III : 6ème B, méchanceté gratuite
Ce qu'il y avait de frustrant dans ce que je vivais, c'est que je n'avais aucune idée de ce que j'avais fait pour mériter une telle haine. Pour moi, c'était purement gratuit. Alors, certes, de nombreuses personnes se cachaient derrière cette phrase que nous avions tous déjà entendue, mais si, vous savez, le fameux : " C'est juste pour rire ". Cette phrase qui permettait à n'importe quel bourreau de se dédouaner de n'importe quel acte. Mais finalement, ça n'avait rien de drôle, je n'ai jamais ri une seule fois lorsque j'étais face au harcèlement, à part peut-être justement pour tenter de l'arrêter. J'ai essayé plusieurs fois d'entrer dans leur jeu, de participer à ma propre humiliation, j'ai été méchante avec moi-même, je me suis rabaissée, insultée, j'ai ri de moi dans l'unique but qu'ils me foutent la paix, mais ça n'a jamais suffi. Ils ne se sont jamais arrêtés.
Les jours qui suivirent la rentrée, j'essayais de me faire petite au maximum. Parfois, ça fonctionnait, parfois non. Un jour, alors que je finissais plus tôt, je décidai de m'installer au fond du bus, persuadée que j'allais être seule. Quelques minutes plus tard, Julia et sa joyeuse bande arrivèrent pour me demander sans aucune politesse de dégager, ce que bien sûr j'ai fait sans contestation.
En descendant du bus, je pris rapidement de l'avance pour éviter Julia et son frère. Malheureusement, ce dernier finit par me rejoindre pour se mettre à ma hauteur. Il se posta ensuite devant moi, m'empêchant d'avancer :
- Arrête de te prendre pour ce que t'es pas, je te préviens.
- De quoi tu parles ? J'ai rien fait.
- Tu fais pas ce que tu veux, c'est pas toi qui fais la loi ici.
- D'accord.
Je décidai de rester soft, je n'avais pas envie de l'insulter ou d'entrer dans son jeu, j'étais certaine que c'était le but recherché. Rapidement, je compris que lui et sa sœur cherchaient simplement une excuse pour s'en prendre à moi. Pendant la fin du trajet, je les entendis tous les deux m'insulter, je préférai ne pas réagir, la maison n'était plus qu'à quelques mètres et une fois la porte fermée, je savais que ce serait terminé.
Après cet incident, je compris que les choses allaient devenir de plus en plus compliquées à gérer.
On sait quand ça commence, on ne sait jamais quand ça finit.
Lorsque mon harcèlement commença, je pensais naïvement que je n'étais pas assez intéressante pour que l'on s'en prenne à moi une année entière, j'avais tort.
Mon quotidien devint un enfer. Le matin à l'arrêt de bus, je subissais les insultes et les menaces de Julia et son frère. La journée, j'étais mise de côté par Salomé et Ninon. Le soir, je courais presque pour rentrer chez moi, voulant à tout prix éviter mes nouveaux bourreaux.
Je me souviens d'un jour, après les vacances, être allée à l'arrêt de bus avec de nouveaux vêtements. Je me trouvais jolie, ce qui était plutôt rare, j'étais ravie de pouvoir montrer au reste du monde mon nouveau style. En arrivant, je tombai sur Julia, mais pas que. Cette dernière était accompagnée de sa bande de copines qui ne prenaient pas le bus à mon arrêt généralement. Après m'avoir regardée de longues secondes de la tête aux pieds, elles finirent par pouffer de rire :
- T'as enfin acheté des nouveaux vêtements, il était temps ! s'écria Julia.
Son amie ajouta ensuite :
- Tu peux acheter ce que tu veux, tu seras toujours moche et grosse, tu dégoûtes.
Je ne compris pas l'utilité d'une telle méchanceté. Je ne réussis pas à retenir mes larmes. Je pleurai en silence en attendant le bus, cernée par les moqueries.
Arrivée au collège, je rejoignis Salomé et Ninon. Je les saluai timidement, sans obtenir de réponse. Je décidai de parler un peu plus fort mais toujours rien, pourquoi refusaient-elles de me répondre ? Ça n'avait aucun sens, j'étais juste en face d'elles, je savais qu'elles m'entendaient, qu'elles me voyaient, elles n'avaient qu'à me saluer en retour, j'avais seulement besoin d'une once de bienveillance.
Salomé finit par me répondre :
- Désolée, mais aujourd'hui on aimerait bien rester toutes les deux avec Ninon, donc on a décidé de t'ignorer.
- Pardon ?
Ninon coupa court à la discussion :
- Arrête Salomé, on a dit qu'on lui parlait pas aujourd'hui, viens !
C'est de cette manière que je découvris cette nouvelle pratique. Il n'y avait rien de plus humiliant pour moi que de parler dans le vide en sachant très bien que l'on m'entendait. Les voir me snober en se parlant comme si je n'existais pas me rendait folle, je n'avais rien fait pour mériter une telle cruauté, surtout venant d'elles.
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