créée spécialement pas Pixie Bob, devenue une véritable architecte pour les deux classes. De nouveau, le but avait été de renforcer son bouclier en lui assenant un unique et très brutal coup. Quoi de mieux qu'une chute dans le vide alors ?

Au début, Haruka avait été terrorisée par cet entraînement vertigineux mais, après avoir été encouragée par Eijiro qui était un habitué de ce genre d'exercice et avoir été contrainte par les petites pousses vicieuses de la gentille Pixie Bob, elle avait bien dû s'habituer à cette sensation de chute. Une sensation de perte de contrôle et surtout, de mort imminente. Son cœur avait plusieurs fois menacer de faire un arrêt cardiaque.

« C'était si inquiétant que ça ? s'enquit-elle d'une petite voix auprès de son ami.

-Inquiétant... répondit le bicolore, Pas vraiment. C'est juste... surprenant, les premières fois. »

Comme pendant son exercice, le cœur de la jeune fille menaçait de lâcher alors que Shoto quittait le groupe des trois pour venir en aider un autre qui l'appelait avec de grands gestes.

« Eh, Haruka-chan ! cria Tenya de l'autre bout de la cuisine, Ce n'est pas le temps de rêvasser ! »

L'interpellée sursauta avant de se remettre au travail. Pour nourrir quarante-et-un adolescents affamés, il ne fallait mieux pas traîner.

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   « Laisse-moi aller dormir, s'il-te-plait !

-Haruka, tu ne discutes pas.

-Mais j'ai beaucoup travaillé aujourd'hui et...

-Il n'y a pas de « mais ».

-... D'accord. »

L'air abattu, la jeune Aizawa tourna les talons, laissant derrière elle Mina, Denki et tout le groupe de rattrapage auquel s'était rajouté l'étrange Neito de la seconde B, son père et surtout, le chalet où l'attendait son lit douillet.

Alors qu'elle était partie se coucher avec les autres après un repas peu réussi mais tout de même agréable, son professeur de père avait envoyé la rose pour la faire redescendre en salle de classe. Ayant d'abord pensé qu'elle allait devoir suivre les cours de rattrapages avec ses camarades, à cause probablement de son examen pratique qui ne fut pas extrêmement concluant, la jeune fille s'était retrouvé face à son paternel l'obligeant à suivre ses entraînements habituels. Et ce, même pendant le camp de « vacances ».

La voilà donc sur le terrain d'exercice vide de cris et d'activité, seule.

L'endroit qu'elle avait vu si animé sous le soleil d'été pendant toute la journée lui parut froid et inquiétant sous la faible lumière de la Lune. Ce n'était pourtant pas le moment de faire sa peureuse, elle se voyait mal revenir bredouille au chalet pour expliquer à son père qu'elle avait les chocottes toute seule ainsi.

N'ayant pas d'autre choix que d'obéir et pas d'autres occupations que de faire cet entraînement bonus, Haruka se laissa tomber en tailleur sur le sol, bien moins à l'aise dans son pantacourt que dans sa tenue de sport, et ferma les yeux. Elle commença alors ce qui semblait être de la méditation.

Son enveloppe blanche couvrit son corps d'une manière inhabituelle. Elle se mouvait autour de ses membres comme si la jeune fille était parcourue par de grandes et longues vagues tranquilles. Cela ne ressemblait en rien au tremblement qui la secouaient quand son explosion arrivait, mais plutôt à quelque de doux, de calme et de réfléchi.

C'était ce que faisait Haruka, réfléchir.

Dans cette méditation maladroite, la jeune fille essayait de laisser de côté ses problèmes et ne réfléchissait plus qu'à ce cocon de force qui l'enveloppait. Elle la fit se concentrer sur sa main, autour de sa jambe, puis ne protégea que son visage, une épaule, essaya avec un seul bout de doigt. Après cet étrange échauffement, la jeune fille s'entoura de nouveau tout entière de son bouclier laissant les vagues reprendre de plus belle et essayant de les rendre encore plus hautes, encore plus larges.

Le cerveau de l'adolescente tournait à plein régime, tentant de se calmer, d'oublier ses préoccupations et répétant sans cesse une seule et même commande :

« Expansion. »

Alors que les remous s'élevaient de plus en plus hauts, se détachèrent presque de la limite habituelle d'enveloppement, le bouclier céda sous la pression et explosa, lâchant une vague d'énergie parcourut le grand terrain comme un souffle de tempête, renversant le baril d'entraînement de l'un de ses camarades.

Haruka soupira, relâcha tous ses muscles, fatiguée par cet exercice et déçue. Elle se releva avec difficulté et vint remettre en place l'objet tombé qui appartenait en réalité à Shoto.

Après un rapide coup d'œil sur son téléphone portable, elle se rendit compte que l'entraînement avait duré presque une heure, un record pour elle.

Epuisée, elle quitta le terrain d'un pas las et regagna le chalet dont les lumières s'éteignaient une à une. La jeune fille remonta discrètement dans sa chambre et s'étala de tout son long sur son lit sans déranger ses camarades.